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De spectateur à co-auteur : comment réinventer l’impératif stratégique de la communication de l’Union européenne ?

C’est bien connu, l’Europe ne s’anime, ne respire pleinement, que lorsque ses citoyens s’en emparent, la façonnent de leurs mains, de leurs idées, de leurs histoires. Alors, comment placer l’Europe au carrefour des narrations pour donner corps au projet européen ? Comment insuffler un nouveau souffle, redonner du sens à cette construction collective ?

Le constat, forgé au fil des années, est sans appel : l’UE ne souffre pas d’un déficit d’ambition, mais bien d’un manque criant de résonance, d’une incapacité à vibrer à l’unisson avec le cœur de ses citoyens.

Aujourd’hui, la crédibilité future de l’Union européenne ne se mesurera pas à l’aune de ses traités très complexes ou de ses budgets trop ridicules, mais bien à sa capacité fondamentale à transformer chaque citoyen européen en un co-auteur actif, engagé et passionné du récit européen. C’est cette métamorphose, de spectateur passif à acteur engagé, que nous devons orchestrer avec audace et détermination.

Le récit européen en crise : un monologue assourdissant dans l’impasse

L’Europe, pour une part croissante de ses citoyens, s’est muée en une entité abstraite, lointaine, presque impalpable. Elle est perçue comme une architecte invisible, œuvrant dans l’ombre de bureaux bruxellois, dessinant des politiques complexes dont les rouages demeurent obscurs, les motivations impénétrables. Les citoyens, relégués au rang de simples spectateurs, subissent les effets de ces décisions, souvent sans en saisir la logique profonde, la finalité ultime.

Prenons l’exemple emblématique de la Politique agricole commune, pilier essentiel de l’intégration européenne, vitale pour nos agriculteurs, garante de notre sécurité alimentaire, moteur dans notre transition. Dans le discours médiatique dominant, elle se réduit trop souvent à un amas de normes obtuses, de directives technocratiques, perdant toute connexion avec la réalité concrète du terrain, avec les enjeux humains qu’elle sous-tend. Cette déconnexion alimente un sentiment d’éloignement, voire d’aliénation, face à un projet européen perçu comme hors-sol, déraciné des préoccupations quotidiennes.

Cette distance favorise l’éclosion d’un terreau fertile pour la méfiance, voire le rejet. Le populisme, avec ses sirènes séductrices et ses promesses simplistes, prospère sur un océan de désinformation, exploitant habilement les failles de la communication européenne. Ce phénomène préoccupant alimente un cercle vicieux pernicieux : moins d’engagement citoyen, plus de scepticisme, une érosion progressive de la confiance dans les institutions européennes.

Les tentatives de communication institutionnelle, même animées des meilleures intentions, se sont souvent soldées par des résultats insuffisants. Les campagnes corporate de l’UE lancées ces dernières années sont trop souvent pensées autour de verticalités déconcertantes, se traduisant par un déferlement d’affiches aseptisées, de slogans hors-sol, d’une communication conçue « pour le peuple, sans le peuple ». Ce dialogue de sourds, cette communication descendante et monocorde, non seulement manque sa cible, mais renforce, paradoxalement, le sentiment de distance et de déconnexion qu’elle prétend combattre. L’UE a trop souvent péché par excès de pédagogie descendante, oubliant que la véritable communication est un échange, un dialogue, une co-construction.

La co-création : redonner une plume aux citoyens, réécrire ensemble le récit européen

Face à cette impasse, une voie se dessine : celle de la co-création. Il ne s’agit plus de simplement informer, de diffuser des messages pré-formatés, mais de véritablement co-construire le récit européen avec les citoyens, de leur redonner une plume, une voix, un rôle d’acteurs à part entière. La Conférence sur l’avenir de l’Europe a timidement, mais significativement, ouvert cette brèche avec des citoyens, tirés au sort, représentant la diversité de notre continent, réunis pour formuler des propositions concrètes parfois audacieuses. Cette initiative, imparfaite certes, démontre avec force que la démocratie participative n’est pas une utopie, mais une réalité tangible, efficace, à condition de lui accorder une écoute sincère et une suite concrète.

Pour concrétiser cette ambition de co-création, des outils innovants, hybrides, peuvent être déployés à grande échelle :

  • Plateformes hybrides : marier le numérique et le local. Associer la puissance des outils numériques – à l’image de la plateforme de participation des citoyens en ligne à l’élaboration des politiques publiques européennes et la richesse des échanges en présentiel, au sein de dialogues citoyens ancrés dans les territoires. Ces plateformes hybrides permettent de démultiplier les canaux de participation, de toucher un public plus large et diversifié, et de favoriser un dialogue continu entre les institutions européennes et les citoyens.
  • Récits incarnés : soutenir les voix de l’Europe vécue. Soutenir activement les projets qui collectent les témoignages, les expériences vécues, en particulier dans les zones rurales, les quartiers périphériques, les communautés souvent marginalisées. Ces « voix de l’Europe » sont précieuses pour humaniser le projet européen, le rendre proche, tangible et pertinent pour chacun.
  • Éducation critique : animer des ateliers de décryptage des institutions européennes, de leurs mécanismes de fonctionnement, de leurs politiques. Le modèle finlandais, qui place l’éducation critique au cœur de son système éducatif, est une source d’inspiration précieuse. Donner aux jeunes générations les outils intellectuels pour comprendre l’Europe, pour se forger une opinion éclairée, pour devenir des citoyens européens actifs et engagés.

