Audit des sites mobiles des institutions européennes

Le Parlement européen vient de lancer la version mobile de son site internet – ce qui en fait le 4e site mobile de l’UE après l’agenda européen en version mobile, le site mobile de l’action extérieure de l’UE et plus récemment le site mobile du Conseil européen. Une occasion pour faire un audit des sites mobiles des institutions européennes…

Deux typologies de sites mobiles : les « outils de travail » et les « vitrines »

En fonction des contenus mis à la disposition de « mobinautes » plus ou moins bien ciblés, deux types de sites mobiles de l’UE se dégagent :

  • Les « outils de travail » : les versions mobiles sont alors conçues comme des réponses aux besoins et aux pratiques d’une cible particulière. Le site mobile du Conseil européen est ainsi particulièrement destiné aux journalistes, de même que l’agenda des institutions européennes est clairement proposé aux professionnels de l’UE.
  • Les « vitrines » : les versions mobiles sont plutôt conçues comme des présentations optimisées de l’activité de l’institution pour une consultation via smartphone. Le site mobile du Parlement européen fournit ainsi la plupart des services du site standard (actualités, activités des commissions, programme des plénières, fiches des députés…) tandis que le site mobile de l’action extérieure de l’UE informe sur les déclarations et les déplacements de la Haute Représentante Catherine Ashton.

La gestion du multilinguisme est également une indication intéressante pour juger de l’intention du site mobile :

  • Traduit dans toutes les langues officielles de l’UE, le site se destine plus particulièrement à un public élargi qu’il soit professionnel (les journalistes pour le site du Conseil européen) ou amateurs (les citoyens pour le site du Parlement européen) ;
  • Disponible uniquement en anglais ou dans les 3 langues de travail de la Commission européenne, l’agenda de l’UE et le site de l’action extérieure de l’UE sont plus naturellement destinés à des publics spécialisés dans les affaires européennes.

Une même problématique liée à la visibilité de la version mobile

Hormis la version mobile de l’« EU calendar » qui est clairement affichée sur le site standard et qui est détecté automatiquement en surf mobile (test personnel avec un iPhone), les 3 autres versions mobiles ne bénéficient pas d’une bonne visibilité :

  • Aucune mise en avant de la version mobile du site pour le Conseil européen, le Parlement européen et l’Action extérieure de l’UE : un logo sur les pages d’accueil des sites standards seraient souhaitables une fois la phase de tests terminée ;
  • Indications réduites des versions mobiles lors d’un surf mobile puisque seul le site mobile du Parlement européen indique qu’une version optimisée est disponible : une détection automatique du contexte de navigation permettrait d’améliorer le service offert aux mobinautes.

Ainsi, 9 mois après le billet que nous publions sur le sujet : « Que fait l’UE pour adapter sa communication à l’Internet mobile ? », l’adaptation de l’UE aux nouveaux formats et usages mobiles progresse.

Interview testamentaire exclusive de Claus Sørensen, l’ancien directeur général à la DG Communication de la Commission européenne

À partir du 1er Juillet, Claus Sørensen n’est plus le Directeur général à la DG Communication (de la Commission européenne). Avant qu’il ne quitte son bureau, le 1er à exercer un mandat à la tête de la DG COMM depuis sa création en janvier 2006 a répondu à mes questions sur son « testament »…

Quel est votre plus grande réussite en tant que chef de la DG COMM ?

La communication est maintenant beaucoup plus liée au processus politique que ce ne fut le cas, avant mon arrivée. A cette époque, la communication était orientée « outil », ce qui signifie que les choses étaient décidées de manière isolée pour chaque outil de que nous allions faire au cours des prochains mois.

Maintenant nous avons une approche holistique et de fond : nous prenons comme point de départ les priorités politiques du Collège et nous décidons comment nous voulons les communiquer.

Nous nous engageons d’abord sur la narration et les messages, ainsi que les populations cibles, afin de faire sortir les bonnes histoires. Ensuite, nous décidons quels outils utiliser pour ce faire. Tous les différents outils de communication sont disponibles notamment en travaillant avec des partenaires dans les États membres.

