Archives par étiquette : Viviane Reding

Série d’été : quel bilan après 6 mois de mandat pour Viviane Reding, la Commissaire européenne en charge de la communication ?

« Faut-il un Commissaire européen à la communication ? », c’est avec cette question que l’année 2010 a débuté tandis que José Manuel Barroso semblait ne pas attribuer de portefeuille à la communication au sein du Collège des Commissaires :

  • pour les antis : la communication de l’UE n’étant pas une politique, un Commissaire n’est pas nécessaire,
  • pour les pros : l’UE a besoin d’une politique de communication stratégique, un Commissaire est indispensable.

Viviane Reding a finalement été désignée au poste de Vice-présidente et Commissaire chargée de la Justice, des droits fondamentaux, de la citoyenneté (et de la communication) et son audition publique devant le Parlement européen lui a permis de dessiner :

Discours au 4e Sommet européen de la communication de Viviane Reding sur la communication de l’Europe : davantage préoccupé par les médias traditionnels et les pratiques politiques plutôt que porté par les opportunités des médias sociaux et les pratiques citoyennes.

Commentaire d’Aurélie Vialat, qui a assisté à la conférence : « en associant tellement étroitement la communication de l’Europe avec les objectifs politiques de l’Union européenne, la Commission risque de créer un décalage entre l’image globale de l’Europe qui n’est pas en soi si mauvaise et celle de la Commission qui par contre souffrirait (toujours selon l’image) de bureaucratie ».

Plan d’action de Viviane Reding pour améliorer la communication de la Commission européenne, visant à renforcer :

  • les outils presse et média de la Commission : technicisation du dispositif et ouverture offensive à des relations presse personnalisées,
  • les outils web de la Commission : consolidation de la toile et ouverture défensive au web social,
  • les outils graphiques : harmonisation des identités visuelles et ouverture allusive à l’image de marque.

Ce que la Commissaire présente en conclusion comme « la première, mais certainement pas la dernière étape » pour développer et renforcer la vocation servicielle de la DG Communication prend en compte – de manière plus ou moins heureuse – les nouvelles problématiques de la communication européenne (relation presse, web social et marketing).

Regard critique sur le discours de Viviane Reding au 4e Sommet européen de la communication

Lors du 4e sommet européen de la communication à Bruxelles, les 1er et 2 juillet, la Commissaire responsable de la communication, Viviane Reding délivre son discours inaugural sur la communication de l’Europe. Tentative de compte-rendu grâce au live twitt proposé par Aurélie Valtat…

Finalité de la communication de l’UE : être un outil largement institutionnel

La mission de la communication de la Commission européenne selon Viviane Reding se comprend par les oppositions qu’elle dresse :

  • Développer une stratégie de communication, ce n’est pas une question de démocratie, mais de leadership ;
  • La communication de la Commission européenne, ce n’est pas de la publicité, mais de la politique ;
  • Nous ne sommes pas en train de vendre du savon, mais nous construisons un continent où les gens se sentent chez eux ;
  • La communication est aussi bonne que la politique que vous communiquez.

Le positionnement de la communication se déduit aisément de cette mission institutionnelle :

  • La communication doit être intégrée dans le process de décision politique, dès le départ ;
  • Les actions de communication doivent être pilotées de manière centralisée ;
  • L’Europe a besoin d’un visage : Barroso et les Commissaires.

Autrement dit, la communication de l’UE peut être définie comme un outil au service du projet européen, porté au centre par les Commissaires et leur Président et à caractère institutionnel, c’est-à-dire s’attachant à valoriser les valeurs et les réalisations de ce projet.

Modalité de la communication de l’UE : être un message fortement émotionnel

Le travail de la communication de la Commission européenne selon Viviane Reding consiste à :

  • construire des relations presse pour adapter les messages aux différents paysages médiatiques nationaux dans l’Europe à Vingt-Sept et assurer une présence plus importante des Commissaires dans les chaînes de TV nationales ;
  • bâtir une marque forte et cohérente pour créer des relations émotionnelles fortes en éliminant les logos non essentiels, le drapeau européen devant suffire à l’identité visuelle de l’UE.

