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Quelles sont les priorités du futur DG COMM à la tête de la communication de l’UE ?

D’ici quelques jours, un événement particulièrement important va marquer la communication de l’UE : l’actuel Directeur général de la DG Communication au sein de la Commission européenne, Claus Sørensen – en poste depuis la création de cette direction en janvier 2006 – devrait quitter son poste.

Une occasion pour aborder – à la lecture de l’étude sur « les évolutions du métier de communicateur public et de l’organisation des services de communication des institutions publiques » – les temps nouveaux de la communication européenne qui devraient voir évoluer à la fois les métiers, les structures et surtout les relations, notamment avec les citoyens…

Priorité n°1 : renforcer la professionnalisation pour une meilleure maîtrise de la complexité et de la transversalité

Du recrutement de spécialistes de la communication en amont – un concours spécifique existe depuis 2007 au sein de l’UE – à l’évaluation de la performance et des résultats en aval, la priorité du futur Directeur Général est de poursuivre la professionnalisation à tous les niveaux.

En tant que fonction stratégique au sein des institutions européennes, la communication européenne doit renforcer sa maîtrise de la « complexité » :

  • Meilleure maîtrise de la complexité des « publics » simultanément citoyen, électeur, contribuable, usager ou consommateur ;
  • Meilleure maîtrise de la complexité des « enjeux », notamment les attentes liées au web social (temps réel, dialogue, fact checking, open data…).

En tant que fonction opérationnelle au sein des institutions européennes, la communication européenne doit également mieux maîtriser la « transversalité » :

  • Dans le sens de la spécialisation des savoir-faire de la communication (publications, relations publiques, événementiels, médias traditionnels et web social…) ;
  • Dans le sens du conseil, notamment à l’égard des dirigeants et de la formation à la communication des acteurs à tous les niveaux de l’institution.

Priorité n°2 : couvrir les nouveaux territoires émergés : réseaux et partenariats, communication interne et locale

1. Satisfaire la demande ascendante d’accueil et d’information

Résultat d’une double pression : celle des citoyens européens et celle des réformes institutionnelles conduisant à une décentralisation (Représentations dans les États-membres), la demande de proximité, de transparence et de clarté met en cause l’ensemble des structures, des méthodes et des pratiques de la Commission européenne.

Ainsi, la communication européenne doit répondre à cette demande d’accueil et d’information :

  • tantôt il s’agit d’améliorer le service rendu au public, son accès aux droits, sa connaissance et son itinéraire dans les formalités ;
  • tantôt il s’agit plutôt de préparer, d’éclairer ou d’expliquer une réforme ou un projet.

Le développement des « Maisons de l’Europe » rassemblant les Représentations de la Commission et les Bureaux du Parlement européen contribuent à satisfaire cette pression ascendante.

2. Combler les besoins inexplorés de communication interne

Alors que le travail en mode projet au sein d’équipes pluridisciplinaires et multilingues est le quotidien des fonctionnaires européens, la communication interne à la Commission européenne est un territoire à ne pas négliger.

La communication apparaît comme un moyen incontournable de réussite de la réforme des politiques publiques européennes.

3. Assurer le développement des partenariats et des réseaux de communicateurs

Afin d’assurer la pleine puissance de la communication de l’Union européenne, plusieurs réseaux doivent être parallèlement confortés :

  • les réseaux « partenariaux » issus de l’accord interinstitutionnel entre les institutions européennes (Commission, Parlement et Conseil) et avec les Etats-membres ;
  • les réseaux « horizontaux », c’est-à-dire les cellules de communication dans les différentes Directions et Services de chaque institution européenne ;
  • les réseaux « décentralisés/spécialisés » : mise en place et professionnalisation de réseaux de communication homogène comme par exemple le réseaux des experts en médias sociaux.

