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Y a-t-il un problème dans la communication de l’UE via des vidéos virales ?

Alors qu’un eurodéputé flamand fait actuellement polémique à cause d’une vidéo en ligne avec un « euro-striptease », la question de savoir s’il y a un problème dans la communication audiovisuelle en ligne de l’UE est relancée. Les polémiques se multiplient et prennent suffisamment d’ampleur pour faire le tour de la question et faire la part des choses entre jugement de valeur et histoire de goût ou de mauvais goût…

Résumé : le contenu de certaines vidéos publiées par les institutions européennes franchit ouvertement certaines bornes. Ce n’est pas tant les vidéos décalées qui cherchent à communiquer avec de l’humour ou avec du sexe qui doivent être mises en cause. En revanche, les vidéos qui s’appuient sur des préjugés sexistes ou racistes sont beaucoup plus problématiques, car contraire à l’esprit et aux valeurs de l’UE, comme c’est le cas avec la vidéo du MEP flamand Ivo Belet.

L’humour, une recette efficace pour attirer l’attention des électeurs européens

Par exemple, en matière d’humour réussi, la vidéo « Get active: get out of your chair » illustre qu’il est possible de toucher un vaste public (143 000 vues) avec le sourire. De même, les vidéos réalisées lors de la campagne du Parlement européen pour inciter à participer au vote lors des élections européennes de 2009 ont été un succès :

La volonté de toucher un public éloigné et indifférent à l’UE pousse inévitablement à faire preuve de créativité, comme le montre cette vidéo « Sneezing Panda » (91K views) qui vise clairement à jouer sur l’affection portée à ces animaux pour communiquer sur les antibiotiques.

Aujourd’hui, la Commission européenne dispose d’un « track record » suffisamment important pour dire qu’il ne s’agit pas simplement d’accidents de parcours mais d’une tentative délibérée de créer de l’attention et du buzz en jouant avec le feu.

Le sexe, une recette éculée pour tenter de toucher un large public « européen »

La 1e vidéo à faire scandale a été publiée en juin 2007 lors du lancement de la chaîne Youtube de l’UE « EUTube » : « Film lovers will love this! ». Il s’agit d’une vidéo qui sous prétexte de faire la promotion du programme MEDIA qui subventionne le cinéma européen rassemble toutes les scènes érotiques de films financés par l’UE. Cette vidéo est également le plus grand succès d’audience en ligne avec 8,6 millions de vues et n’a jamais été retirée, malgré les nombreuses critiques.

La volonté de « jouer » avec le sexe et l’attrait de la nudité pour moderniser l’image de l’UE et faire passer des messages de manière plus « cool » a été à plusieurs reprises réutilisée par la Commission avec plus ou moins de succès d’audience à défaut de vraiment faire passer un message :

  • « Make love, not CO2! » en septembre 2008 incite à réduire sa consommation énergétique pour contrôler le changement climatique (147K views) ;
  • « Hot Summer Holiday » en juin 2011 vise à faire la promotion de carte santé européenne en montrant un comédien quasiment nu sur une plage et avec un « twist » final réussi (297K views) ;
  • « Take control of your personal data » en janvier 2012 qui incite à protéger ses données personnelles en ligne déshabille littéralement les comédiens sans parvenir pour autant à toucher un large public (9 000 vues seulement).

La recette d’une vidéo virale est complexe. Ces vidéos pour la plupart naturellement virales peuvent heurter la sensibilité d’un public rigoriste ou estimant qu’une institution publique ne peut pas se permettre certains écarts dans sa communication. On peut estimer que ces vidéos restent dans les limites.