De cette façon, la Commission est présente sur les différents canaux de communication avec les mêmes sujets et les mêmes messages. Quand je dis «nous», j’entends les premiers « communicateurs », que ce soit le président, les commissaires ou les communicants officiels.

Durant la dernière année nous avons considérablement amélioré la performance des outils de communication de la Commission :

Les Représentations : Des gestionnaires expérimentés et même des cadres supérieurs ont été nommés chefs des Représentations de la Commission. Il y a maintenant une rotation obligatoire pour les fonctionnaires des représentations de la Commission, de sorte qu’ils ne deviennent pas « natifs »…

Les partenariats : Le partenariat de gestion a démarré en Allemagne en 2006, aujourd’hui, ce concept est mis en œuvre dans 18 États membres: Autriche, Belgique, Estonie, Finlande, France, Allemagne, Grèce, Hongrie, Italie, Lettonie, Lituanie, Malte, Pologne, Portugal, Slovénie, Slovaquie, Espagne, Suède.

Refonte du portail Europa : Au cours des dernières années, la Commission a mené des recherches approfondies sur les utilisateurs, grâce à des tests d’utilisabilité, des sondages (plus de 2 000 réponses chaque mois) et des commentaires d’utilisateurs réguliers (plus de 4 000 commentaires chaque mois), pour savoir ce que les visiteurs veulent lors de la consultation d’Europa et quel est leur niveau de satisfaction. Ce travail se traduit par une amélioration constante de l’ensemble du site basé sur une approche de navigation centrée sur la facilitation de l’utilisateur.

L’exemple le plus récent de ce processus est le re-lancement, en mai 2011, de la section « À propos de l’UE » en 23 langues. Il contient environ 80 pages courtes qui vont remplacer quelque 250 pages existantes qui étaient réparties sur plusieurs sites.

Euronews : À la fin de 2010, la Commission a signé un accord-cadre de 4 ans de partenariat avec Euronews. Dans ce cadre, la Commission a jusqu’ici soutenu la mise en place d’un bureau à Bruxelles et la production et la diffusion de programmes européens. La Commission soutient également les versions en arabe et en persan d’Euronews, ce qui est important pour le développement démocratique dans ces régions.

Europe by Satellite (EbS) : Ce service d’informations pour les médias de l’UE a été la principale source de contenus pour les radios et télévisions sur les questions de l’UE depuis 1995. La programmation, transmise par satellite et Internet, est constituée d’un mélange d’événements en direct, des news et de productions diverses sur les politiques de l’UE. La capacité d’EbS a été doublée en janvier 2009 par l’ajout d’un deuxième canal (EbS +) en réponse à une demande croissante d’infos sur l’UE dans l’audiovisuel. En 2010, le service a livré 2 150 heures de transmission EbS à plus de 20 000 journalistes et 650 000 utilisateurs sur une base mondiale.

EUtube : Des productions multimédias pour le grand public – des vidéo-clips, des documentaires sur les politiques de la Commission ainsi que des CD-Rom de présentations pour des conférences et/ou à des fins éducatives.

Euranet : Un réseau européen de radios composé de 27 stations internationales, nationales, régionales et locales issues de 18 Etats membres de l’UE. Le réseau a débuté ses programmes sur les affaires européennes en avril 2008 en 17 langues, atteignant 19 millions de citoyens de l’UE et 30 millions de citoyens non-UE dans le monde, chaque semaine. Il exploite un site web interactif et multilingue visant à favoriser le débat public.

Presseurop : Un portail Internet dédié à la presse imprimée et en ligne. Il offre un aperçu quotidien des articles de presse les plus intéressants sur les affaires européennes publiés le jour même ou la veille. Ces articles sont sélectionnés parmi près de 250 journaux et magazines à travers le monde et sont traduits en 10 langues.

