Les pétitions adressées au Parlement européen reflètent non seulement leur stature limitée aux yeux du public, mais aussi leur efficacité limitée dans la résolution des problèmes des citoyens, selon une vaste enquête « Renforcer le rôle et l’impact des pétitions en tant qu’instrument de démocratie participative » . Quelles sont les raisons structurelles et les solutions pour faire du. droit de pétition un mécanisme participatif plus accessible, permanent et polyvalent ?
Plus de publicité et de visibilité des pétitions nouvellement enregistrées
Le niveau unique d’ouverture garanti à l’exercice du droit de pétition ne se traduit pas par un niveau équivalent de publicité. Cela devient particulièrement évident lorsque l’on examine le cycle de vie de la pétition et la faible publicité. À ce jour, le public n’a pas accès à la liste de toutes les pétitions déposées, ni aux documents. Alors que toutes les pétitions enregistrées sont disponibles sur le portail dédié, son accès nécessite un enregistrement…
Une politique de publicité plus proactive pourrait aider à attirer l’attention des médias – et du public – sur les pétitions :
• insérer un lien sur la page d’accueil du site du Parlement européen menant au portail dédié aux pétitions ;
• créer un bulletin d’information communautaire à envoyer à toutes les personnes ayant soumis une pétition précédente, ou l’ayant simplement approuvée, ou qui ont choisi de rester informés des pétitions entrantes afin de créer un sentiment de communauté similaire à celui existant au sein des plateformes en ligne non institutionnelles, telles que Avaaz, Change ou WeMove ;
• créer un forum en ligne autour d’une pétition donnée pour permettre une discussion en ligne entre les pétitionnaires, les sympathisants, les observateurs et le grand public ;
• envoyer des e-mails ciblés à la communauté médiatique en fonction du pays ;
• pour les pétitions ayant recueilli un nombre important de signatures (par exemple supérieur à 10 000), la tenue d’un dépôt solennel et une pré-audition pourraient être envisagées ;
• adopter un engagement plus proactif avec les médias sociaux, les médias ainsi que les organisations de la société civile, et le développement d’un format qui transcende les communiqués de presse institutionnalisés et conventionnels actuels.
Au-delà de l’égalité formelle d’accès, une communication proactive et un soutien matériel aux pétitionnaires
Si la démocratie représentative est fondée sur l’égalité formelle, la démocratie participative souligne la nécessité de créer les conditions d’une égalité réelle et substantielle. D’où la nécessité de transfert de pouvoir capables de remodeler ou de recentrer l’environnement participatif global de l’UE à travers le Parlement et en particulier le processus de pétition :
• Une collecte systématique et plus large de données sur les pétitions, et en particulier sur le profil des citoyens qui font usage de leurs droits, pourrait être réalisée. C’est une condition préalable à toute évaluation sérieuse du système de pétition de l’UE ;
• Une publication proactive de toutes les pétitions et de leurs documents connexes en accès libre et accessible au public via le portail dédié afin de permettre à d’autres personnes de soutenir une pétition donnée et de maintenir les partisans réels informés ;
• Un helpdesk dédié offrant la possibilité de déposer une plainte par téléphone ou par e-mail (pas seulement par formulaire en ligne) et de recevoir un soutien et des conseils dans l’exercice du droit de pétition, afin d’éviter la fracture numérique et plus largement une communication bidirectionnelle dans la préparation et l’instruction d’une pétition. Cela pourrait et devrait être un contact avec les personnes sous-représentées, qu’il s’agisse de migrants, de réfugiés et d’autres minorités.
• Une évaluation permanente du système de pétition par les utilisateurs, en étudiant en permanence la satisfaction du pétitionnaire pendant et après le processus de pétition. Ceci est essentiel dans la mesure où l’opinion du citoyen sur l’institution politique est largement influencée par le traitement accordé à sa demande.
Guichet unique pour l’infrastructure participative de l’UE
Aucune solution toute faite ne peut remédier à la fragmentation historiquement ancrée de l’infrastructure participative de l’UE. Cependant, le moment est venu de concevoir un guichet unique en ligne centralisant toutes les contributions du public :
• rationaliser l’utilisation des différents canaux participatifs, en offrant une plutôt que plusieurs passerelles vers l’Union ;
• conseiller en temps réel les citoyens désireux de s’engager, que ce soit pour se plaindre, proposer des solutions ou responsabiliser l’Union, en les orientant vers le canal participatif le plus approprié.
Accroître le profil politique par le biais d’enquêtes, d’auditions et de rapports
Lorsqu’elle enquête sur des pétitions, établit des faits ou recherche des solutions, la commission parlementaire peut organiser des visites d’information, suscitant une couverture médiatique, rehaussant ainsi le profil politique du problème sous-jacent et offrant une crédibilité aux pétitionnaires, renforçant ainsi leur voix et leurs revendications.
De plus, la visite suivie de la rédaction d’un rapport de mission contenant les observations et recommandations des députés européens participant à la délégation, peut déboucher sur une résolution votée par le Parlement en séance plénière, afin de formuler clairement des recommandations visant à traiter et à résoudre la demande des pétitionnaires.
La commission parlementaire peut également décider de soumettre des questions orales à la Commission et/ou au Conseil.
Accroître la visibilité politique par le biais des commissions temporaires d’enquête
Le Parlement européen a le droit, à la demande d’au moins un quart des membres qui le composent, de constituer une commission temporaire d’enquête sur les allégations d’infractions ou de mauvaise administration dans l’application du droit de l’Union. Une commission dispose de 12 mois pour conclure ses travaux par la remise d’un rapport.
En substance, une commission temporaire d’enquête est l’outil de surveillance le plus puissant pour exercer le contrôle politique du Parlement européen sur les États membres. Son simple lancement suscite une large couverture médiatique et peut contribuer à un élan politique majeur pour aborder les problèmes sous-jacents du pétitionnaire.
Publier systématiquement : « Name and shame » ou « Name and fame »
Rien n’empêche la commission parlementaire d’enregistrer l’absence des représentants des États membres à leur audition, et de publier ce constat dans le rapport annuel de la commission, voire de publier le nombre de demandes envoyées par la commission à chaque membre et le nombre de réponses obtenues ainsi que la contribution que chaque réponse apporte à la solution recherchée par les pétitionnaires.
Améliorer la coopération des commissions parlementaires par le biais d’intergroupes, de joint commitee et de co-rapporteurs
La solution la plus prometteuse pour améliorer la coopération de la commission parlementaire est la possibilité d’une procédure conjointe entre plusieurs commissions pour la préparation d’un rapport conjoint, une pratique relativement courante pour la plupart des commissions parlementaires.
Améliorer la capacité et les ressources de la commission dédiée pour la rendre plus efficace et attrayante
Pour assurer la dynamique proactive nécessaire pour orienter et résoudre les problèmes des citoyens à travers les pétitions, il faut un plus grand nombre de personnel et de ressources dédiés, une infrastructure plus importante et plus proactive capable de traiter les pétitionnaires rapidement et de manière satisfaisante.
Il est grand temps de repenser l’infrastructure participative de l’UE avec un ensemble de réformes capables de renouveler l’engagement de l’Union en faveur de la démocratie participative.