Vœux 2015 : pour une communication européenne libérée de ses oxymores

La période étant aux vœux, formulons le vœu que la communication européenne se libère de ses oxymores, ces formules contradictoires qui en rapprochant deux termes que leurs sens devraient éloigner brouillent parfois jusqu’à l’absurde ce qui est et devrait être la réalité…

Vœu d’une communication européenne libérée de l’oxymore entre « l’impact de l’UE dans la vie quotidienne » et les vraies réalisations concrètes de la construction européenne

Premier vœu pour 2015, que la communication de l’UE cesse, à tout bout de champ, d’incanter un soi-disant « impact de l’UE dans la vie quotidienne » des citoyens européens.

S’adresser aux citoyens ne veut pas dire travestir la réalité des réalisations concrètes de la construction européenne pour n’en retenir que ce qui concerne la vie quotidienne, sous la forme de « success stories », qui est à la fois un prisme très réducteur, peu flatteur pour l’UE et au total contre performant.

L’action « macro » de l’UE dans les économies de l’UE, sur la monnaie euro ou avec les politiques communes (compétition, concurrence, commerce international, union bancaire, semestre européen…) demeure méconnue faute d’une pédagogie des vraies réalisations concrètes de l’UE ; ce qui devrait constituer un chantier prioritaire pour la communication européenne en 2015.

Vœu d’une communication européenne libérée des oxymores incantatoires du « marketing de la marque UE » ou de « l’UE communique avec les citoyens dans les médias sociaux »

Autre vœu pour cette nouvelle année, que la communication de l’UE ne se fourvoie plus dans des démarches qui ne correspondent pas à la réalité comme prétendre faire le marketing de la marque UE alors qu’il ne s’agit pas d’un produit et que l’UE n’a rien à « vendre » aux citoyens.

De même, l’UE devrait cesser d’affirmer communiquer avec les citoyens européens dans les médias sociaux, ce qui n’est pas totalement faux mais masque l’essentiel, à savoir l’absence de débats à grande échelle ou dissipe le fait que ces conversations, le plus souvent, sont quand même réduites à des publics très particuliers, déjà « intégrés » – pour le meilleur ou le pire (du militant au troll) – au projet européen.

Vœu d’une communication européenne libérée de l’oxymore entre les résultats au sens de l’administration et les résultats possibles liés à la communication

Trop souvent encore, la communication de l’UE se contente de résultats au sens de l’administration dans ses actions et ses campagnes de communication.

De quoi s’agit-il ? De résultats chiffrés, sans aucune considération de l’impact réel et de l’utilité avérée, comme par exemple le nombre d’exemplaires imprimés pour une brochure sans s’interroger sur le nombre d’exemplaires vraiment distribués ou le nombre de communiqués de presse publiés, encore récemment une gloriole de l’UE tant leur nombre étaient importants, mais aux résultats pourtant dérisoires.

Troisième vœu donc pour la communication de l’UE, que les résultats tels qu’ils peuvent être attendus d’une action ou campagne de communication sur un public déterminé en termes de visibilité/notoriété (1er niveau cognitif), d’image ou de jugement (3e niveau affectif) ou de comportement (3e niveau conatif).

Vœu d’une communication européenne libérée de l’oxymore entre souhait idéal de plus de politique / lyrisme politique et potentialité d’un angélisme technocratique exterminateur

Dernier vœu pour la communication européenne pour l’année 2015, que l’on cesse de déplorer les effets dont par ailleurs on chérit les causes. Méfions-nous de ce que l’on craint ou veut vraiment.

À  force de réclamer à cor et à cri que l’UE fasse plus de politique, que l’UE se dote d’un projet politique – et la Commission Juncker semble prendre au pied de la lettre ce souhait – il ne faut pas regretter, ce qui ne va pas manquer d’arriver : d’une part, le manque de volonté politique des Etats-membres et l’absence d’accord ou de consensus et d’autre part, la critique renouvelée contre une sorte d’angélisme technocratique exterminateur.

Autrement dit, politiser la communication européenne, comme beaucoup semblent aujourd’hui le suggérer, c’est sans doute la condition du succès face au désintérêt et à l’apathie d’un encéphalogramme européen plat dans les esprits, mais c’est surtout l’assurance de la controverse, de la remise en cause justifiée par les autorités elles-mêmes, dans une impréparation flagrante des équipes et des arguments.

En conclusion, le vœu pour 2015 est de passer d’une logique incantatoire faussement ambitieuse mais « administrativement correcte » puisque respectueuse en façade des objectifs/contraintes/missions de la fonction publique à une démarche crédible vraiment engagée auprès de cibles identifiées, visant in fine des résultats tangibles et reposant sur une politique renouvelée, la pire chose étant à ce stade que l’Europe ne représente plus aucune utilité, aucun intérêt et que le débat ne survive pas.

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