Archives de catégorie : Web et Europe

Billets sur les enjeux de la communication numérique européenne

Comment faire campagne auprès des citoyens sur l’Europe ?

Plusieurs tables rondes de la conférence annuelle EuropCom fournissent des insights éclairants sur la manière de communiquer et de mobiliser les citoyens européens en vue des futures élections européennes en juin 2024…

La communication du côté des institutions européennes

Mobiliser les électeurs : le pouvoir des communautés

Première table ronde EuropCom, les stratégies visant à favoriser la participation active aux processus démocratiques reposent sur le principe de se concentrer sur les personnes afin d’aider les gens à voter.

Gaia Manco, Chef de service à la DG COMM du Parlement européen présente la plateforme « together.eu for democracy », le projet de participation des citoyens du Parlement européen :

Action : les institutions doivent toujours fournir des contributions, des espaces, des outils, une éducation et une formation, mais les solutions finales doivent toujours venir de la société civile. L’information conduit à l’engagement et l’engagement conduit à la mobilisation. Cela aide à activer un public plus restreint mais plus engagé, prêt à être actif sur le terrain.

Communauté : les gens se rencontrent lors d’événements, c’est pourquoi aucun projet d’engagement ambitieux ne peut être mené par les institutions sans impliquer les personnes sur le terrain. Les réseaux sociaux ne suffisent pas, l’idée est d’être aussi inclusif que possible.

Inconnu : quelque chose qui doit être accepté, tout projet d’engagement est une co-création des institutions et des communautés, donc le résultat ne peut pas être connu à l’avance.

Informer les électeurs : souligner l’impact des décisions de l’UE sur la vie des gens

Jens Mester, Chef d’unité à la DG COMM, présente plusieurs enquêtes démontrant que l’une des principales raisons pour lesquelles les gens ne votent pas aux élections européennes est le manque d’informations sur l’UE… alors que les gens sont très intéressés à en savoir plus sur l’UE :

  • Montrer l’action politique de l’UE et son impact (discours sur l’État de l’Union, rapport général de l’UE, coins d’apprentissage pour les enseignants et les étudiants) ;
  • Fournir des informations sur les élections et les droits électoraux ;
  • Impliquer les personnes, y compris les jeunes, dans la démocratie européenne (Initiative citoyenne européenne, suivi de la Conférence sur l’avenir de l’Europe, plateforme « Have your Say ») ;
  • Travailler en collaboration avec d’autres acteurs / activer des partenaires et des réseaux.
  • Activer les bénéficiaires des programmes de financement de l’UE ayant la responsabilité de mobiliser les gens en faveur de l’UE.

La communication du côté des novations

La technologie numérique et le changement démocratique : de la macro-politique à la micro-politique

Autre table ronde EuropCom, Rachel Gibson, Professeure de politique à l’Université de Manchester partage les résultats d’un projet Horizon 2020 sur lequel elle a travaillé pendant cinq ans consacrés au développement de la relation entre les technologies numériques et la démocratie.

Au début de l’ère d’Internet, les praticiens étaient très optimistes et idéalistes quant au rôle des technologies numériques dans l’amélioration de la démocratie. Cet optimisme s’est maintenant dissipé avec l’avènement des fausses informations, des discours haineux et du capitalisme de surveillance.

Les changements structurels qui se produisent en politique grâce à la technologie numérique font dissocier la macro-politique relevant de la démocratie pré-numérique, tandis que la démocratie post-numérique fonctionne au niveau de la micro-politique, des formes de mobilisation introduisant de nouvelles voix dans l’arène politique, au risque d’une privatisation de l’espace public, et au pire, comme un passage vers une vision de la politique plus « narcissique ».

Au niveau macro-politique, à l’époque des partis politiques de masse, il était important de se demander « Où est la voix du public ? ». Cette question demeure, à la condition que les individus soient exposés à une plus large gamme d’informations pour éviter les effets de chambre d’écho.

Au niveau micro-politique, la nouvelle question « Comment l’engagement micro-politique se traduit-il par un changement sociétal significatif ? » pourrait être facilité pour une meilleure prise en compte des opinions numériques par des partis politiques qui gèrent les influenceurs de manière plus efficace.

Ma liberté d’expression contre vos sentiments : l’importance de la satire dans les démocraties modernes

Fabio Mauri, « Directeur général à la DG MEME », adopte une approche non conventionnelle pour son discours en mettant en avant l’importance de la satire dans la construction de démocraties saines et critiques.

