Que reste-t-il du mandat de Viviane Reding à la tête de la communication de l’UE ?

La Commission européenne arrive dans quelques mois au terme de son mandat, c’est le moment de tirer un bilan de l’action de Viviane Reding à la tête de la communication depuis 5 ans…

La délégitimation de la communication : l’erreur des choix inauguraux de ne pas nommer de portefeuille à la communication et de mélanger communication et citoyenneté

Lors de sa nomination, Viviane Reding s’est vue confier une Vice-présidence et la Justice, les droits fondamentaux et la citoyenneté tandis que la communication (et la responsabilité sur la Direction Générale Communication) n’était pas nommée dans son portefeuille.

L’absence de visibilité pour la communication correspondait à une conviction de Viviane Reding que « la communication n’est pas une politique, mais un outil ».

En outre, communication et citoyenneté se confondait chez Viviane Reding afin « en priorité de communiquer efficacement les politiques communautaires qui touchent directement le citoyen ».

Ces deux décisions inaugurales se sont révélées inadéquates :

  • D’une part, faute de donner une stratégie, autrement dit une finalité politique à la communication de l’UE, celle-ci se voit dévalorisée et son budget qui n’apparait plus que comme une série de coûts et non un investissement se verra sacrifié.
  • D’autre part, faute de distinguer communication et citoyenneté, la clé de lecture de toute action de communication de l’UE s’est concentrée sur les citoyens européens, le public pourtant le moins facile pour l’UE à directement toucher.

La liquidation de l’héritage de Margot Wallström : de l’utopie d’une communication avec les citoyens à l’idéologie du dialogue citoyen et le sacrifice des partenariats de gestion

Le « moment Wallström » de la communication de la Commission européenne correspondait à une rupture avec une période d’expérimentation de projets délibératifs/participatifs de communication de l’UE directement avec les citoyens.

Quand bien même aucune généralisation de la communication de l’UE avec les citoyens n’était sérieusement envisageable – ce que l’on pourrait appeler « l’utopie » du plan D – Démocratie, Dialogue, Débat ; Viviane Reding a décrété que toute la communication de l’UE serait dorénavant destinée aux citoyens en installant une chape de plomb, une « idéologie », un discours propagandiste du « dialogue citoyen ».

Dans ce cadre, 2013 a été nommée Année européenne des citoyens et des « dialogues citoyens » ont été organisés à grands frais partout en Europe pour que la Commission européenne puisse dialoguer avec les citoyens européens.

Mais un tel dialogue ne s’improvise pas et le plus souvent, lorsque la Commission européenne invite au dialogue des citoyens européens lambda, ce sont en fait les auto-entrepreneurs de la cause européenne qui répondent présents et persuadent la Commission qu’elle mène un dialogue avec l’ensemble des citoyens alors qu’il s’agit d’une communication qui tourne en rond.

Par ailleurs, l’héritage de l’approche stratégique de communication en partenariat avec les Etats-membres est littéralement sabordé de manière unilatérale, en cours de contrat et sans justification au regard des évaluations indépendantes. Il s’agissait pourtant de la seule réalisation unanimement saluée.

Au total, faute de la courroie de transmission des messages que représentaient les Etats-membres avec les partenariats et surtout faute d’une communication qui tourne en rond en invoquant des dialogues citoyens, Bruxelles risque de s’isoler encore davantage.

La confusion entre information et communication

Au fil des appels d’offre publiés sous le mandat de Viviane Reding, pourtant ancienne journaliste, une confusion entre information et communication semble s’installer avec un appel d’offre pour faire de l’espace presse de la Commission européenne une copie des médias en ligne ou l’appel d’offre pour passer d’une revue de la presse européenne multilingue (cf. Presseurop) à une agence de presse de la Commission européenne en ligne sans parler de l’hybridation problématique de l’information sur Euronews.

Il semble que toute l’architecture intellectuelle qui sous-tend cette démarche repose sur une confusion dangereuse pour la réputation et la crédibilité de l’UE et des médias. La ligne de fracture entre information et communication est un principe que tout le monde respecte de l’ONU au POTUS et aux Etats-membres.

Si la Commission européenne n’a pas intégrée cette règle fondamentale soit c’est parce qu’elle ne dispose pas des compétences pour la comprendre et c’est l’échec de la professionnalisation de la DG COMM qui est en jeu, soit parce qu’elle ne veut pas la respecter et c’est encore plus grave d’imaginer que la summa divisio entre information et communication ne s’appliquerait aux affaires européennes car cela signifierait qu’il n’y aurait plus aucune valeur ni aucun intérêt à une quelconque information européenne ou communication européenne.

