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Communication de crise de la Commission européenne après la publication d’une enquête du Financial Times sur les fonds structurels

Alors que les institutions européennes ne sont pas particulièrement connues pour leur réactivité lorsqu’elles se trouvent mises en cause par la presse – au point que certains fonctionnaires européens réclamaient récemment la création d’une cellule de « riposte » contre les « attaques diffamatoires par des médias et des lobbys anti-européens » – ces dernières heures tendraient à prouver le contraire…

Vaste enquête à charge du Financial Times sur les fonds structurels européens

Durant toute la semaine, le Financial Times publie une série d’articles correspondant à une vaste enquête sur les fonds structurels européens, menée pendant 8 mois par Cynthia O’Murchu, la reporter d’investigation du FT, en collaboration avec le « Bureau of Investigative Journalism ».

Un dispositif éditorial complet :

  • la une du FT papier mardi 30 novembre : « EU growth funds lie idle under red tape – FT investigation : only 10% of €347bn programme paid out » (traduction approximative : les fonds structurels européens inexploités à cause de la paperasserie – enquête FT: seulement 10% des 347 milliards d’euros des programmes ont été versés) ;
  • une vidéo « EU funding problems exposed » avec l’interview de la reporter qui revient sur les problèmes de transparence, de destination des fonds et les réformes nécessaires ;
  • un moteur de recherche « Where do the EU Structural Funds go? » avec une base de 646 929 documents mis en ligne (malheureusement un seul champ pour effectuer une requête) ;
  • un suivi régulièrement mis à jour dans la journée sur le FT Brussel blog : « UPDATE: EU Commission tackles FT structural funds expose » (traduction : La Commission européenne répond aux révélations du FT sur les fonds structurels).

Réactions conventionnelles et exceptionnelles de la Commission européenne

À partir des informations fournies par les journalistes du FT :

  • Première réaction conventionnelle lors du point presse quotidien à midi : Pia Ahrenkilde-Hanssen, porte-parole à la Commission européenne a passé un quart d’heure pour répondre aux révélations, complété ensuite par la distribution d’un dossier de presse détaillant des « success stories » par pays ;
  • Deuxième réaction plus exceptionnelle aux alentours de 18h : les Commissaires européens à la politique régionale (Johannes Hahn) et à l’emploi, les affaires sociales et l’inclusion (László Andor) ont réagi, Johannes Hahn avec une déclaration générale sur l’efficacité globale des fonds européens, signalant moins de 5% de fraude et d’irrégularités.

Tandis que les prochaines publications du Financial Times devraient relancer la polémique, force est de constater que la Commission européenne semble sinon d’emblée convaincante du moins plutôt réactive. A suivre…

Quels sont les effets d’opinion de la crise européenne autour des Roms ?

Alors que la crise autour des Roms n’a cessé ces derniers jours d’occuper le devant de la scène, quels en sont les effets sur l’opinion ?

Effet d’exposition : la crise autour des Roms focalise l’attention médiatique dans les sphères publiques nationales

Premier effet immédiat, la crise autour des Roms entraîne une mobilisation importante des médias :

  • en France, une visibilité de l’UE renforcée, notamment pour la Commission européenne au cœur de la tourmente ;
  • dans les autres États membres, une dégradation de l’image de la France au sein du Conseil européen et plus largement sur la scène internationale, avec Nicolas Sarkozy comme principale victime.

Effet de conformation : la crise autour des Roms conforme les interprétations politiques préétablies sur l’UE

Second effet, la crise de Roms fait l’objet d’une polémique forte au sein de la classe politique, avec de nombreuses déclarations politiques à l’emporte-pièce – qu’il n’est nul besoin de citer : Pierre Lellouche, Chantal Brunel, Philippe Marini…

Au-delà de ces raccourcis partisans, s’opèrent des interprétations politiques conformes aux schématisations préexistantes sur l’Europe :

  • pour les pro-européens convaincus, qu’ils soient dans la majorité ou l’opposition : l’intervention de la Commission européenne – quoique indélicate sur la forme – est légitime quant au fond de l’affaire ; seule une solution européenne doit permettre de trouver une issue à la crise ;
  • pour les anti-européens de tous bords : la Commission européenne est sinon incapable de trouver une solution du moins illégitime à critiquer la France.

