Archives annuelles : 2009

Vers un lobbying ministériel auprès des eurodéputés français ?

Selon Euractiv, invités par le ministres des Affaires étrangères Bernard pour évoquer la prochaine mandature, une quarantaine d’eurodéputés français – près de la moitié des élus du scrutin du 7 juin – se sont rendus au Quai d’Orsay, lundi 22 juin, pour rencontrer les ministres dont les portefeuilles couvrent les champs d’activité de l’UE. Le secrétaire d’Etat aux Affaires européennes, Bruno Le Maire souhaite que ce type de réunions informelles ait lieu une fois par mois.

Organisation d’une réunion informelle entre les eurodéputés français et les ministres français : une démarche originale de « lobbying ministériel » auprès des eurodéputés

Objet régulier d’opération de lobbying de la part d’acteurs souhaitant influencer le processus décisionnel, les ministres français s’exercent à cette activité auprès des eurodéputés français, dans un contexte où le Parlement européen influence considérablement les législations nationales.

Les objectifs du lobbying ministériel – au-delà de l’intérêt de créer-entretenir un réseau relationnel – peuvent être multiples :

  • Emergence d’un problème : inscrire ou retarder l’inscription d’un problème sur l’agenda d’eurodéputés français informés des intérêts de la France ;
  • Recherche de solutions : influencer, légitimer ou orienter le choix de solutions préconisées par des eurodéputés français informés des intérêts de la France ;
  • Prise de décision : faire pression pour l’adoption d’une solution ou bloquer la décision d’eurodéputés français informés des intérêts de la France ;

Ainsi, au travers de l’organisation des réunions informelles, la démarche consiste à informer une cible pour tenter d’influencer sa décision.

Elections européennes : Internet au cœur de l’information des citoyens

Alors que ce sont « près de sept individus sur dix âgés de 15 ans et plus qui se connectent au moins une fois par mois à Internet (…) le comportement politique en ligne des Français devient un véritable enjeu », étudié par l’Observatoire Ifop de la netcampagne…

Internet, le média de référence pour se forger une opinion politique

Invitée à préciser l’utilité de chacune des grandes familles de médias pour arrêter leur choix, une nette majorité des personnes interrogées a désigné Internet (56%). Viennent ensuite la télévision (50%), la radio (47%), la presse écrite nationale (44%), la presse écrite régionale (40%) et la presse gratuite (27%).

Internet, une source d’information politiquement neutre pour faire son choix

Fait remarquable, les chiffres varient assez peu d’un électorat à l’autre. Les électeurs du Front de gauche sont les moins enclins (52 %) à juger Internet « utile » pour arrêter leur choix, tandis que ceux de l’UMP plébiscitent ce média à 64%, tout comme l’électorat du MoDem et du NPA (62% tous les deux). En milieu de tableau, on retrouve les électeurs des listes socialistes (56%) et celles d’Europe Ecologie (58 %). Internet arrive donc en tête chez cinq des six principaux électorats, seuls les électeurs socialistes citant davantage la radio.

Internet, un outil principalement utilisé pour des recherches sur l’actualité et dans une moindre mesure sur les candidats et les programmes

Les activités pratiquées au cours de la campagne se sont principalement focalisées sur la recherche d’informations sur l’actualité politique (34%) quoique davantage du côté des cadres et des professions libérales que parmi les employés (31% contre seulement 13 %) et en agglomération parisienne (29% contre 19% dans les communes rurales).

Les activités proprement politiques sont pratiquées par moins de 20% des internautes :

  • 16% ont visité régulièrement des sites de candidats ;
  • 14% ont visionné des vidéos politiques en ligne – « alors que la plupart des état-major politiques ont axé une partie de leur communication « online » sur l’utilisation de ce support » selon le blog E-toile de Touteleurope ;
  • 12% ont visité un blog politique ;
  • 11% ont transféré à des proches des informations sur la campagne.
  • 6% ont participé à des débats en ligne, les plus actifs se recrutant parmi les moins de 25 ans (10% de participants réguliers).

Ainsi, la campagne des élections européennes révèle l’importance devenue forte d’Internet dans l’information des citoyens et a contrario l’importance encore faible d’Internet dans la communication politique.

Quel bilan pour Margot Wallström, la Commissaire européenne chargée de la stratégie de communication ?

Alors que le Conseil européen – qui réunit les chefs d’Etats et de gouvernements des Vingt-Sept – des 18 et 19 juin à Bruxelles, pose notamment à l’ordre du jour la nomination du prochain président de la Commission européenne et du collège des Commissaires, la question du bilan de la Commissaire européenne chargée de la stratégie de communication se pose…

Commissaire chargée de l’environnement au sein de la Commission Prodi (1999 – 2004), Margot Wallström, ancienne ministre sociale-démocrate suédoise est nommée à un poste inédit de vice-présidente de la Commission européenne chargée des relations institutionnelles et de la stratégie de communication en août 2004.

