Archives de catégorie : Opinion publique européenne

Billets sur l’opinion publique européenne

Communiquer l’Europe sur la scène internationale : renforcer l’autonomie stratégique et agir dans le monde

L’Union européenne affirme son engagement envers une Europe plus forte dans le monde, cherchant à construire une autonomie stratégique tout en consolidant les liens entre politiques internes et externes. Quelles pourraient être les actions de communication clés nécessaires pour sensibiliser et mobiliser les parties prenantes à Bruxelles, dans les États membres, auprès des leaders d’opinion, des journalistes et du grand public ?

Une politique étrangère active : élargissements et partenariats renforcés

Élargissements et Partenariats : Des forums diplomatiques et des débats publics à Bruxelles ou dans les capitales européennes pourraient expliquer les enjeux des élargissements aux Balkans occidentaux, en Ukraine et en Moldavie. Des campagnes médiatiques ciblées pourraient mettre en évidence l’importance de la stratégie globale sur l’Afrique et du nouveau Partenariat oriental, établissant l’UE comme un partenaire proactif et responsable.

Global Gateway : Des événements promotionnels et des ateliers sur le Global Gateway, le programme de soutien aux pays-tiers à l’UE dans le monde, pourraient illustrer les avantages d’une souveraineté économique et financière renforcée. Des conférences de presse pourraient également expliquer la position de l’UE concernant les sanctions extraterritoriales, en particulier les paquets contre la Russie liés à l’agression envers l’Ukraine, soulignant ainsi l’engagement de l’UE en faveur de la paix et de la stabilité.

Soutien financier et action de soutien à la production de munitions (ASAP) : Des campagnes de sensibilisation sur le soutien financier et le dispositif législatif européen ASAP pourraient être menées dans les États membres, soulignant l’engagement de l’UE envers la sécurité collective et la capacité de défense autonome, en particulier dans un contexte d’interrogation des journalistes sur le soutien à l’Ukraine.

Sécurité et défense : renforcer la vision globale et la prévention

Approche globale de la sécurité : Des webinaires interactifs et des séances d’information à Bruxelles pourraient détailler les initiatives de l’UE, telles que les coopérations structurées permanentes, dite PESCO et le Fonds européen de la défense, soulignant la nécessité d’une approche globale pour garantir la sécurité collective.

DG Industrie de Défense et Espace : Des événements de porte-ouvertes et des présentations en ligne pourraient mettre en avant la création d’une DG Industrie de Défense et Espace dédiée, renforçant ainsi l’autonomie technologique et industrielle de l’UE.

Lutte contre le terrorisme transfrontalier et la criminalité organisée hybride : Des campagnes de sensibilisation à travers les médias pourraient mettre en évidence les actions de l’UE dans la lutte contre le terrorisme transfrontalier et la criminalité organisée hybride, montrant ainsi son engagement envers la sécurité intérieure et extérieure.

Frontières fortes et nouveau Départ : Le pacte sur la migration et l’asile

Migrations régulées et sécurisées : Des campagnes médiatiques pour expliquer les réformes du système d’asile et la nécessité de renforcer les frontières de l’UE. Des infographies et des brochures peuvent démystifier le nouveau pacte sur la migration et l’asile, soulignant les avantages d’un espace Schengen pleinement opérationnel.

Renforcement de Frontex et du système d’asile européen : Des conférences en ligne pour discuter des mesures concrètes visant à renforcer Frontex et à moderniser le système d’asile européen. Des sessions interactives avec des experts pour répondre aux questions du public sur les changements proposés.

Coopération avec les pays tiers : Des communications sur la coopération renforcée avec les pays tiers, mettant en avant la création de couloirs humanitaires et de visas. Des témoignages de succès peuvent illustrer les avantages mutuels de ces partenariats.

Sécurité interne et coopération policière

Une Europe plus sécurisée : Des campagnes de sensibilisation sur la prévention, la détection et la réponse aux menaces hybrides. Des vidéos éducatives et des simulations en ligne pour aider le public à comprendre les enjeux et les solutions.

