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Comment faire campagne auprès des citoyens sur l’Europe ?

Plusieurs tables rondes de la conférence annuelle EuropCom fournissent des insights éclairants sur la manière de communiquer et de mobiliser les citoyens européens en vue des futures élections européennes en juin 2024…

La communication du côté des institutions européennes

Mobiliser les électeurs : le pouvoir des communautés

Première table ronde EuropCom, les stratégies visant à favoriser la participation active aux processus démocratiques reposent sur le principe de se concentrer sur les personnes afin d’aider les gens à voter.

Gaia Manco, Chef de service à la DG COMM du Parlement européen présente la plateforme « together.eu for democracy », le projet de participation des citoyens du Parlement européen :

Action : les institutions doivent toujours fournir des contributions, des espaces, des outils, une éducation et une formation, mais les solutions finales doivent toujours venir de la société civile. L’information conduit à l’engagement et l’engagement conduit à la mobilisation. Cela aide à activer un public plus restreint mais plus engagé, prêt à être actif sur le terrain.

Communauté : les gens se rencontrent lors d’événements, c’est pourquoi aucun projet d’engagement ambitieux ne peut être mené par les institutions sans impliquer les personnes sur le terrain. Les réseaux sociaux ne suffisent pas, l’idée est d’être aussi inclusif que possible.

Inconnu : quelque chose qui doit être accepté, tout projet d’engagement est une co-création des institutions et des communautés, donc le résultat ne peut pas être connu à l’avance.

Informer les électeurs : souligner l’impact des décisions de l’UE sur la vie des gens

Jens Mester, Chef d’unité à la DG COMM, présente plusieurs enquêtes démontrant que l’une des principales raisons pour lesquelles les gens ne votent pas aux élections européennes est le manque d’informations sur l’UE… alors que les gens sont très intéressés à en savoir plus sur l’UE :

  • Montrer l’action politique de l’UE et son impact (discours sur l’État de l’Union, rapport général de l’UE, coins d’apprentissage pour les enseignants et les étudiants) ;
  • Fournir des informations sur les élections et les droits électoraux ;
  • Impliquer les personnes, y compris les jeunes, dans la démocratie européenne (Initiative citoyenne européenne, suivi de la Conférence sur l’avenir de l’Europe, plateforme « Have your Say ») ;
  • Travailler en collaboration avec d’autres acteurs / activer des partenaires et des réseaux.
  • Activer les bénéficiaires des programmes de financement de l’UE ayant la responsabilité de mobiliser les gens en faveur de l’UE.

La communication du côté des novations

La technologie numérique et le changement démocratique : de la macro-politique à la micro-politique

Autre table ronde EuropCom, Rachel Gibson, Professeure de politique à l’Université de Manchester partage les résultats d’un projet Horizon 2020 sur lequel elle a travaillé pendant cinq ans consacrés au développement de la relation entre les technologies numériques et la démocratie.

Au début de l’ère d’Internet, les praticiens étaient très optimistes et idéalistes quant au rôle des technologies numériques dans l’amélioration de la démocratie. Cet optimisme s’est maintenant dissipé avec l’avènement des fausses informations, des discours haineux et du capitalisme de surveillance.

Les changements structurels qui se produisent en politique grâce à la technologie numérique font dissocier la macro-politique relevant de la démocratie pré-numérique, tandis que la démocratie post-numérique fonctionne au niveau de la micro-politique, des formes de mobilisation introduisant de nouvelles voix dans l’arène politique, au risque d’une privatisation de l’espace public, et au pire, comme un passage vers une vision de la politique plus « narcissique ».

Au niveau macro-politique, à l’époque des partis politiques de masse, il était important de se demander « Où est la voix du public ? ». Cette question demeure, à la condition que les individus soient exposés à une plus large gamme d’informations pour éviter les effets de chambre d’écho.

