Dans un format d’émission spéciale, Le Nouvel Esprit Public, recevait dimanche 10 janvier, le Secrétaire d’État aux Affaires européennes Clément Beaune pour discuter les arguments français pour une souveraineté européenne. A vous d’en juger…
La souveraineté européenne dans l’Europe d’après
Après une succession de chocs et de crises (que nous n’avons pas fini de traverser), l’Europe se dessinera entre d’une part, un club d’une trentaine d’États-membres qui seront rassemblés par un socle de solidarité autour de 3 piliers (le marché commun, les institutions communautaires et les valeurs fondamentales) et d’autre part, des lignes de partage différentes selon les sujets (l’euro, la défense…) où le couple franco-allemand demeurera incontournable dans la dynamique politique d’ensemble.
Pour Clément Beaune, la souveraineté européenne n’est ni un cadre théorique impraticable, ni un fédéralisme désincarné, mais la solution pour « reprendre le contrôle », le slogan du Brexit, et défendre nos intérêts et nos valeurs. Face aux défis (climat, migration, terrorisme, GAFAM), le besoin d’un échelon européen pour aborder de nouveaux sujets (protection, identité, frontière), dont les jalons sont largement posés (plan de relance, protection des investissements internationaux, droit d’auteur, achat commun de vaccins) apparaît comme la garantie durable des souverainetés nationales.
La souveraineté européenne : la protection (indépendance) et la projection (puissance)
Même si le chemin des réformes institutionnelles est bouché depuis les référendums perdus, le changement de traité n’est ni un totem ni un tabou si la différenciation des politiques publiques européennes n’aboutit pas à la multiplication des institutions.
Même si la formulation relativement consensuelle en Europe d’autonomie stratégique recouvre que partiellement l’ambition française, le besoin de protection recoupe largement les enjeux, que l’on songe à la survie de la culture européenne face aux GAFAM en quasi-monopole de service public de l’information sans régulation ou à la nécessité d’investir dans les prochaines technologies de rupture pour préparer l’avenir européen.
La souveraineté européenne et la communication : pour une politique de sentiment d’appartenance
Aujourd’hui, la communication européenne échoue à transmettre tout sentiment d’appartenance, condition d’un espace de vie, d’un patrimoine européen. Le renversement des attentes des Européens doit être entendu, que l’on songe à l’Europe forgée contre la notion de puissance, sous la tutelle sécuritaire européenne sans notion de régalien comme la défense des intérêts, la protection des frontières ou la sécurité collective.
Puisque toute communauté politique se construit sur une démonstration de ses réalisations, tout projet européen, en particulier ceux qui seront financés par le plan de relance de l’Europe, devrait afficher à minima le logo de l’UE. De même tout établissement scolaire européen jumelé devrait rendre le jumelage plus visible. Surtout, une véritable politique de sentiment d’appartenance viserait à multiplier les symboles et les expériences en commun.
Au total, la vision d’une souveraineté européenne – qui n’a pas fini de susciter des réactions – repose sur la finitude géographique et intellectuelle d’une Europe différenciée selon ses politiques. En somme, un projet européen qui se pense contre soi-même et avec les autres.