Composition de la nouvelle Commission européenne : position en demi-teinte pour la communication ?

Vendredi 27 novembre, le président de la Commission européenne, José Manuel Barroso dévoile dans un communiqué sa nouvelle équipe. Quelles sont les premières indications sur la communication dans le nouveau collège des Commissaires ?

Une perte de visibilité préjudiciable pour la communication de la Commission

Premier constat inquiétant, en prenant les attributions de l’ensemble des Commissaires, la « communication » n’en fait plus formellement partie. Il n’y a plus de Commissaire chargé de la communication stricto sensu, alors que pour la première fois, la Commission Barroso 1 avait introduit cette fonction avec un rang de vice- présidence.

Quid de l’engagement politique de la Commission à mieux écouter les préoccupations des citoyens à les prendre en compte et à mieux les expliquer et du changement culturel au cœur de la Commission consistant à améliorer sa communication ?

Un nouveau rattachement politique auprès de la justice, des droits fondamentaux et de la citoyenneté au détriment des relations inter-institutionnelles

Deuxième constat surprenant, la communication n’est plus rattachée aux relations interinstitutionnelles mais à la justice, aux droits fondamentaux et à la citoyenneté. Alors que le principal héritage de la stratégie de Margot Wallström réside dans la déclaration politique signée en octobre 2008 lorsque les États membres se sont formellement engagés, pour la première fois, de travailler avec le Parlement et la Commission à améliorer la communication publique sur les affaires européennes.

Quid de la stratégie partenariale et de la responsabilité collective pour mieux communiquer sur l’Europe ?

Une Commissaire expérimentée tant par son expérience bruxelloise que par son métier de journaliste

Troisième constat encourageant, la titulaire proposée par José Manuel Barroso pour s’occuper du portefeuille intégrant la mission communication est une Luxembourgeoise, Viviane Reding, actuellement Commissaire responsable de la société de l’information et des médias.

Tant par sa carrière professionnelle de journaliste que par son expérience à la Commission européenne : éducation, culture, jeunesse, médias, sport – 1999-2004 et société de l’information et médias – 2004-2009, Viviane Reding dispose d’une double qualité pour devenir Vice Présidente de la Commissaire en charge de la stratégie de communication de l’institution.

De nouvelles responsabilités, notamment la « citoyenneté » pour la direction générale Communication

Quatrième constat satisfaisant, la DG COMM récupère les unités « citoyenneté » (comme Margot Wallström le préconisait dans une interview testamentaire à Euractiv : « la seule manière d’avancer est de donner au nouveau commissaire le contrôle de la législation sur la citoyenneté, avec les programmes et le budget qui vont avec. ») et « visites ».

Quid d’une réorganisation de l’organigramme de la DG COMM qui casserait la logique métier (média, hors médias, multimédia) pour entrer dans une logique cibles (les citoyens, les relais, les Etats-membres) ?

Ainsi, une première approche du futur collège des Commissaires révèle une position en demi-teinte pour la communication.

Nomination d’une nouvelle directrice générale de la communication du Parlement européen

Institution chargée de représenter les citoyens de l’Union, le Parlement européen vient de nommer Juana Lahousse-Juarez directrice générale de la communication. Elle succèdera à partir de mars 2010 à Francesca Ratti, nommée secrétaire générale adjointe…

Une interprète de carrière à la tête de la stratégie de communication du Parlement européen

Née en 1952 et diplômée d’une Licence en interprétation, Juana Lahousse-Juarez est interprète-fonctionnaire au Parlement Européen depuis 1986.

Depuis le 1er février 2007, elle était directrice générale de la traduction (23 langues officielles dans l’UE) et de l’édition (imprimerie, distribution, intranet).

Une communicante confirmée pour diriger la Direction générale de la communication du Parlement européen

Entre 1998 et 2007, Juana Lahousse-Juarez a déjà exercé ce poste au sein de l’ancienne DG Information avec la responsabilité des :

  • Bureaux d’Information du Parlement européen dans les Etats membres ;
  • Unités Evénements, Visites et Séminaires et Courrier du Citoyen.