Au niveau micro-politique, la nouvelle question « Comment l’engagement micro-politique se traduit-il par un changement sociétal significatif ? » pourrait être facilité pour une meilleure prise en compte des opinions numériques par des partis politiques qui gèrent les influenceurs de manière plus efficace.

Ma liberté d’expression contre vos sentiments : l’importance de la satire dans les démocraties modernes

Fabio Mauri, « Directeur général à la DG MEME », adopte une approche non conventionnelle pour son discours en mettant en avant l’importance de la satire dans la construction de démocraties saines et critiques.

La satire est conçue pour faire réfléchir, pas rire ! c’est un phénomène profondément humain, si l’on songe au rôle du bouffon du roi, figure familière dans les cours médiévales, qui était chargé de partager de mauvaises ou difficiles nouvelles avec le souverain par le biais de la comédie.

Les gens ont tendance à faire plus confiance aux comédiens qu’aux politiciens : « Le rire tue la peur et sans peur, nous ne pouvons avoir aucune confiance ». La question de la confiance versus le scepticisme ironique en est était au cœur des débats sur les sociétés démocratiques saines et la confiance que nous avons ou n’avons pas envers les politiciens.

La préoccupation correspond à une tendance croissante à la rectitude politique à tout prix et à une méfiance qui l’accompagne à l’égard de tout ce qui ressemble à de la satire – une sorte d’allergie à la satire. Le fait que vous soyez offensé ne vous donne pas raison. Le rôle de la satire en politique et dans l’espace public plaide en faveur d’une plus grande tolérance à l’égard des opinions qui pourraient ne pas être en phase avec les vôtres, mais qui font néanmoins partie du débat, des désaccords et de la critique essentiels à une démocratie saine. La satire veut exagérer les problèmes pour que vous puissiez les regarder sous un autre angle.

Connaissez-vous #EUBeachCleanup ? C’est la campagne de communication européenne du moment !

A l’occasion de la proximité de la date du 16 septembre, qui comme vous ne le savez pas encore est la Journée internationale du nettoyage des littoraux, c’est l’occasion de présenter rapidement la campagne de communication #EUBeachCleanup qui s’inscrit dans la démarche d’une campagne mondiale pour des océans propres et sans plastique…

Qu’est-ce que le #EUBeachCleanup ?

Le #EUBeachCleanup est une campagne organisée, depuis plusieurs années, par la Direction générale des affaires maritimes et de la pêche de la Commission européenne (DG MARE), en collaboration avec les Nations Unies… ainsi qu’en partenariat avec les Schtroumpfs.

L’objectif est de sensibiliser à la pollution marine et à l’impact de nos habitudes sur notre océan. Jusqu’à 37 millions de tonnes de déchets plastiques atteindront l’océan chaque année d’ici 2040.

La campagne comprend des événements de nettoyage organisés par des institutions (délégations et représentations de l’UE, centres Europe Direct, bureaux régionaux des Nations Unies, etc.), des ONG et des citoyens souhaitant organiser leur propre événement. Tout le monde est encouragé à unir ses forces au niveau local (avec, par exemple, les ambassadeurs du pacte climatique, les écoles, les municipalités, etc.).

Comment « rejoindre la vague » ?

Soit rejoindre un événement près de chez vous, soit organiser votre propre événement, une application mobile est à disposition ainsi que des visuels et des ressources notamment pour les médias sociaux.

Toutes les informations peuvent être retrouvées sur le site en ligne dédié.

Panel de citoyens européens sur les mondes virtuels

Formule clé dans le prolongement du débat citoyen, les panels de citoyens organisés par la Commission européenne se poursuivre, le plus récent qui vise à développer des mondes virtuels européens justes et désirables, vient de livrer ses recommandations, tout un programme…

Les mondes virtuels dans le travail et les marchés du travail

Recommandation 1 : les marchés du travail dans les mondes virtuels européens

Destinée à ceux qui souhaitent accéder au marché du travail virtuel européen, les citoyens recommandent d’évaluer, d’adapter et d’harmoniser la législation pour le monde virtuel européen afin de réguler l’accès au marché de l’UE en fonction du respect des droits et protections du travail de l’UE afin de protéger les travailleurs européens et de préserver le marché unique du travail européen.