L’appel à l’action : écrire l’Europe ensemble, chaque jour

L’heure n’est plus aux déclarations incantatoires, mais à l’action, à la mise en œuvre d’une stratégie de co-création ambitieuse et pérenne afin que la puissance de l’engagement citoyen, au travers de la force des récits partagés et de la capacité de se raconter différemment dans nos projets collectifs se traduit par la réinvention de l’Europe. Chacun, à son niveau, a un rôle essentiel à jouer dans cette entreprise collective :

  • Citoyens : saisir les opportunités, devenir acteurs du changement. Les citoyens doivent s’emparer des outils mis à leur disposition : participer activement aux consultations publiques, s’investir dans les budgets participatifs – à l’image du Fonds citoyen franco-allemand –, rejoindre les initiatives locales, partager leurs histoires, leurs idées, leurs préoccupations. Ils doivent devenir les ambassadeurs du récit européen dans leur quotidien, dans leur communauté, dans leur sphère d’influence.
  • Médias : innover et explorer la parole aux citoyens. Les médias, traditionnels et numériques, ont une responsabilité cruciale afin d’innover avec les « reporters citoyens », encourager le journalisme positif, mettre en lumière les initiatives locales soutenues par l’UE, donner la parole aux citoyens, à leurs expériences, à leurs perspectives. La chaîne Arte, avec sa série « Eurêka ! », qui explore les initiatives européennes innovantes, montre la voie d’une information européenne plus engageante, plus proche des réalités du terrain.
  • Institutions : intégrer la co-création au cœur de leur ADN. Les institutions européennes doivent opérer une véritable révolution culturelle, en intégrant la co-création au cœur de leur fonctionnement. L’idée de panels citoyens permanents, proposée par le Parlement européen est une piste prometteuse : « organiser des « mini-publics » dont les participants, choisis de façon aléatoire, représentent des sous-groupes de la structure socio-économique de l’Union, et ainsi l’ensemble de la société, de manière à prévenir l’inégalité d’accès à la participation à la vie démocratique de l’Union, en offrant aux citoyens qui n’auraient pas eu cette chance autrement, un moyen d’exprimer leur point de vue » ; en intégrant systématiquement les citoyens dans les processus de décision, en les consultant en amont des politiques, en leur donnant un véritable pouvoir d’influence sur l’agenda européen.

Imaginons un instant cette Europe rêvée, cette Europe co-créée : chaque village, chaque quartier aurait son « ambassadeur narratif », formé, outillé, pour relayer les initiatives locales, faire remonter les alertes, tisser des liens entre le local et le global. La politique agricole ne se décréterait plus dans des bureaux feutrés, mais se discuterait dans des fermes ouvertes au contact direct des agriculteurs et des consommateurs. Le Pacte vert européen ne serait plus perçu comme une contrainte imposée d’en haut, mais comme un projet collectif, débattu et enrichi dans des ateliers collaboratifs, au cœur des villes et des campagnes.

L’Europe, un livre ouvert à écrire ensemble

L’Europe ne se décrète pas, elle se vit, elle s’écrit au quotidien, par l’engagement de ses citoyens, par la richesse de leurs échanges, par la force de leurs récits partagés. En faisant de chaque Européen un co-auteur du récit européen, l’UE ne gagnera pas seulement en crédibilité, en légitimité, en efficacité – elle redeviendra une aventure collective, un projet vibrant, porteur d’espoir et de sens. L’Union européenne n’est pas un chapitre clos de l’histoire, un monument figé dans le passé. C’est un livre ouvert, aux pages encore vierges, où chaque main, chaque voix, chaque histoire, peut y écrire, contribuer à façonner son avenir. À nous de saisir cette plume, ensemble, pour écrire les plus belles pages de l’histoire européenne.

Réarmer le récit européen : un impératif unificateur pour réinventer la communication stratégique européenne

Le Livre blanc pour la défense européenne sonne comme un appel à la prise de conscience et à l’action face à la résurgence de conflits, l’accélération des avancées technologiques et l’intensification des menaces hybrides. L’Europe doit répondre à l’impératif de réarmement. Malgré sa puissance économique, son leadership normatif, elle peine à projeter un récit unifié et percutant à la hauteur des enjeux. Comme le souligne Mario Draghi, dans un discours au Sénat à Rome, il est impératif de « dépasser les modèles nationaux et de penser à l’échelle continentale« , une injonction qui résonne avec une acuité particulière dans le domaine de la communication. Dans un monde où la guerre informationnelle fait rage, où les narratifs concurrents s’affrontent pour modeler les opinions et influencer les décisions, le déficit de communication stratégique de l’UE constitue une vulnérabilité. Cette fragilité narrative entrave sa capacité à mobiliser ses citoyens, à défendre ses intérêts sur la scène internationale et à contrer efficacement les menaces qui pèsent sur sa sécurité et ses valeurs.

