Archives mensuelles : mai 2010

Vers un « New Deal » financement contre couverture médiatique : l’Europe peut-elle sauver la presse de la crise ?

La crise de la presse gronde, pour ne prendre que quelques exemples français récents :

  • le Groupe Le Monde lourdement endetté fait l’objet d’une offre de rachat de Claude Perdriel, propriétaire du Nouvel Observateur et d’une offre d’entrée au capital de Pierre Bergé et Matthieu Pigasse, patron de Lazard France ;
  • le président de La Tribune Alain Weil vient de céder 78% du capital du quotidien économique à sa directrice générale Valérie Décamp pour un euro symbolique ;
  • Libération, quotidien endetté à hauteur de 12 millions d’euros en 2009, envisage d’augmenter son capital de 3 et 5 millions d’euros.

Les conséquences de la baisse du secteur peuvent être importante sur la démocratie européenne.

Va-t-on assister à un « New Deal » pour sauver la presse : financement de l’Europe aux médias contre meilleure couverture de l’actualité européenne ?

Les propositions d’un rapport du Parlement européen pour améliorer la place des questions européennes dans les médias

Dans une proposition de résolution « sur le journalisme et les nouveaux médias – création d’une sphère publique en Europe » adoptée par la Commission de la culture et de l’éducation du Parlement européen fin mars dernier, le rapporteur Morten Løkkegaard (ancien journaliste et actuellement euro-député danois) formule plusieurs propositions pour améliorer la place des questions européennes dans les médias.

  1. Meilleure couverture de l’Europe sur la télévision publique : mise en place ou renforcement de chartes des services publics de l’audiovisuel afin de garantir la couverture des questions européennes, en particulier dans les journaux télévisés ;
  2. Meilleure couverture de l’Europe via des réseaux de radios et de télévisions régionales : poursuite de l’initiative de la Commission relative à la diffusion paneuropéenne de programmes financés par l’UE sur des réseaux radios (cf. le réseau EuraNet) et de télévisions régionales (projet à venir).
  3. Meilleure couverture de l’Europe par des médias régionaux (PQR) : « des investissements européens peuvent inviter les diffuseurs régionaux à écrire des articles indépendants et critiques sur l’Union européenne ».
  4. Meilleure couverture de l’Europe dans tous les médias : « des partenariats entre les secteurs privés et publics pourraient être la solution pour communiquer les questions européennes. Cela impliquerait d’inviter des professionnels de l’information à prendre en charge les tâches communicatives de l’Union ».

Ces propositions d’hybridation entre information et communication avec des professionnels de l’information prenant plus ou moins en charge la communication de l’UE sont toutes souhaitées « dans le respect d’une totale indépendance éditoriale ».

Les propositions des syndicats des journalistes européens pour que l’UE soutienne le journalisme comme « bien public »

En réponse à la crise du journalisme en Europe et pour protéger le pluralisme de l’information, les syndicats de journalistes de tout le continent lancent une campagne de presse pour que l’UE soutienne le secteur, selon Phillips Leigh dans un article du 20 avril dernier sur EuObserver.

Lors de sa réunion annuelle à Istanbul, la Fédération européenne des Journalistes a décidé de demander à Bruxelles de répondre à la crise dles revenus des médias, sans que cela puisse souffrir aucun compromis sur l’indépendance éditoriale ou la nécessité d’un journalisme crédible et éthique.

Plus précisément, les syndicats envisagent de faire pression sur la Commission européenne et les députés européens afin de pousser les États membres de l’UE à « ouvrir des débats nationaux sur le renforcement du journalisme comme un bien public », qu’il conviendrait alors de davantage subventionné.

Ainsi, qu’ils s’agissent des dernières propositions émanant des institutions européennes ou des syndicats de journalistes européens, l’idée semble germer que l’UE puisse sauver la presse de la crise avec un « New Deal » consolidant financièrement le bien public d’une presse libre contre une meilleure couverte de l’actualité européenne.

Pour la rédaction d’une charte d’utilisation des réseaux sociaux à destination des communicants de l’UE

Où en sommes-nous et que pourrait-il être fait maintenant, en matière de communication de l’UE sur les réseaux sociaux ?

1e étape : publication d’une lettre ouverte de la communauté des éditeurs et des webmasters de la Commission européenne = affirmation de la volonté

En janvier dernier, la communauté des éditeurs et des webmasters de la Commission européenne publie une lettre ouverte destinée au Président de la Commission afin d’« exploiter la puissance d’Internet pour une meilleure communication ».

Le 11 mai dernier, un Twitt de Tony Lockett, un communicant de l’UE, indique que « Barroso est d’accord que la Commission devrait en faire plus sur le web et les nouveaux médias, a demandé à son personnel de faire des propositions ».

