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Comment connecter avec les futures générations : évolutions et enjeux des stratégies d’engagement de l’UE avec les jeunes

Face à une jeunesse européenne souvent perçue comme distante, voire désintéressée des institutions de Bruxelles, et dont la participation électorale a longtemps été préoccupante, comment la communication européenne peut tenter de créer un lien pertinent et durable avec les jeunes citoyens ? Quelles stratégies, quels canaux et quels récits peuvent émerger pour passer d’une approche de ciblage classique à une véritable politique d’engagement jeunesse intégrée et continue, entre engagement civique et quête d’authenticité ?

L’UE et les jeunes, du rendez-vous manqué à la tentative de connexion permanente

L’image d’une Union européenne vieillissante, technocratique et complexe a longtemps constitué un repoussoir pour une partie significative de la jeunesse. Les faibles taux de participation des jeunes aux élections européennes (seulement 27% en 2014) en sont le symptôme le plus visible. Pourtant, aucune institution ne peut ignorer la génération qui façonnera son avenir. Le Parlement européen, conscient de cet impératif démocratique et de sa propre légitimité future, a progressivement mais radicalement transformé son approche de communication envers les jeunes au cours des quinze dernières années. D’une simple « cible » parmi d’autres dans les campagnes électorales, la jeunesse est devenue un axe stratégique à part entière, nécessitant des outils, des messages et une philosophie d’engagement spécifiques. Comment s’est réalisée cette mutation, des premières tentatives maladroites aux stratégies sophistiquées d’aujourd’hui ?

1. Du « primo-votant » à l’écosystème d’engagement jeunesse : élargir le spectre

Initialement, l’approche vis-à-vis des jeunes était principalement axée sur leur statut de « primo-votants » ou d’électeurs potentiels à réveiller. La communication était largement concentrée sur la période pré-électorale. La transformation majeure est de comprendre que l’engagement jeunesse ne se décrète pas tous les cinq ans, mais se cultive en continu.

C’est ainsi qu’est né un véritable écosystème d’initiatives :

  • Les rencontres européennes de la jeunesse (European Youth Event) : Lancées en 2014, ces rencontres biennales à Strasbourg sont devenues bien plus qu’un simple événement. C’est un point de ralliement, un lieu de débat direct avec les décideurs, et une emarquee reconnue qui incarne l’ouverture du Parlement aux jeunes.
  • Le programme « School Ambassador » : En intégrant l’éducation à la citoyenneté européenne directement dans les lycées, le Parlement investit dans la formation civique et la familiarisation avec l’institution bien avant l’âge de voter.
  • Les centres « Europa Experience » : Ces espaces d’exposition interactifs dans plusieurs villes européennes offrent une porte d’entrée ludique et pédagogique à l’UE pour un public jeune et scolaire.
  • Une unité et des canaux dédiés : La création d’une unité « Youth Outreach » et de canaux spécifiques comme le compte Instagram @Europarl_EYE témoigne de la reconnaissance de la jeunesse comme un public nécessitant une expertise et une attention particulières.

Cette approche holistique vise à créer des points de contact multiples et réguliers, transformant la relation de ponctuelle à potentiellement continue.

2. Parler jeune (sans faire vieux) : la révolution des canaux et des contenus

Le Parlement européen a compris (parfois après quelques ratés) qu’on ne parle pas aux jeunes aujourd’hui comme on leur parlait auparavant. La mutation la plus visible est celle des canaux et des formats :

  • L’adoption des codes numériques natifs : Les réseaux sociaux et les influenceurs, sont mis au cœur de toute stratégie jeunesse, en particulier TikTok, plateforme incontournable des moins de 25 ans. Il ne s’agit pas juste d’être présent, mais d’adopter les formats courts, visuels, interactifs et souvent humoristiques qui y règnent.
  • Le pouvoir du peer-to-peer et de l’authenticité : La communication la plus efficace auprès des jeunes est souvent celle qui vient de leurs pairs. Le Parlement l’a intégré en encourageant le contenu créé « par les jeunes pour les jeunes », notamment lors des événements EYE, et en collaborant avec des influenceurs qui ont une crédibilité auprès de leur communauté. L’authenticité est la clé : le discours institutionnel trop lisse est immédiatement rejeté.
  • Du message descendant à la conversation : Les plateformes numériques sont utilisées non seulement pour diffuser, mais aussi pour écouter, interagir (via les commentaires, les Q&A, les quiz, et adapter le message en temps réel.

3. De la figuration à l’empowerment : donner la parole (et un peu de pouvoir ?)

Au-delà des canaux, c’est la posture même qui a évolué. Le Parlement européen cherche de plus en plus à positionner les jeunes non comme de simples récepteurs, mais comme des acteurs et des partenaires.

