Archives de catégorie : Opinion publique européenne

Billets sur l’opinion publique européenne

L’Union européenne encore à la traine dans l’information audiovisuelle trop franco-française

La question est clairement posée au vue des résultats de l’étude de l’Observatoire Europe de la Fondation Jean-Jaurès sur « L’Union européenne dans les médias : atonie générale, sursaut récent », les citoyens européens ont-ils une visibilité suffisante sur la teneur du débat politique européen pour participer aujourd’hui aux prises de décision qui nous toucheront demain ?

L’Union européenne toujours largement absente de l’information nationale à la télévision et à la radio

Sur les 7 années étudiées de 2015 à 2022, en moyenne, l’actualité de l’Union européenne est traitée dans 3 % ou moins de l’ensemble des sujets de journaux télévisés des chaînes historiques de télévision. En 2022, en raison de la couverture de la guerre en Ukraine, la part de sujets portant sur l’Union européenne (5,7 %) dépasse les résultats de 2015 et 2019 (4,8 %).

Les trois segments de médias analysés (journaux télévisés traditionnels, chaînes d’information en continu et radios nationales) accordent une place généralement uniforme – et plutôt faible – aux dossiers européens, en moyenne, cela concerne 2,6 % des sujets diffusés sur les tranches d’information analysées, les plus écoutées et regardées.

En d’autres termes, sur une heure d’information audiovisuelle diffusée en France entre 2020 et 2022, les auditeurs sont exposés en moyenne à 94 secondes ayant trait à l’actualité de l’Union européenne.

Les chaînes d’information en continu purement nationales (LCI, BFM TV, CNews) constituent l’ensemble de médias où la part de sujets européens est la plus faible (1,9 %) ; les sujets européens ne dépassent pas 1,5 % de l’ensemble des sujets diffusés sur BFM TV, la première chaîne d’information en continu de la télévision française en termes d’audience.

On constate une forme de domination de la Commission européenne sur les deux autres institutions dans la communication de l’action communautaire. Ce phénomène, déjà observé par le passé dans nos travaux, est fortement accentué par la couverture du volet européen de la guerre en Ukraine.

#1 Une incarnation renforcée : le langage audiovisuel de l’exécutif en action appliqué à la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen voit sa médiatisation corrélée à l’Ukraine, ses phases d’exposition couvrent ses temps forts de communication.

Ces éléments de la grammaire audiovisuelle sont en France habituellement réservés aux membres du gouvernement et au président de la République.

Enfin, sur le plan de l’incarnation, le président de la République française demeure une personnalité importante dans la couverture des affaires européennes. Il s’exprime dans 50 sujets sur l’Union européenne dans l’année, soit 4,5 % du volume consacré aux affaires européennes.

#2 Un regard porté vers l’est et le nord de l’Union : si la guerre en Ukraine a modifié la couverture médiatique de l’Union européenne, elle réoriente celle des États membres, traditionnellement réservée à nos voisins territoriaux directs, vers les États de l’Europe de l’Est, dont la Pologne et du Nord avec la Suède et la Finlande.

L’Union européenne dans l’information locale et régionale avec France Bleu et France 3

Sur les antennes des réseaux France Bleu et France 3 en France métropolitaine, sur les 289 sujets en 2021, le premier enjeu traité est celui de la pêche, le second thème qui fait parler de l’Union au niveau local concerne les transports, enfin, le suivi des vagues de vaccination occupe la troisième place.

Nonobstant les sujets européens à dimension institutionnelle ou politique diffusés sur le réseau France Bleu et France 3 qui ne sont pas étudiées, la part consacrée à l’actualité de l’Union européenne dans les médias audiovisuels locaux publics est relativement faible, voire très faible. Sur les chaînes du service public, le 19/20 est le JT du soir qui consacre le moins de place aux nouvelles européennes.

