Archives mensuelles : septembre 2012

Communication européenne et esprit national : comment les pays communiquent sur l’Europe ?

Chaque nation européenne noue une relation particulière avec l’Europe et par voie de conséquence toute communication européenne est fortement imprégnée par l’esprit national. Comment l’Allemagne, le Royaume-Uni et la France communiquent-ils sur l’Europe ?

Communication européenne affirmative de l’Allemagne autour de l’autorité : « I will Europa »

Lancée récemment, la campagne de communication allemande sur l’Europe s’appuie sur l’héritage historique de la construction européenne vue par les Allemands. A cause de la seconde guerre mondiale et du regard des Européens, les Allemands ne pouvaient pas ouvertement affirmer leur volonté européenne, sans doute de plus en plus frustrée par une culpabilité de moins en moins présente dans la société.

Sous cet angle, la campagne « I will Europa » (Je veux l’Europe) libère la parole des Allemands qui désirent enfin pouvoir exprimer publiquement leurs visions de l’avenir de la construction européenne. La communication européenne de l’Allemagne est une forme d’exutoire de l’affirmation d’une autorité retrouvée dans la famille européenne.

Communication européenne démonstrative du Royaume-Uni autour des intérêts : « EU, what’s in it for me? »

Plus ancienne, la campagne de communication britannique sur l’Europe s’inscrit dans un contexte national spécifique : la société est sensiblement plus europhobe et toute affirmation pro-européenne n’est pas envisageable. Fruit de l’héritage conservateur de Margaret Thatcher (cf. « I want my money back »), la relation des Britanniques à la construction européenne est marquée par le pragmatisme et la défense des intérêts nationaux.

Dans ce cadre, la campagne « EU, what’s in it for me? » joue sur la principale attente du peuple britannique de connaître les bénéfices concrets apportés par l’UE, dans une relation utilitariste : “a No-Nonsense Guide for UK Citizens to what the European Union Delivers”. La communication européenne du Royaume-Uni démontre et contre-argumente avec des faits sur les intérêts tirés de la cohabitation avec les pays européens continentaux.

the-eu-and-me.org.uk

Communication européenne imaginative de la France autour de la grandeur : « les grandes étapes de la construction européenne »

En France, la communication sur l’Europe se réalise sur un autre registre : ni dans l’affirmation d’une autorité, ni dans la démonstration des intérêts, l’Etat présente – depuis plusieurs décennies – la construction européenne comme un projet permettant à la France d’être plus que la France, d’être en quelque sorte la France en grand.


Elections Européennes – 7 juin 2009 par SIG-PM

Avec cette ambition, la dernière campagne d’incitation au vote lors des élections européennes de 2009 illustre cette approche de la construction européenne, résumée aux grands hommes européens, particulièrement français et aux grands projets européens, d’inspiration partiellement française. La communication européenne de la France montre l’inspiration et la grandeur de l’union des nations européennes.

Ainsi, les campagnes de communication européennes menées par chaque Etat-membre de l’UE se révèlent particulièrement éclairantes sur les relations qu’entretiennent chaque société avec l’Europe.

Vers une communication européenne « existentielle » sur le pourquoi de l’UE ?

La période est sombre pour l’Union européenne : la résolution des crises patine et le soutien des opinions publiques vacille. Les esprits ne sont plus seulement préoccupés par le déficit démocratique supposé ou admis de l’UE. L’existence même de l’UE dans ses formes actuelles est au cœur des interrogations. L’UE se doit de réagir sous peine de se voir condamner à disparaître. Quelques indices laissent à penser qu’une communication « existentielle » sur le pourquoi de l’UE est en préparation…

Indice n°1 : positionnement de la Commissaire titulaire du portefeuille de la communication comme soutien du Président de la Commission

Viviane Reding, actuelle Vice-Présidente de la Commission européenne, notamment responsable de la communication, se positionner de plus en plus ouvertement pour assurer un 3e mandat à José Manuel Barroso, comme elle l’affirme à Euractiv.com.

Afin d’asseoir cette continuité au sein des milieux européens, Viviane Reding aurait tout intérêt à faire porter par ses services une vaste campagne de communication sur ce que l’UE représente actuellement, sur la plus-value d’une approche européenne sur les grands dossiers du moment – une occasion de poser un bilan et un programme pour le futur agenda politique de la Commission européenne.

Indice n°2 : prise de parole du plus haut responsable de la communication en faveur d’un accent sur le pourquoi de l’UE

Gregory Paulger, le Directeur Général de la DG Communication à la Commission européenne, qui a été récemment nommé, s’est récemment exprimé lors d’une réunion du comité communication du Comité économique et social européen (CESE), selon le blog du secrétaire général du CESE.

Dans un exposé, qui demeure à ce jour l’une des premières et des seules indications publiques de ses intentions depuis sa prise de fonction, Gregory Paulger décrit comment, en cette période d’austérité, avec des mesures de crise étant décidées et mises en œuvre rapidement, il y a un risque que le messager soit puni pour le message. Cela signifie, selon lui, un changement de tactique de la Commission européenne et de ses activités de communication, mettant moins l’accent sur le « quoi » et le « comment » et davantage sur le « pourquoi ».

Indice n°3 : priorité interinstitutionnelle de communication autour de la notion de « Tirer le meilleur parti des politiques de l’UE »

Parmi les 3 priorités communes aux institutions européennes pour l’année 2012, les principaux responsables de la communication de l’UE se sont accordés autour de la notion de « Tirer le meilleur parti des politiques de l’UE », ce qui signifie notamment de « maximiser la valeur ajoutée des politiques de l’UE » et de communiquer sur « le coût de la non-Europe ».

Ainsi, semble se dessiner une prise de parole « existentielle » de l’UE sur ce qu’elle a à dire aux Européens. 2013, Année européenne des citoyens pourrait accueillir cette initiative.