Démocratie numérique européenne : comment Internet révolutionne nos usages de citoyen de l’UE ?

Parce qu’Internet est devenu, ces dernières années, un espace d’innovation démocratique, le Conseil de l’Europe y consacre cette année son forum mondial de la démocratie. Si l’essor d’Internet remet en question le fonctionnement traditionnel de la démocratie représentative européenne, pose-t-il pour autant les fondations d’une « démocratie 2.0 » européenne ? Quels sont les enseignements du document de réflexion pour le Forum mondial de la démocratie 2013 : « Exploiter le web comme outil de démocratie : nouvelles pistes pour l’étude et la pratique de la démocratie numérique » ?

Recul des modes de participation politique « traditionnels » partout en Europe

A l’heure actuelle, partout en Europe, de nombreuses activités démocratiques « hors ligne » comme le vote, l’adhésion à un parti, l’affiliation à un syndicat ou le militantisme sont en déclin.

Bien au-delà de l’abstention aux élections européennes, le rapport note que « les électeurs boudent les urnes, les adhérents se détournent des partis politiques et les citoyens se disent, dans des proportions alarmantes, à la fois méfiants et mécontents de leurs dirigeants politiques ».

Autrement dit, le déficit démocratique spécifique de l’UE tend à se normaliser au sein d’une tendance généralisée au recul de toute forme de participation politique traditionnelle.

Déclin du cyber-enthousiasme d’une démocratie numérique européenne participative

En dépit des attentes la participation politique sur internet n’a pas permis de remédier à ces tendances inquiétantes : le web n’est pas une panacée pour les démocraties en difficulté, y compris pour l’UE.

Le web comme lieu de dialogue et de débat – malgré les tentatives de l’UE avec le forum Debate Europe et bien d’autres projets – n’a pas sensiblement améliorer les pratiques classiques des institutions européennes en matière de consultation et d’engagement.

Le web comme moyen de communication universel et en temps réel – quoique les interactions avec les institutions européennes sont plus régulières et plus ouvertes dans les médias sociaux – n’a pas permis de généraliser l’engagement et de restaurer la confiance des citoyens européens.

Aussi, quand bien même, les élections européennes de 2014 correspondraient avec la généralisation d’Internet lors de la campagne, l’abstention électorale risque de se maintenir, sinon de se renforcer avec la crise.

Vers une nouvelle approche de la démocratie numérique européenne

Plutôt que d’évaluer les succès ou les échecs en fonction des critères de la démocratie représentative, le document de réflexion invite à « commencer par examiner les fonctionnalités du web ».

La politique dans des espaces non politiques : Internet permet à des personnes ayant des intérêts communs de former des communautés, qui peuvent s’engager dans des espaces non politiques. Aujourd’hui, l’opinion des citoyens européens se forment partout ailleurs que sur les sites de l’UE.

De nouveaux modes de participation politique : Internet réduit les coûts d’échange de l’information et de collaboration en permettant l’« externalisation ouverte » ou crowdsourcing : « des initiatives qui sollicitent les ressources (intellectuelles, financières ou autres) d’un groupe d’individus ou d’organisations afin d’aboutir à un résultat (décision, produit ou processus) ».

Si les institutions adoptaient ce type d’approche et collaboraient régulièrement avec des groupes d’individus non représentatifs sur des questions très pointues qui les concernent, on constaterait peutêtre que le crowdsourcing sur le web permet une augmentation générale de la participation grâce à des modes d’engagement variés et spécialisés qui mettent l’accent sur des groupes particuliers et des questions particulières.

Internet, un outil de recherche : Internet contient des données et renferme des outils d’analyse qui apportent un nouvel éclairage sur des problèmes déjà anciens, et dont les enseignements pourraient améliorer sensiblement la conception des initiatives en faveur de l’engagement dans les années à venir.

Mais, Internet peut aussi être utilisé pour porter atteinte aux idéaux démocratiques avec la surveillance, la censure et l’absence de responsabilité des acteurs publics face au crowdsourcing.

Au total, la révolution de la démocratie numérique européenne est en marche, mais plutôt que d’opposer des « forces de progrès » cyberenthousiastes à des « rétrogrades » cybersceptiques, la ligne de fracture dépend d’abord de ce que les citoyens et les institutions font ou ne font pas d’Internet, en tant qu’outil fonctionnel de démocratie.

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