  • Co-création de contenu : Impliquer des jeunes créateurs dans la production de contenu assure non seulement la pertinence du ton, mais donne aussi une voix directe aux intéressés.
  • Dialogue direct avec les décideurs : Les événements comme EYE permettent des échanges directs (et parfois sans filtre) avec les députés et experts permettant aux jeunes que leur opinion est entendue.
  • Influence sur l’agenda politique : Les rapports issus des débats de l’EYE sont transmis aux commissions parlementaires créant un (mince) lien formel entre les préoccupations des jeunes et le processus législatif.
  • Mobilisation citoyenne : En encourageant les jeunes à rejoindre together.eu ou à devenir volontaires pour les campagnes, le Parlement leur offre un canal concret pour s’engager activement.

Le message clé devient : « Votre voix compte » non seulement dans l’urne, mais aussi dans le débat public européen.

Les défis spécifiques à la communication jeunesse : terrain miné ?

Communiquer avec les jeunes reste un exercice périlleux pour une institution :

  • Le spectre de la récupération : Toute tentative de parler « jeune » ou d’utiliser les codes des réseaux sociaux peut être perçue comme maladroite, voire comme une tentative de récupération cynique si elle manque d’authenticité.
  • La diversité de « la » jeunesse : Parler des « jeunes » comme d’un bloc homogène est une erreur. Leurs préoccupations, leurs usages médiatiques, leur niveau d’intérêt pour la politique varient énormément selon les pays, les milieux sociaux, les niveaux d’éducation… Une communication efficace doit être segmentée et nuancée.
  • La vitesse de l’obsolescence : Les plateformes, les tendances, les codes changent à une vitesse fulgurante. Ce qui était « cool » hier est « cringe » aujourd’hui. Cela demande une agilité et une veille constantes.
  • La fatigue de la sollicitation : Les jeunes sont sur-sollicités de toutes parts. Pour émerger, le message européen doit être particulièrement pertinent, créatif ou utile.

Communiquer avec les jeunes, un investissement stratégique pour la légitimité future de l’UE

La transformation de la communication du Parlement européen envers les jeunes est l’une des évolutions les plus significatives et stratégiques de ces quinze dernières années. En passant d’un ciblage électoral ponctuel à un écosystème d’engagement continu, éducatif et interactif, l’institution ne cherche pas seulement à améliorer la participation électorale. Elle investit dans sa légitimité démocratique future et dans la formation d’une citoyenneté européenne active pour les décennies à venir.

Les succès sont réels (hausse de la participation jeune en 2019, vitalité des programmes comme EYE), mais le travail est loin d’être terminé. L’avenir passera sans doute par une personnalisation accrue des messages (via l’IA ?), une intégration encore plus poussée de la voix des jeunes dans l’élaboration des politiques (au-delà du symbolique), et une innovation constante dans les formats et les canaux pour maintenir la pertinence.

L’enjeu est de taille : réussir à faire de l’Union européenne non pas un héritage poussiéreux, mais un projet pertinent, désirable et appropriable pour les générations qui en seront demain les principaux acteurs. La communication, lorsqu’elle est authentique, créative et responsabilisante, a un rôle crucial à jouer dans cette entreprise. Le Parlement européen semble l’avoir compris et s’être engagé sur cette voie. Reste à transformer l’essai sur la durée.

L’Union européenne face à la guerre des récits : la nouvelle grammaire du pouvoir

A Bruxelles, la saison de la négociation de la prochaine programmation budgétaire pluriannuelle à partir de 2027 commence, c’est un laboratoire à ciel ouvert des mutations qui secouent et secoueront l’ensemble de notre Union. Comment mieux comprendre les nouvelles règles du jeu ? L’ère de la communication politique comme simple exercice de persuasion programmatique est révolue. Nous sommes entrés dans l’âge de la compétition narrative. La victoire n’appartient plus à celui qui a le meilleur projet, mais à celui qui impose le récit le plus puissant pour convaincre et rassembler.

I. Déconstruire la nouvelle grammaire du pouvoir

Les contours de cette nouvelle grammaire se dessinent sous nos yeux :

1. La bataille pour la définition du « peuple » 

Les programmes qui seront retenus dans les budgets seront ceux qui seront parvenu à s’adresser à « tous les Européens », réussissant à incarner une définition du « peuple » dans laquelle une majorité d’électeurs se reconnaîtra, ou aspirera à se reconnaître.  

Cette réthorique s’est installée avec les mots du penseur britannique David Goodhart sur la fracture entre les « Anywheres » – l’élite mobile et diplômée – et les « Somewheres », cette majorité attachée à un lieu et à une identité locale. C’est aussi la « France périphérique » décrite par le géographe Christophe Guilluy, qui se vit comme culturellement et économiquement déclassée par les métropoles mondialisées.

Ce « peuple » n’est pas une entité sociologique, mais une construction mythologique. Il peut être,   le « peuple des travailleurs » contre les « élites mondialisées », le « peuple enraciné » contre le « nomadisme cosmopolite », ou le « peuple des oubliés » contre les « centres-villes gentrifiés ». Les priorités budgétaires deviennent un référendum sur l’identité du peuple.