Coopération Policière Renforcée avec Europol : Des communications sur l’amélioration de la coopération policière avec Europol, en mettant l’accent sur la lutte contre la criminalité organisée, le trafic de drogue, la traite des êtres humains et les abus sexuels sur les enfants. Des ateliers interactifs avec des forces de l’ordre pour expliquer comment le renforcement de la coopération améliorera la sécurité intérieure.

Commerce libre et équitable : intégrer le développement durable

Négociations et Accords Commerciaux : Des ateliers dans les États membres pourraient expliquer les négociations en cours avec l’Australie, la Nouvelle-Zélande et le Mercosur, mettant l’accent sur l’intégration du développement durable, du climat, de l’environnement et de la protection du travail. Des tables rondes avec des experts pourraient fournir des clarifications sur les avantages économiques et sociaux de ces accords.

Préserver le multilatéralisme

Actualiser et réformer l’OMC: Des séminaires à Bruxelles avec des experts en commerce international pourraient expliquer les efforts de l’UE pour actualiser et réformer l’OMC, soulignant l’engagement continu envers le multilatéralisme et la coopération internationale.

L’Union européenne, en renforçant son autonomie stratégique, est déterminée à jouer un rôle actif dans le monde. Des actions de communication ciblées, à travers une variété de formats et de plateformes, pourraient garantir une compréhension approfondie de ces politiques ambitieuses, suscitant ainsi le soutien et l’engagement des citoyens, des leaders d’opinion, des journalistes et du grand public.

Nuances dans les préférences médiatiques et comportements liés aux actualités : comment mieux informer les Européens sur l’Europe ?

La lecture des résultats de l’enquête Eurobaromètre Enquête médias et actualités 2023 sur les usages médias des Européens conduit à une série de recommandations…

Cibler les canaux médiatiques préférés comme la TV pour contrer l’évitement des actualités

Dans l’enquête, 71 % des répondants ont identifié la télévision comme l’une de leurs principales sources d’actualités au cours des sept derniers jours. Ce chiffre souligne l’importance de cibler la télévision dans les campagnes de communication européenne. Pour contrer l’évitement des actualités, privilégier ce canal pour captiver l’attention du public. Comparativement à 2022, la télévision reste le canal le plus couramment utilisé dans la plupart des États membres, soulignant sa constante prédominance.

Valoriser la confiance dans les médias traditionnels

Les campagnes devraient renforcer la confiance du public en mettant en avant la crédibilité des médias traditionnels, tels que les chaînes de télévision et de radio publiques. En 2023, 48 % des répondants sélectionnent ces chaînes comme leur source d’information la plus fiable, un chiffre qui varie considérablement d’un pays à l’autre. Cette confiance reste stable par rapport à 2022, soulignant la résilience de ces médias traditionnels.

Adapter les messages en fonction du niveau d’éducation du public

L’enquête révèle une corrélation entre le niveau d’éducation et la consommation d’actualités. Les messages des campagnes devraient ainsi être adaptés pour répondre aux attentes informationnelles des segments moins éduqués. La simplification des informations, sans compromettre la substance, pourrait être la clé pour atteindre ce public. En 2023, les résultats montrent que 74 % des répondants plus éduqués déclarent avoir récemment consulté quelque chose sur l’UE, comparé à 61 % des moins éduqués.

Adopter une approche différenciée sur les médias sociaux, selon les plateformes

Les médias sociaux jouent un rôle crucial dans la consommation d’actualités. Les campagnes devraient adopter des stratégies spécifiques pour chaque plateforme. Les contenus visuels et courts peuvent être privilégiés sur des plateformes comme Instagram (42 % des répondants utilisent cette plateforme), tandis que des discussions et des débats peuvent être encouragés sur Facebook (37 % des répondants l’utilisent).

