Les médias sociaux et la participation en ligne offrent de nouvelles opportunités mais représentent également des défis pour les partis politiques européens. Quel est l’impact théorique du web sur les partis politiques européens dans la perspective des élections européennes de 2014 ?
Vers un nouveau idéal-type de « cyber » partis politiques européens
Dans une étude sur les partis politiques européens : « All Tomorrow’s Parties: The Changing Face of European Party Politics », Florian Hartleb estime que les « partis de demain » seront des partis « avec plus de participation et moins d’adhésion ».
Au-delà des évolutions idéologiques ou sociologiques correspondant au déclin des partis politiques traditionnels « mainstream » et à l’émergence de nouveaux partis « de niche » (les verts, les partis populistes, le parti pirate…), les évolutions liées au web, qui touchent tous les partis politiques européens, sont particulièrement importantes.
Entre les partis de masse et les partis de niche, un nouvel idéal-type de « cyber » parti politique ou de « parti de réseau » émerge en fondant son mythe de légitimation non plus sur l’adhésion de militants et l’appropriation d’un territoire programmatique mais sur l’action en ligne et le potentiel d’accès à tous les citoyens.
Dans l’organisation et la participation des citoyens aux processus de décision politique, le modèle du « cyber » parti influence de plus en plus la vie politique. Pourquoi ?
Rôle des médias sociaux : De nos jours, le web social transforme non seulement la communication dans nos vies privées, mais également pour les organisations politiques. Le « cyber » parti offre une palette de choix beaucoup plus large aux citoyens. Les électeurs peuvent désormais interagir de manière nouvelle, à la fois pour promouvoir et pour critiquer les idées des partis politiques.
Communication politique multi-canal : Les partis politiques ont beaucoup plus des moyens de toucher les électeurs, et les nouvelles plateformes sociales (comme Twitter) permettent une communication plus souple et plus diversifiée. L’utilisation du web social soulève également des risques en rendant plus difficile pour un parti d’avoir un agenda constant.
Cycle de l’information en continue : Le flot constant de l’information rend plus difficile aux partis politiques d’établir une présence dans une compétition avec des milliers de sources pour capter une attention limitée des électeurs. Avec l’info en continue, il y a aussi le risque que même de petites erreurs qui auraient pu passer inaperçues auparavant puissent maintenant se retrouver dans les campagnes négatives des rivaux politiques.
Baisse du coût de la mobilisation : Les cyber partis peuvent faire campagne grâce à des méthodes et outils moins coûteux avec les technologies modernes.
Des éléments optimistes (concernant les possibilités de militantisme « virtuel ») et pessimistes (concernant les adhésions « réelles » et la stabilité des électorats)
Les conséquences du modèle de « cyber » parti politique sont ambivalentes :
- Les « cyber-optimistes » décrivent le potentiel démocratique d’internet et mettent l’accent sur l’amélioration de l’accès par internet ;
- Les « cyber-pessimistes » soulignent les menaces potentielles pour la démocratie en termes de représentation institutionnelle traditionnelle.
Cette nouvelle forme de participation politique soulève des questions quant à la viabilité des partis politiques tels qu’ils existent aujourd’hui. Cela pourrait avoir des conséquences dramatiques pour les partis politiques « mainstream » s’ils ne parviennent pas à s’adapter au web.
Quid de la future campagne des élections européennes ?
De grands espoirs sont placés sur le web 2.0. Cependant, il n’y aura pas d’effets miracles. Néanmoins, Facebook et Twitter et quelques autres médias sociaux peuvent contribuer à l’activation et à la mobilisation des membres et des non-membres (déjà politisés).
Le type d’adhésion classique à un parti politique perd de son importance. Les électeurs voteront de plus en plus pour des mouvements absents de la vie politique partisane. Mais, les partis politiques traditionnels ne sont pas pour autant en danger.
Avec moins de pénétration dans la société, la question est de savoir si les partis politiques sont encore légitimes. Pour le rester, le principal défi des partis de demain sera de mettre en œuvre de nouvelles formes de participation réalistes.
Les partis doivent adapter leur communication, tout en maintenant la stabilité, la crédibilité et la fidélité de leur électorat. Dans le cas contraire, les partis politiques seront des véhicules tout simplement interchangeables d’émotions imprévisibles produites par des médias (sociaux) et du marketing, et perdront leurs racines profondes et leurs fonctions dans la société qui est la transformation des intérêts de la population (input) dans le processus de prise de décisions publiques (output).
Au total, les élections européennes de 2014 étaient clés pour la légitimité de l’UE. Internet le sera également pour les partis politiques européens.