Promesses du web 3.0 : quel avenir souhaitable pour l’Europe ?

Entre la toute-puissance actuelle des GAFAM et la logique future de décentralisation du web3 autour de l’empowerment des créateurs de contenus, l’Institut Sapiens a fait discuter deux essayistes Caroline Faillet, auteur de « Web3, la nouvelle guerre digitale » et Charleyne Biondi, auteur de « Dé-coder une contre-histoire du numérique »…

Charleyne Biondi : Le numérique c’est un enjeu stratégique

Avec son regard de techno-politiste, la contre-histoire du numérique est une invitation à comprendre les évolutions qui se sont imposées dans nos vies quotidiennes :

  • Les big data, c’est un moyen d’influencer et de gouverner les populations ;
  • Le numérique, en tant qu’il produit et collecte ces données, c’est devenu un enjeu stratégique ;
  • Le techno-pouvoir correspond aux capacités des nouveaux souverains big tech.

Au total, la souveraineté numérique, nouvel enjeu stratégique, doit se comprendre sous trois angles : la régulation, les infrastructures critiques et les sujets sécurité/défense.

Caroline Faillet : Les nouvelles guerres digitales

Avec son métier de consultante, le regard se porte sur les couches du champ de bataille :

  • Les câbles : le combat est d’ores et déjà quasiment perdu ;
  • Les logiciels : le combat est pour le moment largement perdu ;
  • La dimension cognitive : l’attention capturée par les interfaces.

Pour dire les choses très simplement, la bataille, pour l’avenir de nos sociétés, se joue contre la captologie, cette technique qui vise à capturer notre attention grâce au design et aux interactions avec les plateformes et les applications.

Au total, la cyber-guerre, c’est la guerre sourde de l’attention et les actions de manipulation des opinions par des puissances étrangères.

Charleyne Biondi : La révolution numérique

Dans son rôle d’historienne des nouvelles technologies, la science informatique peut être vue comme une grande découverte, aussi radicale que Newton ou Einstein. Pourquoi ? Parce que c’est une révolution industrielle, mais aussi un changement de paradigme ; c’est-à-dire une nouvelle manière d’être au monde.

Les nouvelles idées de l’informatique prennent corps dans les populations via des outils numériques comme les réseaux sociaux et les applications. Le numérique nous mène à un point de bascule où les systèmes politiques et les imaginaires collectifs sont bouleversés.

Caroline Faillet : L’empowerment des individus

En tant que pédagogue des futures technologies, le web 3.0, c’est la poursuite de la prise de pouvoir des individus, engagée avec le web 2.0, via la désintermédiation et la révolution des usages :

  1. Digitalisation de la valeur : avec le token, des individus sont propriétaires de cryptoactifs dématérialisés ;
  2. Décentralisation de l’organisation : avec la blockchain, c’est le partage de la valeur de pair à pair.

Un « optimisme de devoir » doit être adopté pour corriger les dérives et reprendre le pouvoir des GAFAM contre leur business-model fondé sur la monétisation des données personnelles grâce aux usagers-propriétaires de leurs actifs numériques dans le web 3.0.

Charleyne Biondi : Les risques politiques du numérique

Plusieurs étapes clés ont incarné les dérives politiques du numérique :

  1. Le techno-utopisme libertaire de la Silicon Valley, c’est la première figure des cyberpunks
  2. La crainte de la surveillance de masse, c’est le temps des whistleblowers comme Edward Snowden ;
  3. Le discours démocratique de la régulation des GAFAM vs le splinternet qui divise les espaces numériques, avec en particulier la grande muraille virtuelle en Chine ;
  4. La rhétorique de la décentralisation heureuse avec le web 3.0, c’est le moment présent ;
  5. L’hyper-marchandisation du cyber espace, c’est le risque si l’on se retrouve uniquement avec des métavers gérés via des blockchain tokenisés, qui réduise toute vie numérique à des actifs monétisables.

Caroline Faillet : Les opportunités du web 3.0

La bataille se mène à la fois contre les plus dogmatiques qui se mobilisent toujours (scams/trolls/fake…), mais aussi contre la radicalisation renforcée par les algorithmes et encore contre le business-model « quand tout est gratuit, c’est vous qui êtes le produit ».

Se tourner vers des intentions d’usage « citoyennes », des échanges plus vertueux et durables, là où la tech recrée du lien, le token, ce n’est pas de l’argent mais une valorisation de tâches, d’activités et de partages de savoirs et de connaissances et du coup, la blockchain, c’est un lien direct et transparent.

Au final, dans ces transformations du numérique, la plus belle promesse serait que l’Europe passe d’un nain de l’ère du web 2.0 dominé par les GAFAM à un géant du web 3.0 décentralisé et souverain.

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