Les médias sociaux : La Commission utilise les médias sociaux aujourd’hui, à trois niveaux différents:

  • « Political messaging », c’est-à-dire que des messages politiques sont envoyés via Twitter par les Commissaires et les porte-parole ;
  • Communication avec les parties prenantes et dans le cadre de campagne menée par les DG et services, en utilisant Facebook, Twitter et YouTube, etc ;
  • Présence active de membres du personnel sur toutes les plateformes de médias sociaux en fonction de leur capacité personnelle. Des directives pour l’ensemble du personnel existent.

Europe Direct Contact Centre : Le Centre est accessible depuis tous les États membres, dans toutes les langues officielles de l’UE via un numéro de téléphone sans frais (00 800 / 6 7 8 9 10 11), et une adresse web unique. Des chats sont disponibles en EN, FR et DE. Il a été considérablement élargi ces dernières années.

L’Europe pour les citoyens : Ce programme appuie les discussions et le réseautage des citoyens à travers l’Europe et va maintenant bénéficier d’un lien plus étroit avec les questions de politique qui sont débattues en Europe. Cela aidera les citoyens à participer au grandes décisions transeuropéennes comme par exemple la reprise économique, l’emploi, l’efficacité énergétique, l’immigration, le changement climatique, etc.

Par ailleurs, nous travaillons maintenant de manière beaucoup plus proche avec les autres institutions européennes quand il s’agit de communiquer sur l’Europe, notamment avec le Parlement européen et avec le Conseil. La collaboration est basée sur la déclaration politique intitulée « Communiquer l’Europe en partenariat » signé en 2008.

L’amélioration des outils et la coopération avec le Parlement européen, le Conseil et les États membres permettent à la Commission d’expliquer et de communiquer beaucoup mieux les politiques de l’UE avec et pour les citoyens et de contribuer à combler le « fossé » entre les citoyens et les institutions européennes. La communication sur la reprise économique est un bon exemple: les propositions et les opinions de la Commission sont désormais très présentes dans les différents médias dans les États membres.

La communication sur le prochain cadre financier pluriannuel sera le prochain test pour voir combien nous sommes efficaces dans la communication des grandes propositions de la Commission.

Quelle est, au contraire, votre plus grande déception ?

Certaines des réformes que j’avais en tête sont sorties très tardivement ou ne sont pas encore réalisées.

Les ressources humaines et financières de la Commission disponibles sont réparties dans toute la Commission. Ceci est un obstacle pour concentrer nos efforts sur les sujets qui comptent vraiment pour les citoyens et les entreprises. Je pense que nous pourrions être encore plus efficaces dans la communication de l’Europe si nous pouvions rassembler plus les ressources pour la communication afin de développer une plateforme de communication corporate plus solide.

Le conseil de direction de la communication, qui guide la communication corporate, que j’avais proposé en 2008, a été créé vers la fin de mon mandat avec l’arrivée de la vice-présidente Reding. Il s’est avéré être un moyen très utile pour orienter les activités de communication de la Commission, mais aurait dû être fait plus tôt.

Qu’avez-vous appris la plupart de la communication ?

L’importance de la localisation des messages aux conditions dans les États membres. Communiquer nécessite de prendre en considération les sensibilités, la culture, l’histoire et évidemment les langues. Ce qui fait la richesse de la diversité de l’Union européenne est en effet un grand défi pour communiquer à travers l’Europe. Et surmonter ces obstacles est indispensable pour un échange efficace des points de vue à travers l’Europe.

À cet égard, les Représentations de la Commission dans les États membres ont joué et jouent un rôle clé. Je suis très heureux qu’elles aient été renforcées grâce à plus de personnels mieux qualifiés et qu’elles sont maintenant mieux branchées sur la communication de la Commission à différents stades : donner une rétroaction plus qualitative des États membres et faire passer les messages par les médias et les citoyens.

Mais on pourrait faire plus ! Nous devons nous engager davantage avec les parties prenantes, avec les écoles, les ONG, les pro-européens et les eurosceptiques de même ! Vive une démocratie vivante.

Exclusive testamentary interview of Claus Sørensen, the former Director General at the DG Communication of the European Commission

As of today, 1st of July, Claus Sørensen is no longer the Director General at the DG Communication (of the European Commission). Before he leaves his office, he replied to my questions on his “testamentary”…

What is your greatest achievement as head of DG COMM?