Sexisme et racisme, les lignes jaunes des vidéos virales de l’UE

En revanche, là où la Commission dépasse clairement les bornes, c’est lorsque ses vidéos peuvent être vues comme sexistes ou racistes : deux critiques qui ne sont plus seulement une question de bon ou de mauvais goût mais qui attaquent les valeurs de la construction européenne. La Commission européenne se tire ainsi une balle dans le pied – tout en parvenant à atteindre de nouveaux publics le plus souvent choqués, ce qui est contre-productif – en donnant des arguments à ses détracteurs, qui n’en demandent pas tant, pour lancer de nouvelles polémiques :

  • 1er exemple avec la vidéo jugée « raciste » : « The more we are, the stronger we are », dont le titre déjà est un peu limite mais dont le contenu peut tout naturellement être mal accepté. Cette vidéo fut d’ailleurs rapidement retirée avec un message d’excuse du Directeur Général de la DG Elargissement ;
  • 2e exemple avec la vidéo considérée comme « sexiste » : « Science: it’s a girl thing! », qui dépeint de jeunes adolescentes de manière caricaturale, voire dégradante. Là encore, la vidéo a été retirée mais, de nouveau, une copie avait été réalisée et la vidéo circule encore en ligne.

Au total, les vidéos en ligne de l’UE qui jouent avec suffisamment de 2nd degré lorsqu’elles abordent l’humour ou le sexe peuvent être tolérées, quoiqu’elles susciteront toujours des réactions plus ou moins outrées parmi les publics captifs de l’UE qui regretteront ces simplifications et/ou ces exagérations pour parvenir à toucher un large public.

En revanche, les vidéos qui contredisent les valeurs de l’UE – quelque soit leur potentiel viral, souvent considérable – sont condamnables et donc retirées après un bad buzz. Bad buzz que la Commission européenne parvient de mieux en mieux à gérer, ce qui est une maigre consolation, puisqu’il s’agirait – c’est le moins que l’on puisse attendre – de ne pas en créer de son propre fait.

Palmarès des membres de la Commission européenne actifs sur Twitter en 2013

Que de chemin parcouru depuis le 1er classement en 2010 des membres de la Commission européenne avec seulement 2 Commissaires actifs. Début 2013, ce sont maintenant 20 Commissaires, dont le président qui sont actifs sur Twitter…

Progression impressionnante de l’activité de la Commission sur Twitter

En quelques années, Twitter s’est imposé comme le média social de l’eurosphère.

La progression s’est révélée régulière avec 6 Commissaires en janvier 2011 et 12 Commissaires en janvier 2012. Début 2013, pas moins de 20 Commissaires, dont le président Barroso, soit près de 75% du collège, sont actifs sur Twitter. D’une année sur l’autre, il s’agit à chaque fois d’un doublement de la présence.

Rien que sur l’année 2012, plusieurs mesures de l’activité globale de la Commission européenne permettent de mesurer la progression :

  • 70 435 Followers et 5 600 Tweets en janvier 2012 ;
  • plus de 100 00 Followers et plus de 8 000 Tweets en milieu d’année 2012 ;
  • 209 524 Followers et 18 630 Tweets en janvier 2013.

palmares_Twitter_Commission_2013Classement des Commissaires européens sur Twitter

Avec des niveaux d’engagement des Commissaires très inégaux – notamment s’agissant de l’intervention directe d’un membre de la Commission, encore rare face aux comptes gérés par les équipes, la communication s’est néanmoins professionnalisée, ce qu’indique notamment les 13 « verified accounts ».

Le podium des comptes les plus engagés répond à plusieurs logiques tenant à la fois du portefeuille (Neelie Kroes en charge de la Société numérique est en top du classement) ou de la fonction (José Manuel Barroso, président de la Commission est également bien placé).

