Relations rédacteur en chef – porte-parole de la Commission européenne, le dialogue en ligne serait-il possible ?

Malgré certaines avanies dans les relations entre les correspondants de presse à Bruxelles et le service de presse de la Commission européenne (cf. « Le service de presse de la Commission européenne sous le feu des critiques »), le dialogue est régulier tant lors du briefing quotidien qu’au travers d’échanges bilatéraux, notamment via Twitter avec une présence – encore timide – de porte-parole. Mais, s’agissant des rédacteurs en chef à Paris, qu’en est-il vraiment ? Un dialogue peut-il s’établir ? Et le web social peut-il y contribuer ? Voici un cas pratique…

Étape 1 : Eric Mettout, rédacteur en chef de lexpress.fr publie sur son blog un billet incriminant Viviane Reding

Dans un billet du 29 novembre « La mémoire contre l’oubli », Eric Mettout s’en prend ouvertement à Viviane Reding qui serait en train de préparer une « directive sur le droit à l’oubli » qui viserait à appliquer la même législation – la plus restrictive – pour tous les sites web, médias en ligne inclus. Cette interprétation de la future législation soulève, selon le rédacteur en chef, des problèmes de fond (atteinte à la liberté d’informer) et de forme (cauchemar des suppression de données en ligne).

La conclusion du papier est rétrospectivement « drôle » pour reprendre les propos mêmes d’Eric Mettout :

C’est du corporatisme, j’avoue et j’assume. Un combat d’arrière-garde, aussi, j’en ai peur. La Commission européenne se moque de mon avis comme d’une guigne – le contraire serait drôle, non ?

Étape 2 : Fabrice Pozzoli-Montenay, Secrétaire général de la section française de l’Association des Journalistes Européens (AJE) tweete l’information avec copie à Viviane Reding

Dans les commentaires, Fabrice Pozzoli-Montenay tente de calmer les inquiétudes d’Eric Mettout : « Le dossier est sensible, mais il est très loin d’être ficelé. Et L’Express n’est pas le seul média européen à sonner l’alerte. ».

De plus, le journaliste européen tweete l’information en mettant en copie le compte de la Commissaire européenne dans un registre qui joue la connivence avec Viviane Reding, elle-même ancienne journaliste, un registre qui semble avoir fait mouche :

Étape 3 : Matthew Newman, porte-parole de Viviane Reding, appelle Eric Mettout, qui publie la réponse sur son blog

Dans un second billet sur son blog du 2 décembre « Droit à l’oubli: Viviane Reding me répond directement (ou presque) », Eric Mettout raconte sa surprise : « dans les deux heures qui ont suivi, j’ai reçu l’appel (…) de Matthew Newman, porte-parole de Viviane Reding, (qui) a tenu à répondre lui-même à mes vilaines spéculations. Je l’accueille bien volontiers et, surtout, donne acte à la Commission de ses bonnes intentions ».

Ce second papier soulèvera même un commentaire assez savoureux pour qui suit la communication de la Commission européenne :

Héhé, certains commissaires européens suivent de près ce qui se dit sur les réseaux sociaux… Tant mieux !
C’est bien que ces personnalités « si loin à Bruxelles » réagissent directement.

Bilan : le professionnalisme, meilleur argument pour faire progresser le dialogue rédacteur en chef – porte-parole de la Commission

Rien dans cette anecdote n’aurait été possible sans le professionnalisme des trois acteurs (et sans l’utilisation des différents espaces du web par l’ensemble des acteurs) :

  • transparence et humilité pour le rédacteur en chef qui « éditorialise » sur un sujet et assure un droit de suite aux parties incriminées ;
  • dialogue et médiation pour le journaliste spécialisé sur les affaires européennes qui démine avec le rédacteur en chef et sollicite la réponse de l’institution européenne ;
  • réactivité et précision pour le porte-parole qui argumente sur les intentions de la Commissaire européenne.

Faut-il considérer ce cas comme un acte isolé ou un précurseur de nouvelles pratiques ?

2 réflexions sur « Relations rédacteur en chef – porte-parole de la Commission européenne, le dialogue en ligne serait-il possible ? »

  1. Craig Willy

    Un bon échange et une bonne manière pour la Commission de cultiver des bonnes relations avec les médias nationaux (comme le fond les politiques).

    J’ai personnellement souvent été contacté par Matthew Newman en tant que journaliste lorsque j’ai traité des questions relatives à la Commmissaire Reding. Toujours très réactif et professionnel…

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  2. Fabien

    « Hé hé »… je pense qu’on a été plusieurs à envoyer des tweets à Mme Reding. Cela prouve que les réseaux sociaux sont un outil de plus pour permettre la communication entre politiques/médias/citoyens car « FPM » a autant réagi en tant que professionnel que citoyen sur ce coup.

    Pareillement, on peut voir le bad buzz sur Rachida Dati qui aurait vu un huissier lui demander de se taire. Elle publie un tweet pour expliquer qu’elle demandait des précisions sur un vote, et la dépêche AFP a recoupé l’information avec une confirmation de l’eurodéputé Michel Dantin.

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