Ainsi, la volonté des communicants de l’UE de s’engager sur les réseaux sociaux est posée, mais la réponse institutionnelle – quoique positive – tarde à venir.

2e étape : adoption en commission d’une proposition de résolution du Parlement européen « sur le journalisme et les nouveaux médias – création d’une sphère publique en Europe » = confirmation du soutien

En date du 26 mars dernier, Morten Løkkegaard (ancien journaliste et actuellement euro-député danois) présente une proposition de résolution qui « encourage la Commission et le Parlement à renforcer davantage leurs activités sur les médias de socialisation ».

En particulier, le rapporteur préconise que « les instructions pour le personnel de l’Union devraient être qu’il est plus facile de se faire pardonner d’avoir fait quelque chose, que d’obtenir une autorisation. Ce qui signifie dans un système hiérarchique qu’en cas de nécessité, les fonctionnaires de tous niveaux devraient être autorisés à répondre rapidement aux citoyens comme à la presse ».

Ainsi, le soutien du Parlement européen pour communiquer dans les réseaux sociaux est apportée – quoique la proposition de résolution n’ait pas encore été adoptée en séance plénière mais seulement, pour l’instant, par la commission parlementaire de la culture et de l’éducation.

3e étape : ouverture d’un blog des communicants web de la Commission européenne spécialisé dans la communication sur les médias sociaux

En avril dernier, sous la responsabilité de Bert Van Maele, chef de la section « médias sociaux et promotion » au sein du département web de la DG COMM de la Commission européenne, un blog « Waltzing Matilda » pour « apprendre comment la Commission peut utiliser les médias sociaux pour communiquer avec les citoyens » est lancé.

Les premiers billets lancent la réflexion avec notamment « “The chicken or the egg” dilemma goes social » pour savoir ce qui devrait venir en premier, la stratégie ou l’utilisation des réseaux sociaux ou « Bureaucrats and the web: a strange marriage! ».

Ainsi, la réflexion est en cours actuellement chez les communicants de l’UE sur les modalités (avantages-inconvénients-opportunités-menaces) de s’engager sur les réseaux sociaux.

Quid de la prochaine étape ? Pour la rédaction d’une charte d’utilisation des réseaux sociaux à destination des communicants de l’UE = description de la démarche

Le moment semble venu que les communicants de l’UE rédigent un « how to », un « guidelines » sur comment utiliser les réseaux sociaux pour communiquer sur l’UE.

Dans cette étape, il pourrait être judicieux de s’inspirer du travail du Central Office of Information (COI) « Engaging through social media » destiné aux fonctionnaires anglais ou bien encore du « Reuters’ social media guidelines » publié en mars dernier pour leurs journalistes.

Ces documents se révèlent utiles pour lister des mises en garde initiales (cf. Reuters) :

  • Pensez aux groupes et aux discussions que vous rejoignez : il peut être préférable de ne pas adhérer à un groupe ou de ne pas suivre des participants à un débat allant dans un seul sens ;
  • Pensez à faire usage des paramètres de confidentialité sur les réseaux sociaux…

Mais également pour préciser des principes de base (cf. COI) :

  • Soyez crédible : précis, juste, rigoureux et transparent ;
  • Soyez cohérent : encourager la critique constructive et la délibération en étant chaleureux, honnête et professionnel à tout moment ;
  • Soyez réactif : quand vous avez une idée, partagez là où c’est approprié ;
  • Soyez intégrées : dans la mesure du possible, aligner votre participation en ligne avec d’autres communications « offline ».
  • Soyez en service : n’oubliez pas que vous êtes un ambassadeur pour votre organisation, dans la mesure du possible, communiquer votre position en tant que représentant de votre organisation.

Mais aussi pour formuler des préconisations sur les usages, notamment pour Twitter (cf. Reuters) :

  • Si vous souhaitez utiliser Twitter dans un cadre professionnel, vous devez demander la permission de votre supérieur hiérarchique.
  • Si vous utilisez un Twitter professionnel, vous devez utiliser le mot ‘Reuters’ (pour la Commission, les initiales de la Direction Générale semble se répandre) dans le nom de votre flux, ou ailleurs sur la page.
  • La déontologie professionnelle s’appliquent à Twitter – vous ne doit rien faire qui la compromette.
  • Lorsque vous utilisez Twitter ou les médias sociaux à titre professionnel, vous devriez viser à être « personable » (prestant, élégant), mais sans inclure des éléments non pertinents au sujet de votre vie personnelle.

Ces quelques indications ne sont qu’une sélection non exhaustive de ce que pourrait contenir ce guide d’utilisation des réseaux sociaux pour les communicants de l’UE.

Ainsi, la communication de l’UE sur les réseaux sociaux est en marche, il convient de l’organiser.

Comment améliorer la communication sur les fonds structurels européens ?