2. Du clivage idéologique au conflit existentiel

L’axe droite/gauche, qui structurait le débat autour de la redistribution des richesses et du rôle de l’Europe, s’efface au profit de clivages existentiels, plus explosifs :

  • Le populisme comme technologie de combat : Il ne s’agit plus d’une simple posture. C’est une méthode : définir un adversaire clair (l’élite, l’immigré, Bruxelles), dénoncer une  » domination culturelle » et transformer le débat politique en un spectacle « survitaminé », une lutte permanente pour la survie culturelle.
  • L’Europe, ligne de front : Le clivage « ouverts vs. fermés » ou « Européistes vs. Souverainistes » est devenu le principal organisateur du chaos. Il n’est plus une question de politique étrangère, mais une question du qui nous sommes. L’Europe est le symbole parfait de « l’autre » pour les uns, et le projet civilisationnel ultime pour les autres.
  • L’identité, « la politique sous acide » : Lorsque la politique ne porte plus sur ce que nous faisons ensemble mais sur ce que nous sommes les uns contre les autres, le débat devient irrationnel. L’adversaire n’est plus celui qui a une mauvaise idée, il devient l’ennemi qui menace notre existence même.
  • La rupture apocalyptique : Le clivage final, et le plus dangereux, oppose les « pro-apocalypse » (qu’ils soient écologistes radicaux ou « woke », convaincus de l’effondrement imminent du système) aux « survivalistes » (cette alliance contre-nature de paléo-libertariens et de conservateurs extrêmes qui se préparent au chaos). Ces deux camps, bien que minoritaires, fixent les termes d’un débat où la modération est inaudible.

3. La politique factuelle recule face à la politique fictionnelle

Ce phénomène n’est global. Le succès du Brexit reposait sur un récit simple et puissant : « Take Back Control ». Une définition du « peuple » britannique contre une « bureaucratie de Bruxelles » anonyme. Aux États-Unis, la polarisation entre le « Make America Great Again » et une vision progressiste et multiculturelle de l’Amérique relève de la même logique de guerre narrative.

Et l’Union européenne dans tout ça ? Elle est la victime désignée de cette nouvelle ère. La communication, historiquement, technocratique et factuelle, basée sur les bénéfices (le marché unique, Erasmus, les fonds de cohésion). Nous répondons à des attaques mythologiques avec des communiqués de presse et des fiches d’information. 

II. Pour une boussole stratégique européenne

Il est urgent de changer de paradigme. L’Union ne peut plus être un simple objet de débat dans les politiques nationales ; elle doit devenir un acteur narratif à part entière.

1. Définir notre propre « peuple » européen 

Nous devons cesser de parler des « citoyens européens » comme de simples bénéficiaires de droits. Nous devons construire et incarner le récit du « peuple européen » : une communauté de 450 millions de personnes unies non par l’uniformité, mais par un destin partagé. Un peuple qui a choisi la paix sur la guerre, la coopération sur la confrontation, la démocratie sur l’autoritarisme. 

Ce récit doit être émotionnel, incarné, visible. Qui sont les héros de l’Europe ? Pas seulement les « Pères fondateurs », mais l’infirmière polonaise travaillant en Allemagne, l’ingénieur espagnol créant une start-up en Estonie, l’étudiant grec en échange en Irlande.

2. Passer de la justification à l’inspiration : le « pourquoi » européen

Inspirons-nous de Simon Sinek : « Start with Why ». Notre communication est obsédée par le « Quoi » (les directives, les budgets) et le « Comment » (les institutions, les processus). Nous expliquons rarement le « Pourquoi ». 

Pourquoi l’Europe ? Parce que face au changement climatique, à l’agressivité des empires autoritaires, aux pandémies et aux révolutions technologiques, aucune de nos fières nations ne pèse quoi que ce soit seule. 

Le « Pourquoi » de l’Europe, c’est la survie de notre modèle de civilisation, de nos libertés et de notre prospérité dans un monde de géants. C’est un projet non pas de domination, mais d’influence ; non pas de fermeture, mais de puissance ouverte.

3. Assumer le conflit positivement

Une communication stratégique efficace n’est pas neutre. Elle choisit son camp. L’Europe est le projet de l’État de droit, de la dignité humaine et de la coopération. Notre adversaire n’est pas le « souverainiste » qui exprime une inquiétude légitime, mais le projet politique qui instrumentalise cette peur pour promouvoir la désinformation, la haine de l’autre et le démantèlement de la démocratie libérale. 

Nous devons nommer et contrer activement les ingérences étrangères et les forces politiques internes qui cherchent à affaiblir l’Europe pour servir des intérêts qui ne sont pas ceux de ses peuples. Il ne s’agit pas d’attaquer des personnes, mais de déconstruire sans relâche les récits toxiques.

