Archives mensuelles : juin 2008

Que faut-il penser des enquêtes Eurobaromètre ?

Depuis 1973, la Commission européenne effectue un suivi régulier de l’opinion publique dans les Etats membres avec les enquêtes Eurobaromètre. A l’aune de la crise européenne, à la suite de l’échec du référendum de ratification du traité de Lisbonne en Irlande, que faut-il penser des enquêtes Eurobaromètre ?

Les paradoxes de l’Eurobaromètre

Dans un article paru dans Le Monde du 15 juin, « Une Europe qui peine à susciter l’engagement des citoyens », les correspondants permanents à Bruxelles remarquent que les résultats de la dernière enquête d’opinion européenne, l’Eurobaromètre Standard 68, publié en décembre 2007, montre qu’« un haut niveau de satisfaction pour l’Europe ne garantit pas un engagement positif en sa faveur ».

En effet, les Irlandais sont parmi les Européens les plus favorables à l’Union, en 2e position. Ils sont 74 % à considérer l’UE comme « une bonne chose » contre 54 % pour la moyenne européenne (60 % pour les Français).

Par ailleurs, les responsables actuels de l’Eurobaromètre refusent les questions, jugées trop controversées, ce que le fondateur de l’outil, Jacques-René Rabier, dénonce, dans un entretien avec Euractiv, comme une preuve d’un « manque de courage ».

En effet, jusqu’en 1997, les Européens étaient interrogés sur la question de savoir en qui ils avaient le plus confiance. Les Français et les Allemands avaient invariablement montré une grande loyauté l’un envers l’autre. Cette question sur la confiance entre les peuples a été retirée afin – semble-t-il – de ne pas alimenter les tensions.

Les asynchronismes de l’Eurobaromètre

Dans un article dans la revue Europe’s World, « « Aimez-vous l’Union européenne ? » ou les curieuses réponses des instituts de sondage », Helen Szamuely constate que les personnes interrogées donneraient des réponses divergentes selon qu’il s’agisse d’instituts de sondage indépendants ou des enquêtes de l’Eurobaromètre.

L’apparente popularité du projet européen dans diverses études de l’Eurobaromètre pourrait s’expliquer par la confusion entretenue par les enquêteurs communautaires entre l’adhésion aux valeurs européennes et l’approbation de l’Union européenne. L’UE n’est pas forcément considérée par les citoyens européens comme le seul pourvoyeur de ces valeurs, ni qu’une meilleure intégration européenne soit nécessaire pour sauvegarder ces valeurs.

La relance de l’Eurobaromètre

Parce que la connaissance juste et approfondie de l’opinion publique européenne est l’une des conditions fondamentales de la réussite des politiques publiques européennes, Jacques-René Rabier suggère d’introduire dans l’Eurobaromètre des questions « légèrement pimentées ». Ces questions pourraient être posées sous la responsabilité éditoriale de médias et/ou à l’initiative de parlementaires européens.

Un contexte de communication plus difficile que prévu pour la PFUE

Alors que le lancement officiel de la PFUE est prévu le 1er juillet, une succession d’éléments assombrie les perspectives. Retour sur cette convergence de effets de cadrage négatifs…

Effet de verdict : l’échec du référendum de ratification en Irlande

Seul pays de l’UE à tenir une telle consultation, organisée jeudi 12 juin, 53,4% d’électeurs irlandais a rejeté le traité de Lisbonne avec une participation électorale moins faible que prévue : 53,1% de l’électorat s’est rendu aux urnes.

Le succès de la Présidence française reposera sur la capacité de la France à trouver une solution avant l’entrée en vigueur du traité de Lisbonne, prévue le 1er janvier 2009.

Effet de contexte : la situation internationale « compliquée »

Lors d’une réunion du Club Grande Europe, jeudi 12 juin, le secrétaire d’Etat aux affaires européennes, Jean-Pierre Jouyet a estimé que « la Présidence française de l’UE sera très difficile » en raison du contexte international : crise financière internationale, hausse des prix des matières premières et de l’énergie, nouvelle administration américaine…

Le succès de la Présidence française se mesurera en fonction de la capacité de la France à composer avec un contexte international tendu.

Effet d’opinion : les divergences du couple franco-allemand

Lors d’un conseil des ministres franco-allemand, lundi 9 juin à Straubing en Bavière, Nicolas Sarkozy et Angela Merkel ont tenté de s’accorder. La France a consenti des concessions à son partenaire traditionnel sur le projet d’Union pour la Méditerranée et la priorité de lutter contre le réchauffement climatique.

Le succès de la Présidence française tiendra à la capacité de la France à conclure des accords avec ses partenaires sur les principaux chantiers en cours.

Effet de conjoncture : les déficits publics français

En mai dernier, la Commission européenne a mis en garde la France contre des déficits publics « excessifs » qui vont à l’encontre des engagements pris dans le cadre du Pacte de stabilité et de croissance.

Le succès de la Présidence française sera évaluer selon la capacité de la France à mener une politique intérieure de réformes visant à respecter ses engagements.