Priorité n°3 : assurer une pleine appropriation des progrès et outils du web social avec davantage de mutualisation et de cohérence

1. Gérer les formes nouvelles des relations presse et de gestion de l’engagement dans les médias sociaux

Parce que les médias audiovisuels et sociaux se développent avec une amplification de l’image qui décuple considérablement l’émotion et l’impact pour l’audiovisuel et renforce la sensibilité et l’exigence d’information du public via les médias sociaux, la communication européenne doit s’adapter :

  • modification de la vraie fonction des services de presse qui d’apporteurs de faits ou de données, deviennent des apporteurs de réflexion et de « valeur ajoutée » ;
  • modification de la relation avec les journalistes et les citoyens engagés en ligne.

L’engagement des porte-parole sur Twitter contribue à suivre, répondre ou agir en temps réel pour alimenter en informations, répondre aux diverses interpellations et faire face au phénomène de « rumeur ».

2. Développer la mutualisation des pratiques et des contenus grâce au web social

Au-delà de l’engagement des porte-parole – la voie officielle de la Commission européenne – dans les médias traditionnels et les médias sociaux, une pleine appropriation des progrès et outils du web social par l’ensemble des professionnels de la communication bouleverse leur métier :

  • changements dans la gestion et la préparation des décisions entre services historiquement cloisonnés avec une meilleure cohérence de l’ensemble des messages et outils de communication (écrits, interactifs, audiovisuels, événementiels…) ;
  • « mutualisation » au service de la rapidité, de la qualité et de la baisse des coûts.

« Progrès permanents vers plus de professionnalisation, nouveaux territoires de communication, évolution vers plus de légitimité stratégique sans même parler des innombrables évolutions encore à venir… » les priorités de la communication européenne ne manque pas pour le futur DG COMM.

Le futur Directeur Général à la communication devra être un homme ou une femme qui aura le plus besoin de personnalité, d’acharnement et de puissance de conviction. Ses principales qualités seront :

  • ne pas baisser les bras ;
  • accumuler du professionnalisme ;
  • apporter de la valeur ajoutée ;
  • travailler en partenariat ;
  • prendre de la hauteur.

« Ask the President » : à quoi sert la plateforme relationnelle du Président du Conseil européen ?

Ballon d’essai lors de la journée de l’Europe le 9 mai dernier, le Président du Conseil européen réalise une page Facebook « Ask your question » qui s’est transformée en pétard mouillé, selon Cédric Puisney dans « Herman Van Rompuy ou l’éloge du monologue 2.0 », avec seulement 38 questions et 10 réponses dans l’ensemble du week end. Las, une plateforme relationnelle « Ask the President » vient d’être lancée…

Un précédent américain riche d’enseignements

En mars 2009, un projet américain mené conjointement par des médias traditionnels et nouveaux (The Nation, The Washington Times and the Personal Democracy Forum) selon Mashable porte déjà le nom de “Ask the President” Obama, en l’occurrence.

Une participation filtrée par des journalistes : L’idée est de solliciter les internautes pour poser des questions qui sont ensuite reprises – pour les plus populaires d’entre elles (57 179 votes réalisés par 8 056 voteurs) – par des journalistes lors d’une conference de presse spéciale avec le Président américain : “the people’s press conference”.

Une plateforme ouverte aux médias sociaux : Chaque contribution – au-delà du système de vote – peut être partagée sur la plupart des médias sociaux, dispose d’un lien et d’un code dynamique pour être “embedded” dans un blog par exemple. Autant de fonctionnalités que ne propose pas – pour le moment – le site du Président du Conseil européen.

Une valorisation relative des contributeurs : Plusieurs fonctionnalités permettent de rétribuer symboliquement les contributeurs (dépôt anonyme également possible) : géolocalisation, historique des contributions par auteur, liens vers le comptes personnels sur les réseaux sociaux. Par ailleurs, un affichage aléatoire des contributions sur la page d’accueil renforce la visibilité des contributeurs, même occasionnel. Autant de fonctionnalités que ne propose pas – pour le moment – le site du Président du Conseil européen.