Cette stratégie doit s’aligner sur la forte utilisation des médias sociaux par les jeunes, 59 % des 15-24 ans utilisant des plateformes comme Facebook et Instagram. Pour les mobiliser, les campagnes devraient créer des contenus engageants, émotionnels et interactifs. En comparaison avec 2022, l’utilisation de TikTok par les jeunes a augmenté, passant de 11 % à 55 %. Par ailleurs, les influenceurs sont particulièrement appréciés par les plus jeunes pour suivre les commentaires de l’actualité.

Angler l’actualité européenne autour des sujets d’actualités locales populaires

Les campagnes devraient se concentrer sur les sujets d’actualité les plus populaires, tels que les actualités locales pour trouver des moyens de parler d’Europe, l’un des sujets les mieux classés dans tous les États membres. Cette stratégie maximiserait la pertinence et l’engagement du public, répondant aux préférences des répondants, 50 % d’entre eux ayant consulté des actualités locales au cours des sept derniers jours.

Limiter les obstacles à l’accès à l’information

Pour surmonter les obstacles liés à l’évitement des actualités en ligne, les campagnes devraient promouvoir l’accessibilité, en mettant en avant des moyens directs tels que les sites web d’actualités. En 2023, 91 % des répondants déclarent accéder aux actualités en ligne, soulignant l’importance de faciliter cet accès.

Éduquer à la détection de la désinformation

Face à la confiance relativement basse dans les réseaux sociaux en tant que source d’information fiable, les campagnes doivent inclure des messages éducatifs sur la détection de la désinformation. Encourager une consommation critique des actualités en ligne est essentiel, notamment en soulignant que seulement 16 % font confiance aux personnes, groupes ou amis sur les médias sociaux pour des nouvelles véridiques.

Ces résultats offrent des perspectives claires pour les professionnels de la communication européenne, leur permettant de concevoir des campagnes plus efficaces et ciblées en tenant compte des préférences médiatiques et des comportements liés aux actualités des citoyens de l’UE, en vue des prochaines élections européennes.

Élargissement de l’UE : comment passer de la vision au « menu » à une approche « à la carte » ?

Dans le Guardian, “The EU’s ‘set menu’ membership model is failing. It’s time for an ‘à la carte’ approach”, Alberto Alemanno revient sur les conclusions du sommet des chefs de gouvernement à Grenade où une prise de conscience a émergé : une réforme interne radicale est devenue inévitable. Jusqu’à présent, les gouvernements ont résisté à toute réforme véritable des structures internes de l’UE, mais il devient de plus en plus évident que des ajustements significatifs sont nécessaires pour répondre aux défis actuels…

L’élargissement, une opportunité cruciale

L’UE se trouve dans une position vulnérable, constamment prise en otage par les agendas nationaux de ses États membres. Cette situation a mis en lumière plusieurs problèmes structurels. Tout d’abord, l’UE manque de pouvoirs dans des domaines clés, ce qui limite sa capacité à agir efficacement. De plus, elle semble insuffisamment responsable envers ses citoyens pour les responsabilités nouvellement acquises, ce qui a alimenté le mécontentement et le sentiment d’éloignement vis-à-vis de l’UE. En outre, des attaques internes, souvent alimentées par des intérêts nationaux, mettent en péril la cohésion et l’efficacité de l’Union.

Cependant, la prochaine expansion de l’UE vers l’est offre une opportunité cruciale. Elle permettrait à l’Union de devenir stratégiquement indépendante dans un nouvel ordre mondial menaçant, tout en assumant un rôle de leader dans la lutte contre l’urgence climatique. Les dirigeants de l’UE ont montré une volonté de repenser entièrement l’avenir de l’Union et son cadre de gouvernance sous-jacent.

D’un modèle d’adhésion « tout ou rien » à un modèle d’une Europe « à la carte »

Le « Groupe des 12 », une initiative franco-allemande composée d’experts, a joué un rôle essentiel en élaborant un ensemble de propositions audacieuses pour des réformes structurelles majeures.

