Lors des Rencontres économiques d’Aix du cercle des économistes consacrées, cette année, au thème de « Recréer l’espoir », avec « Europe, l’Union fait la force » sont discutées les perspectives européennes entre leviers de progrès de l’unité comme l’autonomie stratégique ou la mutualisation de nouveaux domaines de prérogative nationale tels que la santé ou l’énergie ou enfin la créativité, avec par exemple le programme de facilité pour la paix en réponse à l’invasion de la Russie en Ukraine même s’il faut également considérer les facteurs de désunion entre la déstabilisation des populismes voire les élargissements. L’Union européenne saura-t-elle être aussi proactive que réactive à l’avenir ?
Des Européens en première ligne, alignés
Pour l’ambassadeur de France en Russie, Pierre Levy, l’analyse de l’Europe au prisme du conflit en Ukraine est un moment tellurique, qui débouche sur une crise longue, une guerre européenne et un effet de souffle mondial.
L’Europe fait preuve d’unité, tant dans la mobilisation de ressources avec près de 80 milliards d’euros mobilisés pour les Ukrainiens que dans les sanctions de la Russie avec 11 paquets adoptés à l’unanimité ; alors que la relation à la Russie était l’un des sujets les plus diviseurs dans l’UE, une vulnérabilité autant qu’une force que les Européens ont su gérer en réduisant temporairement les divergences.
Les principaux défis de l’Europe visent à :
- Résister à la guerre afin de restaurer la stabilité stratégique ;
- Ne pas être polarisé, ni géographiquement, il n’y a pas que l’Est, mais aussi l’Asie, l’Afrique, l’Indopacifique, ni thématiquement, il n’y a pas que le conflit en Ukraine ;
- Veiller aux intérêts européens qui ne sont pas toujours convergents avec les USA ;
- Assurer la capacité opérationnelle de l’UE, en particulier sa base industrielle.
Le débat n’est pas désincarné, il dépend de choix politiques, d’élections dans les 27 États-membres, pour une UE plus résiliente, en sécurité, ce qui conditionne tout le reste.
Les aspirations européennes des peuples autour de l’Europe vont également conditionner l’avenir de l’UE, songeons notamment que les Russes regarderont comment l’Ukraine se relèvera dans l’UE.
Un Européen au cœur brisé
Pour le professeur à l’université de Columbia, Adam Tooze, le panorama n’est pas aussi positif. Certes, on n’a pas eu d’échec sur les dernières années, mais les accords sont toujours difficiles et à la baisse, avec un manque d’ambition.
Considérant les aspects économiques, l’Union européenne n’a pas su bien gérer l’héritage de la crise de l’eurozone qui a frappé les jeunes étranglés par la crise ; l’euro n’est toujours la devise de référence en raison du manque de dettes conjointes et même s’il y aurait une vision politique macro, les choix micro dépendent… de la coalition gouvernementale allemande indécise.
Il s’agit encore et toujours de convaincre les Européens qu’être ensemble est un choix politique avant tout.
Même si l’on ne peut pas prédire les prochaines crises qui vont nous frapper, on sait qu’il s’agira d’une série de chocs qui auront des effets domino avec plusieurs impacts, l’Europe vit à l’ère des polycrises comme le disait déjà Jean-Claude Juncker.
Il nous faut réagir plus rapidement à ces phénomènes inédits, avec une meilleure gouvernance pour gérer les crises et surtout une meilleure organisation de la finance afin d’agir de manière proactive, tangible comme avec les politiques industrielle ou de recherche afin d’insuffler un nouvel essor dans l’économie et de réaliser une réalité encore plus interconnectée.
La chose la plus inspirante de l’Europe, c’est qu’elle existe encore, et qu’elle fait des bonnes choses. Les Européens ont la chance d’avoir l’UE, pour la qualité de vie, ce laboratoire dans l’amélioration des conditions de vie humaine en société, comme son système de santé unique au monde.