Archives par étiquette : information

Benchmark des médias européens dédiés aux affaires européennes

En contrepoint de la disparition regrettable de Presseurop dont les financements de la Commission européenne ne sont pas renouvelés, un débat sur les médias européens émerge avec des questions sur leur modèle économique, leur ligne éditoriale, leur équilibre dans la place accordée aux professionnels et aux amateurs de l’information. Qu’en est-il donc des principaux médias européens dédiés aux affaires européennes, selon les informations disponibles sur leur site et en ligne ?

Synthèse : plusieurs modèles se sont succédés et coexistent aujourd’hui 

Face aux médias européens « historiques » (New Europe, European Voice, Europe’s World) assurant leurs revenus avec de la publicité et des abonnements à des éditions papier offrant de la visibilité à des experts via des tribunes libres ;

de nouveaux acteurs 100% web plus ouverts au sponsoring et au partenariat (Euractiv, EU Business) sont apparus, eux-mêmes concurrencés par des médias reposant plus sur la vidéo (Vieuws, EU Reporter) et proposant des services de média training et de production en complément de leur activité éditoriale.

Des projets publics (Eurotopics), financés par des cabinets de conseil (The Parliament) ou alors de volontaires (European Daily), d’amateurs (E!Sharp, Newseuropean Magazine) ou de freelances (MyEurop, Euro-correspondent) tentent de se faire également une place.

New Europe

Chiffres clés :

  • 438,900 visites mensuelles en novembre 2013 selon trafficestimate.com
  • 44,399e rang dans le classement international Alexa.com
  • 21 ans, édition papier hebdomadaire, monolingue anglais

Business modèle : abonnement et publicité

Positionnement / ligne éditoriale : « the European Political Newspaper »

  • Pro-européen, avec la foi dans le projet européen, mais pas aveugle sur les défauts des structures européennes
  • Une plateforme d’information et de dialogue entre une « news room » rédigée par une équipe de journalistes professionnels et une « guest room », le « knowledge network » composée de tribunes d’experts

Euractiv

Chiffres clés :

  • 441,100 visites mensuelles en novembre 2013 selon trafficestimate.com
  • 51,415e rang dans le classement international Alexa.com
  • full digital, 15 sites, 15 langues

Business modèle : corporate sponsoring, EurActor membership, publicité, EU projects, et syndication de contenus

Positionnement / ligné éditoriale :

  • « the independent media portal fully dedicated to EU affairs »
  • « couvre les prises de position des « acteurs européens » visant à influencer les politiques européennes »

EU Observer

Chiffres clés :

Business modèle : organisation à but non lucratif de droit belge générant des revenus sur une base commerciale à travers la publicité, les dons et les ventes de livres

Positionnement / ligne éditoriale : « support the debate on – and development of European affairs »

  • rubriques principales consacrées aux affaires européennes : politiques / étrangères / économiques / sociales / juridiques et divers formats : opinion / investigation / vidéos / focus…
  • 15 blogs

EU Business

Chiffres clés :

Business modèle : newswire sponsorship, publicité, sponsoring, premium partnership, co-branded newswires…

  • Positionnement / ligne éditoriale : « Europe’s leading independent online business information service about the European Union »
  • une plateforme de dépêches, d’annonces d’événements et d’articles
  • des blogs d’experts

European Voice

Chiffres clés :

  • 157,400 visites mensuelles en novembre 2013 selon trafficestimate.com
  • 192,443e rang dans le classement international Alexa.com
  • 13 ans, édition papier hebdomadaire, monolingue anglais

Business modèle : abonnement et publicité

Positionnement / ligne éditoriale : « the leading source of news and analysis on key EU policies, laws and institutions »

  • « established by The Economist Group, independent insight into the Brussels beltway for insiders and outsiders »
  • des éditoriaux, des tribunes, des rapports spéciaux (avec un calendrier éditorial) des blogs de journalistes…
  • une rubrique « Entre nous » rassemblant des indiscrets ou des brèves

Eurotopics

Chiffres clés :

  • 90,400 visites mensuelles en novembre 2013 selon trafficestimate.com
  • 298,714e rang dans le classement international Alexa.com
  • 8 ans, trilingue allemand, anglais et français

Business modèle : une offre du Centre fédéral allemand pour l’éducation politique (bpb) et du Réseau pour l’Information sur l’Europe de l’Est (Berlin)

