Que donne la vision de l’Europe d’étudiants en journalisme analysant les discours des médias sur l’UE et discutant de l’avenir de la communication européenne, selon Michelangelo Conoscenti dans « Europe with a view: how a media discourse analysis understand and narrate (another?) Union » ?
Principal thème de la narration de l’Europe : l’asymétrie
La narration de l’Europe, dans les médias, permet de faire émerger plusieurs récits de l’Europe sous l’angle a) économique ; b) des valeurs ; c) des visions. Un thème principal transversal apparaît : l’asymétrie.
a) Au-delà de la crise économique, l’asymétrie se raconte sous l’angle économique par la répartition asymétrique de la richesse en Europe. Alors que l’UE devrait générer de meilleures conditions pour tous ses citoyens avec une amélioration vers des normes plus élevées, l’UE est perçue comme destructrice de ses valeurs fondatrices et de son bien-être au nom de la compétitivité.
b) L’asymétrie des valeurs se retrouve le long d’un axe Nord-Sud, notamment sur les questions de corruption, de primauté du droit et d’évasion ou sur les rôles de la famille et des amis. L’UE est pragmatiquement acceptée comme une expérience en cours où il est normal d’avoir des approches différentes pour la résolution de problèmes, mais seulement lorsque l’on est habitué à la différence et à « négocier » des vues différentes et des façons de résoudre les problèmes.
c) Le dernier récit de l’UE concerne les effets de la crise économique qui se traduisent par la montée de deux sentiments d’asymétrie : l’égoïsme et le nationalisme, jugés responsables de générer soit un sentiment anti-européen, soit nationaliste, que ce soit sous la forme de mouvements anti-euro ou de partis xénophobes. La « peur de l’autre » se manifeste notamment avec les immigrants et demandeurs d’asile, un exemple de l’incapacité de l’Union européenne à proposer une réponse spécifique au problème.
Défauts de la narration de l’Europe
L’Europe n’est pas un sujet populaire, surtout quand la politique est concernée.
Un autre élément clé est le long processus d’approbation des directives et règlements, considéré non seulement comme difficile à rapporter, mais comme un véritable obstacle à la communication d’une image dynamique de l’Europe.
Puisque les politiques de l’UE ne se vendent pas bien, les journalistes ont tendance à se concentrer sur les aspects négatifs, car considérés comme ayant une certaine valeur.
La conséquence immédiate est que les partis anti-européens / eurosceptiques utilisent ce genre d’infos comme caisse de résonance pour leur agenda politique. Cette attitude se combine avec une tendance à trouver un ennemi « extérieur » qui est facilement identifié avec l’Europe, favorisant ainsi les sentiments nationalistes principalement basée sur la peur.
Le pire effet de cette trajectoire négative est le manque de vision à long terme sacrifié au nom des intérêts nationaux Ainsi, la peur est l’émotion qui domine et l’Union se transforme en un bouc émissaire parfait : l’EU-rope ou l’« UE-corde ».
Possibles solutions pour la narration de l’Europe
Les éléments et les résultats positifs de l’UE ne sont pas considérés comme des nouvelles importantes. Pourtant les avantages d’une Europe unie sont nombreux : la possibilité de voyager librement, sans les questions des visas, l’union monétaire, la sécurité alimentaire et un ensemble commun de valeurs démocratiques.
L’une des solutions possibles pour éviter le manque de communication de l’Europe serait d’accorder une grande importance à la liberté de voyager combinée avec la révolution numérique. La combinaison permettrait une meilleure communication directe et une possibilité de partager… même si le principal défaut serait de se limiter aux « gens qui sont comme vous ».
En raison de la perception différente des questions européennes en fonction du niveau d’éducation et de classe sociale, la diffusion d’une information de qualité auprès de tous les publics est une préoccupation essentielle. Et pour cela, l’information européenne doit développer une dimension locale de proximité, à l’instar paradoxalement de ce que les mouvements nationalistes ont su faire pour gagner le consensus parce qu’ils ont été capables de traiter les questions locales de manière familière et accessible.
Stratégie d’influence de la façon dont l’information est reçue, interprétée et relayée par les journalistes
Les « spin doctors » travaillent non seulement le récit, mais aussi le libellé, afin d’obtenir des « sound bites » et des slogans qui sont « acceptables » pour les journalistes qui vont les adopter / adapter et les faire couramment utilisés.
Une nouvelle langue, qui s’ajoute, et non pas se soustrait à nos propres expériences nationales doit être créée pour narrer le récit de l’Union européenne, concerné par le « ici, maintenant et demain ».
Tout comme il est possible d’observer un arc en ciel après la tempête, l’Europe pourrait être cet endroit et ce moment.