A l’occasion de la Journée Annuelle de l’Initiative Citoyenne Européenne, le Mouvement européen – France a organisé un débat sur les initiatives citoyennes européennes, un dispositif méconnu et sous exploité. Qu’en est-il vraiment ?
Généalogie de l’initiative citoyenne européenne : l’orpheline de l’utopie européenne
Dans le tournant participatif de l’Union européenne accompagné de progrès de la démocratie consultative et délibérative européenne, l’initiative citoyenne européenne est atypique : nul ne peut vraiment s’en attribuer la paternité, n’en revendique l’origine et le modèle d’aspiration.
De fait, cet outil de démocratie participative light qui fait appel au recueil de signatures des citoyens afin de mettre à l’agenda institutionnel de l’Union européenne des propositions de législation ne fait pas vraiment sentir la pression démocratique citoyenne sur les institutions européennes afin de rendre des comptes aux citoyens.
A l’image de la construction européenne, l’initiative citoyenne européenne en hérite à la fois les aspects innovants, voire utopiques qui nécessiterait un véritable peuple européen pour vraiment fonctionner correctement et les défauts de nature bureaucratique, quoique la Commission européenne ait été condamnée par la justice européenne pour défaut de réponse autour d’une initiative citoyenne européenne.
Typologie des initiatives citoyennes européennes : les causes sociétales bienveillantes
Avec une centaine d’initiatives citoyennes européennes déposées depuis leur lancement lors de la mise en œuvre du traité de Lisbonne, l’outil n’est pas ce que l’on pourrait qualifier de très populaire ; seules 5 initiatives citoyennes européennes ont fait l’objet d’une réponse de la part de la Commission européenne à ce jour.
Des idéaux-types se dégagent à la lecture des sujets, surtout dans la catégorie des initiatives citoyennes encore en cours ou ayant fait l’objet d’une réponse, par ordre d’importance, une initiative citoyenne européenne veut :
- Mettre un « stop » : glyphosate, vivisection, biométrie, pêche aux ailerons, élevage en cage…
- Mettre un « droit » : eau comme service public, protection des minorités, vaccins pour tous, vote aux électeurs sans frontière…
- Mettre une « taxe » (dans une moindre mesure).
La base d’une initiative citoyenne européenne repose sur un combat de société, un projet de briser des blocages ou de faire des progrès. Cet appel au convictions personnelles, positives, généreuses – puisqu’une initiative citoyenne européenne doit respecter les valeurs et les compétences de l’Union européenne – conduit à privilégier des plateformes de communication spécifiques qui mettent l’accent sur les solutions concrètes, opérationnelles.
Méthodologie des initiatives citoyennes européennes : les mobilisations communautaires
Dans la panoplie des modalités de s’engager et de faire de la politique, les initiatives citoyennes européennes introduisent un nouveau registre de participation pour les citoyens, fondé à la fois sur le pari de l’intelligence collective et la force de la multitude.
Du côté des organisateurs des initiatives citoyennes européennes qui doivent parvenir à constituer un groupe de 7 nationalités différentes, le rôle d’une minorité d’avant-garde motivée à agir, experte des problématiques européennes et désireuse de faire appel au grand public est la condition sine qua none, le tipping point pour faire basculer le destin.
Du côté des signataires, les mécaniques de mobilisation s’appuient sur une logique de fierté d’appartenance ou de reconnaissance d’identité permettant à des collectifs largement spontanés de se mobiliser et de jouer la carte de la confiance et de l’autonomie de la société civile face au monde politique traditionnel.
Quoique très perfectibles en raison de nombreux obstacles techniques, logistiques et politiques, que la révision du règlement entrée en vigueur cette année n’est pas totalement parvenue à corriger malgré des avancées pour simplifier le conseil aux organisateurs, l’ergonomie de la plateforme web et la communication, les initiatives citoyennes européennes représentent une tentative en cours d’accoucher d’une nouvelle modalité citoyenne non médiatique de mise à l’agenda institutionnel européen, une prouesse autant qu’une promesse.