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La diffusion du documentaire "Home" sur France 2 a-t-elle influencé le vote aux élections européennes ?

Les faits

Home, le documentaire de Yann Arthus-Bertrand consacré à l’environnement, a réuni 8,3 millions de téléspectateurs en moyenne, vendredi 5 juin en prime time sur France 2, soit 33% de part d’audience.

Europe Écologie, la liste emmenée par Daniel Cohn-Bendit a obtenu 16,28% des voix aux élections européennes, en troisième position derrière l’UMP et à 34.760 voix seulement du Parti socialiste.

Le débat

Nombre d’observateurs et de personnalités n’en doutent pas lundi, au lendemain du scrutin, que la diffusion du documentaire à influencer le scrutin.

Sur Europe 1, Yann Arthus-Bertrand reconnait que la diffusion de son film, à l’occasion de la journée mondiale de l’Environnement, a réveillé la fibre « verte » des électeurs appelés aux urnes pour les européennes : « Bien sûr qu’on a donné des voix » à la liste Europe Ecologie.

Sur RTL, Daniel Cohn-Bendit ne contredit pas cette version des faits : « Il y a une sensibilité écologiste en France. Cette sensibilité a été activée ou réactivée sûrement par un film comme Home, c’est possible ».

L’enseignement

Ainsi, alors que la théorie nous apprenait que la disjonction entre l’information médiatique et la communication politique était aussi coûteuse pour le politique qu’était profitable leur éventuelle conjonction, la pratique avec cet épisode de la campagne électorale des élections européennes nous apprend que la conjonction entre programmation télévisée et programmatique partisane peut se révéler également profitable

Euronews, quatre fois plus d’audience que CNN en Europe, bientôt sur la TNT ?

La chaîne européenne, Euronews, réalise une audience quatre fois supérieure à celle de CNN et huit fois supérieure à celle de BBC World en Europe, avec 6 à 7 millions de téléspectateurs quotidiens…

Euronews en chiffres :

  • compte 350 journalistes composant 8 équipes linguistiques de la chaîne (en allemand, anglais, arabe, espagnol, français, italien, portugais, russe, et en turc à partir de janvier 2010) ;
  • couvre 210 millions de foyers dans le monde (90 % en Europe) et 1,5 million de chambres d’hôtel.

La France, un pilier d’Euronews :

  • la société éditrice, de droit français, est établie à Lyon et tient son autorisation d’émettre du CSA ;
  • la France est le premier actionnaire (30 % du capital) ainsi que la première nationalité parmi le personnel (40 %) ;
  • France 3 diffuse le matin, une heure par jour d’Euronews.

Euronews sur la TNT ?

Selon Emmanuel Berretta du Point, Dominique Baudis, tête de liste UMP aux élections européennes dans le Sud et ancien président du CSA, propose à la ministre de la Culture Christine Albanel, d’offrir un canal gratuit de la TNT à la chaîne d’information européenne Euronews : « Faisons d’Euronews le moteur médiatique de la construction d’une identité européenne et intégrons Euronews à la télévision numérique terrestre ».

Interrogations sur le plan média de la campagne gouvernementale d’information et d’incitation au vote pour les élections européennes

Alors que le gouvernement français lance une campagne d’information et d’incitation au vote pour les élections européennes du 7 juin prochain avec la diffusion d’un spot TV unique de 45 secondes plus de 1000 fois du 9 au 22 mai 2009, la stratégie du plan média soulève des interrogations…

Une campagne d’information nécessite de s’inscrire durablement

Une campagne de communication qui s’inscrit dans la durée permet une meilleure appropriation du message par le grand public.

Pourtant, Bruno Le Maire, le secrétaire d’Etat aux Affaires européennes lors d’une intervention le lundi 4 mai devant un auditoire clairsemé d’étudiants de l’université Paris Dauphine (une vingtaine), se prononce pour « une campagne courte et forte à la fois » (la période de diffusion du spot TV réalisé par le gouvernement français est de 15 jours seulement).

Une campagne d’incitation au vote nécessite de s’inscrire précocement

Une campagne d’incitation au vote pour éviter tout sentiment de frustration de la part de citoyens non inscrits devrait débuter par un message d’incitation à s’inscrire sur les listes électorales, avant la clôture des inscriptions au 31 décembre de l’année précédent l’année du scrutin.

Pourtant, la campagne du Parlement européen a officiellement été lancée le mardi 17 mars 2009 quant à la campagne du gouvernement français, il s’agit du samedi 9 mai 2009 pour un scrutin programmé le dimanche 7 juin 2009 pour la France.

Ainsi, une campagne relativement longue permettrait de toucher efficacement les citoyens et une campagne précoce permettrait de ne pas se situer en même temps que le processus électoral et le jeu politique proprement dit.

Lancement officiel de la campagne d’information et d’incitation au vote pour les élections européennes 2009

En complément de la campagne de communication du Parlement européen pour les élections européennes : “Elections européennes : à vous de choisir”, le gouvernement français lance – à l’occasion de la Journée de l’Europe du 9 mai – une campagne d’information et d’incitation au vote pour les élections européennes composée d’un spot vidéo…

Des objectifs de communication concentrés sur l’institutionnel : déficit de la dimension affective de l’Europe

Les objectifs du spot, unique moyen de communication de la campagne sont de :

  • rappeler la date des élections : le 7 juin pour la métropole, le 6 ou 7 juin pour l’outre-mer.
  • inciter les électeurs à se mobiliser : le taux de participation réel aux élections européennes de 2004 était de 43.3%.
  • raconter les grandes étapes de la construction européenne et mettre en perspective les élections du 7 juin.