Communication is now much more linked to the policy process than it was the case, before I arrived. At that time, communication was tool driven, meaning that it was decided in an isolated manner for each communication tool what we are going to do over the next month.

Now we have an holistic and substance driven approach: we take as a starting point the political priorities of the College and decide on how we want to communicate them.

We first agree on the narrative and the messages, as well as the target groups, in order to get the good stories out.

Then we decide which tools to use to do so. All the different communication tools are available including working with partners in Member States.

In this way the Commission is present on the different communication channels with the same subjects and the same messages. When I say « we », I mean the prime communicators, be it the President, the Commissioners or officials.

Over the last year we considerably improved the performance of the Commission’s communication tools:

Better Representations: Experienced managers and even senior managers were appointed as Heads of the Commission Representations. There is now a mandatory rotation for officials in Commission Representation, so that they do not go native…

Management partnerships: The first Management Partnership started off in Germany in 2006, nowadays this concept is implemented in 18 Member States: Austria, Belgium, Estonia, Finland, France, Germany, Greece, Hungary, Italy, Latvia, Lithuania, Malta, Poland, Portugal, Slovenia, Slovakia, Spain, Sweden.

Revamped EUROPA: Over the last years, the Commission has been conducting extensive user research, through usability testing, user surveys (more than 2 000 replies each month) and regular user feedback (more than 4 000 comments each month) , to find out what visitors want when consulting Europa and what their level of satisfaction is.

This work is translating into constantly improving the whole site based on a user-centric approach facilitating navigation.

The most recent example of this process is the re-launch, in May 2011, of the section « About the EU » in 23 languages. It contains around 80 short pages that will replace some 250 existing pages which were spread across many different websites.

More EURONEWS: At the end of 2010 the Commission signed a 4 years partnership framework agreement with Euronews. In this framework, the Commission has so far supported the setting up of a Brussels office of Euronews and the production and broadcast of European programmes. The Commission is also supporting the Arabic ad Farsi versions of Euronews, which is important for the democratic development in those regions.

Europe by Satellite (EbS): the EU’s TV information service has been the main source of radio and TV material on EU issues for the media since 1995. The programming, transmitted via satellite and internet, consists of a mix of live events, news and miscellaneous productions on EU policies. EbS capacity was doubled in January 2009 by adding a second channel (EbS+) in response to increasing demand for EU-related audiovisual news. In 2010, the AV Services delivered 2 150 hours of EbS transmission to more than 20 000 journalists and to 650 000 users on a worldwide basis.

Eutube: multimedia productions for the general public – video-clips, documentaries on the main EC policies as well as CD-Rom presentations for conferences and educational purposes.

Euranet: a European Radio Network of 27 international, national, regional and local radio stations from 18 EU Member States. The Network started its programmes on EU affairs in April 2008 in 17 languages, reaching 19 million EU citizens and 30 million non-EU citizens around the world weekly. It operates an interactive and multilingual website aimed at fostering public debate.

Presseurop: an Internet portal dedicated to the printed and online press. It offers a daily overview of the most interesting press articles on EU affairs published the same or the previous day. These articles are selected from around 250 newspapers and magazines around the world and are translated into 10 languages.

Social media: The Commission uses nowadays social media at three different levels:

  • Political messaging, i.e. centrally agreed messages are sent out via Twitter by Commissioners and Spokespeople.
  • Stakeholder and campaign communication carried out by DGs and services, using Facebook, Twitter and YouTube, etc.
  • Staff members are active on all social media platforms in their personal capacity. Guidelines for all staff exist.

Europe Direct Contact Centre: The Centre is accessible from all Member States in all EU official languages via a toll-free telephone number (00800/6 7 8 9 10 11), and a single web address. Web chat is available in EN, FR and DE. It has been vastly expanded these last years.

Europe for Citizens: This programme supports discussions and networking of citizens across Europe and will now benefit from a closer link to the real policy issues that are being debated in Europe. This will help the citizens to participate in big trans-European decisions as for example the Economic recovery, jobs, energy efficiency, immigration, climate change etc.