1. Construire un récit européen unificateur : mobiliser et projeter sa puissance narrative sur la scène mondiale

  • Réhausser le sentiment d’appartenance en mettant en lumière les valeurs partagées, l’histoire commune et les aspirations futures, qui renforce le lien entre les citoyens et le projet européen et transcende les identités nationales sans les nier, mais en les intégrant dans un ensemble plus vaste et porteur de sens.
  • Clarifier le projet européen : Face à la complexité des politiques européennes, un récit clair et accessible permet d’expliquer pourquoi l’Europe est nécessaire, ce qu’elle apporte concrètement aux citoyens, et quelle vision du monde elle défend. Il s’agit de rendre le projet européen intelligible et désirable. Draghi insiste sur l’importance de définir « une stratégie continentale unifiée » pour faire face aux défis actuels.
  • Mobiliser l’opinion publique : un récit inspirant et émotionnellement engageant est un puissant levier de pédagogie et de mobilisation afin de susciter l’adhésion aux politiques européennes, de renforcer la résilience face aux crises, et d’encourager la participation citoyenne.
  • Projeter une puissance normative : un récit européen affirmé, basé sur des valeurs universelles, renforce la crédibilité de l’UE sur la scène internationale, aussi comme modèle alternatif, Draghi évoque la nécessité de penser à « la place de l’Europe parmi les grandes puissances« , ce qui implique une projection narrative forte.
  • Développer une plateforme narrative européenne : créer une initiative à l’échelle de l’UE (impliquant les institutions mais aussi des acteurs culturels, des médias, des universités) pour définir et incarner ce récit européen commun, de manière créative et accessible.

2. Investir dans la « défense narrative » : bouclier informationnel pour protéger l’espace public européen des attaques informationnelles et garantir un débat démocratique libre et éclairé

  • Protéger l’espace informationnel européen : En détectant, analysant et contrant les campagnes de désinformation et de manipulation, la défense narrative préserve l’intégrité du débat public et la liberté d’opinion. Draghi mentionne la « cyber-guerre silencieuse » avec des menaces (désinformation, manipulation, ingérences étrangères, cyberattaques) comme un élément fondamental de la défense moderne, soulignant l’importance de protéger l’espace informationnel avec un renforcement des capacités de fact-checking et de débunking.
  • Renforcer la résilience démocratique : En informant et en éduquant les citoyens aux enjeux de la désinformation, en développant leur esprit critique et leur capacité à vérifier les sources, la défense narrative renforce la résilience des démocraties européennes face aux attaques informationnelles. Draghi insiste sur l’évolution du concept de défense vers « une notion plus large de sécurité globale« , qui inclut la protection contre les menaces informationnelles.
  • Maintenir la confiance publique : En luttant contre la désinformation qui vise à discréditer les institutions européennes et nationales, la défense narrative contribue à maintenir la confiance des citoyens dans le système démocratique. En parlant de la nécessité d’une « défense commune de l’Europe« , Draghi implique une défense qui protège tous les aspects de la sécurité, y compris la confiance dans les institutions.
  • Contrer les narratifs hostiles : La défense narrative ne se limite pas à la réaction. Elle implique également de développer des contre-narratifs proactifs pour déconstruire les récits hostiles et promouvoir les valeurs et les intérêts européens. Draghi souligne que « La défense aujourd’hui ne se résume plus à l’armement, c’est aussi de la technologie numérique« , ce qui implique la nécessité de contrer les narratifs hostiles dans le domaine numérique.

3. Maîtriser les nouveaux champs de bataille communicationnels : stratégies numériques, médias sociaux et IA pour l’influence et la souveraineté européenne

  • Engager les citoyens numériques : Les citoyens, en particulier les jeunes générations, s’informent et interagissent principalement en ligne. L’UE doit être présente et active sur les plateformes numériques pour communiquer avec eux, les informer et les mobiliser. Draghi met en avant l’importance de « l’évolution technologique extrêmement rapide, qui a complètement bouleversé le concept même de défense et de guerre« , soulignant la nécessité d’adapter notre communication à ces nouveaux environnements.
  • Contrer la désinformation en ligne : Les réseaux sociaux et les plateformes numériques sont des vecteurs privilégiés de la désinformation. L’UE doit développer des stratégies spécifiques pour lutter contre la désinformation en ligne et protéger les utilisateurs. Draghi mentionne spécifiquement « Drones, intelligence artificielle, données, guerre électronique, espace et satellites, cyber-guerre silencieuse » comme des éléments fondamentaux de la défense moderne, impliquant la lutte contre la désinformation dans ces domaines.
  • Exploiter le potentiel de l’IA pour la communication : L’IA offre des opportunités considérables pour améliorer l’efficacité de la communication stratégique : analyse de données, personnalisation des messages, détection de tendances, automatisation de tâches, création de contenus innovants. Draghi souligne la « convergence entre les technologies militaires et les technologies numériques« , ce qui ouvre des perspectives pour utiliser ces technologies, y compris l’IA, dans la communication stratégique.
  • Projeter l’influence européenne dans le cyberespace : Le cyberespace est un espace de compétition géopolitique. L’UE doit y affirmer sa présence, défendre ses valeurs et ses intérêts, et contrer les acteurs malveillants. Draghi insiste sur la nécessité de se doter d’ »une stratégie continentale unifiée pour le cloud, le supercalcul, l’intelligence artificielle et la cybersécurité« , ce qui inclut la projection d’influence dans le cyberespace.