Lorsque l’Union européenne traite d’enjeux « concernants », ayant une dimension concrète, son actualité devient un sujet potentiel pour l’information locale, comme l’illustre les chargeurs universels d’appareils électroniques d’ici à 2024 ou certaines mesures du Pacte vert.

Recommandations pour une mise en lumière à faire perdurer dans les médias audiovisuels publics et privés

Aucune chaîne de télévision et de radio étudiées dans le panel de l’audiovisuel public et privé ne dispose de correspondant permanent à Bruxelles – ce qui permet de mieux comprendre le peu d’exposition donnée aux affaires de l’Union européenne dans les journaux d’information qu’écoutent les Français au quotidien.

Sur le service public, les objectifs sont clarifiés mais il reste à les quantifier, afin d’inscrire formellement un objectif de couverture des affaires européennes dans le corpus généraliste de programmes d’information des télévisions et radios financées par l’État.

Pour les chaînes privées, les télévisions et radios privées françaises ne parviennent pas à accorder une place régulière aux questions européennes dans leurs programmes d’information

L’Arcom devrait mettre en place un baromètre de la place de l’Union européenne dans les médias audiovisuels afin d’engager une logique incitative voire que le législateur institue la couverture des affaires européennes au titre des obligations déontologiques.

Que faire vraiment face à cette atonie générale ? Faudrait-il en passer par la possibilité de fixer par la loi une mission d’information sur l’Europe dans l’audiovisuel ?

Facts et Fake : comment les Européens s’informent ou se désinforment sur l’UE ?

Résultats d’une enquête menée auprès de 300 personnes provenant de cinq pays européens par Paulina Fröhlich, Sophie Borkel et Christian Mieß, qui ont cherché à comprendre d’où les citoyens européens tirent leurs informations sur l’Union européenne ainsi que les sources de désinformation auxquelles ils sont exposés. L’objectif était de mettre en lumière les médias et les canaux de communication les plus utilisés, ainsi que les mécanismes qui conduisent à la propagation des fausses informations.

L’information sur l’UE se présente de manière occasionnelle

Interrogées sur les sources à partir desquelles les participants obtiennent leurs informations sur l’UE, la plupart mentionnent divers médias, mais aussi des conversations privées ainsi que des échanges avec des collègues. De manière frappante, mais sans surprise, ce sont les participants plus jeunes qui ont tendance à indiquer les médias sociaux et/ou les médias en ligne comme leurs principales sources d’information.

Les bibliothèques, les brochures, les conférences ou les événements d’information sont également mentionnés de manière occasionnelle. En plus de ceux mentionnés, il y a cependant des personnes qui soulignent qu’elles ne s’informent pas du tout. Plusieurs personnes mentionnent avoir délibérément décidé de ne pas avoir d’abonnement à la télévision ou aux journaux.

Ceux qui se considèrent comme étant activement impliqués et politiquement informés utilisent plus souvent des podcasts, des newsletters et d’autres supports d’information (médias à la demande) en plus des journaux et de la télévision (médias classiques) pour se forger une opinion sur l’UE que ceux qui se disent plus éloignés de la politique. Ces derniers ont tendance à se limiter à la télévision et aux médias sur Internet et, s’ils sont plus jeunes, aux médias sociaux tels qu’Instagram et surtout Facebook.

Ce qui ressort particulièrement de cette discussion, c’est que la plupart des participants ont démontré un niveau élevé de compétence médiatique en ce sens que, quel que soit le canal utilisé, ils ont toujours examiné de manière critique les sources et les ont comparées à des informations de seconde et de troisième main. Dans certains cas isolés, la perception du contenu médiatique apparaît déjà sceptique et fondamentalement méfiante.

La réceptivité aux fausses informations s’explique de différentes manières

La plupart des participants sont conscients de la désinformation. Cependant, seulement après y avoir réfléchi un moment. La source de fausses informations la plus fréquemment mentionnée dont ils ont conscience est la chaîne de télévision Russia Today (RT). Les participants la décrivent comme de plus en plus difficile à identifier en tant que fausses informations, surtout lorsqu’elles apparaissent sur les médias sociaux.