Alors que la la politique régionale de l’UE – représentant le deuxième poste de dépenses de l’Union avec plus d’un tiers du budget communautaire – fait l’objet à mi temps de la période du programme (2007-2013) de diverses évaluations, qu’en est-il en matière de communication ?

Des mesures d’information et de communication renforcées pour les États membres et les régions

Suivant le règlement de la Commission n°1828/2006, les mesures d’information et de communication sont renforcées avec le programme 2007-2013 :

Chaque programme opérationnel doit être assorti d’un plan de communication (art. 2-4), comprenant stratégie, définition des cibles, mesures prévues pour l’information et la communication, responsables et budget indicatif

Des exigences minimales (art. 5-9) sont définies concernant l’information du grand public par les autorités de gestion et les bénéficiaires finaux.

Exigences minimales de l’autorité de gestion à destination du public :

  • publication de la liste des bénéficiaires + noms des opérations + montant des fonds publics alloués (une carte interactive des bénéficiaires des Fonds européens en France est en ligne) ;
  • une activité d’information importante lors du lancement de l’OP et au moins une grande action d’information par an, présentant les réalisations de l’OP ;
  • pavoisement du drapeau européen pendant une semaine à compter du 9 mai de chaque année.

Exigences minimales du bénéficiaire :

  • Panneaux d’affichage ou de construction remplacé par une plaque explicative permanente au plus tard 6 mois après la fin des travaux;
  • L’emblème européen, le nom du fonds et le slogan (en France : « L’Europe s’engage ») occupe au moins 25% du panneau et de la plaque.

États membres et régions devraient mettre en réseau (art. 10) leurs actions d’information et de communication afin d’atteindre une meilleure intégration et de tirer des leçons des bonnes pratiques.

Des moyens d’information et de communication améliorés pour la Commission européenne

Responsable de ces moyens, la Direction Générale « Politique Régionale » – la DG REGIO – dispose de trois outils de communication réguliers et complémentaires :

Par ailleurs, la plate-forme « Inform Network » coordonne un réseau de responsables de la communication issus des 27 États membres afin de partager les expériences et les bonnes pratiques, d’identifier comment améliorer la qualité des activités de communication et d’établir des liens avec les réseaux nationaux existants.

Tout ce dispositif est-il optimal pour sinon toucher directement le grand public (par l’intermédiaire du site Internet, par exemple) du moins atteindre les publics intermédiaires clés tels que les responsables politiques régionaux, les acteurs économiques locaux, les journalistes de la PQR, etc. qui relaient l’information en l’adaptant au contexte local ?

Préconisations pour une communication mieux organisée: le rapport Auconie-Lequillier sur la bonne utilisation par la France des fonds structurels européens

Première équipe mixte, associant un parlementaire national (Pierre Lequiller) et un parlementaire européen (Sophie Auconie), le rapport a été remis mercredi dernier, le 12 mai, au Secrétaire d’État aux Affaires européennes, Pierre Lellouche.

Parmi les nombreuses propositions, un chapitre (pp 16 à 18) est consacré à « communiquer, un devoir », dont voici les principales préconisations :

  • communication de l’Etat à l’échelle nationale : les opérations de communication nationale ne devraient pas se limiter au début de la période de programmation mais être relayées à intervalles réguliers au cours de celle-ci (pourquoi ne pas relancer sur France Télévisions les programmes courts « J’avance avec l’Europe » ?) ;
  • communication des Régions à l’échelle régionale : les sites Internet destiné à l’information du public quant aux fonds européens disponibles sur le territoire régional devraient être généralisés et harmonisés (des régions comme le Nord – Pas de Calais n’en disposent toujours pas à l’heure actuelle) ;
  • communication des parties prenantes locales : les Chambres Régionales de Commerce et d’Industrie (CRCI) devraient être investies d’un véritable rôle d’information sur les financements européens destinés aux entreprises, les sous-préfets devraient être reconnus comme les ambassadeurs de la politique européenne de cohésion dans leur arrondissement et les Conseils régionaux et généraux devraient avoir un Vice-président en charge des affaires européennes.
  • communication média : promotion des réalisations à la fois par l’organisation à Bruxelles de stages de formation des journalistes locaux et par l’achat de pages de publicité.
  • communication hors média : mutualisation des nombreux guides et documents d’information.

Ainsi, les préconisations ne manquent pas pour améliorer la communication sur les fonds structurels.

Que préconise le « groupe des sages » sur l’avenir de l’UE en matière de communication européenne ?

Avec pour mission de réfléchir à un projet pour l’Europe, les membres du « groupe des sages » viennent de remettre au Conseil européen un premier rapport sur « les défis à relever et les chances à saisir ». Que préconisent-ils en matière de communication européenne ?