Le questionnement de la communication porte sur l’utilisation des médias sociaux:

  • certes, Viviane Reding affirme que l’engagement des citoyens est clé, qu’il faut faire passer le message au-delà de la presse et de la sphère bruxelloise ;
  • mais, les médias sociaux ne sont quasiment pas mentionnés et ne sont pas appropriées parce qu’ils répandent des potins.

Au total, le regard de Viviane Reding sur la communication de l’Europe semble davantage préoccupé par les médias traditionnels et les pratiques politiques plutôt que porté par les opportunités des médias sociaux et les pratiques citoyennes.

Plan d’action de Viviane Reding pour améliorer la communication de la Commission européenne

Peu de temps après sa nomination en 2004, la première Commissaire responsable de la communication avait publié un plan de 50 mesures concrètes visant à changer la façon dont la Commission aborde la communication, avec comme principales actions :

  • Professionnalisation du personnel : organisation de concours de recrutement pour des professionnels de la communication ;
  • Amélioration de la présence sur le web : lancement d’EUtube – l’espace de l’UE sur YouTube – et du blog de Margot Wallström, la première Commissaire à tenir un blog ;
  • Planification et coordination de la communication : renforcement des bureaux dans les pays membres et réalisation d’un calendrier de l’actualité de l’UE disponible en ligne.

Dans un courrier daté du 21 juin 2010, dont Euractiv a obtenu une copie, la Commissaire actuellement responsable de la communication écrit au Président de la Commission, José Manuel Barroso afin de lui annoncé un train de 14 mesures visant à renforcer la vocation servicielle de la DG Communication…

Renforcement des outils presse et média de la Commission : technicisation du dispositif et ouverture offensive à des relations presse personnalisées

La plupart des mesures annoncées concerne les outils presse et médias de la Commission autour de deux principales orientations :

D’une part, technicisation des moyens à la disposition de la Commission, en particulier de son président et des porte-parole :

  • installation de prompteurs pour les porte-parole lors des points presse (mesure 2) ;
  • densification des équipes de rédacteurs avec 4 senior speechwriters pour traiter les questions transversales (mesure 3) ;
  • service de diffusion interne d’une revue de presse électronique quotidienne disponible dès 8h45 (mesure 1) ;
  • service de transcriptions textuelles rapides des principales déclarations et conférences de presse (mesure 4) ;
  • service de diffusion de SMS à destination des journalistes pour les porte-parole lors de crises (mesure 6) ;
  • service dédié d’une équipe de production audiovisuelle (mesure 7) et de photographes (mesure 8) pour suivre le Président et éventuellement les Commissaires en missions importantes et sensibles.

D’autre part, personnalisation des relations presse en permettant au Président ou éventuellement aux Commissaires en missions importantes à l’étranger d’être accompagné d’une délégation de journalistes (mesure 8).

Quoique cette dernière mesure réponde en partie aux attentes des correspondants de presse à Bruxelles, les autres mesures tendent à davantage améliorer le dispositif technique sans forcément faciliter le travail des journalistes. Ces mesures répondent-elles vraiment aux attentes de l’Association de la presse internationale face à la chute inédite du nombre de correspondants de presse à Bruxelles ?

Renforcement des outils web de la Commission : consolidation de la toile et ouverture défensive au web social

Deux mesures annoncées touchent les outils web avec l’affectation diversement pondérée :

D’une part, mise en place d’une « équipe dédiée de 8 personnes au sein de la DG COMM » pour assurer un service permanent 24h/24h de « mises à jour en temps réel » des sites du Président et des Commissaires (mesure 5). Une telle mesure illustre l’engagement de la Commissaire pour améliorer les « owned media », c’est-à-dire la présence contrôlée par l’UE sur Internet.

D’autre part, mise en place d’un réseau de « 10 à 15 experts en médias sociaux au sein de la Commission » pour assurer « une surveillance des blogs et les réseaux sociaux et une réfutation instantanée » (mesure 10). Une telle mesure – à contrario – illustre la frilosité de la Commissaire pour améliorer les « earned media », c’est-à-dire la présence gagnée par l’UE sur Internet via les interactions avec les internautes.