Ils attribuent généralement plus de fausses informations aux médias sociaux qu’à la presse écrite ou aux chaînes de télévision, par exemple. Le manque de citations de source émane pour eux d’un manque de sérieux. Tous les participants n’ont pas encore rencontré consciemment de désinformation. S’ils l’ont fait, ils l’ont rencontrée parmi des connaissances ou des amis (des liens vers des blogs ou des vidéos douteux ont été transmis par message), ou ils entendent des rapports sur les fausses informations provenant des médias de confiance.

L’exemple le plus courant ici concerne les fausses informations sur le coronavirus. Les participants des groupes de discussion soulignent qu’ils considéraient les « fausses informations évidentes », telles que l’affirmation selon laquelle les produits laitiers protégeraient contre le virus, comme moins dangereuses que les informations dont la véracité était plus difficile à déterminer. Avant même que des cercles sociaux d’extrême droite ne soient soupçonnés de fausses informations, d’autres pays étaient suspectés d’en être les acteurs.

De plus, les tentatives d’expliquer pourquoi les citoyens ont tendance à croire les récits alternatifs ou les fausses informations étaient très remarquables. Il existe ici des différences nettes entre les participants qui s’informent activement sur les événements politiques et participent également politiquement, et ceux qui s’intéressent aux événements politiques en marge et ont également tendance à ne pas participer en général : tandis que le premier groupe tend à chercher les raisons dans des facteurs socio-économiques (éducation, position économique, âge), le second groupe voit les raisons davantage dans la recherche de cohésion et de solidarité des personnes. Dans le même temps, les citoyens prétendument non mobilisés expriment une grande compréhension pour cette façon de recevoir des informations. On a soutenu que, de manière similaire à une communauté religieuse, les gens cherchaient la sécurité dans un monde complexe.

En conclusion, l’enquête révèle que les Européens s’informent sur l’UE à travers une variété de sources, allant des médias traditionnels aux médias sociaux et aux conversations privées. Les médias en ligne et les réseaux sociaux ont gagné en importance, surtout parmi les jeunes générations, tandis que certains participants ont exprimé leur volonté de s’éloigner des médias traditionnels en optant pour des sources plus sélectives, telles que les podcasts et les newsletters.

Parallèlement, la sensibilisation à la désinformation est présente, bien que souvent après réflexion. Les participants identifient les médias sociaux comme étant une source fréquente de fausses informations, soulignant la difficulté de distinguer la vérité de la manipulation en ligne. Les résultats montrent également des différences dans la réception de ces informations entre les citoyens politiquement engagés et ceux qui se tiennent à l’écart de la politique, avec des explications allant de facteurs socio-économiques à la recherche de cohésion sociale.

Il est encourageant de constater que la plupart des participants ont démontré une compétence médiatique élevée, en examinant de manière critique les sources et en comparant les informations. Cependant, la persistance de la désinformation et la propagation de fausses informations soulignent la nécessité de renforcer l’éducation aux médias et la capacité des individus à discerner les informations fiables des tromperies.

Pour promouvoir une société bien informée et résiliente, il est essentiel de continuer à encourager la vérification des sources, le questionnement des informations et la recherche de diverses perspectives. Les médias, les plateformes en ligne et les institutions politiques ont un rôle crucial à jouer pour fournir des informations crédibles et combattre la désinformation. En outre, une coopération internationale visant à contrer les campagnes de désinformation et à promouvoir la transparence peut contribuer à renforcer la confiance des citoyens dans l’information qu’ils reçoivent.

En comprenant mieux les schémas d’information et de désinformation, il est possible de développer des stratégies efficaces pour promouvoir une culture de l’information basée sur des faits et pour contrer les effets néfastes de la désinformation sur la société et la démocratie.

