Comment communiquer l’Europe, selon la nouvelle vision de la Commission européenne ?

A l’occasion du Conseil européen à Sibiu, en Roumanie, aujourd’hui, journée de l’Europe, les dirigeants de l’UE sont invités à décider de l’avenir de l’UE, notamment de sa communication. Une occasion pour la DG COMM de poser une nouvelle vision d’une communication de l’UE au service des citoyens et de la démocratie…

La communication européenne est une responsabilité commune

Les chefs d’État et de gouvernement sont invités à reconnaître que la communication à propos de l’Union européenne est une responsabilité commune des États membres de l’UE, des gouvernements à tous les niveaux et des institutions de l’UE afin de « communiquer davantage avec des messages communs, sous la marque de l’Union européenne, en expliquant ce que les décisions et les politiques signifient pour les citoyens et quels en sont les résultats concrets (…) pour souligner l’unité européenne ».

Cette conviction d’une responsabilité commune, lointain héritage de Margot Wallström abandonné par Viviane Reding, est une excellente nouvelle pour tous ceux qui considèrent que seule la Commission européenne ne peut pas communiquer au nom de l’UE à tous les Européens, sans le concours des autres institutions européennes, mais également et surtout des États-membres. Après quelques années de soul searching, nous sommes en quelque sorte à la recherche du temps perdu, mieux vaut tard que jamais !

La communication européenne doit augmenter l’engagement avec les citoyens sur les politiques et les problèmes de l’Union européenne

Deuxième conviction de la DG COMM, les institutions de l’UE et les États-membres devraient renforcer leur soutien à un dialogue permanent avec les citoyens sur l’UE, en utilisant dialogues citoyens, réunions publiques, consultations ou conventions, ainsi que les technologies numériques et audiovisuelles afin d’assurer un processus et des canaux permettant de faire remonter les résultats.

Là encore, vaste est le chemin parcouru au cours des dernières années débutant par des expérimentations limitées de démocratie participative au déploiement à grande échelle tant de la consultation citoyenne européenne que des dialogues citoyens. La seule communication pertinente aujourd’hui consiste à donner des capacités aux publics de pouvoir s’exprimer d’une part, ce que l’UE a bien compris ; mais également d’autre part, à s’assurer que les conclusions de cet engagement des publics soient bien prises en compte, ce qui reste encore à davantage démontrer.

La communication européenne doit partir de nos valeurs communes, puis se concentrer sur les résultats concrets des politiques de l’UE pour les personnes sur leur lieu de résidence

Conséquence logique, les institutions de l’UE doivent veiller à travailler plus étroitement ensemble à l’avenir dans le cadre de campagnes de communication basées sur des valeurs européennes communes, pleinement alignées sur les priorités stratégiques du prochain cycle politique, racontant ainsi la différence que l’Union européenne fait dans la vie quotidienne des citoyens en vue de s’adresser à tous les publics, dans leur propre langue, de manière attrayante, engageante et évocatrice.

Sur ce 3e point, la DG COMM tente de prendre la main pour imposer l’agenda politique de la Commission européenne à l’ensemble de la communication des institutions de l’UE, ce qui ne sera pas sans difficulté compte-tenu des différences propres à chaque institution européenne. Une approche plus collective, permettant d’inclure les sensibilités et les priorités de chacun, semble la voie de compromis nécessaire pour passer de la situation actuelle d’un partage de priorités inter-institutionnelles de communication à un véritable partage d’actions inter-institutionnelles communes.

La communication européenne étant basée sur des faits doit lutter contre la désinformation

Au-delà du contexte électoral, l’enjeu des fake news conduit, selon la DG COMM à renforcer les services de vérification des faits indépendants aux niveaux national et européen, à promouvoir l’initiation aux médias et le développement des compétences en intelligence artificielle, à intensifier le travail avec les réseaux sociaux et les plateformes en ligne au niveau de l’UE pour promouvoir les bonnes pratiques, tout en défendant la liberté des médias et le pluralisme et à redoubler d’efforts pour mettre en commun les ressources européennes et nationales afin de protéger le droit des citoyens à une information factuelle, objective et fiable sur l’Union européenne.

Il ne faut que souhaiter que la prise de conscience et l’impératif d’agir, porté par la Commission européenne, soit partagé par le Conseil européen tant les enjeux sont importants pour l’information et la communication européennes, dès maintenant et dans les prochaines années. Il s’agit clairement de l’un des défis les plus importants relevant de la « techno-structure », du contexte médiologique dans lequel s’inscrit la communication de l’UE.

