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« Comment Neelie » : la plateforme de commentaires des discours du Commissaire Kroes

Alors que les formes d’engagement du public en ligne avec des responsables politiques sont potentiellement très nombreuses, faute d’imagination, elles se dégradent le plus souvent en fugaces et éphémères apostrophes sans suite. La plateforme de commentaires des discours du Commissaire Neelie Kroes innove et ouvre la voix à de nouvelles pratiques pour les futurs candidats, élus et responsables européens. Pourquoi ?

comment_neelieTout engagement numérique fonctionne d’autant mieux lorsque l’internaute ne part pas de zéro

Fort de ce constat logiquement établit – notamment cette semaine dans « Lessons learnt from online engagement: don’t expect policy co-creation » par David Osimo, le premier intérêt de « Comment Neelie » est de proposer un engagement circonscrit et contextualisé qui repose sur des données plutôt que des impressions.

Chaque internaute peut commenter une phrase de son choix parmi les discours prononcés par la Commissaire européenne. Le dialogue s’établit ainsi sur la base d’une ressource documentée et clairement identifiée, ce qui ne peut que susciter des commentaires potentiellement de meilleure qualité.

Toute curation fonctionne d’autant mieux lorsque les interactions sont faciles à rassembler

Du point de vue de Neelie Kroes, l’ouverture d’une plateforme centralisant les interactions est une solution intelligente pour rassembler aisément les suggestions judicieuses du public, autrement éclatées entre les différents médias sociaux. Pour en prendre connaissance et y répondre ou en tirer des enseignements, la plateforme se révèle un outil précieux et un gain de temps considérable.

Quoique la plateforme encore en version beta pourrait s’enrichir d’une interopérabilité avec les principaux réseaux sociaux (Facebook Connect et dépôt de commentaire sous la forme de tweets), c’est une leçon d’ouverture, de transparence et de maturité numérique qui permet d’établir un dialogue éclairé et simplifié entre un responsable public et les internautes.

En raison de ses nombreux intérêts, il ne serait pas surprenant de voir ce type de plateforme de commentaire de discours se développer lors de la prochaine campagne électorale européenne.

Comment la place de l’UE dans les médias est conditionnée par le respect du pluralisme ?

Les nombreuses transformations du paysage médiatique liées à l’Internet haut-débit, aux nouvelles chaînes de TV ou aux radios numériques peuvent menacer la place de l’UE et de l’information européenne. Un meilleur respect du pluralisme dans les médias pourrait consister à sauvegarder, voire améliorer, la place de l’Europe dans les médias. Quels sont les enjeux et les propositions ?

Convergence web-audiovisuel : sauvegarder l’accessibilité à des « contenus d’intérêt général » européens pour tous les publics

Dans le Livre vert « Se préparer à un monde audiovisuel totalement convergent: croissance, création et valeurs », la Commission européenne s’inquiète que « l’accessibilité de « contenu d’intérêt général », y compris dans l’environnement en ligne, pourrait en pratique être limitée par des décisions d’ordre économique, comme celles des fabricants d’équipement, des opérateurs de plateformes ou, bien sûr, des fournisseurs de contenu eux-mêmes ».

En effet, les évolutions en ligne correspondant aux « mécanismes de filtrage, et notamment la personnalisation des résultats de recherche » sans même parler du social design qui conditionne l’affichage des contenus en fonction de l’activité de l’internaute dans le web social pourraient menacer le rôle des médias dans la formation de l’opinion publique.

Dorénavant, il est plus probable que l’internaute reçoive les informations qui l’intéressent et sous l’angle qui lui convient, ce qui limite la diversité des opinions qui lui sont visibles et aboutit à ce que le public se retrouve, selon les termes de la Commission « en situation de vulnérabilité sans même en être conscient ».

Aussi, le respect de l’accessibilité à des « contenus d’intérêt général », notamment de dimension européenne, sur les plateformes du nouveau paysage médiatique, doit être sauvegardé pour tous les publics. Une préoccupation que n’aborde pas le Livre vert.

Multiplication des chaînes radio/TV : améliorer la visibilité du débat politique européen

Autre évolution, notamment perceptible en France, l’éclatement du paysage audiovisuel avec la multiplication des chaînes de TV, notamment les chaînes parlementaires et d’information en continue pour laquelle la place de l’Europe ne semble pas suffisamment considérée.

Pour améliorer la visibilité du débat politique européen dans les médias audiovisuels français, la Fondation Terra Nova publie une note qui formule des propositions s’appuyant sur le Conseil Supérieur de l’Audiovisuel (CSA).