4. Amplifier la voix de l’Europe sur la scène internationale : diplomatie publique proactive et storytelling global de conviction

  • Promouvoir les valeurs européennes : Démocratie, droits humains, multilatéralisme, développement durable, sont des valeurs que l’UE souhaite promouvoir à l’échelle mondiale. Une voix européenne forte est essentielle pour porter ces valeurs et les défendre face aux modèles alternatifs. Draghi, en parlant de la défense européenne, souligne que « Tout cela concerne non seulement notre sécurité, mais aussi la place de l’Europe parmi les grandes puissances« , ce qui implique une projection de valeurs et d’influence à l’échelle mondiale.
  • Défendre les intérêts européens : Dans un monde de compétition géopolitique accrue, l’UE doit défendre ses intérêts économiques, commerciaux, sécuritaires, et environnementaux. Une voix européenne unie et audible est un atout majeur dans les négociations internationales et les forums multilatéraux. Draghi mentionne la nécessité d’un « rapport plus équilibré avec l’allié atlantique, y compris sur le plan économique« , ce qui souligne l’importance de défendre les intérêts européens sur la scène internationale.
  • Influencer les débats mondiaux : Face aux défis globaux (climat, pandémies, inégalités, conflits), l’UE a une expertise et des solutions à apporter. Amplifier sa voix permet d’influencer les débats mondiaux, de proposer des solutions innovantes, et de construire un ordre international plus juste et durable. Draghi insiste sur les « complexités géopolitiques actuelles » et l' »évolution technologique extrêmement rapide » comme raisons pour une transformation de la défense européenne, ce qui implique une volonté d’influencer les débats mondiaux sur ces enjeux.
  • Contrer les narratifs concurrents : D’autres puissances mondiales projettent leurs propres narratifs et visions du monde. L’UE doit amplifier sa voix pour contrer ces narratifs concurrents, déconstruire les stéréotypes négatifs sur l’Europe, et promouvoir une image positive et dynamique de l’UE. Draghi, en parlant de la nécessité de « dépasser les modèles nationaux » et de « penser à l’échelle continentale« , implique une volonté de proposer un narratif européen alternatif face aux modèles concurrents.

L’heure est venue pour l’Europe de prendre son destin narratif en main.

Au terme de cette analyse, l’urgence d’une transformation profonde de la communication stratégique européenne apparaît avec une clarté implacable. La mise en œuvre de ces recommandations représente un défi ambitieux, mais aussi une opportunité historique. En investissant résolument dans sa communication stratégique, l’UE peut non seulement renforcer sa résilience face aux menaces informationnelles et aux narratifs hostiles, mais également libérer un potentiel narratif immense. Une Europe capable de raconter son histoire avec force et conviction, de mettre en récit ses valeurs et ses aspirations, de dialoguer avec ses citoyens et le monde entier, deviendra une puissance narrative à part entière, capable d’inspirer, de mobiliser et d’influencer les débats mondiaux.

Comment penser l’avenir de l’Europe : du soft power au « Reality Power 2.0 » ?

Deux décennies après l’œuvre fondatrice de Robert Kagan, Of Paradise and Power, qui dépeignait les relations transatlantiques comme un choc entre l’idéalisme « vénusien » de l’Europe et le réalisme « martien » américain, la fracture s’est transformée en une divergence bien plus profonde. Aujourd’hui, il ne s’agit plus simplement d’approches concurrentes du pouvoir, mais d’un clivage épistémologique sur la manière dont les sociétés construisent et valident la vérité politique. Les États-Unis embrassent une forme d’« astrological politics », où la résonance émotionnelle et les croyances personnelles priment sur la réalité empirique. L’Europe, quant à elle, reste attachée à une « éthique astronomique », élaborant ses politiques via des données, l’expertise et la délibération rationnelle. Ce fossé interroge la capacité de l’Europe à défendre un modèle de gouvernance fondé sur les faits dans un monde où la vérité elle-même est contestée.

Le Virage astrologique américain : l’ère de la vérité émotionnelle


Les élections américaines de 2024 ont confirmé une mutation profonde de l’engagement politique. Comme le souligne Francis Fukuyama, la politique aux États-Unis est désormais régie par « l’individualisme expressif » — une priorisation de l’identité et des sentiments viscéraux au détriment des faits. L’ère Trump incarne cette dynamique : ses discours offrent des récits validant les peurs et aspirations de ses partisans, indépendamment de leur factualité. Un phénomène qu’Ivan Krastev et Stephen Holmes, dans The Light That Failed, analysent comme un rejet du consensus libéral post-Guerre froide.