Positionnement / ligne éditoriale : 30 pays – 300 médias – 1 revue de presse

  • un réseau de correspondants couvrant toute l’Europe
  • une revue de presse tous les jours de la semaine

MyEurop

Chiffres clés :

  • 78,700 visites mensuelles en novembre 2013 selon trafficestimate.com
  • 343,466e rang dans le classement international Alexa.com
  • 2 langues français et anglais

Business modèle : publicité et dons

Positionnement / ligne éditoriale : l’euro-comparaison

  • Focus sur les Européens, leur vie quotidienne et non sur l’Europe de Bruxelles
  • Trois passionnés, quelques jeunes journalistes percutants à Paris et une vingtaine de correspondants professionnels expérimentés dans toute l’Europe

Contexte

Chiffres clés :

Business model : Fremium et Premium avec abonnements et publicité

Positionnement / ligne éditoriale : journal des politiques publiques françaises et européennes

  • mettre en contexte les informations essentielles
  • suivre les décisions là où elles se prennent (Paris, Bruxelles) et recenser les prises de positions des parties prenantes

The Parliament

Chiffres clés :

  • 48,100 visites mensuelles en novembre 2013 selon trafficestimate.com
  • 538,148e rang dans le classement international Alexa.com
  • un magazine bimensuel, monolingue anglais

Business modèle : un  site d’information et d’actualités politiques européennes appartenant à Dods, un cabinet de conseil – abonnement et publicité

Positionnement / ligne éditoriale : « the magazine for MEPs, by MEPs »

  • comment and analysis from both EU politicians and an in house team of experienced journalists
  • balanced, objective and informative coverage
  • un blog « From the heart of Europe »

EU Reporter

Chiffres clés :

  • 30,000 visites mensuelles en novembre 2013 selon trafficestimate.com
  • 748,679e rang dans le classement international Alexa.com
  • 13 ans, monolingue anglais

Business modèle : publicité et services comme Video Production, Media Training et Event Services par une équipe de journalistes/reporters expérimentés

Positionnement /ligne éditoriale :

  • « a well-established independent magazine and online site covering the EU »
  • une plateforme de communication multimédia combinant vidéos/onlineTV, « journalisme citoyen », photojournalisme, un magazine et des blogs

Europe’s World

Chiffres clés :

  • 15,100 visites mensuelles en novembre 2013 selon trafficestimate.com
  • 1,017,764e rang dans le classement international Alexa.com
  • une revue trimestrielle, monolingue anglais

Business modèle : abonnement et publicité

Positionnement / ligne éditoriale : « the only EU-wide policy journal »

  • « promoting discussion of policy issues shaping Europe’s future »
  • des tribunes de grandes signatures et de think tanks mises en ligne récente des articles

European Views

Chiffres clés :

Business modèle : production de vidéos permettant à des stakeholders de réaliser des interviews et des débats avec des décideurs et des acteurs de l’UE, advocacy space, publicité et média training

Positionnement / ligne éditoriale : « a new digital platform on EU policy Development »

E!Sharp

Chiffres clés :

Business modèle : une plateforme collaborative

Positionnement / ligne éditoriale :

  • « A sharper view from inside Europe »
  • analyse vivante et provocante des affaires européennes et des relations transatlantiques

European Daily

Chiffre clé : 2,422,842e rang dans le classement international Alexa.com

Positionnement / ligne éditoriale :

  • « news and opinion from a European perspective »
  • projet abandonné

Newropeans Magazine

Chiffre clé : 4,654,667e rang dans le classement international Alexa.com

Positionnement / ligné éditoriale :

  • Ancêtre des médias européens subventionnés par l’UE, non subventionné
  • Multilingue et paneuropéen
  • Amateur et pro-européen

Euro Correspondent

Aucun chiffre clé

Un réseau de 5 journalistes freelance spécialisés dans les affaires européennes

Peu d’articles mais très pointus autour de 3 thèmes : Eco Doom, EU insider et Digital State

Pourquoi il faut sauver le soldat Presseurop ?

Le couperet de la disparition de Presseurop est annoncé et le compte-à-rebours prendra fin dans 3 semaines, avec 70 emplois détruits, sauf si la pétition en ligne convainc la Commission européenne de poursuivre son financement. Comment comprendre une telle erreur de jugement ?

Le faux débat sur les financements de l’UE à des médias européens

Une enquête de Médiapart, commentée par Arrêt sur Images « révèle » qu’une multitude de médias européens et nationaux sont financés par l’UE.

