Peu diserte dans la presse quant à la stratégie de communication de l’UE dans les médias sociaux, la Commissaire Viviane Reding s’est pliée à deux reprises à l’exercice de répondre aux questions parlementaires, écrites par Francisco Sosa Wagner, un eurodéputé espagnol non-inscrit…
Première question du 14 mars 2011 : vive critique contre la diffusion d’information – par le président du Conseil européen – en exclusivité sur Twitter
L’eurodéputé s’inquiète que « l’information selon laquelle les chefs d’État et de gouvernement de la zone euro acceptaient de promouvoir le « pacte de compétitivité » exigé par l’Allemagne comme condition pour augmenter le fonds de sauvetage a, en premier lieu, été diffusée sur le réseau social Twitter par le président du Conseil européen M. Van Rompuy (…) trois heures avant d’être communiqué aux médias traditionnels. »
Effectivement, comme le relate Yann Ollivier, journaliste de l’AFP à Bruxelles sur MediaWatch dans « Les tweets de Van Rompuy le réservé bousculent la bulle bruxelloise » : lors du Conseil européen du 16 décembre 2010, le Président du Conseil européen avait en effet annoncé à la surprise générale sur son compte Twitter @euhvr : « Nous avons un accord sur un amendement du traité » bien avant l’alerte de l’Agence France-Presse : « Accord de l’UE pour changer le traité de Lisbonne et créer un Fonds de secours ».
L’eurodéputé formule alors la remarque suivante :
L’auteur de la présente est bien conscient de la nécessité pour les institutions européennes d’assurer une bonne communication, ainsi que de l’importance qu’ont actuellement les « réseaux sociaux », toujours à la pointe de la lutte pour les libertés publiques (sic). Parmi ceux-ci, le réseau Twitter se distingue par sa grande diffusion. Toutefois, je considère que ces messages devraient être publiés en même temps de manière ouverte, ce qui me paraît faisable et même facile.
En résumé, l’eurodéputé s’inquiète de savoir si la Commission européenne prévoit de généraliser la pratique de diffuser des informations en exclusivité sur Twitter.
Première réponse de Viviane Reding du 19 avril 2011 : « l’utilisation des médias sociaux n’est pas vue comme un obstacle à l’information ouverte, au contraire »
La Commissaire européenne ne peut que constater la réalité de l’importance de Twitter tant auprès des journalistes que des porte-parole de son institution :
La communication doit être adaptée aux instruments que les médias utilisent pour obtenir leurs informations. Par exemple, de plus en plus de journalistes utilisent Twitter pour recueillir des informations. Les institutions de l’UE doivent tenir compte de ces nouveaux outils lorsqu’il s’agit d’informer le public sur leurs décisions et leurs actions. L’utilisation de Twitter est très répandue dans la Commission : Commissaires, porte-parole et certains services communiquent avec leurs parties prenantes à travers ce médium.
Néanmoins, sans contester l’utilisation complémentaire que représentent la diffusion de la communication européenne dans les médias sociaux, la Commissaire européenne réaffirme l’importance primordiale du portail Europa :
Il reste que toutes les grandes déclarations de principe, les propositions, les livres verts… doivent être rendues accessibles sur le portail Europa de l’UE. Les institutions de l’UE gardent Europa à jour et accessible pour le grand public et les parties prenantes de l’UE.
Autrement dit, aucune inquiétude, l’information est d’abord publiée sur le portail Europa et ensuite promue via les médias sociaux. Pourtant, l’eurodéputé Francisco Sosa Wagner exerce un droit de suite.
Deuxième question du 11 mai 2011 : « l’utilisation exclusive ou préférentielle de Twitter par les institutions européennes (…) constitue une discrimination injustifiée »
La diffusion d’informations relatives aux institutions européennes, à ses accords et à ses projets doit être assurée via les médias appropriés en s’adaptant, comme il se doit, aux circonstances et aux progrès techniques.
L’auteur de la présente est bien conscient de l’importance que revêt cette idée aussi élémentaire que nécessaire pour resserrer les liens entre les citoyens européens et l’Union.
Il est bon de recourir à Twitter, à Facebook ou à toute autre application promue par des entreprises américaines qui jouissent d’une diffusion vaste et méritée.
Toutefois, l’utilisation exclusive ou préférentielle d’un média en particulier par les institutions européennes rompt avec le principe de neutralité et ne devrait donc pas être admise.
La Commission n’est-elle pas consciente que le recours à Twitter à défaut d’autres réseaux sociaux, et au lieu de mettre à jour les informations fournies sur les pages officielles constitue une discrimination injustifiée ?
Réponse de Viviane Reding du 16 Juin 2011 : « les médias sociaux sont utilisés pour attirer l’attention vers l’information pertinente sur le site Europa »
Certes, la Commissaire européenne admet la « valeur des médias sociaux » et précise la présence de la Commission dans le web social :
La Commission continue de communiquer en utilisant les médias traditionnels, mais elle explore également les médias sociaux dans le cadre de son mix de communication. La valeur des médias sociaux réside dans leur potentiel de se connecter avec les citoyens, les écouter et dialoguer avec eux et accéder à des groupes d’utilisateurs qui sont moins susceptibles d’être atteints par les médias traditionnels.
L’utilisation de Twitter et Facebook vient compléter l’utilisation des médias traditionnels comme la télévision, la radio et la presse écrite pour informer le grand public sur les politiques, programmes et activités de l’Union européenne. Selon les préférences nationales, régionales et locales, d’autres plateformes de médias sociaux sont utilisés. Plusieurs Commissaires et directions générales utilisent Twitter et Facebook. La Commission a également trois comptes centraux sur YouTube, Twitter et Facebook.
Mais, la Commissaire indique que l’utilisation des médias sociaux demeure limitée :
Indépendamment du type de média social que la Commission utilise, le site Europa reste la source d’information de référence pour les citoyens, les entreprises et les autres parties prenantes. La Commission veille à l’exactitude, l’accessibilité et la pertinence de l’information.
Les médias sociaux sont utilisés pour attirer l’attention vers l’information pertinente sur le site Europa. D’où l’investissement de la Commission déploie pour améliorer continuellement le site Europa.
Ainsi, la place réservée aux médias sociaux dans la communication européenne se trouve particulièrement réduite par Viviane Reding : il ne s’agit que de faire la promotion des informations préalablement diffusées sur le portail officiel.