La satire est conçue pour faire réfléchir, pas rire ! c’est un phénomène profondément humain, si l’on songe au rôle du bouffon du roi, figure familière dans les cours médiévales, qui était chargé de partager de mauvaises ou difficiles nouvelles avec le souverain par le biais de la comédie.

Les gens ont tendance à faire plus confiance aux comédiens qu’aux politiciens : « Le rire tue la peur et sans peur, nous ne pouvons avoir aucune confiance ». La question de la confiance versus le scepticisme ironique en est était au cœur des débats sur les sociétés démocratiques saines et la confiance que nous avons ou n’avons pas envers les politiciens.

La préoccupation correspond à une tendance croissante à la rectitude politique à tout prix et à une méfiance qui l’accompagne à l’égard de tout ce qui ressemble à de la satire – une sorte d’allergie à la satire. Le fait que vous soyez offensé ne vous donne pas raison. Le rôle de la satire en politique et dans l’espace public plaide en faveur d’une plus grande tolérance à l’égard des opinions qui pourraient ne pas être en phase avec les vôtres, mais qui font néanmoins partie du débat, des désaccords et de la critique essentiels à une démocratie saine. La satire veut exagérer les problèmes pour que vous puissiez les regarder sous un autre angle.

Influences de la désinformation manipulative et des technologies artificielles sur la démocratie, que faire pour soutenir la démocratie européenne ?

Lors de la session d’ouverte d’EuropCom 2023, la question des menaces sur l’information afin de réduire et atténuer la désinformation et permettre aux citoyens de l’UE d’accéder à des informations fiables dans un écosystème sain de l’information.

La société civile pousse les institutions à mettre en œuvre des législations pour réduire et atténuer la désinformation

Flora Rebello Arduini, directrice des campagnes chez Ekō explique comment des campagnes de désinformation bien structurées et financées jouent en faveur de ceux qui les promeuvent en vue d’éroder la confiance des citoyens dans les institutions démocratiques en particulier pour remettre en question les résultats des élections.

Pour contrer la désinformation sur les plateformes de médias sociaux et exploiter tout le potentiel de la directive sur les services numériques pour réduire et atténuer la désinformation, il est nécessaire de mieux protéger la sécurité des citoyens sachant que plus de 70 pays et 2 milliards de personnes seront appelés à voter l’année prochaine.

La vérification des fausses informations évolue, quand les journalistes sont meilleurs pour vérifier les faits, les gens doivent aussi acquérir plus d’expérience

Jonathan Lundberg, journaliste et auteur spécialisé dans les guerres culturelles numériques, attire l’attention sur l’importance d’une perspective historique, affirmant que nous étions tous des êtres sociaux et qu’il y a toujours eu des mensonges. Seulement maintenant, avec l’avènement d’Internet, tout va plus vite. Les problèmes ne sont pas nouveaux, mais ils s’expriment de nouvelles manières. Cependant, Internet fournit également des outils qui aident à vérifier les faits. Les groupes marginalisés sont plus touchés par la désinformation renforçant la nécessité de trouver des solutions pratiques pour communiquer avec eux et gagner leur confiance.

La lutte contre la désinformation nécessite que tout le monde acquière des compétences journalistiques, car la désinformation est partout

Anna Słojewska, coordinatrice et correspondante de l’UE pour Rzeczpospolita, présente le projet Lie Detectors qui organise les visites de journalistes dans les écoles afin de partager des compétences en éducation aux médias avec les élèves. Parmi les outils pour lutter contre les fausses informations, la vérification des auteurs et des pages web, la comparaison avec des articles et des sources similaires, les discussions avec les membres de la famille et les professeurs, et l’utilisation du bon sens.

Contrer la désinformation avec l’IA : toutes les guerres se font aussi par la communication

Dmytro Bilash fondateur de Osavul se concentre sur le développement de solutions alimentées par l’IA pour protéger les États, les entreprises et la société contre les menaces informationnelles. La lutte contre la désinformation avec l’IA se compose d’une partie analytique des informations et d’une partie réactive pour répondre à la désinformation plus rapidement, qui nécessite une intervention humaine. Accroître la collaboration et la coopération avec les géants de la technologie est essentiel pour créer un marché plus ouvert afin de protéger notre société.