Quoique la confusion soit permise au vu du maquis plus ou moins confus de financements, il faut tenter de faire la part des choses entre :

  • des financements pluriannuels et transparents de médias européens qui n’existeraient pas dans leur conception paneuropéenne et leur multilinguisme sans le soutien de l’UE ; et dont l’indépendance éditoriale et la déontologie journalistique sont garanties : Presseurop, Euradionantes, Café Babel appartiennent à cette catégorie ;
  • des financements ponctuels et opaques de médias européens ou nationaux qui correspondent davantage à des opérations de partenariats / publi-rédactionnels / publicités dont l’opportunité est contestable faute d’une information explicite du public tant pour l’UE que pour les médias en cause : le tour d’Europe de la matinale de France Inter tombe sous cette catégorie ;
  • des financements mixtes à la fois « structurels » et liés à des co-productions particulières correspondent à l’impossible équation d’Euronews, à la fois subventionné par la Direction Générale Communication de la Commission européenne et coproducteur de programmes avec des Directions Générales de la Commission.

Que faut-il retenir sinon que la « mauvaise monnaie chasse la bonne monnaie », c’est-à-dire que les financements susceptibles de corrompre l’indépendance éditoriale et de distordre la concurrence – si concurrence il y a, ce qui n’est que très rarement le cas avec des médias paneuropéens – sont néfastes encore une fois pour les médias qui y succombent et pour l’UE avec des effets « boomerang » contre-productifs évidents.

C’est pour cette raison qu’il s’agit d’un faux débat dans la mesure où les financements transparents et structurels (indépendants de la ligne éditoriale) de médias paneuropéens sont justifiés par la quasi absence de viabilité économique de telles entreprises multilingues et transnationales tandis que les autres financements lorsqu’ils ne sont pas transparents devraient être condamnés avec fermeté sans – là encore – la moindre place au débat.

Presseurop : comment des erreurs de la Commission européenne se concluent par une faute ?

Ce qui s’annonçait comme une formalité – le renouvellement du financement par la Commission européenne de Presseurop – a été en fait très mal géré et des erreurs se terminent par une véritable faute.

L’appel d’offre de la Commission européenne publié au début de l’été dans l’indifférence générale est une erreur : plutôt que de poursuivre une revue de presse paneuropéenne traduite pour les Européens – la mission de Presseurop – l’appel d’offre vise à développer un média en ligne dédié aux affaires européennes sans véritable indépendance.

Face à quelques réactions légitimement courroucées, en particulier (pour les réactions publiques) l’Association des journalistes européens (qui regrette aujourd’hui la fin de Presseurop) et deux médias anglo-saxons, la Commission européenne ne corrige pas le tir en suspendant l’appel d’offre.

Pourtant, la Commission européenne a déjà su suspendre un appel d’offre comme ce fut le cas pour ses prestations web qui visaient très maladroitement à ce que son futur espace presse copie les médias d’information en ligne.

La Commission européenne joue la carte des restrictions budgétaires pour annuler l’appel d’offre. Une raison qui n’en est pas vraiment une puisque le Parlement européen négocie, selon l’éditorial de Presseurop « une augmentation du budget de l’UE pour 2014 afin d’attribuer à la Commission des ressources financières supplémentaires pour les projets médias ».

Faute de corriger une erreur dans la conception du cahier des charges visant à renouveler le contrat de Presseurop, la Commission européenne invoque une fausse raison financière et prise à son piège refuse d’amender son cahier des charges, empêchant ainsi de prolonger le contrat de Presseurop – qui n’avait jusqu’à présent soulevé aucune critique alors qu’il remonte quand même à 2009.

Le vrai débat sur l’isolement des affaires européennes dans les médias

Ce que révèle ce gâchis de la disparition de Presseurop, c’est l’isolement dont souffrent les affaires européennes dans les médias.

Entre des médias européens, concentrés sur la machine bruxelloise et réduits à une audience experte/spécialisée et des médias nationaux éloignés du cœur du pouvoir européen condamnant leur correspondant sur place à la portion congrue, Presseurop est inclassable, explore un terrain inconnu et pour cette raison dérange.

Média européen par excellence, Presseurop officie comme trait d’union entre l’UE et les Européens sans prendre Bruxelles comme centre mais en parvenant à tirer le meilleur de la presse européenne.