La négociation budgétaire de l’UE sera un test de résistance pour la démocratie européenne, mais elle est surtout un avertissement pour nous tous. Si l’Union européenne ne se dote pas rapidement d’une stratégie de communication offensive, capable de livrer et de gagner la guerre des récits, elle continuera d’être le bouc émissaire parfait pour tous les populismes.

L’enjeu n’est plus seulement de convaincre, mais aussi d’inspirer et de mobiliser. L’Europe doit cesser de se raconter comme une solution technique à des problèmes complexes et commencer à s’affirmer comme ce qu’elle est : la plus grande aventure politique de notre temps. C’est à ce prix qu’elle survivra et aura les moyens à la hauteur de cette ambition.

L’Europe au pied du mur : pour une communication de puissance et de projet

L’urgence d’un débat rationnel face au choc des réalités : Le monde qui a présidé à la dernière législature européenne a volé en éclats. Entre la brutalisation des relations internationales, en commençant par notre allié transatlantique traditionnel, la guerre de l’information qui fait rage sur nos écrans et le risque patent d’un déclassement économique et technologique, l’Union européenne fait face à un « choc des réalités » d’une violence inouïe. Comme le disait Raymond Aron, « nous croyons dans la victoire des démocraties, à condition qu’elles le veuillent ». La question qui nous est posée aujourd’hui est simple : le voulons-nous vraiment ?

La communication européenne ne peut plus se contenter d’accompagner les décisions. Elle doit devenir le fer de lance d’un sursaut collectif. Elle doit forger la conscience et la volonté d’agir. Inspiré par les débats stimulants des Rencontres Économiques d’Aix, ce papier se propose de tracer une voie, en distinguant les acquis du passé, les requis du présent et les indécis de l’avenir. Notre boussole : la réfutabilité des faits chère à Karl Popper, pour sortir des incantations et affronter le réel.

1. Les « acquis » : un héritage à dépasser

Chaque élection européenne a marqué une étape dans la construction d’une communication politique continentale. Cet héritage est notre point de départ, mais il est aujourd’hui insuffisant.

  • 2009 : l’émergence d’un espace public européen. La communication a commencé à traiter l’UE comme un ensemble, posant les premières pierres d’un débat transnational.
  • 2014 : la personnalisation d’une scène politique. Le processus des Spitzenkandidaten a donné un visage à l’alternative politique européenne, transformant une abstraction institutionnelle en une compétition incarnée.
  • 2019 : la mobilisation par la polarisation. Face à la montée des populismes, la communication a adopté un ton « partial », opposant pro-Européens et europhobes. Cette stratégie a payé en termes de participation, mais a aussi contribué à fracturer le débat.
  • 2024 : la prise de conscience des « communs européens ». La campagne a mis en lumière ce que nous partageons et devons protéger ensemble : notre sécurité, notre modèle social, nos transitions climatique et numérique.

Ces acquis sont réels, mais ils correspondent à un monde révolu. L’heure n’est plus à la simple défense d’un modèle, mais à la construction active de notre survie et de notre prospérité dans un environnement hostile.

2. Les « requis » : forger un récit de puissance et de projet

Le mandat qui s’ouvre exige un changement radical de paradigme communicationnel. Il ne s’agit plus de convaincre de l’utilité de l’Europe, mais de mobiliser pour la rendre puissante. Il faut passer à une « Europe de faire ».

A. Communaliser les cultures publiques nationales

Notre plus grande vulnérabilité est la fragmentation de nos espaces publics, exploitée par la désinformation. La Russie, comme le souligne Tidhar Wald, obtient en Moldavie par l’influence ce qu’elle ne peut obtenir par les armes en Ukraine.

La communication européenne doit donc :

  • Créer des ponts, pas seulement des bulles : contrer la polarisation algorithmique en créant des formats et des espaces de débats transnationaux qui ne se contentent pas de renforcer les convictions, mais qui exposent à l’altérité.
  • Armer l’esprit critique : le combat n’est pas tant dans la fabrique de l’opinion que dans la définition de l’agenda. La communication doit éduquer aux mécanismes de la désinformation, promouvoir la vérifiabilité des faits et résister à la dictature de l’émotion et de l’accélération.
  • Incarner la confiance : face à une science devenue « invisible », la communication doit porter la voix de la recherche collective, du vetting des connaissances, avec clarté et émotion, en s’appuyant sur des relais de confiance.

B. Mieux intégrer et gérer les biens communs publics européens

La souveraineté se mesure à notre capacité d’agir. La communication doit rendre tangibles les projets qui la construisent, en sortant de la « langue de coton » technocratique :

  • Raconter le projet, pas seulement la norme : l’Europe souffre d’une approche par le droit et la norme, conséquence de sa construction (Nicolas Dufourcq). La communication doit changer de focale : parler de l’Union des marchés de capitaux non pas comme d’une directive, mais comme du moyen de financer nos futurs champions technologiques et la transition écologique.
  • Faire du marché unique une épopée quotidienne : Enrico Letta le rappelle, nous sommes des « colons » numériques des États-Unis. La communication doit illustrer ce que signifie un marché unique réellement intégré pour les services, les données, l’énergie. C’est un combat pour notre prospérité.
  • Assumer le langage de la compétitivité : L’Europe a été construite pour les consommateurs (Patrick Pouyanné). Il est temps de parler aux producteurs, aux innovateurs. Le rapport Draghi est un électrochoc. La communication doit en être l’amplificateur, en martelant la nécessité d’investir, de protéger nos industries et d’alléger le fardeau réglementaire qui freine l’innovation.

