Comme prévu par l’agenda institutionnel européen, Ursula von der Leyen est réélue présidente de la Commission européenne pour un second mandat, le 18 juillet, avec une majorité plus confortable qu’attendue. Dans son discours devant les députés européens, elle dévoile ses orientations politiques pour la prochaine Commission : « Le choix de l’Europe » pour les cinq prochaines années, mettant l’accent sur cinq priorités majeures.
Une communication politique hyper-sobre : piliers du programme von der Leyen II
Le travail de consolidation de sa majorité parlementaire, entre les groupes politiques du centre-droit (PPE), centre-gauche (S&D), centristes (Renew), mais aussi les Verts qui ont joué le jeu de la coalition tandis que les conservateurs (ECR) se sont divisés :
- Un nouveau plan pour la prospérité et la compétitivité durables, visant à stimuler l’économie européenne, en mettant l’accent sur la facilitation de l’activité des entreprises, l’élaboration d’un pacte pour une industrie propre, et le renforcement de la recherche et de l’innovation. Elle souligne également l’importance de combler le déficit de compétences et de main-d’œuvre.
- Une nouvelle ère pour la défense et la sécurité européennes : Face aux défis géopolitiques actuels, von der Leyen promet de faire de l’Union européenne de la défense une réalité, tout en renforçant la préparation aux crises et la sécurité intérieure. Le renforcement des frontières communes et une approche équitable mais ferme en matière de migration sont également au programme.
- Soutien aux personnes et renforcement du modèle social européen : La présidente de la Commission s’engage à promouvoir l’équité sociale, à restaurer l’unité des sociétés et à soutenir les jeunes. L’égalité et la préservation de la qualité de vie, notamment en termes de sécurité alimentaire et d’accès à l’eau.
- Protection de la démocratie et défense des valeurs européennes : un autre « bouclier européen de la démocratie » propose de renforcer l’état de droit et de placer les citoyens au cœur du processus démocratique.
- Renforcement du rôle de l’Europe dans le monde : La présidente de la Commission prévoit de poursuivre l’élargissement de l’UE, d’adopter une approche plus stratégique envers les pays voisins et de mettre en place une nouvelle politique économique étrangère.
Une nouvelle forme de communication politique par la création de nouveaux postes de Commissaires
La nouvelle présidente de la Commission européenne von der Leyen, dont la créativité n’est plus à démontrer si l’on se souvient de la configuration autour de Vice-Présidence aux titres ronflant, se montre de nouveau généreuse dans la création de nouveaux postes de Commissaires, notamment :
- « chargé de la défense »
- « spécialement chargé de l’élargissement »
- « pour la Méditerranée »
- « dont le portefeuille inclura le logement »
- « chargé de l’égalité »
- « chargé de l’équité intergénérationnelle »
- « chargé de la pêche et des océans »
Ces propositions soulèvent des questions sur l’équilibre entre visibilité politique et efficacité institutionnelle. La création de ces nouveaux postes présente des avantages en termes de visibilité politique et d’adaptabilité face aux défis émergents. Cela peut servir de « marqueur » qui font tant défaut dans la liste des priorités, sur le fond largement consensuel au vue des résultats du vote à bulletin secret pour son investiture, mais sans aspérité, pour les valoriser les porter à la connaissance du grand public.
Cependant, ces nouveaux postes soulèvent également des interrogations. Le respect du cadre juridique, la création de nouveaux postes doit s’inscrire dans le cadre fixé par les traités européens, sinon, le risque de fragmentation augmente avec une multiplication des portefeuilles qui pourrait nuire à la cohérence de l’action de la Commission. Mais surtout, l’alignement avec la structure administrative est crucial afin d’assurer une bonne coordination entre les portefeuilles des Commissaires et l’organisation des directions générales.
En revanche, la communication via les portefeuilles peut se montrer nuisible, en raison de son illisibilité pour le public. La multiplication des postes pourrait paradoxalement rendre moins lisibles les responsabilités réelles de l’UE pour les citoyens européens. Sans compter les contraintes pratiques où la répartition des postes devra se faire en fonction des candidatures présentées par les États membres, ce qui pourrait limiter la flexibilité dans l’attribution des nouveaux portefeuilles en fonction des profils.
Au total, la proposition d’Ursula von der Leyen de créer de nouveaux postes de Commissaires reflète une volonté d’adapter l’institution aux défis contemporains et d’envoyer des signaux politiques forts. Cependant, la mise en œuvre de cette vision devra naviguer entre les contraintes juridiques, les impératifs d’efficacité administrative et les besoins de communication politique. Dans l’équilibre à trouver entre ambition politique et pragmatisme institutionnel, où il s’agira de traduire les nouvelles priorités en actions concrètes, peut-on suggérer que cela ne se fasse pas au détriment de la cohérence et de l’efficacité de l’institution européenne, d’autres formes de communication devraient être privilégiées.
Le processus d’audition des nouveaux Commissaires par le Parlement européen permet d’évaluer la faisabilité et la pertinence de cette nouvelle structure, et aurait pu conduire à des ajustements avant la prise de fonction effective de la nouvelle Commission européenne.