Chantiers prioritaires de la communication européenne : développer une formalisation de la politique de communication de l’UE 3/4

Avant la rentrée, Lacomeuropéenne propose une série d’été sur les chantiers prioritaires qui attendent la communication de l’UE…

L’absence de norme contraignante, une fragilité préjudicielle

A ce jour, la base légale aux milliers de recrutements et aux millions de dépenses pour couvrir toutes les missions de communication des institutions européenne repose, on l’oublie trop souvent, sur un texte extrêmement fragile puisqu’il s’agit d’une simple déclaration politique sans effet contraignant.

Pour les temples de la norme et de la régulation juridique que sont la Commission et le Parlement, l’absence de formalisation de la politique de communication devrait être un motif sinon d’inquiétude du moins d’insatisfaction.

Il est plus que temps, compte tenu de l’importance des enjeux de reprendre le chantier de la formalisation de la politique de communication de l’UE.

Faut-il rappeler que la procédure d’adoption de la déclaration politique « Communiquer l’Europe en partenariat » aura été un exemple de rapidité et de concorde. Sans que n’ait été apporté d’amendement substantiel au texte de la communication de la Commission européenne, la future déclaration aura été très promptement adoptée en première lecture au Conseil de l’Union et votée également en première lecture par le Parlement européen.

Mais il faut aussi se rappeler que ce partenariat n’a finalement pris la forme que d’une déclaration politique, un cadre souple, souhaité par les Etats membre du Conseil, alors que la Commission proposait initialement que soit signé un Accord Interinstitutionnel, beaucoup plus contraignant en termes législatifs.

Pour un « Accord Interinstitutionnel sur la communication de l’UE »

Même si la négociation qui s’engage risque d’être longue et compliquée, il faut placer les différents acteurs, en particulier les Etats-membres devant leurs responsabilités. La communication de l’UE sera institutionnalisée ou ne sera pas.

Tandis que l’apport principal de la déclaration « Communiquer sur l’Europe en partenariat » aura été de formaliser le rôle et les attributions du Groupe Interinstitutionnel de l’Information (GII), l’Accord Interinstitutionnel, si l’on se donne de l’ambition, serait de lui donner des pouvoirs de décisions et des moyens de mettre en œuvre ses décisions.

Aujourd’hui, indépendamment des propres politiques de communication de chacune des trois institutions du partenariat et en respectant leur autonomie sur les moyens et instruments de leurs politiques d’information, le GII constitue un cadre dans lequel elles peuvent dialoguer et prendre des décisions sur un pied d’égalité et dans un environnement coopératif et non contraignant.

Demain, le GII aurait un rôle plus surplombant de définition de la politique commune de communication de l’UE que chaque institution serait chargée de mettre en œuvre dans une logique qui repose notamment sur la mutualisation des moyens autant que possible, notamment dans le cadre de campagnes de communication prioritaires pluriannuelles et paneuropéennes.

Quoiqu’il s’agisse d’une chantier chronophage et dont les résultats ont peu d’effets immédiats et de visibilité, la formalisation de la communication de l’UE constitue néanmoins une priorité dans une perspective de pérennisation et de légitimation de la communication européenne.

Chantiers prioritaires de la communication européenne : développer une « gouvernance éditoriale », à savoir, le content mastering, le mail mastering et le community mastering 2/4

Avant la rentrée, Lacomeuropéenne propose une série d’été sur les chantiers prioritaires qui attendent la communication de l’UE…

L’impasse de la question organisationnelle

Il faut cesser d’appréhender, comme c’est trop souvent le cas, la communication de l’UE sous l’angle organisationnel, tournant le plus souvent autour des questions :

  • Faut-il déconcentrer ou reconcentrer la communication au sein des institutions (cf. une direction communication forte ou faible) ?
  • Quelle décentralisation de la communication dans les Etats-membres, là où se trouvent ne l’oublions pas l’essentiel à la fois des médias et des publics ?

Non pas que les enjeux organisationnels ne soient à négliger, mais l’essentiel porte sur la « gouvernance éditoriale », c’est-à-dire ce qui permet – quelque soit l’organisation en place – de parvenir à formuler une communication intelligible et audible.

De ce point de vue, le chantier de la gouvernance éditoriale est également prioritaire pour la communication européenne, tant l’éclatement des émetteurs, des messages et des supports est aujourd’hui en cause, au point que la lisibilité même en interne de la ligne devient difficilement perceptible.

Le boulevard d’une stratégie éditoriale globale

Ce chantier pour considérable qu’il soit doit être poursuit, car d’ores et déjà quelques signes positifs pavent le chemin que ce soit la rationalisation en cours de la présence en ligne de la Commission européenne ou le pilotage des community managers de la Commission et du Parlement dans les Représentations et Bureaux d’information au sein des Etats-membres.

Plus largement, la réflexion sur la meilleure gouvernance éditoriale doit prendre en compte les process de production et de distribution des contenus existant en vue de les optimiser :

  • Comment s’assurer que toutes les informations pertinentes sont recueillies et partagées en amont ?
  • Comment diminuer les volumes tout en améliorant la pertinence, l’intérêt et l’utilité des informations ?
  • Comment améliorer la distribution de l’information entre push et pull, print et web, opt-in et opt-out ?

