La « Commission socialisée » : l’impact des réseaux sociaux et des plateformes communautaires sur la communication en ligne de l’UE

Deuxième partie de la contribution de Romain Babouard et Michaël Malherbe dans le dossier « « l’Europe sur les réseaux sociaux » publié dans la revue « communication & langages » n°183 en mars 2015.

Premier enjeu du nouveau terrain que représentent les médias sociaux : comment maîtriser la prise de parole institutionnelle

Une genèse difficile dont voici les principales étapes :

En janvier 2010, la communauté des éditeurs et webmasters de la Commission publie une lettre ouverte pour « exploiter la puissance d’Internet ». Viviane Reding leur donne à la fois tord (pas de moyens) et raison (« Internet doit être un élément essentiel de nos efforts pour communiquer »).

En avril 2010, le blog Waltzing Matilda vise à « apprendre comment la Commission peut utiliser les médias sociaux pour communiquer avec les citoyens ».

En juin 2010, un courrier de Viviane Reding expose une série de mesures pour moderniser la DG COMM, dont l’une concerne un « réseaux de 10 à 15 experts en médias sociaux au sein de la Commission » pour assurer surveillance et réfutation.

L’enjeu d’une prise de parole cohérente et inscrite dans une stratégie de communication globale doit permettre de résoudre le dilemme entre le « parler neutre » d’une institution qui doit s’exprimer de manière consensuelle et contrôlée et le « parler vrai » des communications personnelles et politiques des individus.

Deuxième enjeu des médias sociaux : encadrer la prise de parole

En septembre 2011, la Commission publique une stratégie de communication dans les médias sociaux. Décevante, la communication s’y concentre autour de ses « priorités politiques » et d’une approche « top-down » de relais des informations. Les préoccupations des citoyens et à fortiori le dialogue y sont absents.

La stratégie de verrouillage de la prise de parole au nom de l’UE se confirme dans les nouvelles directives pour l’ensemble du personnel sur les médias sociaux qui distinguent entre les prises de parole officielles (des Commissaires et de leurs porte-paroles), « mandatées » (au sein des équipes de communication) et « non officielles » des autres fonctionnaires européens.

Depuis 2012, d’abord sous la forme d’un projet-pilote, « Partageons l’Europe en ligne » est le bras armé de la présence de la Commission dans les réseaux sociaux au travers d’une communauté de community managers dans les Représentations.

Reconnaissant que « la réputation est l’élément essentiel d’une présence efficace sur les réseaux sociaux » mais confiant la tâche de piloter cette activité à des « intermittents de l’Europe », l’ambivalence symptomatique de la place octroyée par les médias sociaux est encore aujourd’hui perceptible au sein de la Commission.

Les plateformes communautaires

Supposant à la fois un public captif lié aux politiques européennes et une compétence de l’UE qui se traduise par des occasions de redistribution, les plateformes communautaires se présentent comme de nouveaux services qui répondent à des besoins de communication jusque-là non remplis.

1. Les réseaux de bénéficiaires : prolonger une relation avec un public

Associer une action ou un programme de l’UE à un état d’esprit afin de pérenniser une relation entre l’UE et ses bénéficaires

=> Les Euronautes, la communauté des jeunes qui bougent en Europe

2. Les laboratoires de co-création : partager l’innovation

Recueillir des idées, des remarques, des suggestions en laissant la part belle à l’intelligence collective, i.e. aux échanges entre les contributeurs.

=> Europcommunity

3. Les plateformes citoyennes : nourrir un débat autour d’une cause ou d’un enjeu collectif majeur

Animer une communauté d’intérêts autour de thématiques spécifiques

=> Ourspace, le Myspace des Européens : une plateforme paneuropéenne de dialogue entre les jeunes et les responsables politiques

4. Les communautés d’entraide : fédérer un collectif

Structurer des collectifs organisés à l’échelle européenne évoluant dans des domaines professionnels particuliers afin de favoriser l’entraide et le partage d’expériences et de bonnes pratiques

=> eTwining, la communauté en ligne pour les établissements scolaires

=> Regionetwork, la communauté d’entraide des acteurs des fonds européens

=> Capacity4dev, la communauté de la coopération et du développement de l’UE

5. Les services d’expertise et d’accompagnement : représenter des publics cibles

Se positionner comme référent auprès d’un public cible se trouvant dans une situation d’attente d’informations stratégiques

=> Farnet, le réseau européen des acteurs locaux, régionaux, nationaux et européens autour des zones de pêche

 

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