La démocratie ne peut plus être considérée comme acquise face à la désinformation

Confrontés à une bataille toxique en ligne d’une ampleur qui menace les fondements mêmes de nos sociétés libres et de nos élections libres, Delphine Colard, porte-parole adjointe au Parlement européen craint que la démocratie ne peut être tenue pour acquise. Nous devons nous unir avec pour objectif commun de défendre la liberté des personnes et de rendre la société plus résiliente face aux attaques en activant de bonnes pratiques.

Les citoyens ont besoin de voir et de sentir la démocratie européenne en action plus que jamais

Lors de la séance de clôture, Jaume Duch Guillot, directeur général de la communication au Parlement européen souligne l’importance de disposer d’une stratégie de communication axée sur la lutte contre la désinformation.

La première étape dans la lutte contre la désinformation, c’est par des législations claires telles que le RGPD et les directives DSA/DMA, ainsi que la future loi sur l’IA, défendant la société contre la désinformation.

La deuxième étape consiste à réaliser que personne ne peut rester seul, c’est une tâche collective, à partager entre les institutions, les médias, les plateformes de médias sociaux, la société civile, les éducateurs et les autres parties prenantes. Tout le monde devrait promouvoir une meilleure éducation aux médias et aider à diffuser des messages importants.

La troisième étape consiste à être proactif en matière de communication. Il ne suffit pas d’être réactif et défensif face à la désinformation : « La meilleure façon de lutter contre la désinformation, c’est par l’information ». Beaucoup de désinformation tend à dire que voter n’a pas d’importance, que voter est inutile, que le Parlement européen ne sert à rien – ce n’était pas vrai.

Tout le monde, des particuliers aux organisations de la société civile et même aux gouvernements nationaux, devrait aider les institutions européennes à promouvoir la lutte contre la désinformation.

Framing, Agenda-Setting et Priming : quels modèles d’effets médiatiques pour la communication européenne

Les théories majeures de – l’agenda-setting, le priming et le framing – offrent une compréhension approfondie de la manière dont les médias d’information façonnent les perceptions et les attitudes du public. Comprendre ces théories est essentiel à qui cherchent à développer des stratégies de communication efficaces.

L’agenda-setting : impact sur les priorités politiques et influencer les décisions prises par les dirigeants européens

Développé par Maxwell McCombs et Donald Shaw, soutient que les médias ne nous disent pas quoi penser, mais plutôt sur quoi penser. Les médias ont le pouvoir de déterminer les questions considérées comme importantes par le public en mettant l’accent sur certaines problématiques.

Par exemple, dans le contexte de l’Union européenne, les médias peuvent influencer l’ordre du jour politique en accordant une couverture médiatique significative à des sujets spécifiques tels que le changement climatique, la migration ou les politiques économiques. En mettant en avant ces questions, les médias influencent l’attention du public et créent un environnement favorable à la discussion et à l’action politique.

Le priming : impact sur la façon dont les citoyens évaluent les candidats et les enjeux lors des élections européennes

Développé par Shanto Iyengar, Mark Peters et Donald Kinder, se réfère à la façon dont les médias créent un contexte pour la discussion publique. En accordant une attention accrue à certains sujets, les médias peuvent amener le public à porter une attention particulière à ces thèmes.

Par exemple, la couverture médiatique intensive des élections européennes peut jouer un rôle de priming en attirant l’attention du public sur les enjeux politiques et les choix électoraux. En fournissant des informations et des analyses approfondies sur les programmes des partis politiques, les médias peuvent influencer les perceptions et les décisions des électeurs.

Le framing : impact sur les attitudes du public envers l’UE, en fonction de la manière dont les médias présentent les problèmes et les acteurs

Développé par Erving Goffman, se concentre sur la manière dont les médias présentent et structurent une histoire, ce qui influence la compréhension et l’évaluation par le public. Les médias utilisent des éléments tels que les métaphores, les récits, le choix des mots et le ton pour encadrer une histoire d’une certaine manière.

Par exemple, lorsqu’il s’agit de la communication sur l’Union européenne, les médias peuvent adopter différents cadres pour aborder les questions européennes, tels que le cadre économique, le cadre politique ou le cadre social. Chaque cadre offre une perspective unique sur les enjeux européens et peut influencer la façon dont le public perçoit et évalue les politiques et les actions de l’Union européenne.

Perspectives

Ces théories – agenda-setting, priming et framing – offrent des perspectives précieuses pour comprendre comment les médias influencent la communication et l’opinion publique au sein de l’Union européenne.

Cependant, il est important de noter que ces théories ne sont pas une panacée et présentent certaines limites. Par exemple, elles peuvent négliger d’autres facteurs tels que les influences sociales, économiques et culturelles sur la perception et l’attitude du public.