Dans le cadre du respect du pluralisme et de l’honnêteté de l’information et des engagements européens, le CSA pourrait d’ores et déjà dans le cadre de ses missions :

  • assurer le respect par les chaînes de service public de leurs obligations en matière de débat politique européen et d’information européenne ;
  • assurer un temps de parole équilibré dans les médias audiovisuels aux représentants politiques européens dans les mêmes conditions que les élus nationaux et locaux ;
  • assurer la représentation du débat parlementaire européen dans les mêmes conditions de visibilité et de diffusion des débats parlementaires nationaux.

Les transformations du paysage médiatique doivent être une opportunité pour assurer un meilleur respect du pluralisme européen. Des propositions respectueuses des législations actuelles pourraient être aisément mises en œuvre pour conforter la place de l’Europe dans les médias.

Démocratisation de l’Internet et déficit démocratique de l’UE : pourquoi l’Union européenne ne tire pas profit des nouveaux pouvoirs des internautes ?

Le ministère de la Défense vient de publier une étude sur « Nature et conséquence des réseaux sociaux pour les forces armées », rédigée par l’IFRI et Spintank. La révolution de l’information introduite par les innovations du web social confère de nouveaux pouvoirs aux internautes. Il est particulièrement intéressant de constater que cette démocratisation de l’Internet ne semble pas en mesure de réduire le déficit démocratique de l’UE. Pourquoi ?

Massification des capacités d’expression des citoyens sur les médias sociaux vs. quasi-inexistence de l’Europe dans ce nouvel « urbanisme numérique »

Première innovation, le fait que « la médiatisation de soi à but relationnel devient un standard majeur ». Autrement dit, les usages sociaux « fabriquant de la relation par la création et le partage de contenus en ligne » se sont massifiés à l’échelle de la société.

Le problème de l’UE, c’est d’être prisonnier, selon l’expression de l’étude « d’un « urbanisme numérique » principalement dominé par quelques grands opérateurs de réseaux sociaux, pour la plupart américains, dont la tendance va à la privatisation de l’espace public numérique, c’est-à-dire à la connexion sur leur propre plateforme des activités d’accès aux données de publication et de partage social ».

La quasi-inexistence de l’UE de cet écosystème numérique et donc son incapacité à façonner les échanges sociaux est une préoccupation légitime, qui obère toute possibilité de peser, actuellement, sur cette massification de l’expression des citoyens en ligne.

Mobilisation de masse des citoyens vs. incapacité de l’UE à mobiliser en ligne

Deuxième innovation introduite par les médias sociaux, de « nouvelles formes d’organisation, en masse, par agrégation très rapide pour mener des actions conjointes, demandant à chacun une contribution souvent mineure ».

Certes, ces « mobilisations massives et éclaires » sont à relativiser car d’une part, elles « sont encore concentrées sur des activités purement numériques », et d’autre part, elles « revêtent parfois l’apparence d’un slacktivism, d’une simulation de l’action, qui, de fait, réduit sa portée en se contentant de signes numériques ».

Mais, le bilan à un an de l’initiative citoyenne européenne – l’action de l’UE qui aurait pu saisir cette opportunité de mobilisation des citoyens en ligne – démontre qu’aucune mobilisation (sinon l’initiative sur l’eau comme bien public qui a recueillie plus d’un million de signatures) concernant les affaires européennes ne semble en mesure de tirer profit de ces mouvements sociaux en ligne.

Culture de la transparence et de la vérification vs. communication institutionnelle de l’UE

Troisième innovation issue des médias sociaux, la nouvelle « habitude créée de consulter le web pour vérifier et se renseigner ». « Toute source officielle fait face à une critique rapide, un complément permanent de la part d’une audience devenue active, et disposant de sources en abondance. Ce mouvement existe en parallèle d’un réflexe de confiance dans le web, et dans des sources comme Wikipédia, qui est le corollaire d’une défiance à l’égard des institutions. »

Non seulement, selon les auteurs de l’étude « cette culture rend l’action et la prise de parole des institutions difficile, en les confrontant à une masse habituée à un échange horizontal, volontiers critique, demandant des sources et des preuves accessibles de manière autonome ».

Mais surtout, cette nouvelle culture du partage de l’information se confronte à une communication institutionnelle de l’UE encore relativement peu ouverte, quoique l’open data européen se développe et que certaines institutions européennes tentent le dialogue en ligne.

Du online au offline vs. sociabilités européennes orientées et concentrées sur Bruxelles

« Enfin, dernière mutation, et non des moindres, sous l’impulsion de l’équipement en smartphones, le web est définitivement sorti de son statut d’espace virtuel. Les réseaux sociaux intègrent tous des fonctionnalités de géolocalisation, et s’inscrivent dans le territoire. Le web est une ressource perpétuellement interrogeable et mobilisable, au cœur même de la vie. »

Face à cette évolution visant à interconnecter vie en ligne et « real life » et à placer le web au « cœur même de la vie », l’UE se trouve confrontée à une extrême polarisation vers Bruxelles, poumon de l’espace européen.