Au total, la communication européenne aura successivement été délégitimée, puis l’héritage dilapidé et enfin la confusion entre information et communication aura été entretenue. Faut-il parler d’un dépôt de bilan au terme du mandat de Viviane Reding à la tête de la communication de l’UE ?

Pourquoi il faut sauver le soldat Presseurop ?

Le couperet de la disparition de Presseurop est annoncé et le compte-à-rebours prendra fin dans 3 semaines, avec 70 emplois détruits, sauf si la pétition en ligne convainc la Commission européenne de poursuivre son financement. Comment comprendre une telle erreur de jugement ?

Le faux débat sur les financements de l’UE à des médias européens

Une enquête de Médiapart, commentée par Arrêt sur Images « révèle » qu’une multitude de médias européens et nationaux sont financés par l’UE.

Quoique la confusion soit permise au vu du maquis plus ou moins confus de financements, il faut tenter de faire la part des choses entre :

  • des financements pluriannuels et transparents de médias européens qui n’existeraient pas dans leur conception paneuropéenne et leur multilinguisme sans le soutien de l’UE ; et dont l’indépendance éditoriale et la déontologie journalistique sont garanties : Presseurop, Euradionantes, Café Babel appartiennent à cette catégorie ;
  • des financements ponctuels et opaques de médias européens ou nationaux qui correspondent davantage à des opérations de partenariats / publi-rédactionnels / publicités dont l’opportunité est contestable faute d’une information explicite du public tant pour l’UE que pour les médias en cause : le tour d’Europe de la matinale de France Inter tombe sous cette catégorie ;
  • des financements mixtes à la fois « structurels » et liés à des co-productions particulières correspondent à l’impossible équation d’Euronews, à la fois subventionné par la Direction Générale Communication de la Commission européenne et coproducteur de programmes avec des Directions Générales de la Commission.

Que faut-il retenir sinon que la « mauvaise monnaie chasse la bonne monnaie », c’est-à-dire que les financements susceptibles de corrompre l’indépendance éditoriale et de distordre la concurrence – si concurrence il y a, ce qui n’est que très rarement le cas avec des médias paneuropéens – sont néfastes encore une fois pour les médias qui y succombent et pour l’UE avec des effets « boomerang » contre-productifs évidents.

C’est pour cette raison qu’il s’agit d’un faux débat dans la mesure où les financements transparents et structurels (indépendants de la ligne éditoriale) de médias paneuropéens sont justifiés par la quasi absence de viabilité économique de telles entreprises multilingues et transnationales tandis que les autres financements lorsqu’ils ne sont pas transparents devraient être condamnés avec fermeté sans – là encore – la moindre place au débat.

Presseurop : comment des erreurs de la Commission européenne se concluent par une faute ?

Ce qui s’annonçait comme une formalité – le renouvellement du financement par la Commission européenne de Presseurop – a été en fait très mal géré et des erreurs se terminent par une véritable faute.

L’appel d’offre de la Commission européenne publié au début de l’été dans l’indifférence générale est une erreur : plutôt que de poursuivre une revue de presse paneuropéenne traduite pour les Européens – la mission de Presseurop – l’appel d’offre vise à développer un média en ligne dédié aux affaires européennes sans véritable indépendance.

Face à quelques réactions légitimement courroucées, en particulier (pour les réactions publiques) l’Association des journalistes européens (qui regrette aujourd’hui la fin de Presseurop) et deux médias anglo-saxons, la Commission européenne ne corrige pas le tir en suspendant l’appel d’offre.

Pourtant, la Commission européenne a déjà su suspendre un appel d’offre comme ce fut le cas pour ses prestations web qui visaient très maladroitement à ce que son futur espace presse copie les médias d’information en ligne.

La Commission européenne joue la carte des restrictions budgétaires pour annuler l’appel d’offre. Une raison qui n’en est pas vraiment une puisque le Parlement européen négocie, selon l’éditorial de Presseurop « une augmentation du budget de l’UE pour 2014 afin d’attribuer à la Commission des ressources financières supplémentaires pour les projets médias ».

Faute de corriger une erreur dans la conception du cahier des charges visant à renouveler le contrat de Presseurop, la Commission européenne invoque une fausse raison financière et prise à son piège refuse d’amender son cahier des charges, empêchant ainsi de prolonger le contrat de Presseurop – qui n’avait jusqu’à présent soulevé aucune critique alors qu’il remonte quand même à 2009.

Le vrai débat sur l’isolement des affaires européennes dans les médias

Ce que révèle ce gâchis de la disparition de Presseurop, c’est l’isolement dont souffrent les affaires européennes dans les médias.

Entre des médias européens, concentrés sur la machine bruxelloise et réduits à une audience experte/spécialisée et des médias nationaux éloignés du cœur du pouvoir européen condamnant leur correspondant sur place à la portion congrue, Presseurop est inclassable, explore un terrain inconnu et pour cette raison dérange.