Facteurs clés de cette transformation :

  • « Weaponized narratives » : Les leaders populistes fusionnent vérité émotionnelle et réalité, diabolisant l’expertise comme « élitiste ».
  • Épistémologie tribale : La vérité découle de l’alignement partisan, non de la vérification objective.
  • Amplification algorithmique : Les réseaux sociaux renforcent les réalités parallèles, fragmentant les référentiels factuels.

Pour l’Europe, c’est à la fois un avertissement et un défi : comment la gouvernance technocratique peut-elle rivaliser face à la séduction fictionnelle de la politique « astrologique » ?

L’impératif astronomique européen : la raison face à l’émotion

La force de l’Europe réside dans son attachement à une gouvernance « astronomique » — fondée sur les données, le multilatéralisme et la planification à long terme. Du RGPD au Pacte Vert, les initiatives européennes reflètent une croyance dans des solutions systémiques. Pourtant, comme le prévient Emmanuel Macron, l’Europe risque de devenir « un herbivore dans un monde de carnivores » si elle ne parvient pas à émouvoir autant qu’à convaincre.

Les écueils du détachement technocratique :

  • Désenchantement démocratique : Les citoyens perçoivent les institutions européennes comme distantes (ex. : manifestations agricoles contre les normes vertes).
  • Vide narratif : Les politiques complexes (migration, climat) manquent de récits mobilisateurs, laissant le champ libre aux simplifications populistes.
  • Fragmentation identitaire : En l’absence d’un récit européen unificateur, nationalismes et euroscepticismes prospèrent.

Les piliers pour un « Reality Power 2.0 » 


Pour survivre dans un monde post-vérité, l’Europe doit fusionner sa rigueur astronomique avec l’intelligence émotionnelle de la politique astrologique. 

Voici les axes d’une stratégie « Reality Power 2.0 » :

1. Forger des récits captivants pour nos politiques complexes
L’Europe excelle dans la conception de politiques, mais échoue souvent à les incarner. Il faut humaniser l’abstrait :

  • Collaborations médiatiques : S’associer à des créateurs de contenus (YouTubeurs, influenceurs) pour produire des documentaires courts type « L’Europe en action », diffusés aussi sur TikTok et Instagram.
  • Outil innovant : Créer un « EU Impact Navigator », une plateforme interactive cartographiant en temps réel les bénéfices des politiques (ex. : économies annuelles de 500 € par ménage grâce aux subventions solaires).

2. Construire une identité européenne commune
Face à la montée des nationalismes, l’Europe doit devenir une « communauté imaginée » (Benedict Anderson) à part entière :

  • NextGenerationEU 2.0 : Utiliser le plan de relance pour financer des projets culturels transnationaux, un Erasmus+ élargi aux artisans et agriculteurs, ou un réseau de « Digital Citizenship Hubs » offrant des formations aux compétences numériques.
  • Rituels symboliques : Instaurer une « Semaine de la solidarité européenne » autour du 9 mai (journée de l’Europe), avec des événements simultanés : chaînes humaines transfrontalières, hackathons citoyens et concerts virtuels réunissant des artistes des 27 États membres.
  • Patrimoine futuriste : Un « Laboratoire du patrimoine européen » pour relier les valeurs historiques (les Lumières, la paix post-1945) aux innovations technologiques, via des expositions itinérantes utilisant la réalité augmentée et virtuelle.

3. Démocratiser la délibération : une gouvernance hybride
Pour contrer la défiance, l’Europe doit impliquer les citoyens dans la fabrique politique :

  • Plateforme « MonEurope » : Un portail unifié regroupant services (carte santé européenne) et outils participatifs : consultations en ligne, budgets participatifs à l’échelle continentale.
  • Assemblées citoyennes augmentées : Combiner des panels représentatifs (testés lors de la Conférence sur l’avenir de l’Europe) avec des outils d’IA analysant les contributions de millions d’Européens, identifiant les consensus émergents sur des sujets comme la régulation de l’IA ou la fiscalité verte.
  • Gamification civique : Développer une appli type « EU Quest », où les utilisateurs gagnent des “points d’impact” en participant à des consultations ou en s’engageant dans des projets locaux faisant d’eux des ambassadeurs de la démocratie participative.

4. Communication stratégique : des Faits habillés en histoires
L’Europe doit maîtriser l’art du storytelling scientifique :

  • Campagne pour un Pacte Vert incarné : Promu via une campagne de communication mettant en avant des réalisations revitalisant des régions rurales grâce à l’économie circulaire, ou des villes transformant des friches industrielles en éco-quartiers et associer les données sur la réduction des émissions à des récits humains : un mineur polonais reconverti dans l’éolien, une île grecque atteignant l’autonomie énergétique, ou un vigneron bourguignon adaptant ses pratiques au réchauffement.
  • Réseau de leaders d’opinion européens : Contre le risque des chambres d’écho touchant les plus vulnérables à la désinformation mais aussi le prêche aux convertis souvent éduqués et urbains, former une coalition d’intellectuels, artistes et athlètes (comme le programme Cultural Leaders for Europe) pour incarner les valeurs européennes sur les réseaux sociaux.