Ces propositions envisagent quatre niveaux distincts d’adhésion, chacun offrant un degré différent d’intégration. Le modèle des « cercles concentriques » comprend un cercle intérieur, l’UE elle-même, l’adhésion associée (limitée au marché intérieur), et enfin, le niveau moins contraignant de la nouvelle Communauté politique européenne.

Cette approche à plusieurs vitesses permettrait à certains États membres de s’intégrer plus profondément dans certains domaines, tout en empêchant d’autres de les en empêcher, reflétant ainsi la diversité des ambitions et des réalités nationales.

Cette approche pragmatique de l’expansion est en phase avec les réalités d’aujourd’hui. L’adhésion et la participation à l’UE ne peuvent plus être considérées comme une question tout ou rien.

L’UE doit abandonner l’illusion d’une adhésion au « menu » au profit d’une nouvelle compréhension, où chaque pays s’engage à s’intégrer, mais sur la base d’une approche « à la carte », adaptés à leurs besoins et à leurs capacités.

Ces propositions pourraient profondément remodeler la nature de l’Union européenne, d’une part, en renforçant le statut d’une fédération d’États aux mentalités similaires, tandis que d’autre part, la voie serait ouverte à une construction à plusieurs vitesses plus hétérogène. Paradoxalement, en mettant de côté son approche historiquement enracinée de l’adhésion « tout ou rien », l’UE pourrait s’étendre et s’approfondir en même temps.

Cette évolution bénéficierait à la fois aux pays candidats, en offrant des perspectives d’intégration plus flexibles, et à ses résidents actuels, en garantissant une UE plus résiliente et mieux adaptée pour faire face aux défis contemporains.

L’adhésion graduelle au regard du principe de réalité, de la lisibilité de l’UE et de l’acceptabilité du public

Les élargissements vont mettre à rude épreuve l’UE, l’adhésion graduelle offre un terrain fertile pour améliorer l’acceptabilité et réduire le fossé entre les aspirations des pays candidats et les réalités d’une intégration de facto plus douce.

Le principe de réalité exige que les élargissements soient en phase avec les défis et les opportunités du monde actuel tels que les dynamiques géopolitiques, les préoccupations climatiques et les besoins économiques. Cette approche renforce la position de l’UE en tant qu’acteur mondial, capable de répondre aux besoins du 21e siècle, notamment en matière de lutte contre le changement climatique.

La lisibilité pour le public d’une adhésion graduelle invite dès que possible à sensibiliser les citoyens autour d’une approche plus transparente et compréhensible.

L’UE est à un tournant de son histoire, avec la possibilité de remodeler son avenir à condition de faire des choix audacieux et réfléchis qui pourraient façonner son avenir de manière inédite. La communication sera également essentielle pour garantir le succès de cette transition.

L’élargissement graduel peut renforcer la position de l’UE dans un monde en évolution rapide, tout en préservant sa stabilité institutionnelle et en offrant des avantages tangibles à ses citoyens et aux pays candidats.

Framing, Agenda-Setting et Priming : quels modèles d’effets médiatiques pour la communication européenne

Les théories majeures de – l’agenda-setting, le priming et le framing – offrent une compréhension approfondie de la manière dont les médias d’information façonnent les perceptions et les attitudes du public. Comprendre ces théories est essentiel à qui cherchent à développer des stratégies de communication efficaces.

L’agenda-setting : impact sur les priorités politiques et influencer les décisions prises par les dirigeants européens

Développé par Maxwell McCombs et Donald Shaw, soutient que les médias ne nous disent pas quoi penser, mais plutôt sur quoi penser. Les médias ont le pouvoir de déterminer les questions considérées comme importantes par le public en mettant l’accent sur certaines problématiques.

Par exemple, dans le contexte de l’Union européenne, les médias peuvent influencer l’ordre du jour politique en accordant une couverture médiatique significative à des sujets spécifiques tels que le changement climatique, la migration ou les politiques économiques. En mettant en avant ces questions, les médias influencent l’attention du public et créent un environnement favorable à la discussion et à l’action politique.