Une posture d’écoute plutôt satisfaisante

Normalement conçue par des organisations (entreprises ou institutions) qui souffrent d’un gros bruit négatif sur le web avec des publics qui expriment leurs insatisfactions disséminées dans les réseaux sociaux, la mise en place d’une plateforme relationnelle conduit à canaliser l’énergie des internautes dans une posture constructive visant à assainir le territoire relationnel.

Quoique le Président du Conseil européen souffre plutôt d’une absence de bruit le concernant, la posture d’écoute affirmée sur www.askthepresident.eu : “I am ready to answer your questions.” est plutôt satisfaisante – notamment parce qu’elle laisse entendre qu’il se rend disponible et accepte la remise en cause et la critique.

Une promesse de réponse relativement déceptive

Néanmoins, la promesse d’un dialogue est à exclure. Il s’agit davantage d’un cahier de doléances pour lequel les internautes sont invités à participer et à voter sur les questions qui leur importent le plus pour aiguiller Herman van Rompuy qui se concentrera sur ces sujets dans ses réponses : “I will concentrate on those matters in my answers”.

De plus, comme le remarque Kosmopolito dans “Ask Herman ‘the communicator’ Van Rompuy”, dans la video de presentation – d’une durée inférieure à 30 secondes – la formulation se révèle décevante puisqu’au lieu d’encourager la participation et d’annoncer un effort pour répondre à un maximum de questions intéressante, l’accent est mis sur “maybe not all your questions will be answered”.

Ainsi, la plateforme relationnelle du Président du Conseil européen se révèle difficile à juger de prime abord. Seule la prise en main éventuelle par un public qui reste encore à vraiment définir – l’intégralité de la plateforme étant exclusivement en anglais – permettra de juger de la pertinence de la démarche.

L’Union européenne et les médias sociaux : benchmark des actions de communication

Découvrez et téléchargez ma présentation des principales actions de communication de l’UE dans les médias sociaux : blogs, comptes Twitter, pages Facebook, web-TV / chaînes vidéos et plateformes communautaires…

N’hésitez pas à me signaler en commentaire d’autres actions qui vous semblent importantes.

Communication de l’UE : qui doit maîtriser la prise de parole dans le web social ?

Le web social soulève de nouvelles pratiques pour toutes les organisations, notamment en matière de prise de parole. L’enjeu schématiquement (cf. « Comment la communication européenne peut-elle répondre à la révolution du web social ? ») consiste à passer :

  • d’une communication few-to-many qui repose sur la maîtrise d’une offre de contenus et l’utilisation de canaux de diffusion dans une logique top-down ;
  • à une communication many-to-few qui repose sur l’interaction permanente entre les internautes-citoyens et les « porte-parole » dans une logique bottom-up.

Dans cette transformation, comment s’organise la communication de la Commission européenne et particulièrement la « prise de parole » dans le web social ?

Le service du porte-parole : une légitimité auprès des journalistes mais une culture du web social à acquérir

Créé il y moins d’une décennie, le service du porte-parole de la Commission européenne est l’organe légitime pour maîtriser la parole officielle de l’institution, tout spécialement auprès des journalistes.

Organisé de manière sectorielle en fonction des politiques publiques de l’UE, chaque porte-parole maîtrise dans son champ d’intervention les « éléments de langage » transmis aux médias traditionnels.

Doté récemment de comptes Twitter – 22 porte-parole quasiment tous identifiés par leurs noms « ECspokes » – le service du porte-parole semble avoir été choisi pour porter la voix de la Commission européenne sur ce réseau particulièrement utilisé par les journalistes.