Quoique cette dernière mesure puisse être interprété dans un sens moins défensif par les « experts médias sociaux » de la Commission, ces mesures répondent-elles aux besoins de l’équipe web spécialisée dans les médias sociaux de la Commission européenne bloguant sur Waltzing Matilda ?

Renforcement des outils graphiques : harmonisation des identités visuelles et ouverture allusive à l’image de marque

Plus classiquement, les dernières mesures annoncées s’attachent aux outils graphiques :

D’une part, amélioration du respect de la charte graphique de la Commission européenne :

  • densification de l’équipe des graphistes de la DG COMM pour améliorer la qualité des présentations projetés et des dossiers diffusés (mesure 11) ;
  • harmonisation de l’utilisation de logos avec la règle de l’usage systématique du drapeau européen (mesure 12).

D’autre part, les deux dernières mesures semblent timidement annoncer des initiatives visant à renforcer l’image de marque de l’UE :

  • lancement avant l’été d’une opération de « branding » à visage humain pour améliorer l’image de marque de la Commission (mesure 13) ;
  • lancement en octobre d’une « marque ombrelle » en créant un point d’entrée unique pour les citoyens à la recherche d’informations sur l’UE (mesure 14).

Ainsi, ce que la Commissaire présente en conclusion comme « la première, mais certainement pas la dernière étape » pour développer et renforcer la vocation servicielle de la DG Communication prend en compte – de manière plus ou moins heureuse – les nouvelles problématiques de la communication européenne…

Comment former les fonctionnaires européens et organiser la communication de l’UE dans les médias sociaux ?

Alors que la Commissaire responsable de la communication – Viviane Reding – confirme dans un courrier à la communauté des communicants web de l’UE qu’« Internet doit être un élément essentiel de nos efforts pour communiquer » et que n’importe quel fonctionnaire européen est une « ambassadeur de l’UE sur le web, comment l’UE peut-elle organiser sa communication dans les médias sociaux ?

Concevoir et construire l’e-présence : le community building

La lecture de l’article « Les métiers du social media marketing » de Fred Cavazza permet de mieux aborder les responsabilités relatives à la présence d’une marque au sein des médias sociaux. Quelles sont-elles ?

1. Déterminer les objectifs de l’e-présence, selon l’Altimeter Group :

  • Ecouter et démarrer des conversations : ”Foster Dialog“
  • Solliciter des avocats : ”Promote Advocacy“
  • Faciliter l’entre-aide : ”Facilitate Support“
  • Stimuler l’innovation participative et la co-création :”Spur Innovation“

2. Délimiter l’e-présence : les plateformes communautaires/sociales à intégrer et à éviter

À titre indicatif, le Parlement européen est selon la home du site institutionnel actuellement sur Facebook, Twitter, MySpace, Youtube et Flick’r.

Comment organiser la démarche de community building ?

  • Identifier des membres-clés qui permettrait de toucher rapidement des communautés ciblées à forte valeur ajoutée ;
  • Fédérer ces membres-clés autour d’initiatives communautaires associées à la stratégie de la marque ;
  • Enrôler et motiver d’autres membres en allant les recruter.

Comment identifier ces membres-clés ?

  • les veilleurs : ceux qui repèrent les informations sur les réseaux ;
  • les passeurs : ceux qui diffusent ;
  • les filtreurs : ceux qui sélectionnent et contextualisent ;
  • les interprètes : ceux qui reformulent et commentent.

A plus d’un titre, les fonctionnaires actuellement engagés sur les réseaux sociaux tels que certains signataires de la lettre ouverte de la communautés des communicants web de la Commission européenne comme Dick Nieuwenhuis ou Tony Lockett peuvent remplir cette mission.

Cartographier et mesurer l’e-reputation : le community monitoring

Là encore, avant de s’engager à proprement parler, il convient de mener un travail de community monitoring qui consiste à assurer une veille et une analyse des conséquences de la présence d’une marque au sein des médias sociaux. Quelles sont-elles ?

Cartographier l’information : la veille

  • Surveiller les discussions et la présence de la marque au sein des différents médias sociaux ;
  • Répertorier les informations publiées par les équipes internes (qui a publié quoi) de même que celles publiées par les membres de la communauté ;
  • Identifier les personnes en interne qui sont à l’origine des informations et les sensibiliser à la propagation de celles-ci sur les médias sociaux (page Wikipedia…).