Quelles « narrations européennes » les Européens désirent-ils ?

Une étude menée par Paulina Fröhlich, Sophie Borkel et Christian Mieß, ayant interrogé 300 personnes provenant de cinq pays européens dans le but de comprendre comment les citoyens perçoivent l’Union européenne. Quels sont les sentiments des participants quant à la réalisation des objectifs fondamentaux de l’UE ?

Une promesse de longue date, mais pas pour tous : la paix réalisée uniquement en interne, la prospérité réservée à certains

La paix et la prospérité font partie de la mission fondatrice de l’Union européenne. La grande majorité conviennent que l’UE a effectivement assuré la paix et la prospérité. On pourrait parler ici d’un récit européen réussi.

Bien que l’Union ait assuré la paix entre ses pays membres, son succès dans la contribution à la paix dans d’autres parties du monde est qualifié de très modeste. Dans certains cas, des conflits ou des guerres sont explicitement mentionnés, mais dans l’ensemble, la réalisation fondamentale d’une coexistence pacifique est soulignée avec gratitude.

Cependant, l’idéal de paix et de conditions de vie pacifiées ne peut pas se limiter aux frontières de l’UE. Les valeurs universelles et les objectifs de l’UE doivent également être un mandat pour ses relations extérieures.

Malgré tout, les participants ont plus de mal à décrire la réalisation de l’objectif de prospérité. Bien qu’ils reconnaissent que l’UE est dans une large mesure une communauté prospère, ils soulignent toujours la répartition inégale de la prospérité, en particulier la différence entre les pays. Certains pensent que le mécontentement économique (et l’inégalité) est la principale raison de l’euroscepticisme.

La liberté de circulation et l’État de droit : seulement avec des limitations

Interrogés sur leurs premières associations avec l’Union européenne, la grande majorité mentionne la liberté de circulation, les voyages et les frontières ouvertes en premier lieu. L’euro, la bureaucratie et un système de valeurs communes ne sont mentionnés que par quelques-uns. De nombreuses autres associations (langues, diversité, BCE, drapeau, opportunités, processus difficiles, etc.) montrent que les idées sur l’Europe sont très variées.

L’UE en tant que communauté de valeurs revient fréquemment dans les discussions. Cependant, certains participants doutent que l’Union mérite d’être associée à ces valeurs. Par exemple, le traitement des réfugiés aux frontières extérieures de l’UE est mentionné comme un point de critique. Les préoccupations concernant les valeurs européennes telles que l’État de droit et les droits de l’homme sont également fréquentes, en particulier en Pologne et en Hongrie. La situation critique est considérée comme un défi européen et n’est pas envisagée de manière détachée au niveau national.

Certains aimeraient voir la République européenne, tandis que d’autres ont encore besoin d’informations de base sur l’UE

Ce qui est frappant, c’est que, tant dans toutes les associations que dans les attentes formulées pour une future Union, les principales crises sont à peine mentionnées. Ni la crise financière ni la crise climatique ne semblent façonner explicitement l’opinion actuelle ou future des citoyens sur l’image de l’Union européenne. Certes, la nécessité de la protection du climat ou le rôle des politiques fiscales sont discutés, mais pas de manière significative.

À la place, différentes perspectives sur la capacité d’action de l’UE et sur son ambition d’agir sont vivement débattues. Alors que de nombreux participants aimeraient voir une UE plus active, d’autres considèrent la lenteur européenne comme excessive. Ils aimeraient donc voir plus de souveraineté nationale. La question du soutien ou du rejet de l’idée de l’aspiration à une république européenne est exemplaire de ces discussions :

« Bien sûr, beaucoup de temps a été perdu, mais à mes yeux, il n’est pas encore trop tard. (…) Il faut aller de l’avant et créer des visions et essayer de les poursuivre, afin de pouvoir accomplir quelque chose. Si je disais dès le départ ‘je ne peux pas le faire’, ce n’est pas possible. »

