La citoyenneté européenne : une aporie créatrice ?

Le Conseil d’Etat organise un Cycle de conférences sur la citoyenneté, dont « La citoyenneté européenne : réalité ou utopie ? ». Où en sommes-nous du contenu des droits et des devoirs du citoyen européen ?

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Les droits liés à la citoyenneté européenne s’imposent symboliquement…

Au fil de la construction européenne, la force des réalités et des symboles s’enracine et se pérennise – non sans débat – « afin de permettre aux ressortissants de l’Union de s’identifier consciemment comme citoyens européens ».

La popularisation d’une « Europe des citoyens » est sans doute davantage le fruit de programmes comme Erasmus ou le Service volontaire européen que de symboles européens : drapeau, hymne, fête de l’Europe…

Mais surtout, « les transferts à l’Union d’attributs essentiels de la souveraineté ont représenté un tournant majeur » entre la suppression des frontières avec Schengen ou la création de la monnaie commune pour faire progresser la conscience d’appartenir à une communauté.

… et s’exercent quasi inconsciemment

Entre les droits ouverts par les traités européens et surtout la jurisprudence communautaire, qui précise et enrichit, les droits des citoyens européens sont garantis et protègent les citoyens dans leur vie quotidienne.

Autrement dit, et c’est paradoxalement la grande force de la citoyenneté européenne, « les habitants de l’Union exercent le plus souvent leurs droits de citoyens européens sans en avoir pleinement conscience ».

Les obligations liées à la citoyenneté européenne s’exercent en catimini

En dehors de l’obligation de respecter le droit communautaire, le citoyen européen n’a guère d’autres devoirs spécifiques envers l’Union. La reconnaissance de devoirs à l’égard d’autrui ou des générations futures, dans le Préambule de la Charte européenne des droits fondamentaux, ne permet pas de déduire des obligations juridiques concrètes du citoyen européen envers l’Union.

Et les devoirs associés à la définition classique du citoyen dans un cadre national ne sont guère transposables à l’échelle de l’Union. Ainsi le devoir de défendre sa patrie n’a pas d’équivalent à l’échelle de l’Union. De même, la notion de civisme fiscal demeure une abstraction à l’échelle européenne, en l’absence de tout impôt direct prélevé par l’Union.

… et s’imposent modestement

En tant qu’électeur au sein de la démocratie représentative européenne, la baisse continue de la participation électorale aux élections européennes, le rendez-vous pourtant majeur lors duquel les citoyens peuvent s’exprimer, démontre qu’ils n’identifient pas complètement le vote aux élections européennes à un devoir civique. Quels que soient les pays, le niveau de participation aux élections nationales est toujours nettement supérieur à celui enregistré pour les élections européennes.

En tant que citoyen actif au sein de la démocratie participative européenne, le bilan des instruments comme le droit de pétition, le recours au médiateur européen et plus récemment l’initiative citoyenne européenne, est globalement modeste. De surcroit, c’est surtout un mode d’expression élitiste utilisé par des citoyens politisés, bien dotés en capital culturel, social et financier.

Force est donc de constater que malgré des acquis positifs depuis un quart de siècle, la citoyenneté européenne, ancrée dans la réalité des États-nations, doit s’enraciner dans la transmission d’une histoire et d’une civilisation, ce qui passe par l’école et la culture, un chantier qui, pour l’essentiel, reste à ouvrir.

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