Effet d’agenda : le couac de calendrier de Paroles d’Européens

Vendredi 13 juin, la 2nde rencontre du programme Paroles d’Européens était organisée à Marseille autour des enjeux et des priorités de la PFUE. Outre que cet événement fut dominé par l’échec du référendum, le jugement de la presse est sévère comme l’illustre un article de Libération « on est censé entendre des «Paroles d’Européens !», on écoute, en baillant, des experts. »

Le succès de la Présidence française reposera sur la capacité de la France à faire de ce rendez-vous européen un événement citoyen populaire.

Enjeux de l’implication du Parlement lors de la PFUE

Alors qu’un protocole accompagnant le traité de Lisbonne prévoit de renforcer le rôle des Parlement nationaux dans l’UE – avec une amélioration des informations destinées aux Parlements nationaux et un encouragement de la coopération interparlementaire – qu’en est-il du rôle de l’Assemblée nationale et du Sénat dans la PFUE ?

Les formes envisagées de l’association du Parlement à la PFUE

Jean-Pierre Jouyet, secrétaire d’Etat chargé des affaires européennes propose que l’association du Parlement à la PFUE emprunte deux voies principales :

  • une information régulière dans les délégation pour l’UE de l’Assemblée nationale et du Sénat sur la préparation et le déroulement de la PFUE
  • une participation aux débats citoyens en régions avec le Programme Paroles d’Européens sur les enjeux de la PFUE

Par ailleurs, il ne faut pas oublier les réunions communes de commissions parlementaires sectorielles ou des présidents des Commissions des affaires européennes des parlements de l’UE.

Les formes proposées de participation des parlementaires à la PFUE

Dans un avis sur la loi de finances 2008, la députée Nicole AMELINE propose « la mise en œuvre de mesures très concrètes contribuant à atteindre l’objectif d’une implication parlementaire à la hauteur de l’enjeu de la présidence française » :

  • Création d’un « Comité d’orientation de la présidence française ». Ce comité a été installé en décembre dernier par Bernard Kouchner, avec la présence de parlementaires.
  • Fabrication et mise à disposition de « kits d’information » sur la PFUE comprenant un DVD de présentation, du matériel pédagogique et des dossiers d’information sur les priorités politiques. Ce kit faciliterait l’organisation de réunions publiques sur le terrain et positionnerait les élus comme de véritables relais de la PFUE.
  • Mise en place d’une « signalétique » PFUE à l’Assemblée nationale et au Sénat informant les députés en temps réel de l’agenda de la présidence française et des principales initiatives politiques.

Philippe Starck, directeur artistique de la PFUE

Sur les 190 millions d’euros de budget pour la PFUE, une enveloppe de 15 millions d’euros est fixée pour les actions de communication. Afin d’assurer une direction artistique de la communication de la PFUE, le designer Philippe Starck est consulté…

Le brief de la dimension artistique de la PFUE

Bernard Kouchner, ministre des Affaires étrangères, veut imprimer une Présidence française de l’UE « très créative » afin de donner – selon Philippe Starck – « l’image d’une France utilisant les plus hautes technologies, donc une France non pas béret basque mais d’avant-garde ».

Le dispositif artistique de la PFUE

La sensibilité artistique de la PFUE se manifeste notamment par :

  • l’organisation de manifestations culturelles dans le cadre de la saison culturelle européenne,
  • la décoration des bâtiments où se tiendront les réunions officiels
  • la conception des produits dérivés ; les traditionnels cadeaux siglés aux couleurs de la présidence laissant la place – selon Philippe Starck – à « plein de choses utiles » présentés d’ici la fin du mois.

La volonté – commune aux autorités publiques et au designer – est de réaliser un important « travail de dépoussiérage » de la construction européenne afin de relancer l’adhésion citoyenne.

Slogans de campagnes et études d’opinion sur le référendum en Irlande

Dans la cadre de la ratification du traité de Lisbonne, l’Irlande est le seul Etat membre dont la Constitution impose d’organiser un référendum. L’issue du scrutin – prévu demain, le 12 juin – reste incertaine…

Une évolution sensible de l’opinion

Alors que la majorité des enquêtes d’opinion jusqu’à récemment donne le « oui » gagnant, un sondage réalisé le 6 juin dans the Irish Times crédite le « non » de 35%, contre 30% au « oui », 28% restant indécis et 7% disant ne pas vouloir voter. Il s’agit du 1er résultat où le « non » apparaît majoritaire…

La plupart des observateurs – qui se rappellent l’échec de la ratification du traité de Nice – considèrent que aux de participation sera l’élément crucial du scrutin. En juin 2001, alors que les sondages indiquaient une écrasante victoire du oui, le fort taux d’abstention (65,2 %) entraina l’échec de la ratification (53,9 % contre le traité de Nice).

Une campagne de ratification très politique

Comme lors de du référendum en France en 2005 sur le projet de Constitution européenne, la campagne est fortement politisée en confrontant les opposants au traité de Lisbonne, défenseurs de l’indépendance et de la neutralité autour du slogan : « Des Irlandais sont morts pour votre liberté, ne la bradez pas ! Votez non ! »et les partis gouvernementaux, rassemblés autour d’un slogan « Bon pour l’Irlande, bon pour l’Europe ! Votez oui ! » jugé par Marion Van Renterghem du Monde comme une « incitation au oui qui paraît défensive, explicative, nuancée, ennuyeuse »…