« Je ne veux pas d’un gigantesque super-État. Je veux que ça [l’UE] fonctionne, et c’est pourquoi, franchement, je voudrais dire au revoir à des idées irréalistes. Qui, après tout, vise à avoir quelque chose comme 400 ou 450 millions de personnes vivant dans un État à un moment donné, où je me demande : où est la démocratie là-dedans ? »

D’autres attentes exprimées à l’égard de l’UE comprennent le désir de recevoir plus d’informations. Soit les participants à l’entretien ont l’impression que la majorité de la population en sait trop peu sur les réalisations de l’UE, soit ils admettent qu’ils en savent personnellement trop peu pour se sentir liés à l’Union.

De plus, le thème de la solidarité donne lieu à des échanges animés dans les groupes, souvent discuté de manière très exemplaire, sur la base des événements de la soi-disant crise des réfugiés de 2015. D’autres attentes de l’UE sont parfois très concrètes – comme celles d’avoir plus de lois contre la discrimination. En particulier, il est discuté du fait que l’égalité entre les femmes et les hommes est encore loin d’atteindre un niveau satisfaisant dans toute l’Europe.

Un récit de justice

Les souhaits concrets des participants pour l’Europe sont nombreux. Cependant, on observe une fréquence marquée dans le désir de plus de justice et plus spécifiquement, d’un engagement commun en faveur des questions de politique sociale. Selon les mots d’un participant, l’Europe devrait être un « foyer basé sur la solidarité ».

Parmi les énumérations, on trouve par exemple le désir d’efforts communs dans la lutte contre la pauvreté, le chômage des jeunes et plus de cohésion, notamment entre l’Europe occidentale et l’Europe orientale. Après, comme expliqué précédemment, le récit de la paix et de la prospérité a longtemps prévalu, on pourrait supposer que de nombreuses personnes souhaitent maintenant un récit de justice.

Le désir de possibilités de co-création a également été mentionné. Un grand nombre de personnes ont souligné qu’elles aimeraient voir plus de formats comme ces tables rondes, mais aussi des outils participatifs de l’Union européenne elle-même. La conférence sur l’avenir de l’Europe a été mentionnée de manière remarquablement rare, ce qui suggère qu’elle n’est pas largement connue parmi les participants.

Au total, il existe un grand désir d’échanges sur les questions européennes. Surtout parmi ceux qui ont très rarement participé à des formats comparables, déclarent qu’ils en savent peu sur le sujet, mais qu’ils sont très intéressés. Les différences dans le niveau d’information sur l’Union européenne (ses sujets, son fonctionnement, ses institutions et ses territoires) sont frappantes. Cependant, le degré d’information a peu à voir avec la sympathie ou l’antipathie à l’égard de l’UE.

Les avantages de l’Union perçus comme particulièrement personnels, tels que la liberté de voyager, ont été difficilement vécus récemment en raison des restrictions liées au coronavirus. Il est donc certainement nécessaire de rattraper le retard afin de rendre l’UE à nouveau une expérience positive dans la vie quotidienne. Le sujet qui a été le plus clairement exprimé par presque tous les participants dans le contexte européen est : la justice. Un grand mot, que l’UE ne pourra adopter comme un grand récit nouveau que si les résultats de cette revendication audacieuse sont également visibles dans la politique quotidienne.

Les participants expriment un vif intérêt pour les questions européennes et une volonté de participer à des échanges sur l’avenir de l’UE. La liberté de circulation, autrefois perçue comme un avantage majeur de l’UE, a été mise à l’épreuve par les restrictions liées à la pandémie de coronavirus. Afin de restaurer une expérience positive de l’UE dans la vie quotidienne, il est nécessaire de combler les lacunes en termes d’informations sur l’UE et de renforcer la dimension de justice au sein de l’Union. La demande d’une politique sociale plus solidaire et la lutte contre les inégalités sociales et économiques semblent occuper une place centrale dans les aspirations des participants. Pour que l’UE puisse adopter un récit fort basé sur la justice, il est crucial que les revendications audacieuses se traduisent par des actions concrètes et visibles dans la politique européenne quotidienne.