Voici la liste des 20 Commissaires européens effectivement actifs sur Twitter début 2013 :

  • Neelie Kroes (Vice-présidente, Société numérique) demeure la Commissaire la plus active (3 605 Tweets) et la plus suivie (58 729 Followers) ;
  • José Manuel Barroso (Président) s’est inscrit avec beaucoup de retard – seulement au cours de l’année 2012 – et est devenu l’un des plus suivi (23 996 Followers) et le plus ouvert avec 1 209 Followings, avec seulement 205 Tweets ;
  • Michel Barnier (Marché intérieur et Services) se positionne en 3e du palmarès avec 17 252 Followers ;
  • Viviane Reding (Vice-présidente, Justice, Droits fondamentaux et Citoyenneté + Communication) est quasi à égalité sur la 4e marche du podium avec 17 150 Followers ;
  • Connie Hedegaard (Action climatique) est 5e dans le classement avec 13 676 Followers, une prouesse au vue de son portefeuille plutôt limité ;
  • Janez Potočnik (Environnement) est 6e et le dernier Commissaire à disposer de plus de 10 000 Followers (10 945 Followers) ;
  • Kristalina Georgieva – ex @KGeorgievaEU (Coopération internationale, Aide humanitaire et Réaction aux crises) est 7e avec 8 555 Followers ;
  • Cecilia Malmström (Affaires intérieures) se positionne 8e alors qu’elle ne s’est inscrite qu’au cours de l’année 2012, une position due à sa communication personnelle très adaptée au réseau social ;
  • María Damanáki (Affaires maritimes et Pêche) est 9e et doublement présente – une exception – avec un compte officiel (5 471 Followers) et un compte personnel en grec (7 277 Followers) ;
  • Andris Piebalgs (Développement) est 10e  avec 7 833 Followers ;
  • Siim Kallas (Vice-président, Transports) est 11e avec 5 649 Followers ;
  • Štefan Füle (Élargissement et Politique européenne de voisinage) est 12e avec 5 519 Followers, alors qu’il est actif depuis seulement moins d’un an ;
  • László Andor (Emploi, Affaires sociales et Insertion) est 13e avec 5 478 Followers ;
  • Antonio Tajani (Vice-président, Industrie et Entreprises) est 14e avec 4 208 Followers acquis au cours de l’année écoulée ;
  • Androulla Vassiliou (Éducation, Culture, Multilinguisme et Jeunesse) est 15e avec 3 461 Followers acquis là encore au cours de l’année écoulée ;
  • Maroš Šefčovič (Vice-président, Relations inter-institutionnelles et Administration) qui a début au cours de l’année 2011 est 16e avec 2 448 Followers, une belle prouesse au vue des enjeux « internes » liés à son portefeuille ;
  • Algirdas Semeta (Fiscalité, Union douanière, Audit et Lutte anti-fraude) est 17e avec 1 672 Followers ;
  • Günther Oettinger (Énergie) est 18e avec 1 569 Followers en ayant débuté en 2012 ;
  • Joaquín Almunia (Vice-président, Concurrence) est 19e et le dernier Commissaire vraiment actif avec seulement 532 Followers ;
  • Johannes Hahn (Politique régionale) est virtuellement 20e avec un compte qui semble officiel mais qui est actuellement protégé.

Sinon, voilà la liste des 7 Commissaires européens encore récalcitrants :

  • Catherine Ashton (Première Vice-Présidente, Haut représentant pour les Affaires étrangères) : son absence pour le moins surprenante est « compensée » par le compte officiel du Service européen pour l’action extérieure (21 548 Followers et 5 100 Tweets) ;
  • Olli Rehn (Affaires économiques et monétaires) ;
  • Karel De Gucht (Commerce) ;
  • Tonio Borg (Santé et Politique des consommateurs) ;
  • Máire Geoghegan-Quinn (Recherche, Innovation et Science) ;
  • Janusz Lewandowski (Budget et Programmation financière) ;
  • Dacian Cioloş (Agriculture et Développement rural) ;

Ainsi, en quelques années, Twitter s’est imposé comme un canal de communication majoritaire au sein du collège de la Commission européenne.

Y a-t-il un effet « prix Nobel » pour l’UE dans le web social ?

Alors que les « présidents » de l’UE (Conseil, Commission et Parlement) ont reçu lundi le prix Nobel de la paix à Oslo qui a été accordé début octobre à l’UE, assiste-t-on à un effet particulier dans les médias sociaux à l’occasion de cet événement planétaire ?