C. Maîtriser notre destin commun stratégique

La « fin du système atlantique » (Hubert Védrine) et l’incertitude sur l’allié américain nous obligent à penser par nous-mêmes. La communication doit traduire cette nécessité en une ambition politique.

  • Passer de la dépendance à l’alliance choisie : Le but n’est pas de s’isoler, mais d’agir pour que l’Europe devienne un partenaire indispensable et non un vassal. Comme le dit Jean-Noël Barrot, « cessons de demander ce que les USA vont faire pour l’Europe, mais agissons pour l’Europe ». La communication doit porter ce message de responsabilité et de force tranquille.
  • Faire de l’autonomie stratégique un projet de société : La défense ne doit plus être un sujet tabou. La communication doit expliquer pourquoi investir dans notre base industrielle et technologique de défense (Sébastien Lecornu, Florence Parly), c’est créer des emplois qualifiés, maîtriser des technologies duales et garantir notre sécurité. Il faut populariser l’idée d’une « souveraineté augmentée » (Emmanuel Chiva).
  • Construire un multilatéralisme d’action : Face à un monde fragmenté, l’Europe peut être l’anti-dote à la brutalisation du monde. Notre communication doit promouvoir des coalitions de volontaires, sujet par sujet (climat, santé, régulation numérique), montrant que notre puissance n’est pas hégémonique mais coopérative.

3. Les « indécis » : naviguer entre les contraintes et les opportunités

Le succès de cette nouvelle communication dépendra de sa capacité à gérer trois variables majeures.

  • La majorité parlementaire : Quelle que soit les évolutions partisanes dans les combinaisons parlementaires plus ouvertes, la réalité géopolitique et économique s’imposera. Une coalition des centres sera plus réceptive au discours de puissance et de compétitivité. Une coalition des droites contreviendrait à l’histoire de la construction européenne jusqu’à aujourd’hui mais pourrait être plus iconoclaste sur les transitions. La communication devra être agile, trouvant les arguments qui résonnent avec la majorité en place sans trahir la vision d’ensemble.
  • La fiction des blocs : Le « bloc occidental » est une fiction (Jean Pisani-Ferry), tout comme le « Sud global ». Cette fragmentation est une chance. Notre communication doit cesser de raisonner en termes de blocs figés pour adopter une approche chirurgicale, s’adressant à des partenaires spécifiques sur des intérêts communs.
  • La langue (de bois, de coton, d’or) : Le plus grand danger est de retomber dans nos travers. La langue de bois des non-dits, la langue de coton de la technocratie et la langue d’or des promesses sans lendemain sont les poisons de la confiance. La nouvelle communication européenne doit être une langue de fer : celle de la lucidité sur les menaces, de la volonté dans l’action et de la clarté sur les objectifs.

De la communication d’accompagnement à la communication de combat

« Soit l’Europe fait face, soit elle s’efface », prévient Florence Parly. Le temps de « Celui qui n’a pas le goût de l’absolu se contente d’une médiocrité tranquille » (une citation de Paul Cézanne, mentionné par Villeroy de Galhau) est terminé. La communication institutionnelle ne peut plus se permettre d’être un simple service après-vente des décisions bruxelloises.

Elle doit devenir une fonction stratégique de premier plan, avec une triple mission :

  1. Avertir plutôt que divertir : protéger le réel dans un monde de post-réalité et de diversion généralisée.
  2. Rassembler plutôt que fragmenter : construire une « fierté collective » (Philippe Wahl) autour de projets concrets qui répondent aux angoisses de nos concitoyens (climat, sécurité, emploi).
  3. Armer plutôt que subir : donner aux citoyens, aux entreprises et aux décideurs les clés de lecture et la volonté nécessaires pour affronter un monde où le rapport de force est redevenu central.

La tâche de la communication européenne pour les cinq ans à venir n’est plus de commenter le match. C’est d’aider l’équipe à le gagner. Il ne s’agit plus de communiquer sur l’Europe, mais de forger, par la communication, la volonté politique d’une Europe-puissance.