Recommandation 2 : création d’une formation harmonisée pour le travail dans les mondes virtuels

Pour l’égalité et l’inclusion pour tous les Européens, les citoyens recommandent la mise à disposition d’une formation et d’une mise à niveau des compétences sur les mondes virtuels, financée par l’Europe et harmonisée dans toute l’Union européenne faisant l’objet d’une certification et d’une reconnaissance mutuelle des qualifications afin que ceux dont les emplois sont rendus obsolètes par les mondes virtuels reçoivent un soutien et une requalification suffisants pour s’adapter à la nouvelle réalité.

Soutenir l’innovation et le développement des mondes virtuels

Recommandation 3 : examen régulier des lignes directrices européennes pertinentes existantes sur les mondes virtuels

Nous recommandons un examen et une mise à jour périodiques des lignes directrices existantes de l’UE concernant les normes éthiques et technologiques, ainsi que leur adaptation et leur application aux mondes virtuels, en tenant compte de la contribution des experts et de l’approbation du Parlement européen.

Recommandation 4 : soutien financier au développement des mondes virtuels

Nous recommandons la mise en place d’un cofinancement européen pour le développement d’une construction centrée sur l’expansion des mondes virtuels afin de définir les critères de prise en charge et de la mise à disposition du financement.

Public & privé : classement & enregistrement des mondes virtuels

Recommandation 5 : forums participatifs pour des développements et normes communs

Nous recommandons aux entreprises, aux chercheurs et à l’UE de travailler en étroite collaboration pour développer et réglementer les mondes virtuels conformément aux valeurs de l’UE, en impliquant un financement de l’UE pour les start-ups afin de développer des mondes virtuels conformément aux valeurs de l’UE, telles que la sûreté et la sécurité (des données), la santé, l’humanisme, la transparence, l’égalité d’accès et la liberté.

Recommandation 6 : certification entreprise et utilisateur pour les mondes virtuels

Nous recommandons de délivrer des certificats pour les mondes virtuels, basés sur des normes communes et différents selon le niveau d’utilisation des mondes virtuels et visés par un organisme indépendant garantissant le respect des valeurs de l’UE dans les mondes virtuels utilisés par les citoyens.

Données dans les mondes virtuels : utilisation et protection

Recommandation 7 : mécanisme convivial dans le métaverse pour accepter l’utilisation des données sélectionnées

Nous recommandons un mécanisme obligatoire, standardisé et convivial assurant la transparence des données (qui collecte les données, à quoi servent-elles, comment sont-elles stockées et avec qui sont-elles partagées), à travers lequel l’autorisation d’utilisation est donnée explicitement.

Agence centrale et police pour les mondes virtuels

Recommandation 8 : une police pour agir et protéger dans les mondes virtuels

Nous recommandons d’avoir une institution policière internationale, avec des agents spécialisés et formés, comme Europol afin de lutter contre les délits « classiques » comme ceux du monde réel, les comportements indésirables qui se sont multipliés dans les mondes virtuels (haine, harcèlement…) et la protection contre soi-même ; la prévention par l’éducation demeure la priorité.

Recommandation 9 : l’Intelligence Artificielle au service de la police dans les mondes virtuels

Nous recommandons d’utiliser l’intelligence artificielle dans le métaverse pour aider la police à prévenir, combattre les crimes et contrôler ce qui se passe dans les mondes virtuels ; la définition et l’application des principes éthiques de l’IA devraient être établies par un organisme public européen indépendant, tel qu’une cour constitutionnelle. Les principes éthiques définissant cette IA devraient être similaires à une constitution en démocratie. Cette constitution suivra des principes éthiques définis démocratiquement, et l’IA sera financée, détenue et gérée par l’État.