Dorénavant, Juana Lahousse-Juarez aura la responsabilité suivant l’organigramme de l’actuelle DG Communication du PE des 3 directions suivantes :

  • Direction A : Direction des médias
  • Direction B : Direction des bureaux d’information
  • Direction C : Direction des relations avec les citoyens

Esquisse d’une stratégie de communication responsable : « sustainable » et « accountable » pour le nouveau président du Conseil européen

Lors du Conseil européen du 19 novembre dernier, la nomination des chefs d’Etat et de gouvernement pour la présidence stable du Conseil européen s’est tournée vers une personnalité politique peu connue du grand public. Ce « choix consensuel de la modestie plutôt que celui courageux de la puissance et de son incarnation », selon Jean-Dominique Giuliani implique pour Thierry Chopin qu’Herman Van Rompuy Van Rompuy sera « un facilitateur de décision ». Qu’en sera-t-il de sa communication ?

Une stratégie de communication institutionnelle trop visible serait contre-productive

Afin de s’imposer dans le système institutionnel de l’Union, la priorité semble d’expliquer exactement ce qu’il fera, avant même peut-être de présenter qui il sera. Pour cela, le Président du Conseil européen doit suivre le traité de Lisbonne qui dispose qu’il :

  • assure la préparation et la continuité des travaux du Conseil européen;
  • œuvre pour faciliter la cohésion et le consensus au sein du Conseil européen.

Cette mission institutionnelle d’organisateur pour mieux faire fonctionner le Conseil européen implique que le Président du Conseil européen cultiver une relative discrétion en se limitant à délivrer aux moment opportuns un message européen clair au nom des Vingt-Sept.

Une stratégie de communication personnelle trop peopilisée serait contre-indiquée

Même s’il faut se garder de tout jugement hâtif sur la personnalité et considérer comme Catherine Trautmann, qu’« il ne faut pas faire « de procès aux personnes »: « pour une présomption de compétence » » pour reprendre un Twit de Jean Quatremer, il est évident qu’une stratégie de communication trop agressive serait contre indiquée.

En revanche, les conseils d’Etienne Augé dans Slate pour moderniser la communication d’Herman Van Rompuy prodigués « dans le seul souci de faire progresser la démocratie » puisque « même s’il n’est pas été élu directement par les Européens, il doit néanmoins leur rendre des comptes » peuvent être judicieux :

  • « Twitter est à déconseiller fortement, personne ne s’intéresse à un compte-rendu en langage texto » ;
  • « un profil Facebook élégamment agencé, avec quelques informations pertinentes et parfois personnelles peut contribuer à rendre plus proche. Facebook permet également de sentir le pouls de la population en recueillant l’avis des internautes. »

Une stratégie de communication « responsable » : « sustainable » pour porter une vision sur le long terme et « accountable » pour rendre des comptes

Entre s’absteindre à un régime d’abstinence médiatique ou verser dans le règne des « petites phrases », la stratégie de communication Président du Conseil européen pourrait être « responsable ».

Responsable au sens de « sustainable » afin de porter une vision de long terme sur les orientations et les projets de la construction européenne.

Responsable au sens d’« accountable » pour rendre des comptes :

  • au Parlement européen comme le dispose le traité de Lisbonne (le président du Conseil européen « présente au Parlement européen un rapport à la suite de chacune des réunions du Conseil européen ») ;
  • aux journalistes et citoyens afin d’assurer le respect des principes démocratiques.

EURES, le réseau européen des services publics de l’emploi : 15 ans, plus de 700 000 offres d’emploi et près de 3 millions de visiteurs mensuels

Créé par la Commission européenne en 1993, EURES est un réseau de coopération entre les services publics de l’emploi de 31 pays européens, dont les 27 États membres de l’UE.

Son but est d’encourager la mobilité géographique de l’emploi en Europe en offrant chaque jour un accès en ligne à plus de 700 000 offres d’emploi.

Le réseau compte 838 conseillers qui fournissent informations, conseils et services de placement aux :

  • citoyens européens qui souhaitent exercer leur droit à la libre circulation ;
  • employeurs qui désirent embaucher des travailleurs d’autres États européens.

Pour le commissaire européen à l’emploi, Vladimír Špidla : « Il est le seul service de l’emploi d’envergure européenne qui mette en relation des demandeurs d’emploi et des employeurs ».

Depuis la survenue de la crise, le nombre de visiteurs du site est passé de 1,5 million en mars 2009 à 2,8 millions en juillet 2009.

Van Rompuy à la tête de l’UE : quels sont les enseignements de cette désignation ?

Alors que le premier ministre belge a été désigné président du Conseil européen (et la Britannique, actuelle commissaire au Commerce, Catherine Ashton, Haut représentant de l’UE pour les Affaires étrangères et la politique de sécurité) par les 27 chefs d’État et de gouvernement, quels sont les principaux enseignements de cette désignations d’un « inconnu nommé à la tête de l’Europe », selon Le Monde ?