Au total, ce chantier devrait permettre – bien longtemps après le consensus permissif qui permit à l’UE de se développer dans le silence approbateur des citoyens – de retrouver une « communication permissive », c’est-à-dire autorisée et consultée par ses publics.

Chantiers prioritaires de la communication européenne : développer une capacité de communication de l’entité politique « Union européenne » 1/4

Avant la rentrée, Lacomeuropéenne propose une série d’été sur les chantiers prioritaires qui attendent la communication de l’UE…

Jusqu’à présent, chaque institution européenne s’est attachée à développer sa stratégie de communication, avec un « service minimum » tant en matière de coordination inter-institutionnelle que d’impulsion et d’incarnation politique. En clair, les institutions européennes sont de plus en plus cacophoniques, sans jouer une même partition symphonique et de surcroit sans chef d’orchestre.

Cela ne peut plus durer. Le chantier prioritaire aujourd’hui consiste à développer la capacité des professionnels dépositaires des politiques de communication institutionnelles à délivrer de façon cohérente et coordonnée le message européen, en s’appuyant autant que nécessaire sur les responsables politiques.

D’une part, la capacité de communication de l’entité « Union européenne » doit être double : aussi bien externe qu’interne.

De façon évidente, la communication de l’UE doit s’adresser à l’ensemble des citoyens européens avec comme objectifs de :

  • produire du consentement (aux décisions et aux politiques), de l’adhésion (aux valeurs et aux idées) et de la participation (à travers des soutiens puis de la mobilisation électorale) ;
  • mieux répondre aux attentes des citoyens, apporter des réponses aux mécontents, impliquer davantage les enthousiastes et proposer plus d’expérience sociale.

Mais, peut-être avant toutes choses, cette politique de communication doit également créer les conditions d’une meilleure communication en son sein, entre ses différents organes et entre les différents acteurs (institutionnels, étatiques, associatifs…) qui y prennent part. Une bonne communication européenne ne peut se faire sans une bonne communication entre les acteurs du projet européen.

D’autre part, la capacité de communication de l’entité « Union européenne » doit reposer à la fois sur les responsables politiques et les services administratifs.

Là encore, il ne s’agit que de « revenir aux fondamentaux », à savoir un bon équilibre entre la communication des présidents (Commission, Parlement, Conseil européen) et autres responsables importants, et la communication des institutions.

Jusqu’à présent, le grand écart entre « eux, c’est eux » et « nous ; c’est nous » est trop sensiblement perceptible dans la communication de l’UE, ce qui dévalorise à la fois les prises de parole politiques – jamais assez fortes pour les uns et toujours trop engagées pour les autres – et les campagnes de communication pilotées par les institutions, alternativement jugées décalées, fades ou inutiles.

Pour amplifier le message de l’UE, les responsables politiques doivent être les porte-voix et les services administratifs les courroies de transmission, chacun laissant au maximum de côté ses travers, la communication partisane et personnelle pour les politiques et la communication de promotion et d’auto-célébration pour les services.

Au total, le chantier le plus prioritaire pour la communication de l’UE aujourd’hui porte sur sa capacité à se faire entendre, parmi les autres autorités et à se faire écouter par les citoyens.

Vent d’optimisme de l’opinion publique européenne sur l’UE après les élections européennes

Les premiers résultats de l’Eurobaromètre standard 81 du printemps 2014 – réalisé entre le 31 mai et le 14 juin 2014, soit juste après le scrutin européen – sont connus depuis peu, et ils sont très positifs, un retournement…

Image améliorée de l’UE auprès des citoyens européens

Même si une majorité relative d’entre eux continue à avoir une image neutre de l’UE (38%, -1 point de pourcentage), les Européens sont plus nombreux aujourd’hui à en avoir une bonne image (35%, +4) et moins nombreux à en avoir une image négative (25%, -3) :

  • la plus importante évolution des opinions positives depuis l’enquête Eurobaromètre Standard du printemps 2007 ;
  • le plus important écart entre les opinions « positive » et « négative » depuis l’enquête Eurobaromètre Standard du printemps 2011 (EB75).

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Ma voix compte plus dans l’UE selon les citoyens européens

Là encore, l’évolution est très positive. Plus de quatre Européens sur dix estiment que leur voix compte dans l’UE (42%, +13 points de pourcentage depuis l’automne 2013) tandis que les citoyens européens qui pensent que leur voix ne compte pas reculent des deux tiers d’entre eux (66%), à un peu plus de la moitié (52%).

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L’analyse se montre mesurée en parlant de « conséquence probable des élections européennes qui se sont tenues juste avant le déroulement de l’enquête », cette amélioration est la plus importante jamais enregistrée. Les citoyens sont aujourd’hui plus nombreux à penser que leur voix compte dans l’UE qu’ils ne l’ont jamais été depuis 2004.