Apprentissage et éducation sur les mondes virtuels

Recommandation 10 : formation des enseignants aux mondes virtuels et outils numériques

Nous recommandons aux enseignants de l’UE de recevoir une formation sur l’utilisation pratique des outils numériques, les risques, la sécurité et l’éthique dans les mondes virtuels, et sur les nouvelles opportunités d’enseignement via les mondes virtuels, incluant les sujets comme éthique, sécurité en ligne, maîtrise des outils numériques et opportunités d’enseignement des mondes virtuels afin de réduire le fossé numérique.

Recommandation 11 : accès gratuit aux informations sur les outils numériques et les mondes virtuels

Nous recommandons que l’UE garantisse un accès gratuit et facile aux informations pertinentes sur les outils numériques et les mondes virtuels pour tous les citoyens, via notamment une plateforme dédiée aux mondes virtuels afin de souligner les avantages de ces nouvelles technologies.

Durabilité environnementale et climatique

Recommandation 12 : pour un monde virtuel circulaire : droits et responsabilité des citoyens et des industries

Nous recommandons de développer des actions de sensibilisation sur l’empreinte environnementale, et de veiller à ce que les équipements des mondes virtuels s’inscrivent dans l’économie circulaire : recyclables et réparables mais aussi englobant tout le cycle de vie du métaverse.

Recommandation 13 : un monde virtuel vert avec une énergie renouvelable et transparente

Nous recommandons de mettre en place un système de pénalités et de récompenses à imposer aux entreprises travaillant dans les mondes virtuels, afin d’internaliser le coût environnemental de leurs équipements. Les consommateurs doivent pouvoir aussi connaître l’empreinte environnementale de leur utilisation du monde virtuel et faire des choix éclairés avec un système de notation et de traçabilité.

Impact sur la santé et programme de recherche pour les mondes virtuels

Recommandation 14 : mondes virtuels, construisons ensemble un avenir sain de manière responsable

Nous recommandons de mettre en place un programme de recherche intensif sur l’impact des mondes virtuels sur notre santé dans différents domaines de la connaissance comme psychologie, neurologie, sciences cognitives, sociologie, etc.

Recommandation 15 : indicateurs pour des mondes virtuels sains, inclusifs, transparents et durables

Nous recommandons de mettre en place des indicateurs permettant de mesurer les impacts sociaux, environnementaux, mentaux et physiques de l’utilisation des mondes virtuels.

Partage d’informations et sensibilisation pour les mondes virtuels

Recommandation 16 : loi sur les mondes virtuels sur l’éducation et la sensibilisation

Nous recommandons sur la façon d’être un citoyen numérique – de bonnes règles sur la façon de se comporter dans les mondes virtuels ; les citoyens ont la responsabilité d’être actifs dans le débat et l’élaboration des lignes directrices et des politiques.

Recommandation 17 : mes données ne sont pas vos données – « les bonnes données entre les bonnes mains »

Nous recommandons des « termes et conditions » aux entreprises sur la manière dont elles garantissent la sécurité des données personnelles et la transparence pour les citoyens, de manière courte, claire et compréhensible (accessible à tous).

Identité numérique dans les mondes virtuels

Recommandation 18 : développement des infrastructures numériques

Nous recommandons d’assurer l’égalité d’accès aux technologies numériques, à travers la mise en œuvre d’un vaste plan de développement des infrastructures accessibles, abordables et finançables pour tous : pour créer un monde virtuel européen, le point de départ est d’assurer une connexion égale pour chaque citoyen européen.