La stratégie de communication de la Commission européenne avec Margot Wallström : placer les citoyens au cœur des politiques européennes

1ère étape : organiser une large consultation démocratique des citoyens sur l’avenir de l’Union européenne afin :

  • d’encourager les citoyens à débattre de l’Union et des politiques européennes ;
  • d’inciter les décideurs à écouter ce que les citoyens avaient à dire.

2005 – Plan D comme Démocratie, Dialogue et Débat

2ème étape : proposer une approche plus démocratique de la communication entre l’UE et ses citoyens prévoyant le passage :

  • d’une communication à sens unique vers un dialogue renforcé ;
  • d’une communication axée sur les institutions vers une communication axée sur les citoyens ;
  • d’une conception venant de Bruxelles vers une démarche plus décentralisée.

2006 – Livre blanc sur une politique de communication européenne

3ème étape : proposer des mesures concrètes pour mieux communiquer avec le public cible :

  • coopération avec les gouvernements des États membres en matière de communication, par le biais de partenariats : d’ici fin 2009, 19 États membres devraient avoir conclu un partenariat de ce type avec la Commission ;
  • déclaration politique de la Commission, du Conseil et du Parlement pour améliorer leurs efforts communs de communication sur une série de thèmes prioritaires : les élections européennes en juin, la commémoration du 20e anniversaire de la chute du mur de Berlin et le changement climatique avec la conférence de Copenhague en décembre marqueront ainsi la communication européenne de l’année 2009.

2007 – Communiquer sur l’Europe en partenariat

Ainsi, la stratégie de communication de la Commission européenne semble avoir relativement réussi avec Margot Wallström à placer les citoyens au cœur des politiques européennes. En revanche, la stratégie de communication de la Commission européenne ne semble pas avoir réussi à placer l’Europe au cœur de la vie quotidienne des citoyens.

La stratégie de communication de la Commission européenne après Margot Wallström : placer l’Europe au cœur de la vie quotidienne des citoyens

1ère étape pédagogique : « renouer les fils d’un dialogue constructif avec les citoyens européens en insistant de manière beaucoup plus pédagogique sur les véritables enjeux de la construction européenne (…) et l’utilité au quotidien de notre appartenance à l’Union européenne », selon Xavier Grosclaude.

2ème étape médiatique : intensifier la création et l’animation de réseaux européens de chaînes de radios et télévisions visant à assurer une couverture plus large des affaires européennes sur les plateformes audiovisuelles connues et appréciés des Européens.

3ème étape politique : refonder la communication institutionnelle de l’UE afin d’unifier à travers une labellisation, par exemple, les prises de parole des institutions européennes et d’« établir une certaine cohérence entre l’identité narrative et l’identité visuelle des activités de communication », selon le « mission statement » de la politique de communication de la Commission européenne publié en mai 2009.

Ainsi, la stratégie de communication de la Commission européenne après Margot Wallström devrait tenter de placer l’Europe au cœur de la vie quotidienne des citoyens en évitant tout particulièrement que le discours européen ne se concentre sur des sujets passionnels totalement déconnectés des préoccupations quotidiennes.

Elections européennes : plaidoyer pour une campagne électorale officielle sur Internet

Afin de mieux faire vivre la démocratie, « la mise en place de règles particulières s’est peu à peu imposée comme une nécessité, lors des périodes électorales, afin que tous les candidats puissent être entendus, de façon relativement équitable, de l’ensemble des électeurs », selon Vie Publique

Conformément aux principes de l’accès équitable aux médias et de l’égalité de traitement entre les candidats :

Organisation d’une campagne d’affichage officielle strictement égalitaire : les candidats ou listes bénéficient d’un traitement strictement égalitaire s’agissant de l’affichage officiel dans la rue.

Organisation d’une campagne audiovisuelle officielle relativement équitable : les candidats ou listes pour les élections bénéficient d’un temps de parole dans la cadre de la campagne audiovisuelle officielle, qui est fonction de leur représentativité au Parlement et de leur résultats lors des élections précédentes.

Interdiction de toute communication politique publicitaire en période électorale :

  • Trois mois avant le scrutin, toute forme de communication électorale publicitaire est totalement interdite :dans la presse, à la télévision, à la radio et même sur Internet, puisque l’achat de liens sponsorisés est interdit : voir billet sur l’enjeu du référencement des sites de campagne).
  • Six mois avant le scrutin, les campagnes publicitaires des collectivités locales sont interdites, afin d’éviter l’auto-promotion des réalisations et de la gestion de la collectivité.

Ainsi, ces règles encadrant la communication politique en période électorale font l’objet d’une règlementation précise scrupuleusement contrôlée, notamment par le Conseil d’Etat ou le Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA).

Conformément à la décision du Conseil Constitutionnel du 10 juin 2009 sur la loi favorisant la diffusion et la protection de la création sur internet :

« en l’état actuel des moyens de communication et eu égard au développement généralisé des services de communication au public en ligne ainsi qu’à l’importance prise par ces services pour la participation à la vie démocratique et l’expression des idées et des opinions » (considérant n°12 relatif à l’article 11 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 sur la libre communication des pensées et des opinions)

On peut considérer qu’il devient nécessaire d’étendre les règles de la campagne électorale officielle à Internet :

Création d’un portail public officiel sur les élections et les candidats strictement égalitaire : les candidats ou listes bénéficieraient d’un traitement strictement égalitaire s’agissant de la présentation de leur matériel de campagne (bulletins de vote et professions de foi en format électronique) et les citoyens auraient accès à toutes les informations officielles sur le scrutin.

