Plus d’une semaine après les résultats du scrutin européen – marqués en France par le succès de la liste Europe-Ecologie – il s’agit de tenter de tirer des leçons de la campagne des listes Europe-Ecologie en matière de communication politique ?
Premier enseignement : il faut renouveler les pratiques des hommes politiques afin de renforcer la lisibilité de la communication politique
Pour Benoit Thieulin – le concepteur de la cyber-campagne Europe Ecologie – interrogé par David Abiker de France Info dans Parlons net, samedi 13 juin, la stratégie à consister à renouveler les pratiques afin de renforcer la lisibilité de la communication politique.
En dépit d’un contexte défavorable au départ pour les listes Europe Ecologie (septembre-octobre 2008) :
- La presse considère que l’unité de ces listes hétéroclites ne marchera pas ;
- Les sondages indiquent qu’avec la crise, il faut parler du social ;
- Les responsables politiques de gauche pensent que c’est l’anti sarkozisme qui rassemble ;
Le positionnement pour lancer les listes Europe-Ecologie repose sur le renouvellement des pratiques :
- créer une dynamique de rassemblement avec des listes élargies à des non professionnels de la politique ;
- démarrer la campagne des européennes très tôt ;
- parler exclusivement d’Europe et d’écologie.
S’appuyant sur ces nouvelles pratiques, la communication politique sort renforcée notamment via une présence médiatique à l’unisson des têtes de listes permettant de concentrer les citations dans les JT (de seulement 9 secondes en moyenne) sur l’Europe et l’écologie.
Deuxième enseignement : il faut renouveler les usages du web afin de démultiplier l’efficacité de la communication politique
Toujours selon Benoit Thieulin dans Parlons net, la stratégie à également consister à renouveler les usages du web afin de démultiplier l’efficacité de la communication politique.
L’utilisation d’Internet s’est orientée vers une double fonction :
- l’arrimage des contacts « virtuels » avec les citoyens, notamment à travers la présence sur les réseaux sociaux ou le buzz autour d’un lipdub collectif (vidéo de chanteurs en play-back réalisée avec des militants de toute la France : 50 000 vues en 2 semaines).
- la fédération des énergies militantes dans la vie « réelle », ainsi selon La Croix du 3 juin : « Européennes : les politiques tentent de mobiliser avec les réseaux sociaux » : « l’internaute, après avoir signé « l’appel » du rassemblement, rejoint la communauté virtuelle, peut y créer son propre groupe local, y discuter et créer des événements dans la « vraie vie »…
Ainsi, le nouvel usage politique du web – largement inspiré de la campagne du candidat Obama – permet de créer un nouvel « e-militantisme » : on ne s’adresse plus seulement à un citoyen-électeur mais à un média-prescripteur à part entière qui crée de la valeur ajoutée pour la campagne.
Troisième enseignement en contre-point : il faut profiter des circonstances offertes par la société médiatique
La volonté de renouveler les pratiques et les usages ne serait rien sans la capacité à saisir les opportunités que l’air du temps ou l’inconscient collectif offre pour démultiplier la communication politique.
Profiter de l’air du temps saturé par l’écologie (paquet climat-énergie à l’échelle de l’UE, Grenelle de l’environnement en France, diffusion de Home – le documentaire de Yann Arthus-Bertrand, l’avant-veille du scrutin, etc.) afin d’étiqueter la liste autour de cet enjeu (les électeurs se contentant le plus souvent du nom de la liste sans lire le programme).
Profiter de l’image de figures politiques qui résonnent dans l’inconscient collectif (Cohn-Bendit : dissidence, révolution, changement, énergie, impertinence & Eva Joly : intégrité, justice, légitimité, honnêteté, anticorruption) afin de se conformer aux critères de sélection et d’intérêt des médias.
Ainsi, le succès de la campagne des listes Europe-Ecologie repose à la fois sur une communication lisible et efficace et sur une instrumentalisation heureuse des circonstances.