Globalement : forte présence lors de l’annonce du prix, faible retombée lors de la cérémonie de remise du prix

Avec un pic spectaculaire le jour de l’annonce qui culmine avec plus de 1 200 mentions (requête sur les mots clés « EU Nobel peace prize »), dont plus de 1 000 Tweets, le volume est décevant le jour de la remise du prix à Oslo, lundi dernier avec seulement 262 mentions.

NB : une forte discussion sur des forums américains anime le web social à quelques jours de la cérémonie officielle.

Focus sur Twitter

Avec au total 2 071 mentions soit une estimation de 5,3 millions d’impressions, Twitter est le média social largement le plus actif.

Le tweet le plus important porte sur le texte des discours de Barroso et Van Rompuy avec 165,595 impressions et 83 mentions.

Les autres tweets « populaires » sont largement plus critiques :

  • « Not so noble, or peaceful: EU Nobel Peace Prize disappointment » (34 Retweets)
  • « In Giving Prize to EU, Nobel Peace Prize Committee Ignores the Real Heroes of Peace and Freedom » (22 Retweets)
  • « Brilliant piece on rise of Greek Nazism. Yet another reason why awarding EU Nobel Peace Prize was a black joke » (16 Retweets)
  • EU Nobel Peace Prize ‘like giving an Oscar to a box office flop (13 Retweets)

Néanmoins, les principaux hashtags sont davantage issus de comptes célébrant le prix Nobel de la paix pour l’UE avec « #eu » (263 mentions) et « #eunobel » (130 mentions), ce dernier ayant été créé par les institutions européennes.

Focus sur Youtube

Les vidéos les plus importantes – dépassant les 10 000 vues – sont toutes critiques quant à la remise du prix Nobel de la paix à l’UE ; la source « Russia Today » se montrant particulièrement active.

Au total, l’effet « Prix Nobel » pour l’UE est assez limité si l’on compare les volumes correspondant à l’annonce avec les retombées liées à la remise du prix. Tandis que les conversations sur Twitter sont relativement équilibrées, Youtube est largement plus défavorable, sans présence significative de l’UE.

Quelles sont les recommandations des abstentionnistes pour la campagne de communication sur les prochaines élections européennes ?

En préparation des prochaines élections européennes en 2014, la DG Communication du Parlement européen met en place un « desk research » consacré à l’abstention et aux comportements électoraux de juin 2009 en vue d’une « stratégie de marketing social » pour les prochaines élections en mai 2014. Puisque la communication sur l’élection est un élément essentiel pour améliorer la participation électorale, quelles sont, en matière de communication, les recommandations des abstentionnistes ?

Etape 1 : identifier les profils des abstentionnistes

Avec une première étude : « Eurobaromètre Spécial : Enquête post-électorale sur les élections européennes de 2009 », le « desk research » établit que les abstentionnistes ne sont pas un groupe homogène.

Selon le moment, crucial, auquel ils ont pris leur décision de ne pas aller voter, les abstentionnistes se distinguent et les répartissent selon 4 catégories :

  • les abstentionnistes « impulsifs » (26%) : groupe le plus féminin, légèrement plus jeune, mais également plus éduqué et le plus actif. Enfin, ce sont ceux qui utilisent le plus fréquemment Internet : c’est le cas des deux-tiers d’entre eux, dont notamment 44% qui le font pratiquement tous les jours.
  • les abstentionnistes « réfléchis » (26%) : groupe le plus âgé et qui utilise Internet le moins fréquemment.
  • les abstentionnistes « inconditionnels » (18%) : groupe le plus masculin, mais surtout, moins éduqué (plus d’ouvriers et de chômeurs) et où les jeunes sont le plus représentés
  • les abstentionnistes « indéterminés » (30%) : groupe qui se distingue le moins de la moyenne des abstentionnistes hormis par la proportion importante de personnes déclarant avoir voté aux dernières élections nationales (73%, pour 57% de l’ensemble des abstentionnistes).