Furthermore, we now work much closer together with the other European institutions when it comes to communicating Europe, especially with the European parliament and with the Council. The collaboration is based on the political declaration entitled « Communicating Europe in Partnership » signed in 2008.

The improvement of the tools and the cooperation with the EP, the Council and Member States allows the Commission to explain to and to communicate EU policies much better to and with citizens and to help closing the « gap » between citizens and European institutions. The communication on the economic recovery and the European semester is a good example: the proposals and views of the Commission are now very present in the different media in the Member States.

The communication on the next multi-annual financial framework will be the next test case to see, how effective we are in communicating the Commission’s major proposals.

What is, on the contrary, your biggest disappointment?

Some of the reforms I had in mind kicked in very late or not yet realised.

Human and financial resources of the Commission available are spread all over the Commission. This is an obstacle for focusing our efforts on those topics which really matter for citizens and business. I think we could be even more efficient in communicating Europe if we could pool more the resources for communication so as to develop a stronger corporate communication platform.

The creation of the communication steering board, which guides the corporate communication, and which I proposed in 2008, was create  towards the end of my mandate with the arrival of Vice-President Reding. It turned out to be a very useful way to steer the Commission’s communication activities, but should have been done earlier.

What did you learn mostly from communication?

The importance of localising messages to conditions in Member States. Communicating needs to take into consideration sensitivities, culture, history and obviously languages. What is the richness of the European Union diversity is in fact a big challenge for communication across Europe. And overcoming these obstacles is essential for an efficient exchange of view points across Europe.

In this respect the Commission Representations in the Member States have played and will play a key role. I am very happy that they have been strengthened through more and better qualified staff and they are now better plugged into the communication line-up of the Commission at different stages: giving more qualitative feedback from the Member States and getting the messages out to media and citizens.

But more could be done! We have to engage more with schools, with stakeholders, NGOs, pro-Europeans and euro sceptics alike! Long live a lively democracy.

La communication européenne a-t-elle besoin de plus de transparence ou plutôt de plus de cohérence ?

Indubitablement, la transparence est une valeur démocratique qui s’est progressivement imposée dans les esprits et tout particulièrement avec le web social. Pour les individus, la chose est entendue, il s’agit de la disparition de la vie privée dans toutes les sphères du quotidien. Il en va de même pour les institutions publiques invitées à voir disparaître leur vieille posture de discrétion (lire le billet de Mathew Lowry relatif à la communication de l’UE : « Does more transparency make better comms? »). Pourtant, les choses ne sont pas si simples…

Garantir la transparence de l’information n’est pas la garantie d’une bonne communication basée sur la confiance

Qu’il s’agisse tant des individus que des institutions, la dynamique d’ouverture à l’autre – de pleine communication – consiste à établir et gérer des relations de confiance :

  • pour les individus, le succès de la dite transparence induite par le web social ne repose pas vraiment sur le seul attrait de la mise à nu, mais bien plutôt sur l’émergence d’une « sphère extime » faite d’interactions sociales renouvelées, à la fois plus légères et plus authentiques ;
  • pour les institutions, l’attrait de la transparence permise par le web social ne repose pas seulement sur le sensationnalisme des « leaks », qui suppose la détention d’un savoir ou de techniques que les citoyens n’ont pas seuls, mais bien plutôt sur le mouvement vers une plus grande association des citoyens à la décision publique.

Autrement dit, alors que l’information publique même plus abondante – ce qui laisse croire à la soi-disant transparence de l’information – demeure contrôlée et de nature descendante, l’aspiration à la vraie transparence repose sur l’échange dans la confiance et conduit à une co-production des informations échangées entre l’émetteur et le récepteur en vue d’une meilleure décision publique.

Assurer la co-production de la décision publique ne peut se faire qu’en assurant la cohérence de la communication publique

Si l’UE veut développer une relation de confiance avec les citoyens et assurer ainsi une co-production de la décision publique européenne – ce qui constituerait une véritable avancée démocratique – alors il faut assurer la cohérence de la communication européenne, au sens où l’entend Anthony Hamelle dans « 2012 : Netpolitique & Cohérence ».