Forger le nouveau narratif européen : une Europe bouclier, pionnière, équilibre et promesse

Le récit fondateur de l’Europe – la paix après la guerre – fut un moteur puissant au XXe siècle. Aujourd’hui, face aux défis du XXIe siècle, l’Union européenne doit se doter d’un nouveau narratif qui s’appuie sur ses forces existantes pour projeter une vision d’avenir ambitieuse, désirable et crédible. Ce n’est pas une question de marketing, mais de définition de notre projet politique commun…

L’Europe-bouclier : la promesse de protection dans un monde brutal

Ce premier narratif répond à l’anxiété fondamentale des citoyens face à la fragmentation du monde, aux inégalités et aux menaces. Il positionne l’Europe non pas comme une entité bureaucratique, mais comme le seul bouclier pertinent à notre échelle pour protéger notre modèle de société.

  • Le message clé : Seuls, nous sommes vulnérables. Ensemble, nous sommes une puissance tranquille qui protège votre sécurité, votre santé, votre épargne et votre mode de vie.
  • Les preuves à incarner :
    • Le bouclier monétaire : L’euro, qui a protégé l’épargne de 340 millions de citoyens de l’inflation galopante et des dévaluations compétitives. C’est notre souveraineté en poche.
    • Le bouclier économique : Les mécanismes de filtrage des investissements étrangers protègent nos entreprises stratégiques des prédations. Les sanctions contre la Russie montrent que notre puissance économique est aussi une arme de défense.
    • Le bouclier numérique : Le DSA et le DMA sont les premières tentatives au monde de protéger les citoyens et les entreprises de la puissance dérégulée des géants de la tech.

L’Europe-pionnière : la conquête des nouvelles frontières

Ce deuxième narratif est celui de l’ambition et du projet. Il contre l’image d’une Europe vieillissante et bureaucratique en la présentant comme un continent d’inventeurs, de bâtisseurs et de pionniers, capable de mener les grandes transformations du siècle.

  • Le message clé : L’avenir ne se subit pas, il se construit. L’Europe est le meilleur endroit pour inventer le monde de demain : un monde plus vert, plus numérique et plus juste.
  • Les preuves à incarner :
    • La conquête écologique : Le Clean Industrial Deal n’est pas une contrainte, c’est le plus grand projet de modernisation industrielle depuis 50 ans. C’est la mission de notre génération pour réindustrialiser l’Europe et inventer la croissance décarbonée.
    • La conquête de l’innovation : Le projet d’Union des Marchés de Capitaux n’est pas une abstraction financière, c’est le moyen de financer les futurs champions européens de l’IA, de la biotech, du spatial et des cleantechs.
    • La conquête de la mobilité : Erasmus n’est pas seulement un programme d’échange, c’est la fabrique d’une génération de citoyens européens, le plus puissant de nos soft powers.

L’Europe-équilibre : la troisième voie dans un monde de géants

Ce troisième narratif définit la place et la mission de l’Europe sur la scène internationale. Il offre une alternative à la confrontation binaire entre les États-Unis et la Chine, un modèle de puissance fondé non pas sur la coercition, mais sur la coopération et le droit.

  • Le message clé : Dans un monde qui se déchire entre deux empires, l’Europe n’est pas un vassal, mais un pôle d’équilibre. Nous sommes la puissance qui bâtit des ponts plutôt que des murs.
  • Les preuves à incarner :
    • L’architecte du multilatéralisme : Face à ceux qui veulent détruire l’ordre international, l’Europe est le principal défenseur de la coopération et des institutions qui préviennent le chaos.
    • Le partenaire fiable : Notre capacité à former des coalitions « sujet par sujet » (climat, commerce, sécurité) fait de nous un allié recherché par tous ceux qui refusent la logique des blocs.
    • La puissance normative douce : Notre modèle (RGPD, normes environnementales) s’exporte de lui-même car il répond à une aspiration universelle à la protection et à la durabilité. C’est le « Brussels effect » qui change le monde.
    • Le champion du développement : En tant que premier donateur mondial d’aide au développement, l’Europe investit dans la stabilité mondiale, qui est la première condition de sa propre sécurité.

L’Europe-promesse : un modèle de société à défendre

Le quatrième récit est le cœur battant du projet européen, sa justification morale et philosophique. Il répond à la question fondamentale : « Pourquoi ? ». Pourquoi vouloir être un bouclier, un pionnier, un équilibre ? La réponse est : pour préserver et développer un modèle de société qui place la dignité humaine, la solidarité et l’épanouissement individuel au centre de tout. C’est le récit qui doit contrer le cynisme et redonner un sens profond à l’engagement européen.

  • Le message clé : Au-delà de la puissance et de l’économie, l’Europe, c’est la promesse unique au monde d’une société qui cherche à concilier la liberté individuelle avec la sécurité collective, la prospérité économique avec la justice sociale, et le progrès technologique avec le respect de la planète.
  • Les preuves à incarner :
    • Le contrat social européen : Nos systèmes de santé accessibles, d’éducation publique et de protection sociale ne sont pas des charges, mais le socle de notre stabilité et de notre attractivité. C’est ce modèle qui fait que, malgré les crises, « les migrants aspirent à nous rejoindre ».
    • La défense des droits et libertés : L’Europe est le dernier bastion de la « démocratie pleine ». C’est ici que les droits des femmes, des minorités et la protection des données personnelles sont les plus avancés. C’est une puissance normative qui exporte la dignité.
    • La promesse d’une transition juste : La transition, c’est un engagement à ne laisser personne sur le bord de la route. C’est la recherche d’une synthèse entre « l’écologie scientifique et le développement responsable », qui répond directement à la « perception des inégalités » qui nourrit le populisme.
    • L’investissement dans le capital humain : En mettant l’accent sur l’éducation, la formation tout au long de la vie et la culture (Erasmus), l’Europe fait le pari de l’intelligence collective. C’est la conviction que notre plus grande richesse n’est pas dans nos sous-sols, mais dans le talent de nos citoyens.