Conclusion, parmi les 4 groupes d’abstentionnistes, les impulsifs sont sans doute les plus susceptibles de se déplacer lors du scrutin de 2014. Ce groupe représente environ 15% de l’électorat européen.

Etape 2 : identifier les leviers pour inciter à voter

Avec une deuxième étude : « Eurobaromètre Qualitatif : Groupes d’entretien avec des abstentionnistes « impulsifs » et « indéterminés » sur les blocages et les incitations au vote », le « desk research » vise à renouer les liens avec ces abstentionnistes « mobilisables » et à dégager des pistes afin d’assurer une communication efficace (impact maximum du message délivré auprès des cibles).

Principaux enseignements des groupes d’entretien :

  • Principales sources d’information concernant le Parlement européen : médias classiques (journaux et télévision) et internet ;
  • Domaines clés augmentant résolument la probabilité d’aller voter : économie, santé et emploi ;
  • Connaissance sur les candidats et information sur les enjeux du vote : facteurs déterminant la décision d’aller voter ;
  • Demande d’informations et d’histoires positives sur l’UE, afin d’équilibrer le traitement négatif des médias ;

Suggestions quant à la meilleure manière de présenter les informations : diffusion régulière d’émissions de télévision sur le thème de l’Europe, émission de TV hebdo :  » la semaine au Parlement », rubrique du journal télévisé chaque soir, débats télévisés au cours de la campagne électorale et reportages en direct du PE.

Avis mitigés sur les campagnes de sensibilisation : très chères et trop ponctuelles, courriels directs et brochures à bannir, démarchage (porte à porte et téléphone) également très mal vu, textos tout aussi mal perçus.

Avis partagés quant à l’opportunité de faire appel aux médias sociaux : les plus jeunes pensent que le PE a sa pleine place sur les réseaux sociaux et d’autres estiment qu’il n’était pas convenable que le PE se présente en utilisant les médias sociaux.

Conclusion, il faut souligner les bénéfices associés au vote aux élections européennes :

  • mettre l’accent sur la valeur ajoutée de l’Europe en soulignant l’impact direct qu’exerce la législation sur la vie quotidienne de chacun ;
  • passer d’un sentiment abstrait et diffus des conséquences du vote européen à une perception plus concrète et ciblée des effets de celui-ci.

Au total, puisque les abstentionnistes les plus susceptibles d’aller voter semblent plutôt jeunes, éduqués, actifs et connectés, il est probable que les médias sociaux – qui ont progressé de manière exponentielle depuis 2009 et sont devenus le média privilégié de la jeunesse européenne – vont jouer un rôle majeur dans les prochaines élections européennes de 2014.

Une troisième étude Eurobaromètre permettra de récolter des informations sur les réseaux sociaux.

L’objet sera de prendre le pouls du débat sur un média qui accroît son importance d’années en années et qui est privilégié par les jeunes européens pour disséminer et obtenir de l’information autour de ce qui est dit sur la « toile » au sujet du Parlement européen, de son rôle, de son action et de sa capacité à avoir un impact positif sur la vie des Européens.

L’objectif de ce troisième volet sera dans un deuxième temps d’influencer via ces réseaux les internautes pour les inciter à aller voter en 2014.

Ainsi, les deux études Eurobaromètres du « desk research » au Parlement européen fournissent de précieuses recommandations pour la future campagne d’incitation à aller voter.

Communication politique européenne : quel est l’impact théorique du web sur les partis politiques européens ?

Les médias sociaux et la participation en ligne offrent de nouvelles opportunités mais représentent également des défis pour les partis politiques européens. Quel est l’impact théorique du web sur les partis politiques européens dans la perspective des élections européennes de 2014 ?

Vers un nouveau idéal-type de « cyber » partis politiques européens

Dans une étude sur les partis politiques européens : « All Tomorrow’s Parties: The Changing Face of European Party Politics », Florian Hartleb estime que les « partis de demain » seront des partis « avec plus de participation et moins d’adhésion ».