Média européen par excellence, Presseurop officie comme trait d’union entre l’UE et les Européens sans prendre Bruxelles comme centre mais en parvenant à tirer le meilleur de la presse européenne.

Presseurop, une synthèse dont la disparition signe comme la mort d’une certaine idée d’un média d’information sur l’Europe pour les Européens.

Elections européennes 2014 : comment suivre la campagne sur Twitter ?

Puisque Twitter s’est peu à peu imposé dans la sphère publique numérique européenne comme le réseau social incontournable, que se passe-t-il donc sur Twitter en vue de la campagne pour les élections européennes de 2014 ?

#ep2014 : LE hashtag des élections européennes

Depuis le 1er janvier 2013, ce sont 42,980 tweets qui ont été publiés en utilisant au moins l’un des hashtags les plus évidents à priori : #ep2014, #eu14, #eu2014 ou #pe2014.

Le hashtag qui domine largement avec 84% des mentions – et qui devrait donc s’imposer comme le hashtag pour les élections européennes – est : #ep2014.

Thèmes les plus abordés jusqu’à présent

Sur l’année 2013 la campagne pour les élections européennes n’a pas officiellement commencé auprès du grand public. Néanmoins, d’ores et déjà sur Twitter la conversation s’articule autour de plusieurs éléments saillants :

  • Les candidats : Martin Schultz et Viviane Reding émergent
  • Le vidéo-clip du Parlement européen : Act. React. Impact.
  • Les partis politiques européens : le parti socialiste européen se distingue (PSE/PES)
  • Les outils d’auto-positionnement politique : myvote2014.eu et votewatch.eu

wordcloud_ep2014Les comptes « curateurs » dédiés aux élections européennes

Au-delà des comptes Twitter des députés européens (Andrew Duff semble le plus actif) et des candidats, des partis politiques européens, des institutions européennes et des journalistes européens, quelques comptes émergent en tant que « curateurs » de l’actualité des élections européennes :

  • @VoteWatchEurope : curation par 3 personnes pour plus de débats et de transparence dans la politique européenne
  • @EUWatchers : curation avec un accent plus orienté vers les citoyens et les sources critiques sans être anti-européennes
  • @2014Europarl : curation EN et FR d’un auteur inconnu
  • @EPElections : animé par une agence de PR
  • @EuropeDecides : animé par une autre agence de PR

A signaler, 2 comptes pour le moment inactifs à suivre : @EU14 et @DebatesEU qui semblent créés pour suivre les débats entre les candidats à la présidence de la Commission européenne.

Au total, à six mois des élections européennes, sur un plan politique, le terrain semble davantage occupé par la gauche et globalement les actions de communication du Parlement européen s’équilibrent avec les autres initiatives, notamment d’agences de communication, autour des élections européennes.

Démocratie numérique européenne : comment Internet révolutionne nos usages de citoyen de l’UE ?

Parce qu’Internet est devenu, ces dernières années, un espace d’innovation démocratique, le Conseil de l’Europe y consacre cette année son forum mondial de la démocratie. Si l’essor d’Internet remet en question le fonctionnement traditionnel de la démocratie représentative européenne, pose-t-il pour autant les fondations d’une « démocratie 2.0 » européenne ? Quels sont les enseignements du document de réflexion pour le Forum mondial de la démocratie 2013 : « Exploiter le web comme outil de démocratie : nouvelles pistes pour l’étude et la pratique de la démocratie numérique » ?

Recul des modes de participation politique « traditionnels » partout en Europe

A l’heure actuelle, partout en Europe, de nombreuses activités démocratiques « hors ligne » comme le vote, l’adhésion à un parti, l’affiliation à un syndicat ou le militantisme sont en déclin.

Bien au-delà de l’abstention aux élections européennes, le rapport note que « les électeurs boudent les urnes, les adhérents se détournent des partis politiques et les citoyens se disent, dans des proportions alarmantes, à la fois méfiants et mécontents de leurs dirigeants politiques ».

Autrement dit, le déficit démocratique spécifique de l’UE tend à se normaliser au sein d’une tendance généralisée au recul de toute forme de participation politique traditionnelle.

Déclin du cyber-enthousiasme d’une démocratie numérique européenne participative

En dépit des attentes la participation politique sur internet n’a pas permis de remédier à ces tendances inquiétantes : le web n’est pas une panacée pour les démocraties en difficulté, y compris pour l’UE.

Le web comme lieu de dialogue et de débat – malgré les tentatives de l’UE avec le forum Debate Europe et bien d’autres projets – n’a pas sensiblement améliorer les pratiques classiques des institutions européennes en matière de consultation et d’engagement.

