Comment maîtriser la communication européenne « post-vérité » ?

En dépit de penser que nous en savons plus (« l’info est à portée de clic »), en réalité, l’accélération de la circulation des données et l’enfermement dans des bulles de filtre nous condamne à une polarisation qui n’est plus limitée aux opinions et aux valeurs, mais atteint également les faits. Comment maîtriser la « communication post-vérité », une réflexion à partir du mémoire de Sarah Al Sabah ?

Quand la « self-communication » de masse réduit l’efficacité de la communication européenne

La « self-communication » de masse impliquée par les médias sociaux change considérablement la manière de communiquer. Dorénavant, la communication doit recommencer à chaque fois en s’adaptant à ses publics à écouter, apprendre, laisser les gens s’informer et lorsque tout cela a été fait tenter de faire passer un message audible.

Dans un monde « post-vérité » où l’opinion publique est déterminée d’abord par des émotions et des convictions personnelles davantage que par des faits objectifs sachant que les réseaux sociaux ont dépassé la télévision comme source principale d’information chez les jeunes ; la politique populiste et les mouvements sociaux sont capables d’intervenir de manière beaucoup plus décisive auprès des publics.

Le résultat de cette évolution est un glissement historique de communication dans une sphère multidimensionnelle et ouverte sans repères ou référentiels communs. La communication européenne a besoin plus que jamais d’être cohérent et proactive pour déployer des stratégies de communication destinées à tous les segments pertinents de la société et pouvoir aussi percevoir l’humeur du moment, parce que pour les citoyens, leurs perceptions sont devenues leur réalité.

Quand la « post vérité » entraîne la crise de crédibilité et d’influence de la communication européenne auprès du grand public

La suprématie du virtuel où tout y devenu possible alors que le réel est justement ce qui dit que tout n’est pas possible fait que la promesse de toute-puissance finit par faire craindre l’impuissance.

Une perte de maîtrise largement liée à la perte de contrôle face au nouvel écosystème complexe et volatil où convergent la « self-communication » de masse, des médias traditionnels en transformation, des nouveaux médias plus ou bien intentionnés et des opérations de déstabilisation de l’opinion et de propagande conduisant à l’émergence de « faits alternatifs » et de « fake news ».

Une impuissance qui se renforce, face à un tel bombardement d’informations et de désinformation circulant dans la sphère publique, lorsque l’absence de compétences numériques devient une nouvelle forme d’illettrisme, on parle d’ailleurs dorénavant d’illectronisme auquel de nombreux communicateurs publics font face avec un écart de capacité entre ce qu’ils doivent faire et ce qu’ils sont capables de fournir aujourd’hui.

Il ne suffit plus de communiquer de la même manière traditionnelle pour espérer être entendu par les citoyens. Il s’agit de reconstruire le rôle d’une communication européenne légitime des politiques publiques de l’UE et de ne pas laisser les agendas politiques, les influences étrangères et / ou les diffuseurs de fausses nouvelles détourner les messages.

Quand la communication européenne se réadapte et se réajuste à la « post vérité »

Le compromis au cœur de la culture politique européenne ressort en miette de ces nouveaux rapports de forces de plus en plus violents dans la concurrence des apparences ou des vérités hâtivement instruites.

Des solutions doivent être mise en œuvre pour affronter les défis de l’ère de la « post-vérité » :

  • adopter une perspective multidimensionnelle avec les citoyens au cœur de toute stratégie de communication ;
  • passer en revue les approches qui aident à développer des stratégies créatives et d’innovation et éliminer les approches non applicables au secteur public ;
  • renforcer la communication économe, efficace et transparente ;
  • mieux connaître ses publics afin de créer des communications personnalisées ciblées ;
  • resensibiliser à l’honnêteté des « faits » et à la crédibilité des sources fiables ;
  • former et spécialiser les communicateurs publics.

Au total, maîtriser la « communication post-vérité » est l’un des défis les plus importants pour l’Union européenne afin de réinventer sa relation avec ses publics sur le bien-fondé de sa mission pour faire la différence.

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