L’Europe-bouclier protège ses citoyens. L’Europe-pionnière construit son avenir. L’Europe-équilibre la défend sur la scène mondiale. L’Europe-promesse lui donne son âme et sa raison d’être. En articulant ces narratifs de manière cohérente et en les incarnant dans des actions politiques fortes, l’Union européenne peut enfin aligner sa communication sur son projet.

La communication ne suit plus la politique, elle est la politique, car elle donne le sens, la direction et l’élan nécessaires au sursaut européen.

Du monologue ponctuel au dialogue permanent ? La communication du Parlement européen au-delà des campagnes électorales : défis et avenir d’une institution en quête de connexion citoyenne

Comment la communication du Parlement européen, au-delà de ses campagnes électorales quinquennales, a-t-elle évolué entre 2009 et 2024 pour tenter de combler le fossé perçu avec les citoyens européens ? Quels sont les ressorts stratégiques, les innovations tactiques, les défis persistants et les perspectives d’avenir de cette transformation vers un modèle d’engagement se voulant plus permanent, multiforme et résilient ?

L’institution qui apprend à parler (et à écouter ?)

Pendant longtemps, le Parlement européen, malgré son rôle démocratique central, a souffert d’une image distante, complexe, voire carrément soporifique pour une large partie des citoyens. Sa communication, souvent perçue comme un jargon technocratique descendant, peinait à créer un lien, une résonance. Pourtant, l’analyse de ses efforts de communication sur les quinze dernières années (2009-2024) révèle une transformation profonde et fascinante.

Au-delà des pics d’activité liés aux élections européennes, c’est toute une philosophie et une infrastructure de communication qui ont muté, passant progressivement d’un modèle de diffusion d’information épisodique à une tentative ambitieuse de dialogue et d’engagement continus. Après notre série estivale, nous explorons les facettes clés de cette mutation, ses moteurs, ses succès, ses limites et ce qu’elle nous apprend sur la communication d’une institution supranationale au 21ème siècle…

1. L’édification d’une « machine à engager » : de la campagne éphémère à l’infrastructure permanente avec together.eu

Le changement le plus structurel est sans doute le passage d’une logique de campagnes ponctuelles à la construction d’une capacité d’engagement durable. Si les premières campagnes (2009, 2014) misaient sur des outils classiques et temporaires, le succès phénoménal de la plateforme thistimeimvoting.eu en 2019 a marqué un tournant. Sa pérennisation sous le nom de together.eu n’est pas anecdotique : c’est la création d’une colonne vertébrale numérique et humaine pour l’engagement civique européen.

Cette plateforme fonctionne comme un réseau social pour la démocratie, formant des « multiplicateurs », facilitant l’organisation d’événements locaux, et servant de base pour diverses formes de participation (pétitions, consultations…). Le Parlement ne se contente plus d’acheter de l’attention médiatique tous les cinq ans ; il investit dans la construction d’un capital social et civique propre, une communauté qu’il peut mobiliser en continu. C’est un pari stratégique majeur sur l’intelligence collective et l’énergie citoyenne, une tentative de passer du « push » d’information au « pull » d’engagement.

2. La jeunesse : moins une cible qu’un investissement stratégique à long-terme

L’obsession (légitime) pour le vote des jeunes lors des élections cache une stratégie plus profonde et continue. Le Parlement européen a compris que l’engagement civique se cultive tôt. Des initiatives comme les European Youth Events, le programme des « Ambassador Schools », ou la présence active sur des plateformes comme Instagram et TikTok ne sont pas de simples opérations de séduction pré-électorales. Elles constituent un investissement structurel dans l’éducation civique et l’acculturation européenne de la prochaine génération.

En créant une « marque jeune » accessible et en offrant des espaces de dialogue et de participation dédiés, le Parlement pratique une forme de « pré-engagement », tissant des liens bien avant que la question du vote ne se pose. C’est une stratégie patiente, visant à contrer la désaffection à la racine et à préparer l’avenir démocratique de l’Union. Une qualité dont les institutions disposent naturellement.