Le priming : impact sur la façon dont les citoyens évaluent les candidats et les enjeux lors des élections européennes

Développé par Shanto Iyengar, Mark Peters et Donald Kinder, se réfère à la façon dont les médias créent un contexte pour la discussion publique. En accordant une attention accrue à certains sujets, les médias peuvent amener le public à porter une attention particulière à ces thèmes.

Par exemple, la couverture médiatique intensive des élections européennes peut jouer un rôle de priming en attirant l’attention du public sur les enjeux politiques et les choix électoraux. En fournissant des informations et des analyses approfondies sur les programmes des partis politiques, les médias peuvent influencer les perceptions et les décisions des électeurs.

Le framing : impact sur les attitudes du public envers l’UE, en fonction de la manière dont les médias présentent les problèmes et les acteurs

Développé par Erving Goffman, se concentre sur la manière dont les médias présentent et structurent une histoire, ce qui influence la compréhension et l’évaluation par le public. Les médias utilisent des éléments tels que les métaphores, les récits, le choix des mots et le ton pour encadrer une histoire d’une certaine manière.

Par exemple, lorsqu’il s’agit de la communication sur l’Union européenne, les médias peuvent adopter différents cadres pour aborder les questions européennes, tels que le cadre économique, le cadre politique ou le cadre social. Chaque cadre offre une perspective unique sur les enjeux européens et peut influencer la façon dont le public perçoit et évalue les politiques et les actions de l’Union européenne.

Perspectives

Ces théories – agenda-setting, priming et framing – offrent des perspectives précieuses pour comprendre comment les médias influencent la communication et l’opinion publique au sein de l’Union européenne.

Cependant, il est important de noter que ces théories ne sont pas une panacée et présentent certaines limites. Par exemple, elles peuvent négliger d’autres facteurs tels que les influences sociales, économiques et culturelles sur la perception et l’attitude du public.

De plus, la façon dont les médias utilisent ces théories peut varier en fonction du contexte politique et médiatique spécifique. Par conséquent, les professionnels des relations publiques doivent adopter une approche holistique en intégrant ces théories avec d’autres approches de communication et en tenant compte du contexte européen unique pour élaborer des stratégies de communication efficaces.

Au total, les théories de l’agenda-setting, du priming et du framing offrent des outils précieux pour comprendre l’impact des médias sur l’information et la communication de l’Union européenne. En utilisant ces théories de manière stratégique, les professionnels des relations publiques peuvent façonner l’attention du public, influencer les perceptions et les attitudes, et contribuer à une communication plus efficace au sein de l’Union européenne. Cependant, il est essentiel de compléter ces approches par d’autres facteurs et de tenir compte aussi du contexte spécifique pour obtenir des résultats optimaux.

L’Union européenne encore à la traine dans l’information audiovisuelle trop franco-française

La question est clairement posée au vue des résultats de l’étude de l’Observatoire Europe de la Fondation Jean-Jaurès sur « L’Union européenne dans les médias : atonie générale, sursaut récent », les citoyens européens ont-ils une visibilité suffisante sur la teneur du débat politique européen pour participer aujourd’hui aux prises de décision qui nous toucheront demain ?

L’Union européenne toujours largement absente de l’information nationale à la télévision et à la radio

Sur les 7 années étudiées de 2015 à 2022, en moyenne, l’actualité de l’Union européenne est traitée dans 3 % ou moins de l’ensemble des sujets de journaux télévisés des chaînes historiques de télévision. En 2022, en raison de la couverture de la guerre en Ukraine, la part de sujets portant sur l’Union européenne (5,7 %) dépasse les résultats de 2015 et 2019 (4,8 %).

Les trois segments de médias analysés (journaux télévisés traditionnels, chaînes d’information en continu et radios nationales) accordent une place généralement uniforme – et plutôt faible – aux dossiers européens, en moyenne, cela concerne 2,6 % des sujets diffusés sur les tranches d’information analysées, les plus écoutées et regardées.