La cohérence, une obligation nouvelle qui « ne s’attache pas nécessairement au résultat produit mais aux moyens déployés », c’est-à-dire à la manière de faire de la communication :

1. Besoin d’une cohérence dans l’immédiat pour permettre la discussion en temps réel avec les citoyens

Aujourd’hui, avec la pression du temps réel dans le web social qui fait que les médias et les citoyens exigent des informations « synchronisées », il n’est plus possible pour une institution publique de dissimuler des informations, sans risquer de rompre la relation de confiance.

Ainsi, « c’est à une forme de cohérence immédiate que les institutions publiques doivent s’astreindre, en épousant les contours de l’actualité en temps réel pour assumer ou réfuter (de manière argumentée) les représentations qu’elle construit ».

2. Besoin d’une cohérence dans la durée pour permettre le fact checking des citoyens

Aujourd’hui, avec les capacités de mémoire collective que permet le web, il n’est plus possible pour une institution publique de se contredire sans risquer de rompre la confiance que son discours peut construire.

Ainsi, c’est à une forme de cohérence dans la durée que les institutions publiques doivent se conformer pour éviter de décrédibiliser leur parole tandis que le « fact checking » – exercés notamment par des leaders d’opinion actifs sur des blogs et sur Twitter – se développent.

3. Besoin d’une cohérence dans les formats pour permettre l’open data

Aujourd’hui, « faciliter l’accès à des données publiques toujours plus nombreuses pour vérifier, analyser et croiser des « réalités » sociales, économiques ou politiques et de les juxtaposer aux affirmations et prétentions des institutions publiques » correspond à une avancée démocratique que l’UE ne peut se permettre d’échouer.

Ainsi, c’est à une forme de cohérence dans les formats que les institutions publiques sont tenues pour permettre l’« open data » l’exploitation et l’appropriation des données publiques par le plus grand nombre.

Ainsi, satisfaire la demande citoyenne d’établir et de nourrir une relation de confiance entre l’UE et les citoyens ne se fera pas par une communication plus transparente – illusoire sinon dangereuse, même à l’échelle des individus – mais par une communication plus cohérente – un signe de respect pour les parties prenantes, de meilleure gouvernance et de maturité démocratique.

Quelles sont les priorités du futur DG COMM à la tête de la communication de l’UE ?

D’ici quelques jours, un événement particulièrement important va marquer la communication de l’UE : l’actuel Directeur général de la DG Communication au sein de la Commission européenne, Claus Sørensen – en poste depuis la création de cette direction en janvier 2006 – devrait quitter son poste.

Une occasion pour aborder – à la lecture de l’étude sur « les évolutions du métier de communicateur public et de l’organisation des services de communication des institutions publiques » – les temps nouveaux de la communication européenne qui devraient voir évoluer à la fois les métiers, les structures et surtout les relations, notamment avec les citoyens…

Priorité n°1 : renforcer la professionnalisation pour une meilleure maîtrise de la complexité et de la transversalité

Du recrutement de spécialistes de la communication en amont – un concours spécifique existe depuis 2007 au sein de l’UE – à l’évaluation de la performance et des résultats en aval, la priorité du futur Directeur Général est de poursuivre la professionnalisation à tous les niveaux.

En tant que fonction stratégique au sein des institutions européennes, la communication européenne doit renforcer sa maîtrise de la « complexité » :

  • Meilleure maîtrise de la complexité des « publics » simultanément citoyen, électeur, contribuable, usager ou consommateur ;
  • Meilleure maîtrise de la complexité des « enjeux », notamment les attentes liées au web social (temps réel, dialogue, fact checking, open data…).

En tant que fonction opérationnelle au sein des institutions européennes, la communication européenne doit également mieux maîtriser la « transversalité » :

  • Dans le sens de la spécialisation des savoir-faire de la communication (publications, relations publiques, événementiels, médias traditionnels et web social…) ;
  • Dans le sens du conseil, notamment à l’égard des dirigeants et de la formation à la communication des acteurs à tous les niveaux de l’institution.