3. Le yin et le yang de la persuasion : l’art d’équilibrer cœur et raison

La communication du Parlement européen navigue constamment entre deux pôles : l’émotion et la rationalité :

D’un côté, les campagnes électorales (surtout depuis 2014) misent de plus en plus sur des narratifs forts, des valeurs partagées, et une connexion émotionnelle (la vidéo avec le bébé de 2019). Elles cherchent à mobiliser en touchant les cœurs et en soulignant les enjeux personnels ou sociétaux.

De l’autre côté, des initiatives comme « What Europe Does For Me » adoptent une approche résolument factuelle, pragmatique, axée sur les bénéfices concrets de l’action européenne dans la vie quotidienne ou les territoires.

Cette dualité n’est pas une schizophrénie, mais une stratégie sophistiquée : l’émotion crée l’étincelle, l’envie d’en savoir plus ; le factuel ancre la pertinence, fournit des preuves, et peut convaincre les plus sceptiques. Maîtriser cet équilibre délicat est devenu une compétence clé. Il faut marcher sur ses deux jambes. Le Parlement européen l’a appris avec l’apprentissage des campagnes lors des élections européennes.

4. Communiquer dans la tempête : la communication institutionnelle comme facteur de résilience

La communication du Parlement européen ne se limite pas aux temps calmes ou aux échéances électorales. Elle joue un rôle crucial en période de crise (Brexit, COVID-19, guerre en Ukraine implicitement en 2024). Il ne s’agit pas seulement de réagir, mais de cadrer les événements, de proposer un narratif institutionnel qui rassure, explique, et positionne le Parlement comme un acteur pertinent et protecteur. L’exemple du Brexit, transformé en « vaccin » contre l’euroscepticisme, ou celui de l’hémicycle devenu centre de vaccination, illustrent cette capacité à utiliser la communication (et l’action symbolique) comme un outil de gestion de crise et de renforcement de la résilience institutionnelle. Dans un monde instable, cette fonction devient de plus en plus centrale.

5. L’évolution des ressources : investir dans la communauté plutôt que dans la publicité ?

L’analyse des budgets et des tactiques révèle une tendance de fond : un glissement progressif des dépenses d’achat d’espace publicitaire traditionnel vers des investissements dans l’infrastructure d’engagement (plateformes, CRM, outils digitaux), les ressources humainesdédiées (experts digitaux, community managers, équipes locales renforcées) et la facilitation de l’action volontaire.

C’est le passage d’une logique de « location » d’audience à une logique de « construction » d’une capacité d’interaction et de mobilisation propre. C’est plus complexe à gérer, mais potentiellement plus durable et moins dépendant des fluctuations du marché médiatique.

Les défis persistants : les ombres au tableau du papillon européen

Malgré cette impressionnante mutation, des défis structurels demeurent :

  • Le mur des langues et des cultures : Créer des messages universellement résonnants reste un casse-tête permanent.
  • La ligne de crête de la neutralité : Plus la communication devient engageante et émotionnelle, plus le risque de paraître partial est grand.
  • Le dernier kilomètre vers les « non-publics » : Toucher les citoyens les plus éloignés, les plus indifférents ou les plus hostiles reste la frontière ultime.
  • La bataille contre la désinformation : Un combat défensif et proactif qui consomme de plus en plus de ressources et d’énergie.
  • La légitimation des moyens : Justifier l’utilisation de fonds publics pour une communication institutionnelle, même démocratiquement essentielle, reste un exercice délicat.

Vers une communication institutionnelle « augmentée » ?

La trajectoire de la communication du Parlement européen entre 2009 et 2024 est riche d’enseignements. Elle montre une institution qui a su (ou a été contrainte d’) apprendre, d’expérimenter, et de se transformer en profondeur pour tenter de répondre au défi fondamental de la connexion avec ses citoyens. Le passage d’un modèle de communication descendant et épisodique à une approche plus dialogique, émotionnelle, multicanale et permanente est indéniable.

Ce faisant, le Parlement ne fait pas que « mieux communiquer » ; l’institution redéfinit potentiellement son rôle, devenant non seulement un législateur mais aussi un animateur de l’espace public européen, un facilitateur d’engagement civique, et un acteur narratif dans les crises qui traversent le continent.

L’avenir dira si cette transformation est suffisante pour contrer durablement l’apathie et la défiance. Les prochaines étapes impliqueront sans doute une intégration plus poussée de l’intelligence artificielle (pour la personnalisation et la lutte contre la désinformation), l’exploration de nouveaux formats immersifs ou interactifs, et surtout, un approfondissement constant de la culture du dialogue et de la co-construction avec les citoyens.

Car au final, le plus grand défi pour la communication du Parlement européen, comme pour l’Union elle-même, reste peut-être celui-ci : prouver, encore et toujours, par les actes et par les mots, que cette entreprise complexe et parfois déroutante qu’est l’Europe est bien notre affaire à tous. Et que notre voix, individuelle et collective, y compte réellement. La communication ne peut pas tout, mais elle peut, lorsqu’elle est bien pensée et sincèrement engagée, contribuer à rendre cette promesse un peu plus tangible. Un défi permanent, mais passionnant.