Presseurop, une synthèse dont la disparition signe comme la mort d’une certaine idée d’un média d’information sur l’Europe pour les Européens.

Classement des médias en ligne européens selon leur fréquentation

La Commission européenne ayant décidé, comme le dit pudiquement Le Monde de « rétropédaler sur la création d’un média en ligne » en abandonnant l’appel d’offre qui correspondait au renouvellement du contrat avec Presseurop la revue de presse européenne, qu’en est-il de la fréquentation des principaux médias en ligne européens à partir de l’outil gratuit trafficestimate.com – certes contestable, mais utile pour établir une comparaison…

Presseurop.eu – le premier média en ligne européen en termes de fréquentation

Les 5 premiers médias en ligne européens qui partagent la double caractéristique d’exister exclusivement en ligne et exclusivement sur les affaires européennes dénombrent tous plus de 150 000 visites mensuelles.

  • 375,300 visites sont comptabilisées pour Presseurop.eu sur les 30 derniers jours
  • 364,900 visites mensuelles pour Neurope.eu – un site qui connaît une hausse de trafic de 115% sur l’année écoulée
  • 283,700 visites en mai 2013 pour Euractiv.com
  • 188,800 visites mensuelles pour Euobserver.com
  • 150,150 visites mensuelles et 5e place pour Eubusiness.com

Euractiv.fr – le seul média 100% français dans le classement des médias en ligne européens

Les 5 suivants dans le classement des 10 premiers médias en ligne européens comptabilisent entre 30 000 et 60 000 visites mensuelles.

  • 88,200 visites mensuelles pour Europeanvoice.com
  • 58,400 visites mensuelles pour Publicserviceeurope.com
  • 40,500 visites mensuelles pour Eurotopics.net
  • 31,800 visites mensuelles pour Euractiv.fr
  • 31,700 visites mensuelles pour Europesworld.org

Au total, il est intéressant de noter que le multilinguisme du portail Presseurop (10 langues) contribue à sa première place avec un important trafic relatif comparé à quasiment tous les autres médias anglophones à l’exception notable d’Euractiv.fr.

L’Union européenne doit-elle financer un média d’information européenne ?

Mi-juin, la Commission européenne publie un appel d’offre pour le développement, l’implémentation et la gestion d’un média en ligne dédié aux affaires européennes pour un contrat de 3,2 millions d’euros par an. Un mois plus tard, la Commission européenne annule la démarche « en raison des restrictions budgétaires annoncées récemment ». Que soulève cet aller-retour sur un plan théorique et pratique ?

Le besoin d’information en ligne sur les affaires européennes : une nécessité quasi-consensuelle

Force est d’abord de constater que les affaires de l’UE sont sous-représentées dans les médias en dépit de leur importance réelle dans la vie quotidienne des gens et donc que la nécessité de davantage d’information indépendante, professionnelle et de qualité sur les affaires européennes est un sujet quasi-consensuel auprès des chercheurs, des journalistes et du public.

De même, le choix d’Internet correspond aux habitudes de consommation des médias d’autant que la confiance du public dans l’information délivrée sur Internet est en croissance et surtout que plus d’1 citoyen européen sur 2 le consulte quotidiennement.

Le financement d’un média indépendant par l’UE : une problématique exclusivement européenne ?

Face à ce défaut du « marché de l’information », l’intervention publique semble légitime pour financer un média qui se donne pour « objectif global d’accroître l’information sur l’Europe, de diversifier la couverture actuelle de l’UE, de renforcer la sensibilisation et la compréhension des affaires européennes et de stimuler les échanges d’opinions et de débats sur les enjeux actuels de l’UE ».

Et pourtant, ce qui est pratiqué dans n’importe quel Etat-membre de l’UE – à savoir un service public de l’information (modèle BBC ou Radio France / France TV) ou un financement public de médias, notamment à travers diverses subventions – ne semble pas aller de soi lorsqu’il s’agit de l’UE.

Le projet de média en ligne sur les affaires européennes : une ambition éditoriale

La description des attentes de la Commission européenne pour ce média en ligne ne manque pas d’ambition éditoriale :

  • Un média de référence sur les affaires européennes, en fournissant aux citoyens et aux lecteurs une information indépendante ;
  • Un quotidien du « meilleur de la presse et du web » à travers une sélection d’articles traduits (10 langues minimum) et des contenus du web sélectionnés, hiérarchisés et synthétisés ;
  • Une nouvelle voix : pas simplement un miroir des autres médias, mais également pour pas moins de la moitié des contenus originaux ;
  • Un lieu de débat, une plaque tournante de la modération et de l’organisation de débats pour résumer et créer de l’opinion.