Eurobaromètre : vivre dans l’UE, en démocratie, à un an des élections

Découvrez les principales conclusions de l’Eurobaromètre du printemps 2023, réalisé pour le Parlement européen afin de prendre le pouls des opinions publiques européenne…

VIVRE DANS L’UE : DES EUROPÉENS PLUS RÉSILIENTS

Vivre en polycrises malgré tout

Après des années de crises dans l’UE, les perceptions de détérioration des perspectives économiques personnelles des citoyens et de leurs attentes quant à leurs conditions de vie futures pourraient toucher à leur fin. Une majorité s’attend toujours à ce que la situation économique de leur pays se détériore au cours de l’année à venir, mais cette proportion a diminué de huit points de pourcentage au cours des six derniers mois.

L’espoir, une valeur en légère hausse

L’espoir est l’émotion la plus fréquemment mentionnée par les citoyens de l’UE (37 %), arrivant en première position, ou ex aequo en première position, dans huit États membres de l’UE. Cependant, l’incertitude due aux crises en cours occupe la deuxième place avec 34 % et arrive également en tête de liste dans huit États membres de l’UE.

L’optimisme brille d’un léger éclat

Une majorité dans 25 États membres de l’UE se montre optimiste quant à l’avenir de l’UE. L’optimisme a augmenté de sept points de pourcentage depuis l’automne 2022 et atteint maintenant 64 % au niveau de l’UE dans son ensemble.

Le coût de la vie reste élevé

La crise du coût de la vie préoccupe toujours de nombreux Européens. 65 % ne sont pas satisfaits des mesures prises par leur gouvernement national, et 57 % ne sont pas satisfaits des mesures prises par l’UE.

Nous soutenons l’Ukraine

Plus d’un an après le début de la guerre de la Russie contre l’Ukraine, les citoyens de l’UE continuent de soutenir le soutien de l’UE à ce dernier : 76 % approuvent ces mesures, soit une augmentation de deux points de pourcentage depuis l’automne 2022. De plus, le soutien à l’Ukraine est la première action de l’UE que les citoyens mentionnent : 74 % en ont entendu parler, soit 36 points de pourcentage de plus que la deuxième action de l’UE la plus évoquée.

VIVRE EN DÉMOCRATIE : DES EUROPÉENS MOINS INSATISFAITS

L’impact de la démocratie en action où l’UE agit

71 % des Européens affirment que les actions de l’UE ont un impact sur leur vie quotidienne. Les actions de l’UE qui suscitent le plus de satisfaction chez les citoyens sont le soutien à l’Ukraine (69 %), les droits démocratiques et le respect de l’État de droit (64 %), ainsi que la politique étrangère (54 %).

La démocratie est ce qui nous définit

Une majorité absolue de citoyens de l’UE se déclarent également satisfaits des aspects différents de la démocratie. Les élections libres et équitables (70 %), la liberté d’expression (70 %) et le respect des droits fondamentaux (66 %) sont les aspects qui génèrent le plus de satisfaction. La démocratie est la valeur fondamentale que les citoyens veulent que le Parlement européen défende. Avec 37 % de mentions dans l’ensemble, c’est également la valeur principale dans 14 États membres de l’UE. La majorité des citoyens sont également satisfaits du fonctionnement de la démocratie au sein de l’Union européenne (54 %).