Futur optimiste de l’UE pour les citoyens européens

Dernier indicateur convergeant, l’optimisme à l’égard du futur de l’UE a gagné du terrain : plus de la moitié des Européens déclarent être optimistes (56%, +5), tandis que le pessimisme a reculé (38%, -5).

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Pour une fois, les Français ne sont pas classés parmi les peuples les plus pessimistes en Europe, qui regroupent la Grèce, Le Royaume-Uni et le Portugal – des pays qui sont dans une relation en tension avec l’UE en ce moment.

Citoyenneté européenne affirmée chez les Européens

Près des deux tiers des Européens ont le sentiment d’être des citoyens de l’UE (65%, +6), surtout grâce aux réponses enthousiastes « oui, tout à fait » (26%, +6) par rapport aux réponses modérées « oui, dans une certaine mesure » (39% ; 0).

Double résultat significatif, depuis que cette question est posée dans l’Eurobaromètre Standard du printemps 2010 (EB73) :

  • Pour la première fois, le sentiment de citoyenneté européenne atteint aujourd’hui son niveau le plus élevé ;
  • Pour la première fois, plus d’un quart des Européens répondent qu’ils se sentent « tout à fait » citoyens de l’UE.

Au total, sur tous les tableaux qui permettent de suivre les évolutions de l’opinion publique européenne à l’égard de l’UE (image, engagement, futur, citoyenneté), tous les clignotants sont au vert – une bonne nouvelle, assez rare, pour la communication de l’Union européenne.

Que réserve le projet de budget 2015 pour la communication de l’UE ?

Avec une baisse connue de 1,4% par rapport à cette année (et une baisse des effectifs de 17 postes), le budget « Communication » (chapitre 16) de la Commission européenne s’établirait à 243 millions d’euros et 1 105 postes selon le projet de budget 2015…

Physionomie générale du budget : baisse de la promotion de la citoyenneté au profit des actions de communication

Le détail des montants (pp 249-251) entre les crédits d’engagement en amont et les crédits de paiement en aval est particulièrement instructif :

  • la ligne budgétaire la plus en recul : la promotion de la citoyenneté ;
  • la ligne budgétaire la plus en progrès : les actions de communication ;
  • quoique le budget soit à la baisse, les dépenses administratives (personnels, bâtiments, équipements) sont néanmoins en hausse et s’établissent à 129 millions d’euros soit 53% du budget total…

La promotion de la citoyenneté en net recul en 2015

Les crédits de paiement pour la promotion de la citoyenneté sont en franche baisse, passant de 27 à 17 millions d’euros, une baisse correspondant quasiment à une division par deux par rapport à il y a 2 ans.

Deux explications semblent justifier un tel recul :

  • D’une part, l’Année européenne des citoyens en 2013, prolongée plus ou moins officiellement en 2014, se termine pour de bon ;
  • D’autre part, le projet de mémoire et de participation civique à l’échelle de l’UE ne doit pas apporter les résultats attendus et se voit donc désinvesti.

Les actions de communication en progrès contrasté en 2015

Un chiasme s’observe entre 2014 et 2015 au niveau des crédits d’engagement et de paiement. Concrètement, le budget « réel » consacré aux actions de communication passe de 91 à 96 millions d’euros.

La lisibilité des actions de communication – au regard des récentes décisions – n’est pas d’une grande simplicité :

  • Quoique le financement à Presseurop ait été arrêté semble-t-il faute de moyens, la ligne budgétaire des « actions multimédia », notamment le soutien à Euronews est en hausse et atteint les 28 millions d’euros ;
  • Quoique la refonte du portail Europa vise à une cure d’amaigrissement du nombre de sites, le budget pour tout le numérique est en augmentation à 17 millions d’euros ;
  • Quoique les partenariats de gestion avec les Etats-membres aient été prématurément arrêtés en dépit d’une évaluation horizontale positive, la ligne budgétaire consacrée aux budgets des Représentations est à la hausse à 14 millions d’euros.

Quelques remarques au sujet de projets-pilotes ou d’initiatives :

Le projet-pilote « Share Europe Online » correspondant au réseau des community managers dans les 28 Etats-membres est malmené avec un investissement coupé en deux entre 2014 et 2015 ; passé les élections, le dialogue avec les citoyens apparaît bien moins prioritaire à la Commission européenne…

Le projet-pilote « New Narrative of Europe » qui visait à définir un nouveau positionnement au storytelling de l’UE, aura coûté la bagatelle de 1,3 million d’euros ; sans vraiment porter toutes ses espérances…

Le projet de maison de l’histoire européenne qui se pose comme la réponse au Parlamentarium pour accueillir les visiteurs à Bruxelles ne bénéficiera pas de tous les fonds initialement alloués, faute d’intérêt ou de succès ?

Au total, à l’image des ménages en Europe, dans le budget prévisionnel de la communication de l’UE en 2015 semblent de plus en plus peser les dépenses « contraintes » correspondant à des engagements de long terme laissant peu de place à des initiatives originales, tout le moins, pour le moment.