Promouvoir l’enseignement et l’apprentissage de l’Union européenne à tous les niveaux afin de renforcer la connaissance des apprenants sur l’UE, ses valeurs, son fonctionnement et son domaine d’activité

Dernier point posé, l’UE devrait établir des partenariats avec des établissements d’enseignement aux niveaux national et régional afin de garantir que l’éducation civique européenne devienne une part de l’apprentissage.

Quoique cette last but not least recommandation puisse être prise pour une sorte de wishfull thinking puisque l’UE n’a aucune compétence en matière d’éducation, seule de la responsabilité des Etats-membres ; il n’en demeure pas moins absolument vrai que c’est la priorité, le chantier indispensable qui est l’unique possibilité de former toute une génération à la réalité de la construction européenne, qu’à l’âge adulte chacun aura le loisir de soutenir ou de rejeter en connaissance de cause, sans méconnaissance ou influence.

Le prochain agenda stratégique de l’UE est l’occasion de faire front commun pour faire face aux épreuves de notre époque. Le monde n’attendra pas l’Europe. La communication non plus.

Game of Thrones et élections européennes : à quelle famille politique appartenez-vous ?

Constatant que la politique européenne ressemble moins aux idéaux de la démocratie athénienne qu’à Game of Thrones, le think tank ECFR, dans une étude sur ce que veulent vraiment les Européens, analyse le système politique européen comme un champ de bataille imprévisible d’alliances constamment changeantes en lutte brutale d’influence… Bienvenue dans la course européenne au trône de fer…

La « Maison des Stark » : les croyants du système

C’est la classe complaisante qui croit que le système fonctionne toujours aux niveaux national et européen. Pour eux, la politique continue de fonctionner selon les règles habituelles. En votant, ils peuvent faire entendre leur voix et influencer leur avenir. Dans Game of Thrones, la maison des Stark continue de respecter les normes et les coutumes traditionnelles, même si la maison des Lannister et d’autres familles renversent ces règles.

Estimant que les systèmes européen et national fonctionnent à la fois, ils représentent 24% de l’électorat de l’UE :

  • Âge moyen de près de 50 ans car beaucoup de jeunes ne prévoient pas voter ;
  • Majoritairement masculin, mais assez représentatif des hommes et des femmes ;
  • Plus grande représentation en Allemagne, au Danemark et en Suède, mais aussi en Autriche, en Hongrie et en République tchèque ;
  • Confortablement à l’aise, généralement titulaire d’un diplôme d’études secondaires.

« Les moineaux » : les Gilets Jaunes

Ces personnes ont perdu espoir tant dans leurs systèmes politiques nationaux que dans l’UE, car les Sparrows pensent que tous les systèmes politiques sont brisés et rien de bon ne peut en résulter. La seule solution est donc la révolution – un soulèvement populaire visant à purifier la société et à recommencer. Telle est la vision du grand moineau dans Game of Thrones, dont le mouvement politique ascendant utilise la violence pour humilier les élites corrompues qui contrôlent la vie politique depuis des siècles.

Des révolutionnaires désespérés qui ont perdu confiance dans les systèmes politiques européen et national représentent 38% de l’électorat de l’UE :

  • Les plus mobilisés ont plus de 50 ans ;
  • Légèrement plus de femmes que d’hommes et nettement plus de femmes en France et en Italie ;
  • Le plus fort en France, en Grèce et en Italie ;
  • Ni de gauche ni de droite, des électeurs désengagés qui ont le même revenu moyen que ceux de la Maison des Stark.

Le peuple des « Daeneryses » : la gauche pro-européenne

Comme Daenerys Targaryen, mère de dragons, qui libère des esclaves, ces peuples souhaitent libérer les Européens de leurs entraves dans des États-nations restrictifs dotés d’une vision internationale positive. Ces personnes cherchent le salut dans un projet transnational. Ils pensent que leurs systèmes nationaux sont brisés et se tournent vers un système politique bruxellois dans lequel ils croient encore pour soigner leur pays de la maladie.

Des Européens convaincus qui estiment que leur système national est en panne, constituant 24% de l’électorat de l’UE :

  • Le groupe le plus jeune avec une moyenne d’âge de 41 ans ;
  • Groupe assez équilibré, avec une plus grande représentation féminine en Autriche, en République tchèque, aux Pays-Bas et en Suède ;
  • Les plus fortes concentrations en Hongrie, Pologne, Roumanie, Slovaquie et Espagne ;
  • Un revenu moyen plus faible que tous les groupes, en grande partie des génération Y et X.