Au regard des objectifs d’une campagne de communication selon le modèle AIDA (Attention, Intérêt, Désir, Action) :

  • attirer l’Attention ;
  • susciter l’Intérêt ;
  • provoquer le Désir ;
  • pousser à l’Action ;

la campagne gouvernementale répond parfaitement aux objectifs cognitifs (informer) et conatifs (inciter les citoyens à changer leur comportement) mais ne semble pas prendre en compte pleinement les objectifs affectifs (développer une image attractive).

Ainsi, la campagne de communication du gouvernement pour informer et inciter les citoyens à voter aux prochaines élections européennes – dont les objectifs de communication sont très institutionnels – risque de conforter le déficit d’image de l’Europe et ne pas pleinement finaliser la lutte contre l’abstention.

Un dispositif média concentré dans le temps : déficit de diffusion dans la dernière ligne droite avant le vote

Toujours selon le portail du gouvernement, cette campagne bénéficie d’un dispositif média concentré de plus de 1000 passages en télévision d’un spot unique de 45 secondes, du 9 au 22 mai 2009.

Certes, la diffusion sur la plupart des chaînes de la TV (5 grandes chaînes de télévision nationale, 16 chaînes de la TNT, du câble et du satellite et 14 chaînes d’Outre-mer) et les relais sur des sites web gouvernementaux et commerciaux permettront sans aucun doute de toucher massivement une large cible de citoyens français et européens résident en France.

Mais, malgré la puissance GRP du plan média très impactante, l’absence de diffusion du spot lors des 15 derniers jours précédant le scrutin risque de ne pas convaincre les électeurs hésitants qui décident de plus en plus tardivement de voter ou de s’abstenir.

En quoi l’UE souffre d’un déficit de médiatisation ?

Selon Thomas Ferenczi, dans les Cahiers du CEVIPOL, la question de la médiatisation des affaires européennes est certainement l’une des clés pour assurer à l’Union à la fois plus de visibilité et plus de légitimité :

  • Visibilité : une meilleure compréhension des mécanismes institutionnels et des politiques européennes par les citoyens des États membres ;
  • Légitimité : une plus grande adhésion « en la forme d’une tolérance passive ou d’un soutien actif », cf. Jean-Louis Quermonne dans « l’Europe en quête de légitimité ».

Une inadaptation des « machines » journalistiques nationales et de la « machine » de la communication de l’UE

Pour Gerd G. Kopper dans la revue Horizons Stratégiques « Informer sur l’Europe en France », les « machines » journalistiques et de la communication de l’UE ne fonctionnent pas car entre « les médias et l’Union européenne : le prisme national perdure » :

  • La « machine » journalistique tourne autour des centres d’intérêts nationaux. Les correspondants bruxellois ont parfois des difficultés à retransmettre les informations européennes aux publics nationaux en raison des réticences de leurs rédactions nationales.
  • La « machine » de la communication de l’UE, elle ne connaît pas suffisamment les médias nationaux et ne peut donc répondre correctement à leurs attentes.

Au final, la couverture de l’actualité européenne par les médias est minimale. Seules les informations véritablement factuelles sont relayées par les médias. En fonction des choix éditoriaux, les sujets faisant partie de la « machine à actualité » sont traités.

Une inadaptation de la gouvernance politique de l’UE à la lisibilité nécessaire de l’exercice des responsabilités

En matière de gouvernance, le système institutionnel de l’UE est trop compliqué, en démultipliant les présidences (configuration issue du traité de Lisbonne) :

  • la présidence stable du Conseil européen,
  • la présidence tournante du Conseil des ministres, à l’exception du Conseil des affaires étrangères présidés par le haut représentant,
  • la présidence de l’Eurogroupe,
  • la présidence de la Commission,
  • la présidence du Parlement européen.

Pour Bruno Le Maire, Secrétaire d’État aux Affaires européennes, dans Le Figaro « le problème de l’Europe est un problème de responsabilité. Les citoyens ne savent pas qui est responsable de quoi. Pour y remédier, nous devons nous entendre sur l’équilibre institutionnel ».

Il est probable que cette diversification des présidences et le problème de responsabilité pose des difficultés en termes de perception médiatique et ne facilite pas une lecture lisible des institutions européennes.

Une inadaptation de l’Europe aux contraintes de la télévision

L’Europe à la télévision est confrontée à un nombre croissant de problèmes, plus compliqués que ceux des autres médias :

  • L’Europe n’offre aucune image intéressante : les hauts responsables ne peuvent pas toujours être interrogés et les porte-parole ont peu d’intérêt en termes politiques.
  • Par ailleurs, l’Europe ne se résume pas aisément : les problèmes politiques sont abstraits et complexes.
  • Enfin, l’Europe fonctionne sur un mode consensuel : toutes les solutions politiques sont des compromis. Par conséquent, lorsque les télévisions parlent d’Europe, pour que l’information soit visible, elles doivent nécessairement faire le lien avec l’aspect national de la question abordée.

Ainsi, la question d’une meilleure visibilité de l’UE dans les médias européens ne peut passer que par une meilleure légitimité, soit par la responsabilité et l’efficacité des institutions communautaires.