Au total, les médias sociaux révolutionnent l’accès, la production et la circulation de l’information en conférant de nouveaux pouvoirs aux internautes et l’UE ne semble pas en mesure d’en tirer bénéfice pour réduire son déficit démocratique.

 

Comment la communication européenne peut s’adapter au nouveau paysage médiatique et numérique ?

Lors d’un séminaire consacré à la communication publique : « s’adapter ou résister » au Conseil de l’UE le 22 mars dernier, de nombreuses pistes pour améliorer la communication de l’UE ont été évoquées. Que faut-il en retenir ?

« Social generation » : comment adapter les sites de l’UE au web social ?

Lors de sa keynote, Mischa Coster – Directeur et co-fondateur de Grey Matters – présente les 3 générations d’adaptation au web social :

  • 1e génération : « follow us » : ajout de renvois vers la présence dans les médias sociaux (comptes Twitter ou page Facebook et chaîne Youtube pour l’essentiel ) ;
  • 2e génération : « share this » : ajout de boutons de partage vers les principaux médias sociaux, notamment Google+ et LinkedIn ;
  • 3egénération : « social by design » : ajout de feeds sur l’activité des amis Facebook et abonnés Twitter sur le site lors de la visite d’un internaute.

Tandis qu’aucun site gouvernemental en Europe n’a atteint la 3e génération pour le moment, les sites sous le portail europa.eu sont davantage au stade de la 1e génération. Sans complication technique, la newsroom de l’UE pourrait ajouter les boutons « share this » à tous les communiqués, permettant ainsi le partage des contenus via les principaux réseaux sociaux.

« Social currency » : comment adapter les messages de l’UE au web social ?

La monnaie sociale est l’ensemble des facteurs qui contribuent à la valeur des messages dans les médias sociaux. Un contenu « viral » est un message à forte valeur, qui s’échange donc en ligne en faisant appel à la vie quotidienne, à l’émotion, au public…

Doté les messages européens de « social currency » consiste, pour les communicants publics de l’UE, à s’engager dans les médias sociaux pour donner un visage à l’Europe et interagir avec les citoyens.

Le potentiel de diffusion des messages dépend de la capacité d’innovation des communicants. Selon Clémentine Forissier – Rédactrice en chef d’Euractiv.fr – bonnes et mauvaises pratiques s’illustrent dans la communication de l’UE : Van Rompuy, et certains eurodéputés sont utiles sur Twitter car ils apportent des informations immédiates et des documents pertinents tandis que les comptes Twitter qui ne délivrent que des annonces d’agenda et des présences dans les médias sont moins intéressants.

« Social engagement » : comment adapter la communication de l’UE au web social ?

La différence entre médias traditionnels et médias sociaux réside dans le fait que les premiers ont une audience forte et un engagement faible, tandis que les seconds ont une plus faible audience mais un plus fort engagement.

Ce fort engagement, le plus souvent, est soi porté par les personnes les plus convaincues, soit par les plus opposées. Dans tous les cas, les opinions formulées dans les médias sociaux sont rarement représentatives de la population.

L’engagement des communicants européens doit donc être innovant et destiné à fédérer les communautés les plus engagées tout en contre-argumentant face aux oppositions.

« Sofactivism, tribalism, trivialization » : comment résister aux inerties du web social ?

Selon Luis Arroyo, le web social conduit également à plusieurs inerties :

  • Sofactivism : l’engagement des internautes dans le web social est très limité et volatile – aux Etats-Unis, moins de 1% des Américains seraient actifs sur le site de pétitions de la Maison blanche ;
  • Tribalism : le web social ne fait pas le lien entre les individus et les messages, il reproduit des tribus parallèles ;
  • Trivialization : le web social se traduit par des engagements sans intérêt ou importance.

Comment convaincre des gens désintéressés d’écouter ? Il n’y a pas de solution toute faite débloquant la participation massive des citoyens. Il faut rechercher des stratégies de participation plutôt que des outils-miracles et s’adresser aux bonnes tribus, qui sont plutôt en marge des institutions.

« Digital Divide » : quelques usages dans les Etats-membres

D’un pays européen à l’autre, les usages sont très différents :

Diane Oswald, Directrice de l’information du bureau du Premier ministre de Malte indique qu’une personne sur 4 est sur Facebook et qu’à l’occasion des dernières élections, plus de 10% ont « liké » la page officielle qu’elle tient.

Johannes Kleske, cofondateur de Third Wave donne des clés de compréhension de la sphère numérique allemande. Une schizophrénie liée à la vie privée conduit des responsables politiques à militer contre Facebook sur Facebook. En Allemagne tout le monde dit détester Facebook mais, il y a 25 millions d’utilisateurs actifs. Par ailleurs, l’arrogance et l’ignorance des partis traditionnels a poussé le parti pirate. Sinon, l’open data est largement développé dans une relative défiance des institutions publiques.