Recommandation 19 : l’UE doit élaborer des réglementations sur l’identité numérique et sur le moment où autoriser et garantir le droit des citoyens à l’anonymat

Nous recommandons de créer une réglementation au niveau de l’UE sur le moment où vous devez montrer votre identité et quand vous pouvez être anonyme dans le monde numérique. L’anonymat est une question, qui doit être traduite dans une variété de situations grâce à une certaine flexibilité et adaptabilité, afin de préserver la liberté, la convivialité et la transparence.

Connectivité et accès pour les mondes virtuels

Recommandation 20 : accessibilité pour tous – personne n’est laissé pour compte

Nous recommandons que tous les citoyens de l’UE soient en mesure, techniquement et procéduralement, d’accéder et d’utiliser les possibilités du métaverse, conformément à leurs besoins, souhaits et intérêts ; façonné par une collaboration éclairée entre les autorités publiques, les entités privées et la société civile ; l’UE devant assumer la responsabilité de garantir l’égalité des chances pour tous les citoyens de l’UE dans le métaverse.

Recommandation 21 : cadres juridiques pour la transparence et la protection de chacun dans le métaverse – prioriser les groupes vulnérables

Nous recommandons des cadres juridiques clairs éclairés par des recherches en cours sur l’utilisation sûre et positive du métaverse, afin de garantir la protection des groupes vulnérables (enfants, personnes âgées, personnes privées de leurs droits) afin que les droits de toutes les personnes soient protégés.

Coopération internationale et normes

Recommandation 22 : labels/certificats de l’UE sur les applications des mondes virtuels

Nous recommandons d’introduire des labels/certifications facilement compréhensibles et accessibles pour les applications du monde virtuel, afin de garantir leur sécurité et leur fiabilité, facilement compréhensible (par exemple, smileys, lettres : A-B-C-D).

Recommandation 23 : l’UE en tant qu’acteur majeur/pionnier dans les mondes virtuels

Nous recommandons aux États membres de l’UE de s’unir pour devenir un acteur/pionnier commun fort dans le contrôle, la surveillance et la régulation des mondes virtuels, afin de maintenir nos valeurs démocratiques et de les diffuser en fixant le cadre des mondes virtuels sur la base de nos valeurs démocratiques ; il s’agit tant de créer des incitations pour soutenir et stimuler la durabilité et la croissance que de supprimer les obstacles à la participation aux mondes virtuels ou encore de créer des infrastructures suffisantes et fiables.

Prochaine étape : la Commission européenne devrait traduire ses recommandations dans de futures propositions de textes européens.

Consultation De Facto : comment permettre à chacun de mieux s’informer ?

Retour sur la table ronde lors de Médias en Seine, « comment permettre à chacun de mieux s’informer ? » autour de la consultation De Faco, autour d’une réflexion globale sur une information plurielle, vérifiée qui a fait l’objet de 110 000 contributeurs et 2023 propositions, il s’agit d’un projet soutenu par la Commission européenne pour lutter contre la désinformation.

Axel Dauchez, Président et fondateur de Make.org

La consultation a permis de recueillir des réponses sur un sujet sensible auprès d’un très grand public, c’est une matière très riche sur les sujets qui génèrent le plus d’engagement et de consensus.

Principaux enseignements :

  • Sur-prépondérance des fake news, des craintes fortes
  • Sujet de bien s’informer était une préoccupation, c’est dorénavant une priorité, un impact sur la cohésion sociale
  • Convocation de tous les acteurs : l’enseignement à l’école, la régulation des pouvoirs publics, les comportements des citoyens
  • Une sorte d’union sacrée, avec de vrais paradoxes : rupture ou évolution ?

Christine Buhagiar, Directrice régionale Europe de l’AFP

Une consultation positive, on sort d’une attitude passive/critique sur l’information à une envie d’être plus actif, apprendre à douter, se doter d’outils, comment trouver la réalité des faits, c’est un changement de paradigme complet, c’est encourageant.

