Lors d’une conférence « L’Europe, juste une question de communication ? » à la Maison de l’Europe à Paris le 20 mars dernier, Dominique Wolton est intervenu sur les enjeux et défis de la communication européenne aujourd’hui et demain…
Des sentiments de la communication politique européenne
Premier sentiment faisant défaut : la fierté. On ne valorise pas l’acquis considérable des soixante années de construction européenne : la réconciliation des peuples, l’élargissement à l’Est, l’ouverture d’esprit et l’ampleur des réalisations ne sont pas mobilisées pour faire face au réveil des identités nationales et à la montée du nationalisme.
Deuxième sentiment à développer : la curiosité. On n’est pas suffisamment conscient de nos différences et désireux de mieux les connaître. Il faut davantage se comparer, montrer nos complémentarités, notamment linguistiques et religieuses. Sans le multilinguisme et l’histoire, on ne peut pas construire l’avenir sans enracinement.
Troisième sentiment : la générosité. La quintessence du projet européen, la solidarité, donc la redistribution entre les États-membres riches et pauvres dans l’Union européenne est mise sous le boisseau, tandis que le Brexit n’offre pas une vision formidable de l’Europe sous cet angle.
Quatrième sentiment : la fraternité. Entre le sentiment de déclassement et d’abandon des milieux défavorisés et l’arrogance ou le mépris des élites, tant que la division, les fractures frapperont les peuples, la construction européenne ne pourra pas fédérer.
En somme, avec l’Union européenne, on a l’hymne à la joie, mais c’est tout. Il n’y a jamais de joie européenne.
Une attente d’Europe qui demeure
Malgré tous les ratés, le manque de sentiments positifs européens, les peuples restent européens, en raison d’une maturité, d’une plasticité encore – pour combien de temps – favorable à l’Europe.
Malgré tous ses mensonges, l’europhobie ne progresse finalement pas tant que cela ; même s’il n’y pas un projet politique européen assez clair pourtant évident avec l’urgence climatique ; même si le budget européen n’est pas très joyeux ; même si les préjugés et les anathèmes entre classes se renforcent et même s’il manque beaucoup d’enthousiasme.
Le projet européen d’émancipation des classes moyennes, qui défendent un patrimoine commun unique au monde, demeure plus que jamais d’actualité. La flamme européenne n’est pas prête de s’éteindre.