La communication peut-elle relancer l’Union européenne ?

A la recherche de solutions pour redonner du sens – tant une direction qu’une signification – au projet européen, la communication peut, selon plusieurs spécialistes, contribuer à la relancer de l’Union européenne…

Le débat politique pour faire vivre une culture publique commune, selon Jean-Marc Ferry

Interrogé sur les ondes de France Culture, le philosophe Jean-Marc Ferry considère que le projet européen a besoin d’une culture publique de communication, une sorte d’« affectio societatis » qui de proche en proche gagne les consciences civiques et avec l’aide des médias construit un espace public européen.

Du coup, la communication européenne passerait dans cette transformation des pratiques d’une guerre de slogans stériles à un vrai débat démocratique de confrontation publique pour mettre en arène les divergences entre responsables politiques et permettre ainsi au public d’en connaître et donc de participer. Sans publicité des débats européens, point de démocratie européenne.

L’inter-langue pour se faire entendre et faire des compromis, selon Heinz Wismann

Là encore sur France Culture, le philologue Heinz Winsmann recommande de faire un vrai travail contre la langue de l’Europe puisque les Européens ont le sentiment d’une impossibilité de se faire entendre de l’Europe, notamment parce que tout ce qui est intangible est très mal exprimé.

La compétence langagière est indispensable pour favoriser nos capacités de communiquer, tant par l’apprentissage des langues étrangères que la traduction. Ainsi, « l’Europe n’est pas un gène, c’est un geste historique » qui consiste à se dessaisir de soi pour accepter d’entendre les autres et de parvenir à des compromis.

Heinz Wismann cite Walter Benjamin selon qui « la vrai langue, c’est l’entre de toutes les langues ». Les langues produisent du nouveau et c’est cette richesse qui est au cœur de l’Europe.

Plusieurs exemples de différences d’interprétation dans la relation franco-allemande illustrent l’importance de créer de nouveaux mots qui disent la même chose pour tous. L’« appartenance » (à l’Europe) est comprise comme une cohabitation (cf. les appartements) chez les Français, mais comme une soumission en allemand. De même, la  « dette » est comprise comme un remboursement en France, mais comme une faute morale en allemand.

L’on peut extrapoler autour des nombreux débats qui se lient autour des nouveaux mots qui permettent de dire entre Européens ce que l’on souhaite, qu’il s’agisse évidemment du Brexit (aurait-il exister sans être nommé ?), des migrants « dublinés » très présents dans l’actualité ou encore des « Spitzenkandidaten » pour les têtes de liste des partis politiques européens aux élections européennes.

La conversation pour faire exister une société ouverte européenne

Dans un numéro de la revue Esprit consacré à la « société ouverte », une nouvelle fois, la communication apparaît comme une solution au travers de la conversation comme élément constitutif de la société ouverte européenne.

Le défi de l’Europe est de parvenir à constituer une société ouverte, qui soit à la fois en mesure de faire vivre la liberté d’expression et d’opinion tout en parvenant à réguler les « agoras » ouvertes pour faire respecter les règles communes, qu’il s’agisse de l’indépendance éditoriale des médias face aux pressions des intérêts ou de la régulation de l’Internet, initialement très ouvert et marqué par un certain mouvement d’enclosure avec les GAFAM.

Au total, la communication – qu’elle soit un débat politique démocratique, une inter-langue commune ou une conversation ouverte – est au cœur de la relance de l’Union européenne.

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