Dépasser le funambulisme existentiel
L’Europe doit opérer une réinvention copernicienne : garder le cap sur les faits, tout en apprenant à émouvoir. Il ne s’agit pas de singer le populisme, mais de donner aux vérités astronomiques—urgence climatique, défense des démocraties—une résonance culturelle et émotionnelle. En repensant le « soft power » de Joseph Nye en « reality power », l’Europe peut mobiliser massivement.

Quelle campagne idéale de communication stratégique de l’UE, selon le programme de travail de la Commission européenne en 2025 ?

À l’aube d’une nouvelle ère géopolitique, marquée par des défis complexes et interconnectés, la Commission européenne se doit de transcender le simple exercice de communication pour engager un dialogue avec les citoyens, les entreprises et les parties prenantes. Le programme de travail pour 2025 représente une feuille de route pour « une Union plus forte, plus unie et plus efficace ». Cependant, son impact réel dépendra de la capacité à traduire cette vision en une narration claire, inspirante et mobilisatrice. Une campagne de communication stratégique qui ambitionne de forger un récit européen commun, de susciter un sentiment d’appartenance renouvelé et de démontrer concrètement la valeur ajoutée de l’action européenne dans un monde en pleine mutation. En misant sur la force du collectif, la simplification des actions et une projection résolument tournée vers l’avenir, cette campagne viserait à réaffirmer le leadership de l’UE et à consolider le lien de confiance avec ses publics.

Un narratif principal : L’Europe façonne activement son destin collectif – unis dans l’action, ambitieux dans la vision

Pour transformer le programme de travail 2025 d’une richesse considérable, en une communication percutante, il est impératif de le condenser en un récit central, clair et convaincant. Le message fondamental doit être décliné :

1/ Une force proactive et anticipatrice, l’Europe en mode solutions, pas seulement en mode gestion de crise : transformer la perception d’une UE constamment en mode gestion de crise en celle d’une force proactive qui relève les défis de front et construit un avenir plus solide. Mettre en avant le concept d’une « Union plus audacieuse, plus simple et plus rapide ». Exemples concrets à exploiter autour de la défense commune, du bouclier cybernétique, de l’autonomie énergétique.

2/ L’unité c’est notre ADN, notre puissance vient du collectif : notre superpouvoir, c’est cette unité : souligner le message central de « l’Union » comme la meilleure option pour l’Europe. Illustrer comment l’action collective produit des résultats que les nations individuelles ne peuvent atteindre seules. Insister sur la solidarité, la coopération et les valeurs partagées. Simplifier pour un impact réel qui libère l’innovation : se concentrer sur les avantages tangibles des efforts de simplification pour les entreprises, en particulier les PME et les citoyens. Démontrer comment la rationalisation des normes se traduit par des améliorations concrètes en termes d’emplois, d’innovation et de croissance.

3/ L’Europe, un laboratoire du futur pour des bénéfices intergénérationnels : mettre en évidence la perspective à long terme, en se concentrant sur la construction d’un « avenir plus sûr, plus prospère et plus sain pour les générations futures ».  Relier les actions actuelles aux bénéfices futurs, en particulier pour les jeunes générations, avec des sujets comme la santé, la sécurité alimentaire ou la compétitivité technologique.

Des piliers fondamentaux pour une campagne transformatrice

Pilier 1 : Une Union de sécurité comme fondement de notre avenir collectif

Ce pilier vise à protéger ses citoyens et ses intérêts dans un monde de plus en plus instable.

L’UE ne se contente pas de réagir – elle réinvente la sécurité via une approche holistique (cyber, énergie, santé), tout en consolidant des partenariats stratégiques (alliances globales) et la résilience sociétale.

La campagne peut souligner que l’UE n’est pas complaisante mais qu’elle répond activement à des menaces réelles et significatives :

Construire une véritable Union européenne de défense avec une industrie de défense compétitive et un cadre pour les besoins d’investissement en matière de défense et les capacités de défense critiques.

Au-delà de la défense militaire, d’autres enjeux :

Mieux protéger nos infrastructures sous-marines, notamment les câbles de télécommunications, qui sont une partie essentielle de notre infrastructure numérique critique ;

Sur la cybersécurité des hôpitaux et des prestataires de soins de santé et réduire les dépendances dans les secteurs vitaux.

Pilier 2 : Une Union compétitive, l’innovation au service de la prospérité partagée

Ce pilier se concentre sur l’agenda économique de l’UE, en positionnant l’UE comme le continent de la durabilité rentable, où transition écologique rime avec création d’emplois high-tech et souveraineté industrielle.

Face aux défis de « la concurrence déloyale, des coûts énergétiques élevés, des pénuries de main-d’œuvre et de compétences et des obstacles à l’accès au capital », la réponse se situe dans la boussole de la compétitivité, la simplification des règles comprenant le reporting en matière de durabilité, le devoir de diligence en matière de durabilité et la taxonomie, le programme InvestEU et la politique agricole commune.

Mener les transitions verte et numérique pour un avantage économique et moteurs de la compétitivité future et un leadership technologique. Renforcer le marché unique, assurer l’Union de l’épargne et de l’investissement et soutenir les « start-ups et scale-ups ».