Le bilan de la mandature du Parlement européen

Encore plus qu’auparavant, l’agenda des législations adoptées au Parlement européen dessine un bilan, dont les Européens apprécient diversement les résultats, le soutien à l’Ukraine arrivant en haut des actions approuvées tandis que migrations et asiles, Green Deal et Agenda Digital, qui constituaient les priorités de la Commission européenne sont moins bien évaluées.

VIVRE LES ÉLECTIONS EUROPÉENNES : DES EUROPÉENS DÉJA SENSIBILISÉS

Élections européennes : les citoyens le savent déjà

La prise de conscience que les élections européennes auront lieu en 2024 augmente considérablement pour atteindre 45 % des citoyens – neuf points de pourcentage de plus qu’il y a six mois et nettement plus élevé qu’à un moment similaire avant les dernières élections européennes en 2019, où la connaissance de la date était de 32 %.

Élections européennes 2024, l’intérêt est plus élevé qu’auparavant

L’intérêt pour les prochaines élections européennes est de 56 % chez les citoyens, soit six points de pourcentage de plus qu’un an avant les dernières élections européennes. Qui plus est : les deux tiers des citoyens (67 %) déclarent qu’ils sont susceptibles de voter, alors que 58 % le disaient en 2018.

Dans les opinions, la détérioration des attitudes semble s’être arrêtée avec un niveau d’optimisme quant à l’avenir de l’UE en hausse et une majorité ayant une image positive de l’UE. De même, les Européens continuent de penser que l’appartenance de leur pays à l’UE est une bonne chose et qu’elle est importante. De plus, bien que les opinions soient partagées quant à savoir si leur voix compte dans l’UE, la plupart discutent des questions politiques européennes avec leurs amis ou leurs proches et suivent ce qui se passe dans la politique européenne.

Après l’espace public européen, le commun de l’Union

Passé la vision idéaliste habermassienne d’un espace public européen reposant sur l’agir communicationnel et débouchant sur un patriotisme constitutionnel ayant mené à une impasse en Europe faute d’avoir résolu la question de la souveraineté, Jean-Marc Ferry dans « La Raison et la Foi » vise à donner un nouveau contenu politique au projet européen…

Une culture publique commune

Pour le philosophe néo-kantien Jean-Marc Ferry, « ce qui a vocation à être communalisé à l’échelle européenne, ce sont les cultures publiques nationales » au sein d’une culture publique commune à l’Union, qui ne soit ni la seule diversité de juxtaposition, ni la simple proximité des contacts.

Une intégration des communs

Au niveau transgouvernemental, en complément des échanges au sein du Conseil de l’UE qui réunit les ministres, le défi serait de renforcer les échanges à l’échelle des administrations nationales afin de mieux gérer les biens communs publics européens.

Au niveau transparlementaire, avec le Parlement européen, la recommandation serait de renforcer les interconnexions entre les parlements nationaux de l’espace européen, dans les deux sens. La culture parlementaire commune à chaque espace public national sortirait renforcer du partage et du dialogue entre tous les élus parlementaires nationaux et européens.

Au niveau transjuridictionnel, la mise en commun des acquis juridictionnels et des doctrines de droits, en particulier entre les juridictions de dernier recours, permettrait de mieux arbitrer les conflits de normes juridiques suivant le principe de subsidiarité.

Au niveau transmédiatique, l’ouverture des programmations audiovisuelles, en particulier les news nationales, serait la priorité pour fédérer les opinions publiques européennes autour des enjeux communs ; au-delà du respect du pluralisme des intérêts privés, la régulation publique viserait à assurer la qualité et la diversité des genres télévisuels européens.

Au niveau transsociétal, les dialogues social, civil, culturel, artistique devraient être renforcés pour apprendre à partager et apprendre des uns et des autres « en vue d’une intégration enrichissante en même temps que la formation d’un espace de partage de responsabilités » entre membres d’une même société.

Au total, la prise en compte des communs, nouveau paradigme pour le projet de construction européenne, renforcerait la fierté d’appartenance à cette « union sans cesse plus étroite ».