« Le peuple libre » : les eurosceptiques nationalistes

Ces personnes pensent que l’UE est une illusion dangereuse qui sape la souveraineté nationale. Ils veulent retourner dans les États membres autonomes. En ce sens, ils font écho au Free Folk farouchement indépendant, qui valorise l’autonomie par rapport aux tentatives idéalistes d’unir l’humanité ou à la construction d’une alliance grandiose d’autres dirigeants politiques.

Des eurosceptiques nationalistes qui estiment que le système politique de leur pays fonctionne mais que l’Europe ne fonctionne pas, ce qui représente 14% de l’électorat européen :

Le groupe le plus âgé en général, particulièrement les électeurs engagés ;

  • Assez équilibré entre hommes et femmes, mais les hommes prédominent au Danemark et en Autriche tandis qu’en Italie et en Hongrie, le groupe a une forte représentation féminine ;
  • Fortes concentrations en Autriche, au Danemark et en Italie ;
  • Les gens libres sont mieux lotis que les Daeneryses. Ils sont principalement des baby-boomers et légèrement à droite d’eux sur le plan idéologique.

Dans le tumulte de Games of Thrones, comme lors des élections européennes, ce n’est pas la devise de la famille Frey « We Stand Together » qui prédomine mais bien davantage des groupes qui se positionnent en fonction de leur soutien aux systèmes national et européen face aux principaux défis auxquels l’Europe est confrontée aujourd’hui.

Comment remédier aux symptômes des populismes en Europe, selon Ivan Krastev ?

Plusieurs crises ayant fragilisé le projet européen et favorisé l’émergence des populismes en Europe, quel sera le futur de l’Europe et comment redonner corps à l’ensemble européen. Ivan Krastev, auteur de « After Europe » (en français Le Destin de l’Europe) est intervenu devant le groupe de réflexion organisé par le Centre d’analyse, de prévision et de stratégie du ministère de l’Europe et des affaires étrangères et le Centre de recherches internationales de Sciences Po…

Les crises européennes défient les principes fondamentaux de l’UE

Avec la crise de l’euro à partir de 2010, l’UE n’est plus ni un espace de prospérité avec la perspective automatique d’amélioration des conditions économiques par rapport aux précédentes générations pour tous les Européens, ni une « machine à converger », principal argument qui justifia l’adhésion à l’UE en particulier pour les États-membres sud- et est-européens.

Avec la crise ukrainienne de 2014, plusieurs principes de base structurant la politique étrangère européenne ont été remis en cause :

  • la puissance militaire confirme son importance au sein même de l’Europe ;
  • le soft power européen révèle sa vulnérabilité face à l’explosion du conflit ukrainien ;
  • l’interdépendance économique des États ne réduit pas les risques de guerre.

Le Brexit en 2016 frappe psychologiquement la construction européenne qui s’est construite autour de l’idée d’une « union sans cesse plus étroite ». La question n’est plus de savoir qui va rentrer, mais qui pourrait sortir de l’UE.

La crise la plus importante que traverse encore aujourd’hui l’Union européenne est la crise des migrants. Une crise existentielle pour l’UE éminemment symbolique et subjective non pas tant en raison de la réalité des flux migratoires mais de la prise de conscience qu’il est plus facile de changer de pays que d’essayer de changer de gouvernement.

Alors que l’immigration apparaît comme une nouvelle révolution, l’Europe commence à être contre-révolutionnaire : l’Europe n’est plus une idée, donc ouverte ; mais dans les mentalités, l’Europe est considérée comme un territoire, donc limité. Du coup, la question des frontières de l’Europe – et de leur protection – fait son apparition de manière très concrète dans le débat.

Le futur de l’Union européenne et les solutions pour contrer les populismes

Aujourd’hui, la question doit être la stabilité sécuritaire et géopolitique de l’Europe. Les Européens dans leur ensemble sont très sensibles à leur place au sein de l’Europe et du monde. Nous savons que nous ne sommes pas suffisamment influents pour agir seuls. La France en tant que seule grande puissance crédible sur le plan militaire doit mener le dialogue sur la sécurité et la défense à l’échelle européenne.

La transmission et l’apprentissage de l’histoire de l’Europe peut se présenter comme un éventuel antidote contre les populismes contemporains à condition que ce soient les dirigeants politiques qui la porte et la communique sachant qu’avec les réseaux sociaux, la communication s’est accrue entre pairs mais la communication intergénérationnelle s’est affaiblie.