Pilier 3 : Une Union de valeurs et de bien-être : l’humain au cœur du projet européen

Ce pilier se concentre sur l’engagement de l’UE envers ses valeurs fondamentales, son modèle social et la qualité de vie de ses citoyens en vue d’une UE comme rempart des valeurs démocratiques et garant d’un progrès inclusif – où chaque citoyen, jeune ou senior, trouve sa place.

Justice sociale et modèle social européen : le modèle social unique et précieux de l’Europe constitue à la fois une pierre angulaire sociétale et un avantage concurrentiel qui garantit que les bénéfices du progrès économique sont partagés par tous les citoyens et que personne n’est laissé pour compte.

Qualité de vie et durabilité : l’agriculture, la sécurité alimentaire, l’eau et la nature représentent les engagements de l’UE en matière de protection de l’environnement et de gestion durable des ressources pour la durabilité environnementale et une qualité de vie élevée, afin d’améliorer le bien-être des citoyens et des générations futures.

Protection de la démocratie et des droits fondamentaux : la démocratie, l’état de droit et les droits fondamentaux sont les fondements de l’engagement de l’UE envers ses valeurs fondamentales, ses principes démocratiques, l’égalité et les droits fondamentaux pour tous les citoyens, en contrant les menaces à ces valeurs.

Engagement citoyen et inclusivité : avec les « dialogues politiques avec la jeunesse » pour s’assurer que « les perspectives des jeunes sont intégrées dans l’élaboration des politiques » et la nécessité de « soutenir, protéger et autonomiser la société civile » afin de veiller à ce que ses politiques reflètent les besoins et les aspirations de tous les Européens.

Comme toute campagne, il ne s’agit pas de se limiter à informer, il faut viser à inspirer une mobilisation collective en articulant force, innovation et valeurs, la communication pourrait offrir un cadre narratif pour restaurer la confiance via des preuves concrètes (simplification, investissements), anticiper les futurs (santé, climat, sécurité) plutôt que de les subir et célébrer l’unité dans la diversité comme marqueur géopolitique unique. Ce n’est pas une campagne de plus, mais un moment décisif pour reconfigurer l’imaginaire européen en s’appuyant sur des données en temps réel, des récits citoyens et une présence omnicanale, l’UE peut incarner une puissance globale ancrée dans le bien-être local. L’Europe n’est pas qu’un héritage à transmettre – c’est un projet en perpétuelle réinvention. L’UE peut s’affirmer comme laboratoire mondial d’idées et boussole éthique, prouvant une fois encore qu’ensemble on peut dessiner un avenir européen commun.

Face à Trump, l’Europe à l’heure Draghi : un manifeste, un récit, une bataille pour l’âme du continent européen

Mario Draghi n’a pas simplement livré un rapport sur la compétitivité de l’Europe, il a sonné le tocsin. De passage à Bruxelles devant le Parlement européen, il a livré une sorte de manifeste. Ce n’est pas une énième note de conjoncture, mais un appel à la mobilisation générale. Face à la tempête Trumpiste et à la montée en puissance des blocs sino-américains, l’Europe est sommée de se réinventer « il est de plus en plus évident que nous devons agir comme si nous étions un seul État » ou sinon de sombrer dans la marginalisation. Le diagnostic est implacable : retard technologique abyssal, facture énergétique exsangue, paralysie décisionnelle. Mais le remède, aussi audacieux soit-il, reste lettre morte sans un ingrédient crucial : une campagne de communication de rupture, capable de transformer un manifeste d’experts en un cri de ralliement populaire.

Un récit européen puissant et incarné à partir des piliers du message Draghi : urgence, unité et optimisme

Il ne s’agit plus de « communiquer l’Europe », mais de faire vibrer l’Europe dans le cœur des citoyens.

Il faut dépasser la logique des messages clés, ces éléments de langage qui circulent sur les plateaux radio et TV. Il convient de tisser un récit européen de la Renaissance. Les « messages clés » sont nécessaires, mais insuffisants. L’urgence, l’unité, l’optimisme doivent être les fils conducteurs d’une narration européenne de la renaissance. Il s’agit de raconter l’histoire d’une Europe qui se relève, qui ose, qui innove, qui protège. Une Europe qui, face aux défis, redécouvre sa force collective et son génie propre.

L’urgence impérieuse d’agir : le temps des choix courageux. Ne pas se contenter de déplorer le « retard technologique ». Mettre en scène la course contre la montre, le risque de décrochage irréversible. Utiliser des métaphores visuelles fortes : l’Europe comme un train en retard sur le quai, la frontière technologique qui s’éloigne comme une ligne d’horizon inaccessible. Insister sur le coût de l’inaction : perte d’emplois, dépendance accrue, affaiblissement de notre modèle social. L’urgence n’est pas un slogan, c’est une réalité palpable.

L’unité refondatrice comme impératif : plus qu’un marché, une destinée commune. L’unité ne doit pas être perçue comme une contrainte technocratique, mais comme un levier de puissance. Expliquer concrètement les bénéfices de l’harmonisation réglementaire, de l’union des marchés de capitaux pour le financement de l’économie, de l’innovation, de nos modèles sociaux, des nouvelles dépenses pour le climat, la défense, les technologies de rupture. Illustrer par des exemples concrets de PME et de laboratoires de recherche. L’unité, c’est la force multipliée, c’est la capacité à peser dans un monde de blocs.

