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Modernisation des pratiques de communication pour José Manuel Barroso à l’occasion du Sommet du G20 de Toronto

Alors que la visibilité du président Barroso – et de la Commission dans son ensemble – tend à se réduire dans l’Union européenne post-Lisbonne face à :

  • la présence accrue des chefs d’Etat et de gouvernement avec la lutte contre la crise et la médiatisation des Conseils européens ;
  • l’existence nouvelle de personnalités avec le président permanent du Conseil de l’UE et le ministre des affaires étrangères ;

de nouvelles pratiques visant à dynamiser la communication du Président de la Commission européenne ont été mises en œuvre à l’occasion des Sommets du G8 et du G20 de Toronto…

D’une part, des relations presse personnalisées avec des journalistes embarqués avec José Manuel Barroso

Information signalée par Euractiv.com, à l’occasion du Sommet du G20 à Toronto, des journalistes ont pu voyager avec le président de la Commission européenne. « Bien qu’il soit commun pour les journalistes de voyager avec les présidents et premiers ministres des États membres de l’UE, de même que le président des États-Unis, ils ont voyagé à quelques reprises seulement avec M. Barroso ».

D’autre part, une ouverture aux réseaux sociaux avec des porte-paroles habilités à Twitter

Quoique l’initiative demeure limitée (112 Followers et 29 Tweets à l’issue du week end), le compte officiel : Europe_at_G20 (archivé) : « nous sommes l’équipe de presse de la Commission européenne qui accompagne le président Barroso aux sommets du G8 et du G20 » piloté semble-t-il par Pia Ahrenkilde-Hansen, porte-parole de la Commission, démontre :

  • l’importance que revêt les réseaux sociaux chez les responsables politiques de l’UE et
  • l’intérêt pour tenter de s’imposer : cf. le Tweet suivant : « Saviez-vous que le président de la Commission #Barroso est le plus ancien membres du #G8 et a déjà participé à #Gleneagles en 2005? ».

Pour quels résultats ?

La communication de José Manuel Barroso lui permet de recueillir 1 800 résultats pour « Barroso + G20 » sur Google Actualités… à comparer avec 4 400 résultats pour « Sarkozy + G20 », 7 900 résultats pour « Merkel + G20 » et surtout 13 300 résultats pour « Obama + G20 ».

Les recommandations du manuel de l’UE pour communiquer dans les médias sociaux au banc d’essai

Alors que la Commission européenne met à disposition des webmasters, rédacteurs, éditeurs et développeurs un manuel – l’« Internet Providers Guide » (IPG) – dont les règles sont obligatoires pour tout site du portail EUROPA, il semble intéressant de mettre au banc d’essai les préconisations en matière de communication sur les médias sociaux…

Les recommandations de l’IPG pour « inclure les médias sociaux dans la boîte à outils » : 10 règles pour une approche « outil » centrée sur le plan de communication

La page dédiée au « web 2.0 » dans le manuel IPG est particulièrement instructive sur la manière très instrumentale dont les médias sociaux sont perçus :

  • gardez à l’esprit que les médias sociaux sont des médias. Ce sont des outils, non pas une fin en soi. L’utilisation des médias sociaux devraient donc faire partie d’un plan de communication ;
  • gardez à l’esprit la matrice de communication : expéditeur + message + média + audience + temps = effet.

Aussi, les 10 règles énoncées sont-elles orientées autour du plan de communication :

  1. Définir l’objectif : soyez réaliste, clair et précis
  2. Définir le public cible : qui sont-ils ?, que savent-ils, sentent-ils, attendent-ils ?, en qui ont-ils confiance ?, comment sont-ils touchables ?, comment répondent-ils ?
  3. Définir l’expéditeur : qui est le meilleur expéditeur ?
  4. Définir les résultats attendus
  5. Choisir le message … « si nécessaire étayées par des faits et des chiffres »
  6. Choisir des outils appropriés : choisissez des outils appropriés, adaptés au groupe cible, au message et à l’expéditeur (seulement à ce stade regarder les médias sociaux dans le cadre de votre boîte à outils).
  7. Choisir un « emballage approprié » : choisissez un emballage approprié de votre message par rapport à votre auditoire et votre résultat souhaité.
  8. Définir le moment
  9. Suivi : soyez flexible, si nécessaire révisez et adaptez votre plan de communication à mesure que vous avancez
  10. Porter votre attention aux « feedbacks » : « donnez des réponses lorsque cela est nécessaires, faîtes en sorte que les utilisateurs se sentent entendus et assurez-vous (et vos collègues et supérieurs) que vous en tirez des leçons ».