L’article 9 du traité de Lisbonne dispose que « le Conseil européen élit son président à la majorité qualifiée pour une durée de deux ans et demi, renouvelable une fois. »

« Le président du Conseil européen :

  • a) préside et anime les travaux du Conseil européen ;
  • b) assure la préparation et la continuité des travaux du Conseil européen en coopération avec le président de la Commission, et sur la base des travaux du Conseil des affaires générales ;
  • c) œuvre pour faciliter la cohésion et le consensus au sein du Conseil européen ;
  • d) présente au Parlement européen un rapport à la suite de chacune des réunions du Conseil européen. »

A défaut d’une planification des modalités de nomination, une séquence dominée par l’improvisation

Alors que l’innovation la plus importante du traité de Lisbonne réside dans la création d’une présidence stable au Conseil européen, « la désignation du premier président du Conseil européen va se faire dans l’improvisation ! », selon Valéry Giscard d’Estaing « Quand l’Union européenne improvise » dans Le Point.

Aucune réponse n’a été apportée aux questions suivantes :

  • Doit-on faire acte de candidature ?
  • Les candidats ont-ils des conditions à remplir : avoir siégé dans les institutions européennes, appartenir à un État membre qui applique toutes les politiques de l’Union ?
  • Ces candidatures doivent-elles être accompagnées d’un élément de programme ?
  • Le Conseil auditionnera-t-il les candidats avant de faire son choix ? Fera-t-il appel aux sondages de l’Eurobaromètre pour tester les réactions des citoyens sur les noms cités ?

A défaut d’une présentation de l’utilité du poste, une réflexion limitée au portrait robot

Alors que le débat sur la nouvelle architecture institutionnelle de l’Union soulève des enjeux considérables, selon Jacques Delors « Oui à un chairman, non à un executive président » dans Challenges :

  • faut-il que le président permanent se conduise comme un chairman, c’est-à-dire s’efforce d’améliorer le processus de décision de l’Union en proposant des priorités au Conseil européen et des options claires à trancher, au besoin par vote, puis en s’assurant de leur correcte et loyale mise en œuvre ?
  • s’agit-il d’une sorte d‘executive président concurrent du Président de la Commission, institution qui reste une pièce centrale de la méthode « communautaire » ?

La réponse sur le rôle du futur président du Conseil européen – un « facilitateur » ou le véritable n°1 de l’UE – dépend en grande partie de la personnalité de celle ou celui qui exercera pour la première fois la fonction : « la personne qui obtiendra le poste façonnera son rôle, plus que la description du poste ne le fait », selon Luuk van Middelaar, dans NRC.

A défaut d’une compétition entre programmes, un traitement médiatique concentré sur les négociations entre capitales

Alors que l’ambition de l’Europe pouvait être de « donner une voix et un visage à l’Union européenne », de « choisir un « George Washington pour l’Europe », i.e. l’homme le plus célèbre du continent.

Aucun candidat n’a vraiment fait campagne dans les médias. Pire les journalistes se sont attachés à décrypter l’alchimie de la décision reposant sur des critères géographique (Nord/Sud), de taille (grand pays/petit pays), d’ancienneté (les nouveaux États membres/les États fondateurs), de couleur politique (centre-droit)…

A défaut d’une mobilisation populaire des citoyens autour des personnalités candidates, une offensive des leaders d’opinion pour la parité

Seule réussite de la campagne, l’engouement pour l’ »outsider » Vaira Vike-Freiberga, promouvant un mouvement de féminisation des institutions communautaires et soutenu par :

  • la fondation Robert Schuman avec un plaidoyer de Jean-Dominique Giuliani le 7 novembre et un site de soutien : unepresidentepourleurope.eu mis en ligne le 4 novembre ;
  • Simone Veil dans Le Figaro du 12 novembre « Conseil européen : pourquoi je soutiens Vaira Vike-Freiberga » ;
  • Jean Quatremer dans un billet du 16 novembre « Vaira Vike-Freiberga for président! Yes, they can! » ;
  • Margot Wallström Vice Présidente de la Commission européenne lors d’une conférence le 19 novembre « Atteindre la parité: un moment de vérité pour la démocratie européenne ».

Ainsi, la désignation du président du Conseil européen soulève de nombreuses réserves, que seule la pratique du nominé pourra lever.