Alors que les services de communication des institutions européennes ne parviennent pas – seuls – à « impliquer les citoyens dans les questions relatives à l’UE », l’euro-député danois Morten Løkkegaard présente une proposition de résolution « sur le journalisme et les nouveaux médias – création d’une sphère publique en Europe » examinant « comment, en communiquant, on peut lancer, encourager et maintenir des débats européens et la circulation de l’information ».
Quelles sont les solutions du rapporteur Morten Løkkegaard pour améliorer la place qu’obtiennent les questions européennes dans l’agenda des États membres, dans les médias et sur Internet ?
Solution logique : utiliser des prestataires de communication pour former le personnel de l’UE à communiquer sur Internet et notamment dans les médias sociaux
Préalable à cette démarche, le rapport soutient qu’« il faut modifier les politiques de communication des institutions européennes. Les instructions pour le personnel de l’Union devraient être qu’il est plus facile de se faire pardonner d’avoir fait quelque chose, que d’obtenir une autorisation. Ce qui signifie dans un système hiérarchique qu’en cas de nécessité, les fonctionnaires de tous niveaux devraient être autorisés à répondre rapidement aux citoyens comme à la presse ».
Habiliter à communiquer, en particulier sur Internet, l’UE doit ensuite « former son personnel à communiquer » et ne doit pas hésiter à « faire appel à des sociétés spécialisées dans la communication qui s’appuie sur les nouveaux médias » afin de permettre aux équipes communication de mener une véritable démarche de community management dans les médias sociaux.
Quoique le rapporteur ne semble pas formellement trancher pour une internalisation des compétences de community management, comme le préconise Cédric Deniaud : « Réflexions autour du community management et du rôle des agences : pourquoi le community manager doit faire partie de l’entreprise », la démarche logique de recourir à des prestataires spécialisés, notamment des agences, est fermement souhaitée afin de renforcer la communication de l’UE sur Internet et notamment dans les médias sociaux.
Solution légitime : animer des partenariats avec les États membres pour assurer le traitement de l’information européenne dans les médias de service public
Préalable à cette démarche, le rapporteur « invite les États membres à réfléchir à inscrire l’Union au programme de l’enseignement secondaire et les encourage à échanger des exemples de bonnes pratiques à ce sujet au niveau de l’Union ».
Éduquer à la chose européenne, les citoyens de l’Union seraient davantage soucieux de leur droit à être informé sur les politiques et les processus décisionnels de l’Union. Les Etats membres seraient ainsi encouragés « à émettre pour les diffuseurs de services publics régionaux et nationaux des lignes de conduites claires sur la façon de couvrir les affaires européennes, de s’assurer que celles-ci sont respectées et que l’actualité européenne est traitée en priorité ».
Légitimement, le rapporteur précise que « les États membres devraient s’assurer de l’indépendance des diffuseurs du service public » et que ces derniers « doivent avoir une approche critique ainsi qu’une totale indépendance éditoriale par rapport à leur propre couverture des thèmes européens ».
Solution limite : créer une hybridation entre information et communication avec des professionnels de l’information prenant en charge la communication de l’UE
Suivant une démarche, qui ne sera pas sans susciter des critiques auprès de journalistes, le rapporteur « se réjouit de l’initiative de la Commission relative à la diffusion paneuropéenne sur les réseaux radios et télévisions régionaux » et estime que « des investissements européens peuvent inviter les diffuseurs à écrire des articles indépendants et critiques sur l’Union européenne ».
Ainsi, « le rapporteur indique que les partenariats entre les secteurs privés et publics (financement européen des médias contre traitement journalistique de l’Europe) pourraient être la solution pour communiquer sur les questions européennes ».
Illustrant cette solution que l’on peut qualifier de « limite », le rapporteur estime que « cela impliquerait d’inviter des professionnels de l’information à prendre en charge les tâches communicatives de l’Union, comme cela était le cas auparavant » :
- engager dans les bureaux de représentation de la Commission et d’information parlementaire établis dans les États membres, des attachés de presse des médias professionnels extérieurs aux institutions européennes ;
- mettre sur pied une task-force basée à Bruxelles et composée de journalistes indépendants dépourvus de tout contrôle éditorial et recrutés en dehors des institutions européennes. Elle aurait pour tâche de couvrir quotidiennement les actualités ayant trait à l’Union et qui seraient publiées sur différentes plateformes et différents canaux en respectant les critères journalistiques;
- engager un éditeur en chef indépendant pour coiffer cette Task-Force.
Quoique le rapporteur de ce texte soit lui-même un ancien journaliste, la proposition que des professionnels de l’information prennent en charge la communication de l’UE ne sera pas sans soulever – à n’en pas douter – de vives réactions au sein de la profession…