Le droit d’initiative – l’innovation juridique de démocratie participative introduite par le traité de Lisbonne – permettra aux citoyens de demander à la Commission européenne de proposer un projet de loi, à condition qu’il soit appuyé par au moins un million de citoyens originaires d’un tiers des États membres de l’UE.
Afin de préciser les modalités de mise en œuvre, la Commission a présenté, le 31 mars dernier, une proposition de règlement, qui ne fut pas sans soulever des inquiétudes quant à la réelle ouverture de la procédure aux citoyens européens « ordinaires ». Qu’en est-il des positions respectives des institutions européennes ?
Accord du Conseil de l’Union européenne – organe décisionnaire dans l’adoption du règlement – autour des propositions de la Commission européenne
Malgré les nombreuses protestations (voir une synthèse des critiques par Julien Frisch), le Conseil de l’UE (Affaires générales) a décidé, lors d’une réunion, le 14 juin dernier, d’accélérer l’adoption du règlement avec une procédure en urgence (avec une lecture unique au Parlement et au Conseil) – qui devrait permettre de boucler un accord avant la fin de l’année…
Unique concession à la lecture du communiqué de presse, le Conseil estime que la Commission devrait se prononcer sur la recevabilité d’une initiative une fois 100 000 signatures recueillies (et non 300 0000). Quant à la controverse sur le « nombre significatif d’États membres » nécessaire pour atteindre le million de citoyens, le Conseil, suivant la proposition de la Commission estime qu’« un nombre significatif est considéré comme un tiers au moins des membres de l’UE ».
Désaccord du Comité des Régions – organe consultatif dans l’adoption du règlement – autour des propositions de la Commission européenne
Sollicité par le Conseil et le Parlement européen pour donner son avis, le Comité des Régions (CdR) trouve la proposition de la Commission trop compliquée, selon un communiqué du 10 juin dernier.
« Craignant que les pesanteurs de la procédure nuisent à sa popularité, le CdR réclame un assouplissement des contraintes imposées aux citoyens européens pour présenter une initiative citoyenne. »
Au-delà de la proposition de la Commission de créer un registre en ligne pour enregistrer les initiatives proposées, le rapporteur du CdR Sonia Masini « réclame la mise en place d’un guichet d’information interinstitutionnel, visant à fournir une assistance aux auteurs des initiatives et faire connaître les initiatives en cours. Cela doit notamment passer par un effort de traduction, pour que les initiatives proposées ne se voient pas limitées par les barrières linguistiques. »
La traduction et la publicité des initiatives citoyennes – condition du succès populaire – ne semblent pas avoir été suffisamment prises en compte par la Commission européenne.
Ainsi, entre l’accord du Conseil de l’UE, décisionnaire dans l’adoption du règlement et le désaccord du Comité des Régions, tout repose maintenant sur le Parlement européen, l’autre organe décisionnaire, qui a choisi Alain Lamassoure, auteur d’un rapport sur « le citoyen et l’application du droit communautaire » comme rapporteur pour l’initiative citoyenne.
Souhaitons que lors de la réunion de la commission des affaires constitutionnelles du PE qui se réunira le 12 juillet prochain, le spectre d’une coalition anti-citoyenne des institutions communautaires cesse de planer sur l’initiative citoyenne…