Ainsi, il n’est pas besoin de s’étendre sur ces règles qui apparaissent comme autant de mises en garde, voire de freins à l’utilisation des médias sociaux dans la communication de l’UE.

A contrario, la méthode progressive de Fred Cavazza pour « investir sur les médias sociaux » : : 6 étapes pour mieux comprendre les besoins / contraintes / motivations / freins des citoyens et mieux appréhender l’image perçu de la marque

Le billet de Fred Cavazza, aujourd’hui, illustre parfaitement la différence d’approche dans les termes mêmes puisqu’il parle d’investir et non d’utiliser : « il y est question d’investir du temps et de l’énergie pour poser les bases d’une relation enrichie ».

A l’opposé des règles de l’IPG centrée sur le plan de communication, les 6 étapes proposées se concentrent sur le public : ses pratiques, ses besoins / contraintes / motivations / freins et sa perception de la marque :

  • Écouter les discussions : monter une cellule de veille, la première étape indispensable. « C’est en auditant la présence d’une marque et son évolution que vous aurez une visibilité sur les actions à mener ».

=> Aucune veille n’est proposée par l’IPG

  • Définir une stratégie en fonction de l’état des lieux et des écarts constatés avec la stratégie globale. L’idée ici est de poser les bases du dispositif qui va permettre d’aligner la posture de la marque et ses ambitions / aspiration avec la réalité du terrain.

=> Aucune confrontation entre la réalité du terrain et la stratégie n’est envisagée par l’IPG.

  • Être présent. d’abord réserver des noms d’utilisateurs sur les différentes plateformes en utilisant l’orthographe exacte de la marque ainsi que ses variantes puis exploités ces profils comme relais pour l’information officielle afin d’amorcer la pompe et récupérer des premiers avis.
  • Se tenir prêt. il est essentiel de se préparer à affronter une crise.

=> Aucune gestion de crise n’est évoquée par l’IPG.

  • Répondre. Après avoir verrouillé les 4 étapes précédentes, il sera temps de choisir un/des porte parole et de rédiger une charte de présence afin de poser les règles d’engagement avec la communauté. N’oubliez pas de fournir aux populations internes un guide de réponse pour celles et ceux qui souhaiteraient s’exprimer au nom de la marque.

=> Sur ce point, l’IPG s’appuie sur « Staffs as Ambassadors », une contribution de la Commission permettant à ses employés d’être actifs sur le Web à titre professionnel.

  • Initier le dialogue. Après vous être “invité” chez les autres (forums, blogs…), l’ultime étape consiste à motiver / stimuler la communauté pour qu’elle s’exprime sur des plateformes dont vous aurez la responsabilité.

=> Sur ce point, l’IPG n’indique pas d’endroit où s’exprimer qui serait hébergé par l’UE et se contente d’inviter à « participer lorsque c’est nécessaire ».

Ainsi, l’exercice de comparer les recommandations de la Commission européenne aux fonctionnaires pour communiquer dans les médias sociaux avec les conseils d’experts praticiens révèle un profond décalage.

Le web participatif : efficace pour changer les comportements

Dans une thèse de doctorat soutenue par Natacha Roma en janvier 2010 à l’Université Toulon-Var, il est magistralement démontré qu’« un dispositif de sensibilisation web conçu sur la base des stratégies engageantes produit un effet comportemental deux fois supérieur à celui basé uniquement sur les stratégies persuasives classiques »…

L’apport théorique : l’efficacité de l’engagement est supérieure à l’efficacité de la persuasion argumentative pour changer les comportements sur le web

D’une part, il est démontré que le web comparé à une situation de communication en face-à-face peut se révéler plus efficace pour changer les comportements, notamment en raison de :

  • un relatif anonymat et une absence de pression extérieure,
  • une plus grande liberté individuelle de décision et d’action,
  • une facilité d’obtention d’actes préparatoires, l’internaute venu sur un site franchit déjà franchi une première étape « préparatoire » de la décision,
  • une facilité de mise en œuvre technique de la décision.

D’autre part, il est démontré que les stratégies de sensibilisation les plus efficaces sur le web pour changer les comportements correspondent aux dispositifs « engageant » ou participatifs par rapport aux seuls contenus éditoriaux argumentatifs ou ludo-interactifs.

L’apport pratique : les facteurs efficaces d’un dispositif de sensibilisation web « engageant »

La thèse propose un modèle pour un dispositif de sensibilisation sur le web qui pourrait être exploité afin d’accroître l’impact comportemental des campagnes de sensibilisation sur le web :

Afficher le coût élevé de l’acte : formaliser la procédure d’engagement avec un formulaire pour les données personnelles (signature d’engagement) et un autre relatif à l’acte effectivement accompli (formulaire de contribution).

