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Initiative citoyenne : inquiétudes autour des propositions de la Commission européenne

L’initiative citoyenne, l’innovation juridique de démocratie participative introduite par le traité de Lisbonne, fait l’objet aujourd’hui, 31 mars, d’une proposition de règlement de la Commission européenne. Faisant suite à la consultation publique lancée avec un Livre vert publié le 11 novembre dernier sur les modalités pratiques, les propositions de la Commission européenne soulèvent quelques inquiétudes…

1e inquiétude quant à la consultation publique préalable

D’une part, le pilotage de la consultation publique – quoique qu’elle aurait pu échoir à Viviane Reding, Commissaire notamment responsable de la « citoyenneté » ainsi que de la communication – a curieusement été confié à Maroš ŠEFČOVIČ, Commissaire responsable des relations interinstitutionnelles et de l’administration. Une décision qui ne laisse pas présager de l’ouverture aux citoyens des propositions de mise en oeuvre de l’initiative citoyenne.

D’autre part, les résultats de la consultation publique : 323 contributions à l’échelle des Vingt-Sept (159 citoyens, 133 organisations et 31 pouvoirs publics) selon le discours officiel, révèlent un profond déficit de « popularité ». Une participation qui laisse planer une relative crainte sur la représentativité des contributions.

2e inquiétude quant au suivi des suggestions du Parlement européen

Alors que l’initiative citoyenne a fait l’objet d’un débat au Parlement européen, le 24 mars, ayant débouché sur des suggestions allant dans le sens de l’ouverture des modalités de l’initiative citoyenne ; la Commission européenne n’a pas suivi :

Combien d’Etats membres représentés ?

Le Parlement européen avait proposé un quart des États membres (soit sept actuellement) pour les pays d’origine des signataires d’une initiative citoyenne – ils doivent venir « d’un nombre significatif d’Etats membres », selon le Traité de Lisbonne – la Commission propose un tiers, soit actuellement neuf États.

Quand déterminer la recevabilité d’une initiative citoyenne ?

Le Parlement européen avait proposé que la vérification légale de la recevabilité de la demande soit effectuée en amont, alors que les considérations politiques devraient être débattues après. La Commission envisage, selon Euractiv que « chaque initiative citoyenne devrait d’abord être enregistrée puis ensuite soumise à un examen d’admissibilité par la Commission, une fois que les organisateurs ont collecté au moins 300 000 affirmations de soutien. L’exécutif de l’UE devra évaluer l’admissibilité de la proposition sous deux mois » en fonction de deux principes de base :

  • la proposition doit concerner une question où un acte juridique de l’Union peut être adopté aux fins de la mise en œuvre des traités,
  • elle doit correspondre au cadre des pouvoirs d’initiative de la Commission.

Par ailleurs, selon Euractiv, « Si une initiative citoyenne est présentée dans le respect de ces règles, la Commission devra publier une dans les quatre mois qui ont suivi la soumission de l’initiative. Mais l’exécutif de l’UE n’est pas juridiquement contraint de déclencher une action législative en réponse à une collection de signatures. »

Dans une interview à Euronews, Maros Sefcovic affirme ainsi : « Nous n’allons simplement pas retenir les initiatives qui sont dénuées de sérieux ou qui sont des initiatives idiotes. (…) S’il est question du sérieux, ce sera une décision administrative des services de la Commission, mais s’il s’agit du deuxième niveau, qui est encore plus important et qui consiste à déterminer si une initiative est en accord avec les valeurs européennes, alors, c’est une décision politique du collège des commissaires. »

3e inquiétude quant au respect des données personnelles

Certes, alors que la Commission européenne s’était montrée initialement réticente à autoriser les pétitions sur Internet, les organisations non-gouvernementales et la société civile qui le demandaient ont eu grain de cause.