La première réponse pour contrer les populismes vise à identifier quel type d’idées et d’inquiétudes doivent être intégrées comme des revendications et inquiétudes consensuelles. Il faut d’abord prendre en compte les sujets qui comptent vraiment pour les populations et qui peuvent les effrayer.

Ensuite, il est important de faire la distinction entre les partis antisystèmes et les idées et les hommes et femmes politiques qui incarnent un certain type de public européen et sont ainsi des interlocuteurs crédibles : Sebastian Kurtz joue la carte de l’Europe à l’inverse de Viktor Orban menant une politique destructrice pour l’UE.

Enfin, les électeurs souhaitent le changement mais dans le même temps ils cherchent le statut quo. Pour contrer les populismes, il convient de trouver un juste milieu. L’UE ne peut pas juste défendre la « libre concurrence non faussée » mais doit se montrer prête à défendre les citoyens européens contre les abus de grandes entreprises multinationales.

Au total, les solutions pour contrer les populismes seraient plutôt gramscienne : « allier le pessimisme de l’intelligence à l’optimisme de la volonté ».

Elections européennes : comment améliorer le processus des Spitzenkandidaten ?

Promesse d’instiller un ferment démocratique plus fort au cœur du système de l’UE, l’innovation des Spitzenkandidaten n’est pas sans controverse sur son impact sur l’équilibre institutionnel de l’UE et la politisation de la Commission européenne. Dans la perspective des élections européennes de 2019, le débat Spitzenkandidaten est relancé.

L’expérience Spitzenkandidaten a-t-elle fonctionné en 2014 ?

L’approche Spitzenkandidaten ne doit pas être confondue avec une élection présidentielle directe, au moyen de laquelle les citoyens éliraient directement le chef du pouvoir exécutif de l’UE, mais elle est comparable aux pratiques de démocratie parlementaire qui existent dans de nombreux États membres où le chef de la coalition élue est nommé à la tête de l’exécutif.

Les Spitzenkandidaten ont renforcé la dimension européenne des éléctions, sans en surestimer l’impact sur les citoyens européens puisque les débats paneuropéens télévisés concentrés sur les trois à quatre semaines précédant les élections – du 9 avril au 20 mai 2014, neuf débats télévisés au total ont été organisés – n’ont suscité que peu d’intérêt pour les médias grand public.

Le processus Spitzenkandidaten n’est pas une solution miracle : s’il a conduit à une relation plus mature au sein du triangle institutionnel, il n’a pas été un antidote à la baisse constante du taux de participation. Il a finalement transformé la plateforme de campagne du Spitzenkandidat en programme politique de la Commission et son point de départ pour toutes les initiatives, au lieu de le soumettre aux compromis habituels fondés sur le plus petit dénominateur commun.

Certes, le contexte et le contenu de la campagne sont restés essentiellement nationaux en 2014, étant donné que les candidats à la députation du Parlement européen ont été sélectionnés au niveau national par les partis politiques et élus conformément aux différentes procédures nationales.

Mais dans le même temps, le processus Spitzenkandidaten a permis à la campagne parlementaire de gagner une dimension européenne plus forte. Chacun représentant une famille politique européenne, les candidats se sont largement concentrés sur l’agenda européen, tout en écoutant les sensibilités nationales, régionales et locales, renforçant la résonnance des débats européens avec les réalités locales.

Le processus de Spitzenkandidaten à contribuer à replacer la position de la Commission vis-à-vis des deux autres colégislateurs de manière plus équidistante entre le Parlement européen et les capitales européennes ; concrétisé, entre autres, par l’adoption de programmes de travail de la Commission européenne, signés par les trois institutions associées au processus législatif ou encore la nouvelle pratique selon laquelle les présidents des trois institutions font des déclarations communes sur les priorités législatives, sans préjudice des pouvoirs conférés aux colégislateurs par les traités.

L’expérience Spitzenkandidaten pourrait-t-elle mieux fonctionné en 2019 ?

Le rejet du système Spitzenkandidaten constituerait un pas en arrière vers un système de prise de décision plus opaque et moins inclusif au sein de l’UE. Cela ne correspondrait ni au développement progressif de l’UE au cours des dernières années, ni à la nécessité de renforcer encore son processus de légitimation dans les années à venir à condition que le multilinguisme, l’expérience de direction et la crédibilité des candidats fassent que le Conseil européen les considère comme « un de leurs pairs » – étant donné que le président de la Commission siège également au Conseil européen.