Au total, la crise autour des Roms marque une préemption temporaire des enjeux européens par la politique nationale dans une sorte de prise d’otage politicienne de l’Europe, dont les effets sont davantage à rechercher dans la mobilisation des partisans pro- ou anti- européens que dans un quelconque progrès de la compréhension durable de l’UE.

Quelles sont les raisons du succès de la déclaration de Viviane Reding sur la situation des Roms en France ?

Aujourd’hui, Viviane Reding, Vice-Présidente de la Commission européenne responsable de la Justice, des droits fondamentaux et de la citoyenneté, a très vivement critiqué le gouvernement français qui ne respecte pas ses engagements européens en expulsant – sur la base d’une circulaire du ministère de l’Intérieur – des centaines de Roms en raison de leur seule origine ethnique. La Commission devrait ouvrir une procédure d’infraction à l’encontre de la France.

Une déclaration réussie en raison de la convergence entre lisibilité politique et visibilité médiatique

Trop souvent, les déclarations du Président de la Commission européenne ou des Commissaires souffrent d’un déficit de lisibilité (le jargon bruxellois reste incompréhensible) et/ou d’un défaut de visibilité (l’agenda médiatique demeure national).

Assez rarement – et c’est le cas de cette déclaration – il arrive que la voix portée par l’UE franchisse ces barrières :

  • un message lisible, exprimant une conviction profondes de la construction européenne – « la discrimination basée sur l’origine ethnique ou la race, n’a pas de place en Europe. » – très largement partagée par les citoyens ;
  • un message visible, s’inscrivant en plein dans la controverse sur les expulsions de Roms en France et suscitant l’intérêt des journalistes.

Une déclaration réussie en raison de la légitimité du positionnement

Au-delà de ces deux qualités – lisibilité et visibilité – qui aurait pu limiter la déclaration de Viviane Reding à un « coup politique et médiatique », le positionnement renforce la légitimité du message :

  • un message crédible, conforme à la mission de gardienne des Traités confiée à la Commission européenne ;
  • un message adéquat qui s’éloigne de tout parti pris partisan pour ne se concentrer que sur le respect des règles de droit adoptées par tous les États membres.

Au total, Viviane Reding réussit à porter – pour l’une des premières fois – une parole fondatrice sur le socle des valeurs de l’UE.

Stratégie de l’UE sur la grippe A (H1N1) : quelle articulation de la communication entre les niveaux national, européen et international ?

Lors d’une conférence de presse à Strasbourg, le 15 septembre 2009, la commissaire européenne à la santé, Androulla Vassiliou présentant « un document de stratégie qui apporte un soutien aux États membres pour lutter avec efficacité contre la grippe pandémique H1N1 » déclare : « Il faut maintenant développer une coordination plus étroite entre les secteurs et entre les États membres, aux niveaux communautaire, national, régional et local, pour tenter de surmonter les répercussions sanitaires, économiques et sociales de la pandémie ». Qu’en est-il concrètement ?

Articulation de la communication sur la grippe A à l’échelle nationale : l’UE formule des préconisations sur l’information des États membres au public

Alors que l’UE dispose de compétences limitées en matière de santé, la Commission européenne fait valoir que :

  • « l’information du public sur les mesures préventives, et surtout sur la vaccination, doit être claire, cohérente et ciblée » ;
  • « une approche multi-sectorielle associée à une information efficace permettra de sensibiliser la population aux mesures de prévention telles que les règles élémentaires d’hygiène ».

Par conséquent, la DG santé et protection des consommateurs publie un document de travail qui traite de la mise au point « de l’information du public ». Selon le communiqué de la conférence de presse, « ce rapport présente une série d’actions qui pourraient servir à lutter contre la pandémie et à soutenir l’action des États membres ». Malheureusement, aucun accès sur Internet n’est disponible pour le moment.