Mais, les modalités de vérification et d’authentification des signatures proposées par la Commission sont particulièrement dissuadantes. Selon Euractiv, « les signatures pourront être obtenues sous forme papier ou électronique, pour autant que chaque signataire fournissent les données personnelles suivantes : son nom, son adresse, son adresse électronique, la date et son lieu de naissance et les numéros de ses papiers d’identification (passeport, carte d’identité, sécurité sociale). »

Par ailleurs, les signatures doivent être réunies dans une période qui ne doit pas excéder 12 mois, sinon le processus devra repartir de zéro.

De plus, la vérification en elle-même des signatures sera du ressort des autorités nationales de chaque pays.

Ainsi, tant la consultation publique que l’absence de suivi du Parlement européen sans même parler des nombreuses contraintes procédurières soulèvent une profonde inquiétude sur la volonté politique de la Commission européenne de vraiment permettre les initiatives citoyennes…

Consultation publique de la Commission européenne : comment mettre en pratique l’initiative citoyenne prévue par le traité de Lisbonne ?

En vue de l’entrée en vigueur du traité de Lisbonne prévue le 1er décembre prochain, la Commission européenne lance une consultation publique sur la manière dont l’initiative populaire devrait fonctionner concrètement…

L’initiative citoyenne : une innovation juridique de démocratie participative

Le traité sur l’Union européenne prévoit à l’article 11, paragraphe 4, que les « citoyens de l’Union, au nombre d’un million au moins, ressortissants d’un nombre significatif d’États membres, peuvent prendre l’initiative d’inviter la Commission, dans le cadre de ses attributions, à soumettre une proposition appropriée sur des questions pour lesquelles ces citoyens considèrent qu’un acte juridique de l’Union est nécessaire aux fins de l’application des traités ».

Avec cette innovation juridique, Margot Wallström, Vice-présidente de la Commission européenne, responsable des relations institutionnelles et de la stratégie de communication estime – lors d’une conférence de presse – que « le traité de Lisbonne donne aux populations le moyen de s’exprimer et d’influer directement sur l’élaboration des politiques européennes ».

Le Livre vert sur l’initiative citoyenne : 10 questions sur les modalités pratiques

Le livre vert publié le 11 novembre soumet à l’opinion publique des questions concrètes sur la meilleure façon de faire fonctionner l’initiative en pratique :

  1. Nombre minimum d’États membres dont les citoyens doivent provenir : un tiers des États membres, « nombre significatif » ?
  2. Nombre minimum de signatures par État membre : 0,2 % de la population totale d’un État membre, « seuil approprié » ?
  3. Admissibilité d’un soutien à une initiative citoyenne : âge minimum identique à l’élection du Parlement européen ?
  4. Forme et libellé d’une initiative citoyenne : « suffisant et adéquat » d’exiger l’objet et les objectifs ?
  5. Exigences concernant la collecte, la vérification et l’authentification des signatures : créer « un ensemble commun d’exigences procédurales », un soutien « par voie électronique » ?
  6. Délai pour la collecte des signatures ?
  7. Enregistrement des initiatives proposées : créer un « système obligatoire d’enregistrement », via un site Internet spécifique ?
  8. Exigences appliquées aux organisateurs : veiller à la transparence en exigeant des organisateurs de « fournir des informations sur l’appui et le financement qu’ils reçoivent » ?
  9. Examen des initiatives citoyennes par la Commission : prévoir « un délai pour l’examen par la Commission » ?
  10. Initiatives sur le même thème : règles pour « empêcher la présentation successive sur le même thème » ?

La prochaine étape après la consultation : la rédaction d’une proposition de règlement

Les contributions déposées au plus tard le 31 janvier 2010 sur le site dédié aux consultations publiques permettront à la Commission européenne – conformément aux dispositions du traité – de soumettre ensuite une proposition de règlement à l’approbation du Parlement européen et du Conseil des ministres.

Il reste à vérifier si la consultation publique sur l’initiative citoyenne soulèvera une participation populaire…