Priorité n°2 : couvrir les nouveaux territoires émergés : réseaux et partenariats, communication interne et locale

1. Satisfaire la demande ascendante d’accueil et d’information

Résultat d’une double pression : celle des citoyens européens et celle des réformes institutionnelles conduisant à une décentralisation (Représentations dans les États-membres), la demande de proximité, de transparence et de clarté met en cause l’ensemble des structures, des méthodes et des pratiques de la Commission européenne.

Ainsi, la communication européenne doit répondre à cette demande d’accueil et d’information :

  • tantôt il s’agit d’améliorer le service rendu au public, son accès aux droits, sa connaissance et son itinéraire dans les formalités ;
  • tantôt il s’agit plutôt de préparer, d’éclairer ou d’expliquer une réforme ou un projet.

Le développement des « Maisons de l’Europe » rassemblant les Représentations de la Commission et les Bureaux du Parlement européen contribuent à satisfaire cette pression ascendante.

2. Combler les besoins inexplorés de communication interne

Alors que le travail en mode projet au sein d’équipes pluridisciplinaires et multilingues est le quotidien des fonctionnaires européens, la communication interne à la Commission européenne est un territoire à ne pas négliger.

La communication apparaît comme un moyen incontournable de réussite de la réforme des politiques publiques européennes.

3. Assurer le développement des partenariats et des réseaux de communicateurs

Afin d’assurer la pleine puissance de la communication de l’Union européenne, plusieurs réseaux doivent être parallèlement confortés :

  • les réseaux « partenariaux » issus de l’accord interinstitutionnel entre les institutions européennes (Commission, Parlement et Conseil) et avec les Etats-membres ;
  • les réseaux « horizontaux », c’est-à-dire les cellules de communication dans les différentes Directions et Services de chaque institution européenne ;
  • les réseaux « décentralisés/spécialisés » : mise en place et professionnalisation de réseaux de communication homogène comme par exemple le réseaux des experts en médias sociaux.

Priorité n°3 : assurer une pleine appropriation des progrès et outils du web social avec davantage de mutualisation et de cohérence

1. Gérer les formes nouvelles des relations presse et de gestion de l’engagement dans les médias sociaux

Parce que les médias audiovisuels et sociaux se développent avec une amplification de l’image qui décuple considérablement l’émotion et l’impact pour l’audiovisuel et renforce la sensibilité et l’exigence d’information du public via les médias sociaux, la communication européenne doit s’adapter :

  • modification de la vraie fonction des services de presse qui d’apporteurs de faits ou de données, deviennent des apporteurs de réflexion et de « valeur ajoutée » ;
  • modification de la relation avec les journalistes et les citoyens engagés en ligne.

L’engagement des porte-parole sur Twitter contribue à suivre, répondre ou agir en temps réel pour alimenter en informations, répondre aux diverses interpellations et faire face au phénomène de « rumeur ».

2. Développer la mutualisation des pratiques et des contenus grâce au web social

Au-delà de l’engagement des porte-parole – la voie officielle de la Commission européenne – dans les médias traditionnels et les médias sociaux, une pleine appropriation des progrès et outils du web social par l’ensemble des professionnels de la communication bouleverse leur métier :

  • changements dans la gestion et la préparation des décisions entre services historiquement cloisonnés avec une meilleure cohérence de l’ensemble des messages et outils de communication (écrits, interactifs, audiovisuels, événementiels…) ;
  • « mutualisation » au service de la rapidité, de la qualité et de la baisse des coûts.

« Progrès permanents vers plus de professionnalisation, nouveaux territoires de communication, évolution vers plus de légitimité stratégique sans même parler des innombrables évolutions encore à venir… » les priorités de la communication européenne ne manque pas pour le futur DG COMM.

Le futur Directeur Général à la communication devra être un homme ou une femme qui aura le plus besoin de personnalité, d’acharnement et de puissance de conviction. Ses principales qualités seront :

  • ne pas baisser les bras ;
  • accumuler du professionnalisme ;
  • apporter de la valeur ajoutée ;
  • travailler en partenariat ;
  • prendre de la hauteur.