Encore faut-il qu’il y eût une communication et qu’elle fût européenne…

Faire le point sur la communication européenne aujourd’hui, dans ce billet d’humeur, est un exercice salutaire plutôt douloureux, car pour paraphraser le mot du général de Gaulle sur le dernier président de la IIIe République Albert Lebrun « Comme chef d’État, deux choses lui avaient manqué : qu’il fut un chef, qu’il y eut un État ». C’est bien là tout le problème !

Dépôt de bilan pour la communication de l’Europe ?

Pourquoi ? Parce que la « fracture européenne » titre d’un excellent rapport parlementaire en 2005 de Michel Herbillon est plus que jamais d’actualité et s’est même renforcée par les deux bouts de la ligne :

  • Recul du côté émetteur : la présence de plus en plus sporadique de l’UE comme locuteur dans le débat public, les campagnes de communication se réduisent, les portes-paroles se raréfient dans les médias, les événements se limitent aux happy-few des auto-entrepreneurs de la cause européenne ;
  • Recul du côté récepteur : l’écoute de plus en plus réduite des citoyens comme auditeur, faute de place pour l’Europe dans les médias, notamment l’audiovisuel public, parent pauvre de l’information européenne de notoriété publique.

La communication européenne est victime du « syndrome de la grenouille cuite », à petit feu, la grenouille finit tout simplement par cuire et mourir. De fait, à mesure que les moyens, les opportunités, les événements, les temps forts se réduisent petit à petit, la communication de l’Europe en est réduite à la portion congrue, sans crier gare.

On savait depuis l’excellente série Borgen qu’« à Bruxelles, personne ne vous entend crier ». On doit savoir qu’il en est de même dans les Etats-membres en matière d’affaires européennes. Les résultats lilliputiens de la présence médiatique de l’Union européenne dans les Journaux Télévisés français le confirment trop hélas.

Alors que faire ?

Construire des problèmes, c’est la seule solution !
Pourquoi ? Parce qu’il refédérer un public autour de problématiques à résoudre

Sans doute contre-intuitif, le premier remède est qu’il faut poser des problèmes. Auprès de l’opinion publique, il s’agit d’instruire à charges et à décharges, de faire des plaidoyers et des réquisitoires pour réinstaller le sujet « Europe » dans les imaginaires, dans l’univers des possibles.

Refaire parler d’Europe à tort et à raison est le seul moyen de reconstruire une audience, un public au sens d’un ensemble de personnes qui partagent un problème, qui se réunissent pour chercher des solutions communes afin de permettre à terme que l’Europe apparaisse comme une éventuelle solution permettant de résoudre nos difficultés.

Quitter l’esprit de sérieux, c’est sérieusement nécessaire
Pourquoi ? Parce le trop plein d’arguments tue le message – populariser l’Europe, c’est parvenir à simplifier

Deuxième étape de la convalescence, il convient de revoir la manière dont on parle d’Europe, si l’on veut qu’elle redevienne un sujet populaire au sens plein du terme. Cela nécessite que l’on quitte les propos doctes, professoraux et sentencieux mais surtout que l’on abandonne l’esprit de sérieux qui rend l’Europe soporifique.

Rendre l’Europe accessible, « concernante » comme disent les journalistes, « inclusive » selon les pouvoirs publics doit passer par une nouvelle langue simple, une libération de la parole. En somme, une révolution culturelle joyeuse comme préalable à toute forme de réapparition de l’Europe par le public avec un langage du quotidien à rebours du jargon technocratique.

Réfléchir au futur, c’est urgent
Pourquoi ? Parce que la bonne stratégie de communication pour l’Union européenne découle d’une prospective raisonnablement optimiste

Le dernier temps de la conversion porte sur le « fond de sauce », la recette qui donnera du goût et de l’appétit : une vision attractive du projet européen, de sa trajectoire actuelle et future en toute simplicité, qui repose sur un exercice de projection qui donne envie de poursuivre l’aventure, qui donne envie d’écrire les prochaines saisons autour de nouveaux scénarios et de nouvelles personnalités.

Essayer d’attirer de nouveau l’attention et de susciter l’intérêt des Européens ne peut se faire qu’avec une ligne narrative directrice, un schème scénaristique basique qui réinscrivent les succès réalisés et les conquêtes à atteindre dans un ensemble somme toute évident, intuitif, indispensable.

Au total, n’oublions pas que rien de ce qui apparaît comme simple ne l’est en réalité, les choses les plus réussies sont les plus construites sans négliger surtout les efforts – et donc les moyens – permettant d’y parvenir. Même si l’Union européenne n’a encore été suffisamment pensée, il convient pourtant maintenant de la communiquer ?

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