Évoquer le sentiment de liberté : proposer 2 boutons explicites « j’accepte » et « je n’accepte pas » présentés de façon identique.

Renforcer la visibilité sociale :

  • caractère public : afficher la liste des personnes ayant accepté l’acte avec la possibilité de rechercher des participants par critères ;
  • caractère explicite : expliquer simplement, clairement et précisément l’acte avec l’enregistrement des données ;
  • caractère irrévocable : expliciter l’impossibilité d’annuler l’acte souscrit avec la faculté néanmoins de demander le retrait des données personnelles ;
  • caractère répétitif : donner l’accès à une plateforme pour permettre d’accomplir de nouveaux actes et et intégrer un dispositif de suivi.

Souligner l’importance de l’acte : afficher les objectifs et les conséquences attendues de l’opération.

Identifier l’acte : le slogan de l’opération et les messages persuasifs peuvent renforcer l’efficacité de même que les actes préparatoires correspondant à des activités ludique interactives (quiz, tests, jeux…).

Ainsi, la recherche scientifique confirme formellement ce que nous sentions instinctivement, à savoir que le web participatif est particulièrement efficace pour changer les comportements.

Vers une communication plus citoyenne de think tanks européens 2.0 ?

Avec les évolutions du web 2.0 et du traité de Lisbonne, les acteurs de l’influence que sont les think tanks européens semblent mieux relever le défi d’une communication davantage orientée vers les citoyens européens…

Sensibilisation à l’Europe réduite aux citoyens concernés pour des think tanks européens 1.0 au « potentiel inaccompli »

Au travers des canaux traditionnels d’une communication d’influence :

  • publications propres ;
  • organisations de conférences avec des responsables politiques ou de séminaires avec des universitaires ;
  • parutions de tribunes dans la presse ;
  • apparitions occasionnelles à la télévision et à la radio ;

les think tanks européens 1.0 parviennent – au-delà des leaders d’opinion principalement ciblés – à toucher un public de citoyens concernés, par une exposition médiatique incidente.

Selon Mathilde Durand et Hélène Jorry dans Horizons stratégiques 2007- 4 (n°6) « Les groupes d’intérêt, vecteurs d’information sur l’Europe ? », la production et la diffusion d’informations sur l’Europe – « même inachevée, parcellaire ou insatisfaisante » – contribuent à sensibiliser sur l’Europe (acteurs, procédures, politiques).

Tendanciellement, le constat d’une sensibilisation à l’Europe induite par les stratégies de communication des think tanks européens s’adresse – toutefois – « le plus souvent à un public engagé dans une recherche active de l’information ».

Selon Stephen Boucher, dans une étude pour Notre Europe « L’Europe et ses think tanks, un potentiel inaccompli », pour des questions de moyens mais aussi pour des raisons de culture :

  • tension entre la préservation de leur indépendance et de leur crédibilité intellectuelles face aux pressions financières et aux médias imposant un rythme et un mode de fonctionnement très nuisibles à l’effort d’analyse et de réflexion prospective et innovatrice ;
  • approche élitiste, les thinks tanks européens travaillant entre experts des questions européennes et s’adressant à d’autres experts des questions européennes ;

« il y a un réel décalage entre l’ambition de contribuer à combler le ″déficit démocratique″ et la capacité à pouvoir y faire quoi que ce soit ».

Potentiellement, les think tanks européens pourraient jouer un rôle – notamment pour faire émerger des idées de citoyens ou pour faire passer aussi des notions complexes auprès d’un public large – mais jusqu’à présent ils ont plutôt renforcés l’impression d’une Europe d’experts.

Ainsi, contrairement à la plupart des think tanks américains qui accordent autant de soin à la diffusion de leurs idées qu’à leur qualité, les thinks tanks européens 1.0 parviennent qu’indirectement à sensibiliser des citoyens concernés à l’Europe.

Communication sur l’Europe auprès d’une audience citoyenne élargie pour les think tanks européens 2.0

Avec les évolutions que constituent d’une part le traité de Lisbonne et d’autre part le web 2.0, les thinks tanks européens semblent davantage à même de relever le défi de la communication auprès des citoyens.

Le traité de Lisbonne pourrait généraliser les « consultations européennes de citoyens » menées par les think tanks européens 2.0.

Selon la dernière livraison de la revue « Effect » consacrée à l’exploration des relations entre les fondations et l’UE, le traité de Lisbonne représente une véritable opportunité pour les think tank européens, qui pourraient organiser cette meilleure implication des citoyens dans le processus décisionnel européen.