L’optimisme volontariste comme carburant : réveiller la flamme européenne. L’optimisme ne doit pas être naïf, mais combatif. Rappeler les atouts de l’Europe : sa créativité, sa diversité, son modèle social unique, sa tradition démocratique. Mettre en avant les success stories européennes, les entreprises qui réussissent, les innovations qui émergent. L’optimisme, c’est la conviction que l’Europe a les cartes en main pour écrire son propre avenir, à condition de le vouloir.

Une stratégie de communication en rupture

Pour les citoyens, c’est l’Europe du quotidien, l’Europe qui protège. Dépasser les vidéos avec des animations génériques. Tisser des témoignages de citoyens européens qui bénéficient concrètement de l’action européenne dans leurs transformations. Exploiter TikTok et Instagram de manière plus créative : micro-documentaires percutants, challenges ludiques autour de l’innovation européenne, formats interactifs (Q&A avec des experts, sondages en direct). Ne pas négliger les médias locaux et régionaux, vecteurs essentiels de proximité. Imaginer des événements participatifs : « villages de l’innovation européenne » dans les grandes villes, consultations citoyennes en ligne, concours d’idées pour l’avenir de l’Europe.

Pour les décideurs politiques, c’est l’appel à la responsabilité pour un vrai leadership européen. Les « sommets médiatisés » sont utiles, mais il faut bien entendu les théâtraliser, leur donner une dimension symbolique forte. Mais, il faut surtout des décisions fortes, à la hauteur des enjeux, avec une mise en scène qui saisit le moment historique : discours inspirants, annonces concrètes, engagements solennels. Organiser des débats contradictoires pour stimuler la réflexion et contrer les narratifs eurosceptiques. Ne pas hésiter à interpeller directement les leaders nationaux, à les mettre face à leurs responsabilités historiques.

Pour les entreprises et les investisseurs, c’est la clé de la compétitivité retrouvée, le terrain des opportunités. La communication doit être dynamique, interactive, personnalisée. Ne pas se contenter de « recenser les opportunités », mais mettre en récit les success stories, démontrer la rentabilité de l’investissement européen, faciliter la mise en relation entre investisseurs et entreprises innovantes. Utiliser LinkedIn de manière ciblée : groupes thématiques, contenus experts, webinaires interactifs avec des PDG européens, témoignages d’investisseurs convaincus. Organiser des événements sectoriels : forums de l’innovation, « European Tech Days », « Green Business Summits ». Créer un label « Invest in Europe » pour valoriser les entreprises engagées dans la compétitivité européenne.

Un volontarisme pour surmonter les défis

Localiser sans fragmenter, c’est le temps venu de l’Europe des territoires. Adapter les messages aux contextes locaux en veillant à ne pas diluer le récit européen commun. Mettre en avant les spécificités locales comme des atouts de la diversité européenne. Valoriser les « champions régionaux », les entreprises qui incarnent l’innovation locale et qui contribuent à la compétitivité européenne globale. Organiser des campagnes de communication décentralisées, impliquant les acteurs locaux (régions, villes, associations). Traduire les messages clés dans toutes les langues européennes, en tenant compte des nuances culturelles.

Impliquer les parlements nationaux, c’est le cœur du débat démocratique, la source de légitimité. Organiser des consultations parlementaires nationales sur le manifeste Draghi, des auditions publiques avec des experts et des citoyens. Créer un « Forum parlementaire européen » dédié à la compétitivité, permettant aux parlementaires nationaux d’échanger, de débattre, de co-construire des solutions. Faire des parlements nationaux des relais de la campagne de communication, en les dotant d’outils et de ressources spécifiques.

Mesurer l’impact avec un baromètre de suivi de l’opinion, un tableau de bord de l’engagement. Le suivi en temps réel de l’engagement sur les réseaux, des sondages d’opinion, de la participation citoyenne est indispensable. Mais il faut aller au-delà des simples « métriques ». Développer un « Baromètre de la confiance européenne », mesurant la perception de l’UE, l’adhésion aux valeurs européennes, l’optimisme quant à l’avenir. Créer un « tableau de bord de la compétitivité européenne », combinant des indicateurs économiques, sociaux et environnementaux, pour visualiser les progrès et les défis. Communiquer régulièrement sur les résultats, de manière transparente et accessible.

L’heure de l’action narrative, une bataille narrative pour l’âme de l’Europe

Avec le manifeste Draghi, le récit doit devenir une action. La campagne de communication ne doit pas être une simple opération de marketing politique, mais un catalyseur de changement. Elle doit inspirer l’action, mobiliser les énergies, créer un mouvement européen pour la compétitivité et la souveraineté.

L’Europe a besoin d’un « récit-action », d’une nouvelle narration de rupture qui se traduit en initiatives concrètes, en politiques publiques audacieuses, en engagements citoyens forts pour raconter ensemble, agir ensemble. C’est une bataille narrative contre le désordre Trump, pour l’âme de l’Europe.