Le web comme moyen de communication universel et en temps réel – quoique les interactions avec les institutions européennes sont plus régulières et plus ouvertes dans les médias sociaux – n’a pas permis de généraliser l’engagement et de restaurer la confiance des citoyens européens.

Aussi, quand bien même, les élections européennes de 2014 correspondraient avec la généralisation d’Internet lors de la campagne, l’abstention électorale risque de se maintenir, sinon de se renforcer avec la crise.

Vers une nouvelle approche de la démocratie numérique européenne

Plutôt que d’évaluer les succès ou les échecs en fonction des critères de la démocratie représentative, le document de réflexion invite à « commencer par examiner les fonctionnalités du web ».

La politique dans des espaces non politiques : Internet permet à des personnes ayant des intérêts communs de former des communautés, qui peuvent s’engager dans des espaces non politiques. Aujourd’hui, l’opinion des citoyens européens se forment partout ailleurs que sur les sites de l’UE.

De nouveaux modes de participation politique : Internet réduit les coûts d’échange de l’information et de collaboration en permettant l’« externalisation ouverte » ou crowdsourcing : « des initiatives qui sollicitent les ressources (intellectuelles, financières ou autres) d’un groupe d’individus ou d’organisations afin d’aboutir à un résultat (décision, produit ou processus) ».

Si les institutions adoptaient ce type d’approche et collaboraient régulièrement avec des groupes d’individus non représentatifs sur des questions très pointues qui les concernent, on constaterait peutêtre que le crowdsourcing sur le web permet une augmentation générale de la participation grâce à des modes d’engagement variés et spécialisés qui mettent l’accent sur des groupes particuliers et des questions particulières.

Internet, un outil de recherche : Internet contient des données et renferme des outils d’analyse qui apportent un nouvel éclairage sur des problèmes déjà anciens, et dont les enseignements pourraient améliorer sensiblement la conception des initiatives en faveur de l’engagement dans les années à venir.

Mais, Internet peut aussi être utilisé pour porter atteinte aux idéaux démocratiques avec la surveillance, la censure et l’absence de responsabilité des acteurs publics face au crowdsourcing.

Au total, la révolution de la démocratie numérique européenne est en marche, mais plutôt que d’opposer des « forces de progrès » cyberenthousiastes à des « rétrogrades » cybersceptiques, la ligne de fracture dépend d’abord de ce que les citoyens et les institutions font ou ne font pas d’Internet, en tant qu’outil fonctionnel de démocratie.

Communiquer sur la valeur ajoutée de l’Union européenne

Aujourd’hui et demain, le Conseil économique et social européen (CESE) organise un séminaire : « Vers les élections européennes – Communiquer sur la valeur ajoutée de l’Europe ». Que prévoit le programme ?

Image-building de l’Europe : les leçons de la « public diplomacy » et du « corporate branding »

Habitué des cénacles européens, encore récemment lors d’EuropCom en octobre, Simon Anholt, l’inventeur du concept de « nation branding » devrait sûrement faire un keynote speech remarqué sur la construction de l’image de marque de l’Europe.

Communiquer sur le coût de la non-Europe

Les rapporteurs d’un avis du CESE « Vers une étude actualisée du coût de la non-Europe » devraient soulever un angle relativement inédit dans la manière de faire avancer le débat sur la poursuite de l’intégration européenne.

En insistant sur le coût de la non-Europe, leur intention serait de pousser les dirigeants et les citoyens à prendre conscience de la nécessité d’une révolution copernicienne dans les relations entre les États-membres, l’UE et le monde.

En regardant les coûts de la non-Europe, notamment les coûts de ne pas terminer l’union économique et monétaire en Europe, l’idée est d’apporter des éléments de preuve pour appeler l’opinion publique à témoin sur le fait que l’Europe n’est pas le problème, mais doit être considérée comme la solution.

Impact de l’évolution du paysage médiatique sur la communication publique

L’eurobloggeur, spectateur et acteur sur la scène européenne, Jon Worth est invité à partager sa vision des conséquences liées au nouveau paysage entre médias traditionnels, nouveaux et sociaux sur la communication des institutions publiques et en particulier de l’UE.

Défis de communication de la campagne des élections européennes

Alors que la campagne de communication du Parlement européen sur les élections européennes se déploie en Europe, la discussion devrait être animée entre les principaux responsables de la communication de l’UE :

  • Stephen Clark, directeur des relations avec les citoyens au Parlement européen
  • Reijo Kemppinen, directeur général, presse, communication, transparence au Conseil de l’UE
  • Ylva Tivéus, Directeur des citoyens à Direction générale Communication de la Commission européenne

Au total, tant le choix des thèmes que des intervenants justifie l’intérêt du séminaire « Communiquer sur la valeur ajoutée de l’UE ». Rendez-vous pour le débrief…