« Plutôt que de se focaliser sur une politique de communication qui confine parfois à la propagande, il serait préférable de communiquer au sujet des politiques, c’est-à-dire d’expliquer en toute franchise la nature des enjeux en présence et les différentes options possibles. Enfin et surtout, les États membres doivent répondre de ce qu’ils font à Bruxelles et des mesures qu’ils prennent pour mettre en œuvre les décisions de l’UE. »

Page 39 du rapport du groupe de réflexion au Conseil européen sur l’avenir de l’UE à l‘horizon 2030

D’une part, la communication de l’UE doit éviter toute approche politique et privilégier une démarche d’information

Pour que la communication européenne soit crédible, le « groupe des sages » estime indispensable d’expliquer l’action de l’UE de manière plus équilibrée.

« L’image de l’UE qui est proposée au public doit être objective et présenter aussi bien les atouts que les points faibles de l’Union, plutôt que présenter celle-ci sous un jour idéalisé ou exagérément pessimiste. »

Par ailleurs, l’UE devrait se donner les moyens de relever ce défi en définissant de nouveaux objectifs et en visant davantage l’obtention de résultats.

Ce point de vue d’une communication européenne non politique mais stratégique est partagée par Viviane Reding, la Commissaire actuellement responsable de la communication qui considère, notamment dans neurope que « la communication de l’UE n’est pas une politique mais un outil ».

Ce point de vue affichant une volonté de franchise s’apparente également à la transparence revendiquée aujourd’hui par les communicants de la Commission européenne tentant de corriger une exhaustivité illusoire par un effort imparfait de clarté.

D’autre part, la communication sur l’Europe des États membres doit prendre ses responsabilités

Pour que la communication européenne soit effective, le « groupe des sages » estime nécessaire que les États membres participent à l’information sur les actions de l’UE.

Une exigence qui se traduit par un double mouvement :

  • d’une part, expliquer les décisions prisent collégialement à l’échelle européenne à Bruxelles,
  • d’autre part, expliquer les actions menées à l’échelle nationale conformément aux engagements européens.

Cet effort visant à assurer la « transposition » de l’information dans un cadre national s’inscrit pleinement dans la stratégie « Communiquer en partenariat » mise en œuvre par les institutions européennes et les États membres.

Ainsi, les préconisations du groupe de réflexion sur l’avenir de l’UE en matière de communication confirment les initiatives actuellement poursuivies.

60 ans de la déclaration Schuman : occasion manquée ou inespérée pour communiquer sur l’Europe ?

Alors que la fête de l’Europe aurait dû permettre de célébrer, cette année, les 60 ans de la déclaration Schuman – le texte fondateur de la construction européenne – le 9 mai 2010 restera dans l’histoire par la réponse apportée par le Conseil EcoFin à la crise de la zone euro. Que reste-t-il aujourd’hui de la déclaration du 9 mai 1950 prononcée par Robert Schuman, ministre des Affaires étrangères français, dans le Salon de l’Horloge du Quai d’Orsay, à Paris ?

« L’Europe ne se fera pas d’un coup, ni dans une construction d’ensemble : elle se fera par des réalisations concrètes créant d’abord des solidarités de fait. » (voir la vidéo de l’INA)

Tant pis, l’occasion de célébrer la « construction d’ensemble » après 60 ans est manquée

N’importe quelle action de communication autour de la commémoration de la déclaration Schuman – quoique fort utile pour faire la pédagogie de la construction européenne : son histoire, ses valeurs, ses politiques… – semble avoir été menée dans la discrétion, sinon l’indifférence :

  • Exposition photographique commémorant le 60e anniversaire de la Déclaration Schuman au Quai d’Orsay
  • Journée portes ouvertes des institutions européennes à Bruxelles

Ainsi, la fête de l’Europe et de son idéal semble avoir été éclipsé au détriment de toutes les actions empathiques et sympathiques qui avaient été programmées.

Tant mieux, l’occasion d’illustrer les « solidarités de fait » avec la crise de l’euro est inespérée

La réunion du Conseil des ministres de l’Économie et des Finances autour des engagements à garantir la stabilité, l’unité et l’intégrité de la zone euro que Jean Quatremer qualifie de « la « nuit du 4 août » de la zone euro » fait la une de tous les médias et l’intérêt de tous les marchés.

L’obscure déclaration des Chefs d’État ou de gouvernement de la zone euro, publiée très tardivement, marque la volonté et le pragmatisme des autorités européennes pour sauver l’une des principales « réalisations concrètes », l’euro, à travers un mécanisme de prêts et de garanties de plus de 500 milliards d’euros, renouvelant les « solidarités de fait » entre États membres de l’Union.

Ainsi, la déclaration Schuman n’apparaît pas comme un monument de l’histoire mais bien comme une méthode d’action d’actualité.

60 ans après, du rêve des pères fondateurs de l’Europe demeure l’espoir des Européens.