Organisation du vote électronique sur Internet afin de lutter efficacement contre l’abstention, notamment des jeunes.

Ainsi, un meilleur usage d’Internet en période électorale permettrait notamment de mieux faire connaitre les programmes des candidats et d’améliorer le débat démocratique.

Puisque l’élection européenne est réputée « ne pas intéresser les citoyens, car ses enjeux sont complexes et les pouvoirs des élus difficiles à cerner. Raison de plus, selon le blog d’Olivier Ezratty, que de se poser les questions de la pédagogie politique et d’un meilleur usage de l’Internet ».

En quoi la nouvelle composition politique du Parlement européen permettrait un meilleur traitement médiatique des débats au sein de cette assemblée ?

Au-delà des réflexions nécessaires sur l’inquiétant recul continu de la participation électorale depuis les premières élections en 1979, Il semble important de s’intéresser aux conséquences institutionnelles et médiatiques des résultats du scrutin européen de juin 2009…

Les résultats du scrutin de juin 2009 : victoire des partis modérés sur les partis d’extrême

Le scrutin se caractérise par un relatif renforcement de la droite et du centre droit par rapport à la gauche :

  • en 2004, victoire de la droite et du centre droit dans 14 États membres et la gauche dans 11
  • en 2009, la droite et le centre droit sont victorieux dans 20 États membres et la gauche dans 7 (Slovaquie, Malte, Danemark, Grèce, Roumanie, Suède, Estonie).

Le scrutin se caractérise également par une relative stagnation des extrêmes (les partis d’extrême droite atteignent un résultat à 2 chiffres dans 8 États membres : Belgique, Pays-Bas, Hongrie, Finlande, Autriche, Danemark, Bulgarie et Italie).

Ainsi, suivant un premier niveau de lecture du scrutin, « face à la crise économique, les Européens ont majoritairement exprimé leur confiance aux forces modérées qui proposaient des réponses européennes aux problèmes », selon la lettre n°399 du 15 juin de la Fondation Robert-Schuman.

Vers une radicalisation des clivages entre les groupes exigeants et les groupes réticents

Quelle que soit la recomposition du paysage politique en Europe, pour prendre un second niveau de lecture du scrutin proposé par Gaëtane Ricard-Nihoul, secrétaire générale de Notre Europe dans « Elections européennes : cinq réflexions pour susciter le débat », « un clivage assez profond semble donc s’installer entre :

  • les Européens exigeants quant à leur représentation à Bruxelles : « ils n’acceptent plus que l’action européenne soit prise en otage par les querelles nationales et qu’il y ait un décalage entre discours et réalité des actes ».
  • les Européens réticents quant à l’intégration européenne : « leur position se renforce par la montée des partis d’extrême droite qui instrumentalisent l’euroscepticisme et par l’exploitation par les eurosceptiques du discours sur le caractère non démocratique de l’UE ».

Conclusion de Gaëtane Ricard-Nihoul, « il faut donc s’attendre à une prochaine législature où les positions se radicalisent quant à la perspective de l’intégration politique de l’UE ». Il s’agit d’un point de vue assez proche de Jean-Dominique Gillani, président de la Fondation Robert-Schuman dans une tribune « Ce que permettra la nouvelle physionomie du Parlement de Strasbourg » dans Le Figaro du 9 juin : « De nouvelles alliances sont possibles pour trouver des majorités sur les textes en discussion. Le rôle pivot du centre droit n’est pas contesté. Il lui permet l’expression d’une nouvelle vision de l’Union, plus politique, plus offensive… ».

Vers une médiatisation des débats parlementaires européens

Selon Gaëtane Ricard-Nihoul, « ‘cette cristallisation du débat sur la nature et la perspective politique de l’Union serait sans doute bienvenue :

  • pour attirer les médias qui aiment la polémique vers le Parlement européen ;
  • pour rendre les options politiques défendues par celui-ci plus lisibles pour le citoyen ;
  • pour mettre au grand jour des divergences fondamentales entre forces politiques et Etats membres, trop souvent mises sous le boisseau.

Avec cette nouvelle configuration politique au Parlement européen, les nouveaux eurodéputés pourraient être davantage présents dans le débat public à condition qu’ils se conforment davantage aux critères de sélection médiatique, notamment :

  • meilleure personnalisation des courants idéologiques à travers des leaders identifiés par les médias ;
  • meilleure spectacularisation des arguments politiques à travers des prises de parole calibrées pour les médias.

Ainsi, les résultats du scrutin impliquent une nouvelle composition politique du Parlement européen qui pourrait également induire un meilleur traitement médiatique des débats au sein de cette assemblée.