Mesurer l’information : l’analytics

  • Définir et mettre en œuvre des indicateurs-clés en rapport avec les objectifs pré-définis ;
  • Fournir une interprétation de ces données ainsi que de leur évolution et s’assurer que les décisionnaires ont pris connaissance des données et de leur interprétation.

Rédiger des chartes pour former les fonctionnaires européens au web social et formaliser l’organisation de la communication de l’UE dans les médias sociaux

Afin de mener la formation des fonctionnaires européens au web social et l’organisation de la communication de l’UE sur les médias sociaux, les communicants de la Commission européenne pourrait traduire leur tâche par la rédaction de chartes : une charte d’utilisation des réseaux sociaux à destination des fonctionnaires européens (que nous appelions de nos vœux la semaine dernière) et une charte d’engagement de la marque vis à vis de ces communautés.

Ainsi, une fois cette étape incontournable de formation et d’organisation de la communication – et à ce stade il ne s’agit « pas nécessairement de plusieurs emplois à plein temps, mais plutôt de plusieurs rôles qui seront endossés par différentes personnes à des moments-clés » – il sera alors possible de convaincre les autorités de l’impérieuse nécessité de mener à proprement parler du community management, c’est-à-dire :

  • Assurer l’animation et la modération quotidienne des différentes communautés où la marque est présente;
  • Assurer le reporting en fonction des indicateurs clés préalablement choisis et fournir une interprétation des tendances et de l’état d’esprit de la ou des communautés (réceptive, méfiante…) ;
  • Sensibiliser les équipes internes et les accompagner dans leur appropriation des ces supports.

Réponse de Viviane Reding à la lettre ouverte des communicants web de la Commission européenne

Après la lettre ouverte publiée par la communauté des éditeurs et webmasters des sites de la Commission européenne en janvier dernier, pour améliorer la communication de l’UE sur le web, le fait qu’il ait une réponse de Viviane Reding – la Commissaire titulaire du portefeuille de la communication – confirme que le web devient vraiment une priorité…

« Internet doit être un élément essentiel de nos efforts pour communiquer »

Dans son courrier, Viviane Reding estime que « la communication doit devenir une partie intégrante du processus des politiques de tous les Commissaires ». Suivant ce plan, « Internet doit être un élément essentiel de nos efforts pour communiquer », ce qui signifie notamment 2 chantiers :

Moderniser et rationaliser le portail Europa, suivant les principes suivants :

  • une approche centrée sur l’utilisateur,
  • un langage et des messages clairs,
  • une image de marque cohérente.

S’engager dans les médias sociaux, à condition de respecter les règles suivantes :

  • faire partie d’une stratégie de communication cohérente,
  • être basée sur une solide analyse coûts/bénéfices,
  • être menée par des personnels bien formés.

Quels efforts en priorité : refonte du portail Europa ou engagement dans les médias sociaux ?

Entre les 2 chantiers, Tony Lockett – un autre communicant de l’UE – pose le « faux dilemme » des priorités, :

  • Faut-il mieux servir les personnes qui viennent chez nous à la recherche d’informations avec une refonte de nos sites web Europa ?
  • Faut-il saisir l’occasion de toucher de nouveaux publics que nous n’atteignons pas actuellement en faisant une utilisation ciblée des médias sociaux ?

En définitive, que faut-il retenir de la réponse de Viviane Reding ?

Que le courrier est bavard pour passer de la paumade avec des engagements théoriques généreux mais un peu court sur la volonté concrète, dans un contexte de « croissance zéro des ressources humaines en communication » ?

Dick Nieuwenhuis – le communicant européen qui avait publié la lettre ouverte sur son blog – se félicite que « potentiellement tous les fonctionnaires de la Commission puissent être des ambassadeurs » :

  • pour certains, cela sera limité à expliquer à leurs familles et amis ce qu’ils font ;
  • pour d’autres – qui sont déjà nombreux à être en privé sur Twitter et Facebook – cela signifie de pleinement s’engager dans les médias sociaux.

Ainsi, à la manière des paquebots qui manœuvrent en haute mer, la Commission met le cap vers une meilleure communication de l’UE sur le web.