Quoique la présence des porte-parole de la Commission européenne sur Twitter apparaisse plutôt comme une démarche judicieuse – nonobstant la période d’apprentissage plus ou moins longue – il s’agit d’une ouverture aux médias sociaux relativement réduite, puisque les usages envisagés sur cette plateforme se réduiront à un prolongement de l’activité auprès des journalistes, éventuellement élargie à une sphère de bloggeurs-experts-influents…

Les éditeurs et webmasters du portail Europa : une légitimité liée à la présence sur le web mais une mission réduite en matière de web social

Conscient des « potentiels » liés au web social, une poignée d’éditeurs et de webmasters à la Commission européenne interpelle dans une lettre ouverte José Manuel Barroso afin d’« exploiter la puissance d’Internet pour une meilleure communication ».

Inscrit dans une démarche davantage ouverte tant au niveau des émetteurs européens que des plateformes et outils sociaux : « encourager / autonomiser le personnel de la Commission dans l’utilisation des réseaux sociaux pour communiquer aussi sur leurs travail via blogs, réseaux sociaux etc… », l’enjeu d’« offrir de nouvelles possibilités d’engagement du public » est également posé.

Néanmoins, le plan d’actions de la Commissaire à la communication, Viviane Reding préconise la mise en place d’un réseau défensif de « 10 à 15 experts en médias sociaux au sein de la Commission » pour assurer « une surveillance des blogs et les réseaux sociaux et une réfutation instantanée » (mesure 10).

Ainsi, alors que les éditeurs et webmasters semblaient envisager une parole plus ouverte (en termes de médias sociaux et de public), les porte-parole apparaissent comme les « avant-garde » timides pour la communication de l’UE dans le web social.

La communication européenne doit-elle plus attendre du web 2.0 ou du web 3.0 ?

Alors que la « bulle spéculative » du web 2.0 frappe de plein fouet la communication européenne (cf. « L’UE mise sur les fans virtuels » paru dans L’Echo), faut-il davantage attendre du web social ou du « web des objets » pour combler la distance entre les citoyens européens et l’UE ?

La communication européenne en mode 2.0 : l’UE offre une expérience collaborative et déstructurée pour une minorité incluse

Avec le web 2.0, la présence de l’UE sur les différentes plateformes sociales permet aux usagers de créer et de partager entre pairs des contenus enrichis :

  • simplicité : le web 2.0 repose sur de simples interactions entre internautes, une occasion pour l’UE de s’engager avec les communautés d’utilisateurs des différents réseaux sociaux ;
  • utilisabilité : le web 2.0 en plaçant les recommandations au cœur de la dissémination permet à l’UE de bénéficier de nouvelles manières de rechercher et d’accéder aux contenus ;
  • instantanéité : le web 2.0 à travers le temps réel permet à l’UE de développer réactivité et pro-activité en fonction de l’actualité et des préoccupations exprimées en ligne.

Quoique le web 2.0 soit une expérience déstructurée via les différentes plateformes sociales, utilisées elles-mêmes par des communautés encore minoritaires ; il s’agit d’une forme d’engagement, dont l’absence d’investissement de la part de l’UE serait préjudiciable.

La communication européenne en mode 3.0 : l’UE offre une expérience immersive et étendue pour une plus large minorité

Avec le web 3.0, la présence d’agents intelligents de l’UE permet aux usagers de personnaliser Internet selon leurs intérêts et leurs groupes d’amis ou de relations :

  • universalité : le web 3 .0 est indépendant de tout système d’exploitation et de tout matériel (fabricant, marque, logiciel) ;
  • accessibilité : le web 3.0 doit permet de rendre d’autres logiciels accessibles et ouverts aux bases de données diverses (opendata, data-vizualisation…)
  • mobilité : le web 3.0 est indépendant de tout type de support (ordinateurs, smartphones, tablettes).

Quoique le web 3.0 soit encore une expérience coûteuse à déployer ; il s’agit d’une ouverture aux nouveaux usages et aux nouvelles attentes que l’UE aurait tort de mésestimer.

Ainsi, entre l’expérience utilisateur enrichie par l’intelligence collective et l’ouverture multi-support permise par l’intelligence des objets, la communication de l’UE a tout intérêt à investir autant le web 2.0 que le web 3.0.