Daria Santucci, communicante à la chambre de commerce de Turin donne des tendances du numérique en Itale : Internet diminue le fossé de l’accès à l’information, mais augmente la fracture avec la presse. 43% des familles italiennes n’ont pas internet car elles ne voient pas comment elles pourraient s’en servir.

En conclusion, rappelons qu’il a fallu 38 ans pour la radio pour atteindre 50 millions d’utilisateurs, 13 ans pour la TV et 3 ans pour Facebook…

Quelle est la stratégie de communication du Parlement européen sur les élections européennes de 2014 ?

Comment augmenter le taux de participation aux élections européennes ? Si l’opinion des Européens est unanime et connue grâce aux Eurobaromètres, la réponse du Parlement européen se dévoile peu à peu…

Davantage d’informations sur les élections et l’incidence de l’UE dans leur vie quotidienne, c’est la réponse des Européens pour augmenter la participation électorale européenne, selon l’Eurobaromètre Flash 364 « Connaissance des droits électoraux et taux de participation ».

Plus de huit personnes sur dix (84%) s’accordent (et une majorité s’accorde « absolument ») pour dire que la participation aux élections européennes serait plus élevée avec :

  • Davantage d’informations sur les élections au Parlement européen ;
  • Davantage d’informations sur l’incidence de l’Union européenne sur leur vie quotidienne.

Une stratégie « corporate » et opportunément précoce

Selon le compte-rendu du « Working Party on Information » du 30 novembre 2012, quelques grands principes de la stratégie de communication pour les élections européennes ont été présentés par le Parlement européen.

La campagne d’information prévue par le Parlement européen mettra l’accent sur :

  • les valeurs (= ce que l’UE représente, par exemple, les droits fondamentaux et la liberté) ;
  • les politiques (= ce que les institutions font afin de souligner l’importance des décisions du PE dans la vie quotidienne des citoyens).

Contrairement à la campagne « marketing » lors des élections européennes de 2009 qui portait sur la notion de choix individuel lors du vote, l’approche pour 2014 serait plus « corporate » avec un accent sur les valeurs à la base de la construction européenne. Une réorientation sur l’essentiel qui se justifie par le contexte de crise en Europe et de l’Europe au sein des opinions publiques.

Autre nouveauté, la précocité « opportune » du début de la campagne de communication, ce qui permettra d’assurer une meilleure coopération – entre les institutions européennes et avec les États membres – cruciale pour transmettre des messages crédibles et cohérents à tous les publics.

D’ailleurs, le Parlement européen a demandé aux États membres de désigner un point de contact afin d’unir leurs efforts pour coopérer à la mise en œuvre harmonieuse de la stratégie de communication du Parlement européen pour les élections européennes.

D’une certaine manière, la campagne pour l’Année européenne des citoyens en 2013 agit comme une répétition générale afin de sensibiliser et d’interagir avec les citoyens et les multiplicateurs par tous les moyens.

Une communication « digital » et résolument désintermédiée

Lors d’un petit déjeuner « Keep Calm and Communicate » le 20 février à l’European Internet Foundation, les principaux responsables de la communication du Parlement européen ont précisé les contours de la campagne sur les élections européennes.

Juana Lahousse-Juárez, directrice générale de la DG COMM au Parlement européen s’est exprimée sur la stratégie de communication du Parlement européen, en préparation depuis 2010, basée sur les politiques et les valeurs de l’UE. Elle a expliqué que le Parlement européen fait un effort pour écouter les citoyens et encourager un dialogue entre les députés et les Européens.

Thibault Lesenecal, responsable de la communication web, a présenté la stratégie du PE sur Internet et les médias sociaux :

  • Sur 12 médias sociaux (Facebook en priorité avec 650K fans et 1,8 million en faisant la somme des fans de tous les eurodéputés), le PE est actif pour sensibiliser à ses activités et favoriser la participation des citoyens ;
  • Avec EP Newshub, un agrégateur en direct et en 23 langues des contenus publiés par les eurodéputés dans les médias sociaux, le PE dispose d’une plateforme désintermédiée (sans aucune intervention éditoriale tierce) mettant directement en relation les citoyens (du moins les plus intéressés et surtout les journalistes et les lobbyistes) et les eurodéputés.

Jaume Duch, porte-parole et directeur des médias au Parlement européen a également pris la parole pour donner une synthèse de comment tous ces outils seront utilisés pour sensibiliser aux prochaines élections et contribuer à rapprocher les citoyens européens des eurodéputés.

Plus d’un an avant les élections européennes, la stratégie de communication du Parlement européen semble bien en place. Les partis pris « corporate » et « digital » permettront-ils de lutter contre l’abstention ?