Une information de qualité, c’est restituer les faits en toute objectivité, c’est dans la charte fondatrice de l’AFP : oublier toute objectivité, aller sur le terrain. Une information exacte ne suffit plus en captant des photos et des vidéos d’observation des faits, le travail journalistique doit prouver par d’autres outils et méthodes que ce qui vient du terrain est vrai dans la lutte contre la désinformation. Aujourd’hui, 140 personnes ne font que de la lutte contre la désinformation, on n’aura jamais pu l’anticiper il y a même 5 ans.

Face au problème du manque de confiance du public dans les journalistes, un tiers des gens fait confiance aux médias. L’une des réponses à ce problème, c’est l’éducation aux médias, sur la base de valeurs, d’éthique. Si les personnes ont des outils de contre-enquête leur permet d’évaluer la qualité du travail des journalistes.

Sylvain Parasie, Sociologue et Professeur des Universités à Sciences Po

Au départ, une grande déstabilisation des pratiques, des troubles liés à la digitalisation. Il y a une extrême exigence des citoyens à l’égard de l’information, une attente très forte, un véritable intérêt : diversité, transparence, concentration.

Une information sur les réseaux sociaux, sans filtre journalistique. Le rôle des journalistes a changé : l’éditorialisation collective d’un média, alors que la circulation des articles est individuelle avec des réceptions très diverses. L’éthique et les standards journalistiques deviennent encore plus important et la pratique du fact-checking se développe aussi au sein de l’audience. La différence entre journalistes et citoyens reste importante, mais les critères de jugement de la qualité de l’information se rapprochent.

La distance avec les médias reste néanmoins importante au sein de la population, il existe aussi des phénomènes d’évitement de l’information avec des personnes très éloignées des médias.

Nathalie Sonnac, Présidente du Conseil d’Orientation et de Perfectionnement du Centre de liaison de l’enseignement et des médias d’information

Une conscientisation finalement dans un monde complexe, tout un chacun participe à la circulation de l’information, générant du bruit, un flux informationnel constant, difficile de s’y repérer. Il y a besoin de repères, d’informations de qualité, de sensibilisation aux médias, il y a un risque que la mauvaise information chasse la bonne, les citoyens en sont conscients.

Face à la crise de confiance, de façon institutionnelle dans toute l’Europe et les Etats-Unis frappe particulièrement les médias, il y a une forte demande pour s’acculturer aux médias et à l’information pour avoir un socle commun : en 2013, institutionnalisation de l’éducation aux médias pour les plus jeunes et en 2022, le renforcement de l’éducation à l’information avec des référents au sein des rectorats.

Aussi, il faut embarquer les familles dans l’univers numérique et le monde de la recherche et de l’université ainsi que les professionnels de l’éducation pour aider les éducateurs à se former eux-mêmes.

Au total, l’éducation aux médias est une priorité afin de développer ses capacités de lecture critique, de renforcer l’éducation au sein du système éducation et qui soit aussi destiné à toutes les générations.

Communication politique européenne : un exercice d’aggiornamento à l’européenne

Face à la polycrise (mot de l’année), c’est toujours plus au cœur que le projet européen est menacé. Les changements des règles financières, avec notamment le plan de relance post-covid, que certains avaient nommé sans doute à tort le moment hamiltonien s’est relativement bien passé. Les évolutions des règles du marché intérieur pour répondre aux subventions des USA de l’IRA (Inflation Reduction Act) contre l’inflation et celles en Europe pour assurer la transition numérique et climatique, ce qui est au cœur de la doctrine européenne, seront une autre paire de manche. C’est vraiment le moment de réviser la vision des Pères fondateurs, un exercice de communication ultra-sensible ? Comment les décideurs européens s’y prennent pour faire trembler les fondations du temple européen ?