De plus, la façon dont les médias utilisent ces théories peut varier en fonction du contexte politique et médiatique spécifique. Par conséquent, les professionnels des relations publiques doivent adopter une approche holistique en intégrant ces théories avec d’autres approches de communication et en tenant compte du contexte européen unique pour élaborer des stratégies de communication efficaces.

Au total, les théories de l’agenda-setting, du priming et du framing offrent des outils précieux pour comprendre l’impact des médias sur l’information et la communication de l’Union européenne. En utilisant ces théories de manière stratégique, les professionnels des relations publiques peuvent façonner l’attention du public, influencer les perceptions et les attitudes, et contribuer à une communication plus efficace au sein de l’Union européenne. Cependant, il est essentiel de compléter ces approches par d’autres facteurs et de tenir compte aussi du contexte spécifique pour obtenir des résultats optimaux.

Élections européennes : que faut-il attendre de l’impact des intelligences artificielles ?

Tandis que la campagne des élections présidentielles aux Etats-Unis est déjà lancée avec une vidéo 100% générée par l’IA, ce qui est totalement inédit, lancée par les Républicains pour critiquer une réélection potentielle du Démocrate Joe Biden, le Far West de la communication politique à l’ère des intelligences artificielles interroge sur leur impact sur les prochaines élections européennes…

Comment l’IA transformera les élections en 2024

Un Position Paper de la Brookings « Comment l’IA transformera les élections de 2024 » estime que les progrès des technologies numériques fournissent de nouveaux outils où la création et la diffusion numériques en masse en particulier en matière de génération de textes, d’images et de vidéos vont avoir lieu grâce à des modèles faciles et peu coûteux à utiliser par un large public.

Les impacts, difficiles à mesurer, pourraient porter non seulement sur la difficulté à distinguer le faux du vrai mais également la façon dont les électeurs, les politiciens et les journalistes feront la campagne sans compter une incertitude majeure quant à la manière dont l’élection sera affectée.

Des réponses instantanées

Avec l’IA générative, les équipes de campagne pourront réagir quasi instantanément aux développements de la campagne, sans les couteux tournages et montages, simplement avec un prompt demandé à l’outil afin de créer une vidéo, qui soit capable de scanner le web, de réfléchir à une stratégie en termes de message et de proposer un call-to-action percutant.

Pour les élections européennes, il s’agit d’une belle opportunité et d’ores et déjà d’un développement qui peut potentiellement rebattre les cartes, avec un effet d’égalisation des chances, en particulier pour les listes qui n’auraient pas eu les moyens d’assurer une production rich media indispensable pour assurer la visibilité d’une campagne, a fortiori à l’échelle paneuropéenne et multilingue.

Un ciblage précis des messages

Deuxième atout de l’IA, les outils permettent un ciblage d’audience très précis, ce qui est crucial dans les campagnes politiques, en particulier lorsqu’il s’agit de bien cibler le petit nombre d’électeurs qui pourrait décider de l’élection proprement dite – un potentiel beaucoup plus poussé aux Etats-Unis où les données personnelles ne font pas l’objet de la même règlementation qu’en Europe.

Pour les prochaines élections européennes où les évolutions des forces politiques représentées au Parlement européen se font lentement d’un scrutin à l’autre, le petit pourcentage de l’électorat potentiellement indécis sera encore plus « chassé » par les campagnes boostées par les IA – un risque de surinvestir certains publics au détriment d’autres électorats moins connectés. Résultat ? Sans doute, un match nul pour les IA.

Démocratiser la désinformation

Troisième effet des IA, la probable démocratisation de la désinformation en apportant des outils sophistiqués aux citoyens lambda. Les gens n’ont plus besoin d’être des experts en codage ou en production vidéo pour générer du texte, des images ou des vidéos. Tout un chacun peut simplement utiliser des technologies avancées pour diffuser des messages élaborés. En ce sens, n’importe qui peut devenir un créateur de contenu politique et chercher à influencer les électeurs ou les médias.

Selon l’intention des auteurs utilisant des IA, leurs effets pourraient autant galvaniser un camp que stigmatiser un autre, voir créer du bruit et de l’incertitude et développer de faux récits afin de gagner la course.

Lors des prochaines élections en 2024, tant américaines qu’européennes, les IA seront des outils majeurs d’engagement et de persuasion, capable de surfer sur des émotions intenses (mécontentements, peurs, angoisses ou colères) et sans doute également de divulguer fausses nouvelles et désinformation, hors de tout contrôle.