Les partis politiques européens devront jouer un rôle plus marqué dans la campagne électorale afin de garantir que les élections au Parlement européen portent sur des questions européennes. Des partis politiques plus forts, ayant des liens étroits avec les capitales, rendraient l’expérience des Spitzenkandidaten plus précieuse.

Des périodes de campagne plus longues permettraient un engagement politique accru dans les procédures de sélection des candidats la rédaction des manifestes électoraux. Le dynamisme démocratique du débat profiterait généralement aux familles politiques qui décident de leur Spitzenkandidaten à un stade précoce, permettant la tenue de primaires afin de rendre les problèmes européens plus clairs pour les citoyens.

La législation électorale devraient renforcer la visibilité des Spitzenkandidaten et garantir que les noms et logos des partis politiques européens et les noms des Spitzenkandidaten figurent sur les listes électorales et les bulletins de vote à travers l’UE, comme cela a déjà été le cas dans 9 États membres en 2014.

La capacité des Spitzenkandidaten à mener des campagnes marathon dans toute l’UE, afin d’apparaître dans les campagnes médiatiques et dans les meetings et manifestes des partis nationaux permettraient aux citoyens de mieux être en mesure de choisir leur plate-forme électorale européenne.

Le financement de la campagne des Spitzenkandidaten repose en partie sur un soutien financier aux partis politiques européens enregistrés, répondant à des critères clairs de représentativité dans les États-membres et de respect des valeurs de l’UE. Les voies de financement pourraient être complétées.

Les plates-formes des partis politiques européens, fédération de partis nationaux, sont souvent très variées, reflétant la diversité des points de vue dans l’Union. Une plus grande visibilité et un plus grand engagement autour de leurs valeurs et de leurs points de vue sur l’avenir de l’Europe bénéficieraient grandement à la démocratie européenne.

Pour passer d’une innovation à un modèle, le succès des Spitzenkandidaten est d’abord et avant tout la responsabilité des partis politiques européens afin de faire en sorte que les élections européennes portent sur des questions européennes. Plus de soixante ans après le début du projet et à un moment historique pour relancer l’Union, c’est ce que méritent à la fois l’UE et les citoyens européens.

Une anthropologie politique fondamentalement pro-européenne

Lors d’une conférence « L’Europe, juste une question de communication ? » à la Maison de l’Europe à Paris le 20 mars dernier, Dominique Wolton est intervenu sur les enjeux et défis de la communication européenne aujourd’hui et demain…

Des sentiments de la communication politique européenne

Premier sentiment faisant défaut : la fierté. On ne valorise pas l’acquis considérable des soixante années de construction européenne : la réconciliation des peuples, l’élargissement à l’Est, l’ouverture d’esprit et l’ampleur des réalisations ne sont pas mobilisées pour faire face au réveil des identités nationales et à la montée du nationalisme.

Deuxième sentiment à développer : la curiosité. On n’est pas suffisamment conscient de nos différences et désireux de mieux les connaître. Il faut davantage se comparer, montrer nos complémentarités, notamment linguistiques et religieuses. Sans le multilinguisme et l’histoire, on ne peut pas construire l’avenir sans enracinement.

Troisième sentiment : la générosité. La quintessence du projet européen, la solidarité, donc la redistribution entre les États-membres riches et pauvres dans l’Union européenne est mise sous le boisseau, tandis que le Brexit n’offre pas une vision formidable de l’Europe sous cet angle.

Quatrième sentiment : la fraternité. Entre le sentiment de déclassement et d’abandon des milieux défavorisés et l’arrogance ou le mépris des élites, tant que la division, les fractures frapperont les peuples, la construction européenne ne pourra pas fédérer.

En somme, avec l’Union européenne, on a l’hymne à la joie, mais c’est tout. Il n’y a jamais de joie européenne.

Une attente d’Europe qui demeure

Malgré tous les ratés, le manque de sentiments positifs européens, les peuples restent européens, en raison d’une maturité, d’une plasticité encore – pour combien de temps – favorable à l’Europe.

Malgré tous ses mensonges, l’europhobie ne progresse finalement pas tant que cela ; même s’il n’y pas un projet politique européen assez clair pourtant évident avec l’urgence climatique ; même si le budget européen n’est pas très joyeux ; même si les préjugés et les anathèmes entre classes se renforcent et même s’il manque beaucoup d’enthousiasme.

Le projet européen d’émancipation des classes moyennes, qui défendent un patrimoine commun unique au monde, demeure plus que jamais d’actualité. La flamme européenne n’est pas prête de s’éteindre.