Depuis 1973, la Commission européenne effectue un suivi régulier de l’opinion publique dans les Etats membres avec les enquêtes Eurobaromètre. A l’aune de la crise européenne, à la suite de l’échec du référendum de ratification du traité de Lisbonne en Irlande, que faut-il penser des enquêtes Eurobaromètre ?
Les paradoxes de l’Eurobaromètre
Dans un article paru dans Le Monde du 15 juin, « Une Europe qui peine à susciter l’engagement des citoyens », les correspondants permanents à Bruxelles remarquent que les résultats de la dernière enquête d’opinion européenne, l’Eurobaromètre Standard 68, publié en décembre 2007, montre qu’« un haut niveau de satisfaction pour l’Europe ne garantit pas un engagement positif en sa faveur ».
En effet, les Irlandais sont parmi les Européens les plus favorables à l’Union, en 2e position. Ils sont 74 % à considérer l’UE comme « une bonne chose » contre 54 % pour la moyenne européenne (60 % pour les Français).
Par ailleurs, les responsables actuels de l’Eurobaromètre refusent les questions, jugées trop controversées, ce que le fondateur de l’outil, Jacques-René Rabier, dénonce, dans un entretien avec Euractiv, comme une preuve d’un « manque de courage ».
En effet, jusqu’en 1997, les Européens étaient interrogés sur la question de savoir en qui ils avaient le plus confiance. Les Français et les Allemands avaient invariablement montré une grande loyauté l’un envers l’autre. Cette question sur la confiance entre les peuples a été retirée afin – semble-t-il – de ne pas alimenter les tensions.
Les asynchronismes de l’Eurobaromètre
Dans un article dans la revue Europe’s World, « « Aimez-vous l’Union européenne ? » ou les curieuses réponses des instituts de sondage », Helen Szamuely constate que les personnes interrogées donneraient des réponses divergentes selon qu’il s’agisse d’instituts de sondage indépendants ou des enquêtes de l’Eurobaromètre.
L’apparente popularité du projet européen dans diverses études de l’Eurobaromètre pourrait s’expliquer par la confusion entretenue par les enquêteurs communautaires entre l’adhésion aux valeurs européennes et l’approbation de l’Union européenne. L’UE n’est pas forcément considérée par les citoyens européens comme le seul pourvoyeur de ces valeurs, ni qu’une meilleure intégration européenne soit nécessaire pour sauvegarder ces valeurs.
La relance de l’Eurobaromètre
Parce que la connaissance juste et approfondie de l’opinion publique européenne est l’une des conditions fondamentales de la réussite des politiques publiques européennes, Jacques-René Rabier suggère d’introduire dans l’Eurobaromètre des questions « légèrement pimentées ». Ces questions pourraient être posées sous la responsabilité éditoriale de médias et/ou à l’initiative de parlementaires européens.