Ni les individus – électeurs et candidats – ni les organisations – partis politiques et médias d’information – ne sont préparés à faire face à l’utilisation massive des IA génératives pour fabriquer et diffuser des campagnes. Les élections, plus que jamais, vont reposer sur la responsabilité, au cœur de la promesse démocratique.

CaféBabel, Euractiv : transformations dans la sphère des médias européens

Avec une certaine concordance des temps qui n’est certainement pas fortuite, deux médias européens, à la fois précurseurs en leur temps et dorénavant ancêtres parmi les médias européens, dont le modèle s’est longtemps cherché et toujours trouvé dans la difficulté, sont en train de se transformer. De quoi s’agit-il ?

CaféBabel : du journalisme participatif de la génération Erasmus à l’âge adulte européen

Après plus de 20 ans d’existence, une éternité dans le monde des médias européens, CaféBabel, le média participatif multilingue de la génération Erasmus tire sa révérence. CaféBabel, c’est la quintessence d’un moment de la construction européenne et de l’époque médiatique, celle d’une expression autant personnelle que générationnelle, d’un idéal, d’un mode de vie, d’un projet de société, où l’Europe est d’abord vécue, éprouvée, puis transmise par les émotions, les expériences et les collectifs.

CaféBabel, c’était en somme, les voix d’une génération de jeunes Européens qui poursuivaient les voies d’une intégration intime à l’Europe.

Pourquoi évoluer ? Parce que l’évolution des publics doit être prise en compte, au travers de nouvelles attentes vis-à-vis de la construction européenne, à la fois plus stratégique en matière d’autonomie et plus terre-à-terre en termes de politiques publiques européennes. Ces nouvelles relations à l’Europe induisent de nouvelles pratiques de journalisme européen.

Sphera Network structure et professionnalise la démarche de CaféBabel en visant à remodeler les collaborations journalistiques européennes et en se positionnant comme « le premier réseau européen de médias indépendants et alternatifs de petite et moyenne taille ».

Ereb, qui se présente comme « a community-based cross-border media », vise à repenser la manière de réaliser du journalisme transfrontalier avec des nouvelles formes de récits, de photo journalismes, de vidéo reportages, pour « raconter l’intimité de l’Europe depuis le terrain ».

Euractiv : de l’indépendance pionnière à l’entrisme inspirateur

Euractiv, là encore un média indépendant emblématique de la séquence d’intensification de la construction européenne entre élargissements et approfondissements, tente une forme de synthèse entre l’intention de couvrir l’actualité de l’UE à travers un modèle de journalisme sui generis complexe tout à la fois très expert mais pédagogique, assez neutre mais délibérément pro-européen, ouvert aux subventions publiques mais pas anti-business.

Euractiv, c’était en somme l’ambition de créer une forme de journalisme qui tente un fond de compromis à l’image de l’Europe.

Pourquoi évoluer ? Sans doute, pour reprendre le proverbe africain « Si tu veux aller vite, marche seul mais si tu veux aller loin, marchons ensemble. » Surtout, parce que l’évolution des moyens (les ressources, les datas, les IA) réinterrogent la possibilité d’une île, la capacité à rester à la fois indépendant et pertinent dans un paysage médiatique en constante transformation.

Selon le communiqué, l’annonce se verbalise de la manière suivante : « le groupe de médias européen Mediahuis a acquis EURACTIV, la marque d’information paneuropéenne, axée sur la politique de l’UE (…) le réseau de médias EURACTIV bénéficiera de l’envergure d’un groupe de médias international, ce qui lui permettra de devenir LE média de référence en matière de politique européenne ».

De nouvelles marques de fabrique de l’information européenne

Tant les transformations de CaféBabel que d’Euractiv – inévitables tôt ou tard – sont révélatrices de plusieurs dimensions :

Évidemment, le « succès » au sens de capacité à survivre et se développer de ces modèles doit beaucoup à l’investissement hors-du-commun des individus engagés, acteurs de premier plan, personnalités qui ont fait vivre ces projets.

Surtout, Euractiv et CaféBabel, avec le recul, apparaissent comme des marques de fabrique de l’information européenne, qui racontent de manière originale et inédite, avec une certaine maturité et un professionnalisme certain, l’Europe d’aujourd’hui et de demain.

De médias européens précurseurs, CaféBabel et Euractiv se projettent en champions des médias européens.