Au-delà des évolutions idéologiques ou sociologiques correspondant au déclin des partis politiques traditionnels « mainstream » et à l’émergence de nouveaux partis « de niche » (les verts, les partis populistes, le parti pirate…), les évolutions liées au web, qui touchent tous les partis politiques européens, sont particulièrement importantes.

Entre les partis de masse et les partis de niche, un nouvel idéal-type de « cyber » parti politique ou de « parti de réseau » émerge en fondant son mythe de légitimation non plus sur l’adhésion de militants et l’appropriation d’un territoire programmatique mais sur l’action en ligne et le potentiel d’accès à tous les citoyens.

Dans l’organisation et la participation des citoyens aux processus de décision politique, le modèle du « cyber » parti influence de plus en plus la vie politique. Pourquoi ?

Rôle des médias sociaux : De nos jours, le web social transforme non seulement la communication dans nos vies privées, mais également pour les organisations politiques. Le « cyber » parti offre une palette de choix beaucoup plus large aux citoyens. Les électeurs peuvent désormais interagir de manière nouvelle, à la fois pour promouvoir et pour critiquer les idées des partis politiques.

Communication politique multi-canal : Les partis politiques ont beaucoup plus des moyens de toucher les électeurs, et les nouvelles plateformes sociales (comme Twitter) permettent une communication plus souple et plus diversifiée. L’utilisation du web social soulève également des risques en rendant plus difficile pour un parti d’avoir un agenda constant.

Cycle de l’information en continue : Le flot constant de l’information rend plus difficile aux partis politiques d’établir une présence dans une compétition avec des milliers de sources pour capter une attention limitée des électeurs. Avec l’info en continue, il y a aussi le risque que même de petites erreurs qui auraient pu passer inaperçues auparavant puissent maintenant se retrouver dans les campagnes négatives des rivaux politiques.

Baisse du coût de la mobilisation : Les cyber partis peuvent faire campagne grâce à des méthodes et outils moins coûteux avec les technologies modernes.

Des éléments optimistes (concernant les possibilités de militantisme « virtuel ») et pessimistes (concernant les adhésions « réelles » et la stabilité des électorats)

Les conséquences du modèle de « cyber » parti politique sont ambivalentes :

  • Les « cyber-optimistes » décrivent le potentiel démocratique d’internet et mettent l’accent sur l’amélioration de l’accès par internet ;
  • Les « cyber-pessimistes » soulignent les menaces potentielles pour la démocratie en termes de représentation institutionnelle traditionnelle.

Cette nouvelle forme de participation politique soulève des questions quant à la viabilité des partis politiques tels qu’ils existent aujourd’hui. Cela pourrait avoir des conséquences dramatiques pour les partis politiques « mainstream » s’ils ne parviennent pas à s’adapter au web.

Quid de la future campagne des élections européennes ?

De grands espoirs sont placés sur le web 2.0. Cependant, il n’y aura pas d’effets miracles. Néanmoins, Facebook et Twitter et quelques autres médias sociaux peuvent contribuer à l’activation et à la mobilisation des membres et des non-membres (déjà politisés).

Le type d’adhésion classique à un parti politique perd de son importance. Les électeurs voteront de plus en plus pour des mouvements absents de la vie politique partisane. Mais, les partis politiques traditionnels ne sont pas pour autant en danger.

Avec moins de pénétration dans la société, la question est de savoir si les partis politiques sont encore légitimes. Pour le rester, le principal défi des partis de demain sera de mettre en œuvre de nouvelles formes de participation réalistes.

Les partis doivent adapter leur communication, tout en maintenant la stabilité, la crédibilité et la fidélité de leur électorat. Dans le cas contraire, les partis politiques seront des véhicules tout simplement interchangeables d’émotions imprévisibles produites par des médias (sociaux) et du marketing, et perdront leurs racines profondes et leurs fonctions dans la société qui est la transformation des intérêts de la population (input) dans le processus de prise de décisions publiques (output).

Au total, les élections européennes de 2014 étaient clés pour la légitimité de l’UE. Internet le sera également pour les partis politiques européens.