Pour la Commission européenne, l’objectif prioritaire serait de finaliser des éléments de langage clés et des messages partagés en vue de préparer un plan de communication de crise européen en cas de pandémie grippale. Mais, parmi les questions qui ne manqueront pas se poser, on peut identifier celle de la désignation d’un porte parole légitime au niveau européen.

Articulation de la communication sur la grippe A à l’échelle européenne : l’UE supervise la coordination au niveau communautaire de la communication entre les États membres

La Commission supervise la coordination au niveau communautaire de la communication entre les États membres via :

  • le comité de sécurité sanitaire de l’Union européenne, de nature politique : d’ores et déjà des mesures coordonnées de santé publique à l’échelle européenne ont été adoptées ;
  • le Centre européen de prévention et de contrôle des maladies, de nature scientifique : un réseau de surveillance situé à Stockholm ;
  • le centre opérationnel de gestion de crises sanitaires, de nature administrative : divisé en deux parties. L’antenne luxembourgeoise constitue le contact essentiel pour les États membres ainsi que pour l’OMS et le centre européen pour la prévention et le contrôle des maladies (ECDC). L’antenne luxembourgeoise fonctionne 24 h/24. Le site bruxellois est quant à lui chargé de la communication interne à la DG Sanco.

Par conséquent, la Commission européenne a créé un site Internet dédiée à la grippe pandémique H1N1, où elle synthétise toutes les informations disponibles sur le sujet.

Pour la Commission européenne, l’objectif prioritaire serait de mettre en place un réseau de contacts permanents entre communicants des différents États membres, afin d’échanger sur les bonnes pratiques des uns et des autres. Mais, parmi les questions qui ne manqueront pas se poser, on peut identifier celle des éventuels décalages de niveau de préparation et des différences de cultures en matière de communication sanitaire entre États membres.

Articulation de la communication sur la grippe A à l’échelle internationale : l’UE coopère avec des organisations internationales et l’initiative pour la sécurité sanitaire mondiale

La Commission coopère avec des organisations internationales telles que l’OMS et l’initiative pour la sécurité sanitaire mondiale (Global Health Security Initiative – GHSI), créé en 2001, pour assurer la cohérence des mesures de santé publique au niveau mondial. Ce réseau GHSI s’est révélé un mécanisme efficace pour l’échange rapide d’informations. À l’initiative de la commissaire à la santé, la dernière réunion ministérielle du GHSI s’est tenue le 11 septembre dernier à Bruxelles.

Pour la Commission européenne, l’objectif prioritaire serait à l’occasion de la réunion extraordinaire des ministres de la santé de l’UE qui se tiendra le 12 octobre prochain – soit 15 jours avant la mise à disposition des premiers vaccins contre la grippe sur le marché européen – de s’accorder en matière de communication sur une véritable articulation des actions de communication entre le niveau national, européen et international…

Grippe A : mesures coordonnées de santé publique à l’échelle européenne

Le comité de sécurité sanitaire de l’Union européenne et les autorités du système d’alerte précoce et de réaction ont adopté, pour la première fois et à l’unanimité, des mesures de santé publique en réponse à une infection pandémique par le virus de la grippe A. Ces mesures développent une approche européenne coordonnée.

Fermetures d’écoles les plus appropriées pour protéger la santé humaine :

  • pour le moment, aucune fermeture massive d’écoles à titre préventif ;
  • mais préconisation de fermeture locale en cas de diagnostic d’infections.

Manière de concilier la liberté de circulation et la protection de la santé publique pour les voyageurs présentant des symptômes grippaux :

  • pas de restriction des déplacements et des voyages à l’intérieur et au-delà des frontières de l’Union pour les citoyens bien portant ;
  • recommandations pour les individus symptomatiques de reporter les voyages et de rester chez eux.

Selon le communiqué, la commissaire européenne à la santé, Androulla Vassiliou déclare que ces premières mesures coordonnées à l’échelle européenne « illustrent clairement comment l’Europe doit, dans la situation de pandémie actuelle, parvenir à concilier la protection de la santé publique et d’autres intérêts publics fondamentaux ».