Naturellement, une charte éditoriale prévoit l’indépendance journalistique de la rédaction dans le cadre d’un respect du pluralisme, d’une « perspective explicative adoptant un point de vue neutre » et d’une argumentation équilibrée sur les questions clés qui permettent au public de se faire sa propre opinion.

Un traitement équilibré des affaires européennes dans un média européen : une utopie européenne ?

Sans nul doute que le cahier des charges d’un tel projet est idéaliste dans la mesure où il n’existe quasiment pas de médias à proprement parler européens qui réunissent à la fois une orientation éditoriale exclusivement sur les affaires européennes et un public paneuropéen dans une démarche multilingue et pluraliste.

Pour autant, ce que pratiquement aucun média n’est parvenu à faire – faute de moyens pour l’essentiel – n’est-il pas attendu de l’UE de tenter de le faire et de créer ainsi un nouvel espace public en ligne à l’échelle européenne ?

Quid de Presseurop ?

A ce stade, il faut reconnaître que derrière les enjeux théoriques de la légitimité de l’UE à financer un média sur les affaires européennes et de l’utopie d’une ambition européenne à animer un média paneuropéen, se cache aussi des réalités pratiques.

Que va devenir le projet Presseurop – média du meilleur de la presse européenne financé depuis 2010 par l’UE ? Ce que l’appel d’offre récemment publié (puis abandonné) décrivait n’aurait été pas autre chose que le futur Presseurop « + ».

Faut-il craindre qu’à trop vouloir bien faire – avec des contenus originaux qui viennent directement en concurrence des médias existants – la Commission européenne n’assume finalement pas son idée de développer davantage le projet initial d’une revue de presse européenne traduite pour tous les Européens, véritable ébauche d’un espace public européen de prise de conscience et de débat d’une réalité européenne ?

Si l’Union européenne n’est pas capable de défendre sa légitimité à financer un média indépendant d’information en ligne sur les affaires européennes, alors non seulement l’ambition de l’UE de participer à la vie d’un espace public européen en ligne s’éclipse mais surtout le portail Presseurop est condamné à disparaître. Une double régression.

Série d’été : l’information européenne dans tous ses états

La période estivale est toujours plus propice pour prendre un peu de recul et faire le point sur des évolutions de moyen terme. S’agissant de l’information européenne, quelles sont les tendances qui frappent tant la profession des journalistes européens que le traitement de l’actualité européenne ?

Dégradation de la profession « correspondant de presse auprès de l’UE »

Première tendance – la plus prosaïque – l’évolution préoccupante de la situation du corps de presse des journalistes accrédités auprès de l’UE à Bruxelles. En effet, les informations brutes des institutions européennes sont de plus en plus accessibles en ligne mais le pluralisme de la presse et les conditions de production de l’information par les journalistes régressent.

Européanisation marginale de l’information dans les médias dominants

Deuxième tendance – la plus durable – l’européanisation des informations ne vient pas des « voix dominantes » – les médias d’information nationaux généralistes – mais plutôt des médias marginalisés (et donc la presse spécialisée et professionnelle), qui ne s’expriment pas avec les discours médiatiques dominants.

Editocratisation d’un certain journalisme européen

Face à la faible place laissée à l’information européenne à proprement parler – fruit des 2 tendances précédentes – c’est de plus en plus le traitement politique de l’actualité européenne qui prend le dessus. La mission traditionnelle des journalistes européens principalement destinée à informer et à éduquer le public est en train d’évoluer avec des journalistes qui agissent plus ouvertement comme des commentateurs d’opinions.

Fait-diversification de l’information européenne

Pour autant, ce traitement éditocratisé est largement minoritaire, le plus souvent, afin de se conformer aux canons de production et de diffusion de « fast news », l’information européenne doit de plus en plus se transformer en « fait-divers » – ces informations spectaculaires et simplifiées qui peuvent passer en boucle sur les chaînes d’info TV et les médias audiovisuels.

En bref, l’information européenne est en profonde mutation avec une plus grande segmentation des manières de pratiquer le métier entre correspondants à Bruxelles précarisés, spécialistes européens marginalisés et éditocrates européens installés