En d’autres termes, sur une heure d’information audiovisuelle diffusée en France entre 2020 et 2022, les auditeurs sont exposés en moyenne à 94 secondes ayant trait à l’actualité de l’Union européenne.

Les chaînes d’information en continu purement nationales (LCI, BFM TV, CNews) constituent l’ensemble de médias où la part de sujets européens est la plus faible (1,9 %) ; les sujets européens ne dépassent pas 1,5 % de l’ensemble des sujets diffusés sur BFM TV, la première chaîne d’information en continu de la télévision française en termes d’audience.

On constate une forme de domination de la Commission européenne sur les deux autres institutions dans la communication de l’action communautaire. Ce phénomène, déjà observé par le passé dans nos travaux, est fortement accentué par la couverture du volet européen de la guerre en Ukraine.

#1 Une incarnation renforcée : le langage audiovisuel de l’exécutif en action appliqué à la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen voit sa médiatisation corrélée à l’Ukraine, ses phases d’exposition couvrent ses temps forts de communication.

Ces éléments de la grammaire audiovisuelle sont en France habituellement réservés aux membres du gouvernement et au président de la République.

Enfin, sur le plan de l’incarnation, le président de la République française demeure une personnalité importante dans la couverture des affaires européennes. Il s’exprime dans 50 sujets sur l’Union européenne dans l’année, soit 4,5 % du volume consacré aux affaires européennes.

#2 Un regard porté vers l’est et le nord de l’Union : si la guerre en Ukraine a modifié la couverture médiatique de l’Union européenne, elle réoriente celle des États membres, traditionnellement réservée à nos voisins territoriaux directs, vers les États de l’Europe de l’Est, dont la Pologne et du Nord avec la Suède et la Finlande.

L’Union européenne dans l’information locale et régionale avec France Bleu et France 3

Sur les antennes des réseaux France Bleu et France 3 en France métropolitaine, sur les 289 sujets en 2021, le premier enjeu traité est celui de la pêche, le second thème qui fait parler de l’Union au niveau local concerne les transports, enfin, le suivi des vagues de vaccination occupe la troisième place.

Nonobstant les sujets européens à dimension institutionnelle ou politique diffusés sur le réseau France Bleu et France 3 qui ne sont pas étudiées, la part consacrée à l’actualité de l’Union européenne dans les médias audiovisuels locaux publics est relativement faible, voire très faible. Sur les chaînes du service public, le 19/20 est le JT du soir qui consacre le moins de place aux nouvelles européennes.

Lorsque l’Union européenne traite d’enjeux « concernants », ayant une dimension concrète, son actualité devient un sujet potentiel pour l’information locale, comme l’illustre les chargeurs universels d’appareils électroniques d’ici à 2024 ou certaines mesures du Pacte vert.

Recommandations pour une mise en lumière à faire perdurer dans les médias audiovisuels publics et privés

Aucune chaîne de télévision et de radio étudiées dans le panel de l’audiovisuel public et privé ne dispose de correspondant permanent à Bruxelles – ce qui permet de mieux comprendre le peu d’exposition donnée aux affaires de l’Union européenne dans les journaux d’information qu’écoutent les Français au quotidien.

Sur le service public, les objectifs sont clarifiés mais il reste à les quantifier, afin d’inscrire formellement un objectif de couverture des affaires européennes dans le corpus généraliste de programmes d’information des télévisions et radios financées par l’État.

Pour les chaînes privées, les télévisions et radios privées françaises ne parviennent pas à accorder une place régulière aux questions européennes dans leurs programmes d’information

L’Arcom devrait mettre en place un baromètre de la place de l’Union européenne dans les médias audiovisuels afin d’engager une logique incitative voire que le législateur institue la couverture des affaires européennes au titre des obligations déontologiques.

Que faire vraiment face à cette atonie générale ? Faudrait-il en passer par la possibilité de fixer par la loi une mission d’information sur l’Europe dans l’audiovisuel ?