L’article 11 du traité de Lisbonne prévoit que « les institutions, par des moyens appropriés doivent donner aux citoyens et aux associations représentatives la possibilité de faire connaître et d’échanger publiquement leurs opinions dans tous les domaines d’action de l’Union ».

Pour Stefan Schäfers, Conseiller de programme européen à la Fondation Roi Baudouin (tribune page 16 dans la livraison du printemps 2010), les think tanks européens, forts déjà de deux succès paneuropéen de « consultations européennes de citoyens » pourraient contribuer à combler le fossé entre les citoyens et les décideurs politiques.

Les consultations européennes de citoyens prennent la forme d’une série d’entrevues et de discussions de groupes choisis au hasard, débouchant sur des délibérations puis des recommandations. Ces procédures maîtrisées par les think tanks européens pourraient faire partie de la trousse d’outils d’élaboration des politiques européennes en matière de consultation publique.

Le web 2.0 pourrait généraliser les interactions entre citoyens et think tanks européens 2.0.

La domination actuelle des réseaux sociaux sur le web représente une seconde opportunité pour les think tank européens qui pourraient développer une meilleure communication dans les medias sociaux, autour d’un discours plus accessible et d’une présence plus interactive.

A titre d’exemple, la Fondation Robert Schuman s’est largement adaptée avec :

Ainsi, des acteurs tels que les think tank européens peuvent – grâce au traité de Lisbonne et au web 2.0 – adapter leur communication au bénéfice des citoyens européens.

Si l’Europe était une marque, serait-elle capable de fédérer une communauté de marque ?

Deux étudiants de l’ESCP Europe – Valérie Enjolras et Benjamin Hoguet – viennent de soutenir un mémoire dirigé par Andreas M. Kaplan – spécialiste du marketing public – sur l’applicabilité du concept de communauté de marque à l’Europe.

Dans le prolongement du livre de Georges Lewi : « L’Europe, une mauvaise marque ? », leur démarche – reposant sur une douzaine d’entretiens – consiste à utiliser les outils et les concepts du marketing, notamment la « communauté de marque », définie par :

  • un sentiment d’appartenance créant l’opposition entre membres et non membres du groupe ;
  • des rites et des traditions, renforçant la célébration d’une histoire et d’une culture communes ;
  • une obligation mutuelle d’entraide, soutenant la relation sur le long terme ;
  • une co-création de valeur.

L’Europe institutionnelle, un épouvantail à communautés

Premier résultat de leur enquête, l’impossibilité de créer une communauté de marque autour de l’Europe institutionnelle :

  • aucune émotion pour faire rêver au « pays des technocrates » ;
  • aucune réappropriation d’un projet d’ailleurs mal défini et de toute façon frappé par le déficit démocratique ;
  • aucune incarnation d’un leadership légitime pour parler au nom de l’Europe ;
  • aucune segmentation des cibles à l’échelle d’un continent aussi divers ;
  • aucune coordination des relais de toute façon défaillants (les médias, les élus, les enseignants).

L’Europe expérientielle, comme expérience au quotidien

Second résultat de leur enquête, la possibilité de développer une communauté de marque autour de l’Europe expérientielle :

  • adhésion par les expériences vécues de l’échange et de la diversité (programmes de mobilité, vie associative, multilinguisme…) ;
  • utilisation des produits comme bénéfices concrets et tangibles (l’euro, des fruits et légumes sains et abordables…) ;
  • appropriation par des récits plaçant le citoyen au centre et partagés entre citoyens ;
  • fidélisation par un lien sensible et affectif conciliant « moi-je » et « moi-nous ».

Recommandations pour fédérer une communauté de marque autour de l’Europe expérientielle :

  • susciter l’apparition de tribus européennes (lien éphémère et implication multi-niveau) à partir des expérimentations des produits
  • favoriser la mobilité et les échanges (jumelages des villes et des écoles, événements culturels) ;
  • densifier le réseau associatif autour d’une plateforme collaborative afin d’une part, de renforcer la visibilité des associations pour en faire des marques reconnues et d’autre part, de concrétiser et récompenser les collaborations de bénévoles ;
  • raconter des « histoires » afin de créer du sens et du lien avec une production audiovisuelle européenne concentrée sur la vie des Européens ;
  • réconcilier les deux Europe avec une communication tissant le lien entre les tribus et l’Europe institutionnelle et permettant d’affirmer que ces expériences ont été rendues possibles par la marque Europe.

Un mémoire (PDF) de grande valeur pour davantage porter notre regard sur cette Europe expérientielle.