Le moment « make or break » : la cacophonie des plans qui s’empilent

Les débats sont publiquement animés en ce moment traditionnellement réservé aux vœux de début d’année, plusieurs Commissaires européens, en particulier Thierry Breton, Margrethe Vestager et Paolo Gentiloni se sont positionnés pour exposer leurs plans afin de réviser les règles du marché intérieur, sachant que France et Allemagne représentent ensemble près de 80% des subventions accordées aux entreprises en 2022 dans un cadre temporaire post-covid.

Thierry Breton, le Commissaire tout terrain hyper-actif plaide pour un assouplissement des règles de subvention aux entreprises et de stimulation de la fabrication industrielle en Europe « Made in Europe » avec une « loi sur les technologies vertes ». Il est également favorable à un fonds européen qui compenserait les aides de pays de l’UE ayant moins de capacité.

Très présent dans les médias, le Commissaire au marché intérieur est le plus concerné par les réponses de l’UE a apporté face à la crise des prix de l’énergies, aux subventions du marchés aux USA et les actions d’ores et déjà engagées auprès des entreprises européennes en particulier par le couple franco-allemand, qui se rejoint au moins sur ce sujet en ce moment.

Margrethe Vestager, la Commissaire à la concurrence s’est également positionnée sur le sujet, en faveur de modifications des règles de l’UE en matière de subventions pour permettre temporairement aux pays de s’aligner sur le programme de subventions américain qui « risque d’attirer certaines de nos entreprises européennes ». Elle plaide aussi en faveur d’un fonds commun de l’UE pour permettre aux pays de subventionner les industries vertes sur un pied d’égalité.

Étonnamment plus classique dans sa communication, ce qui montre la sensibilité du sujet, elle s’est exprimée par écrit, via une lettre destinée aux ministres de l’UE.

Paolo Gentiloni, Commissaire européen aux Affaires économiques et monétaires s’est également immiscé dans la discussion avec une déclaration publique en faveur de 2 piliers : l’allégement des règles en matière d’aides d’État, sans bouleverser notre mode de concurrence et disposer également d’un financement commun pour éviter la fragmentation.

Dans l’ensemble, chacun dans son style, selon son portefeuille et surtout avec des temporalités d’application un peu différentes, les Commissaires plaident pour faire bouger les lignes, ce qui semble globalement acquis et surtout pour un modèle équilibré et juste entre les États-membres, ce qui est le « bon sens européen », mais pas forcément le sens commun des chefs d’État et de gouvernement pour le moment.

Le moment « Davos » : le discours d’équilibrisme d’Ursula von der Leyen

Très attendue après un long silence, la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, s’est exprimée depuis le forum de Davos, un choix discutable, dans le cadre d’un exercice d’équilibre délicat : assurer aux dirigeants européens que leurs entreprises assiégées recevront de l’argent publique européen, tout en insistant sur le fait que l’UE ne devient pas protectionniste.

Sans grande prise de risque et dans une vision de moyen-terme, Ursula Von der Leyen a annoncé une nouvelle loi sur l’industrie Net-Zero qui fixera des objectifs pour 2030 afin d’augmenter le financement des technologies propres et d’accélérer les permis pour les sites de production.

A plus court terme, au sujet des assouplissement temporaires des règles historiquement strictes des aides d’État directes aux entreprises, Ursula Von der Leyen est restée encore à ce stade assez vague en confirmant que l’UE va offrir aux entreprises des « modèles d’allégements fiscaux plus simples » et accélérer le processus d’approbation d’autres efforts d’aide d’État.

Pour tenir le fil et être diplomatiquement correcte, Ursula Von der Leyen a confirmé l’engagement continu de l’UE en faveur du libre-échange et s’est abstenue de critiquer les États-Unis – malgré l’état difficile des relations UE-États-Unis.

Que faut-il retenir ? Qu’un débat aussi sensible n’aurait sans doute pas été autant publicisé il y a quelques années et surtout qu’une feuille de route claire et partagée est indispensable pour aligner les parties-prenantes, sans perdre de temps, pour poser de nouvelles règles pour le marché intérieur.