Communication politique européenne : comment communiquent les politiques sur l’UE ?

En peu de temps, deux discours sur l’Europe : l’un de David Cameron, l’autre de François Hollande ont illustré des différences importantes sur les manières de s’exprimer sur l’UE. Quels sont les modèles de communication politique européenne permettant de décrypter ces discours ?

A partir d’une grille d’analyse conçue par Ulrike Liebert et Hans-Jörg Trenz dans « Europeanization of the Mass Media », les discours de Cameron et Hollande révèlent deux stratégies de communication politique sur l’Europe très différentes.

modeles_comm_politique_europeenne Discours de Cameron sur l’Europe : une communication politique européenne intergouvernementale

S’adressant aux citoyens de sa Gracieuse Majesté, le Premier ministre David Cameron effectue un exercice de style depuis Downing Street focalisé sur l’espace public national, inclus dans l’UE vue comme une union entre États-Nations.

Conçu comme un événement de politique national, notamment en vue des prochaines élections législatives, le discours se destine à attirer en priorité une couverture médiatique nationale ponctuelle autour d’une figure de style : l’appel au référendum national sur la plus value de l’attachement à l’UE sous l’angle d’un raisonnement coûts/bénéfices au sein d’une institution internationale faisant l’objet de négociations entre acteurs nationaux défendant leur identité nationale.

Discours de Hollande sur l’Europe : une communication politique européenne supranationale

A contrario, s’adressant devant les députés européens dans l’hémicycle de Strasbourg, le président de la République française s’exprime par excellence dans l’agora d’un espace public européen d’une UE vécue comme un ordre supranational.

Bien davantage annoncé comme un événement de politique européenne, le discours – suivi en direct par les médias spécialisés sur l’Europe – s’inscrit dans une logique d’interaction parlementaire à l’heure des importantes négociations budgétaires de l’UE. D’ailleurs, les médias d’information nationaux généralistes ne s’intéressent quasiment pas à ce discours destiné à la sphère bruxelloise.

Les thèmes du discours consistent à donner des assurances aux eurodéputés sur le partage d’intérêts collectifs ainsi que d’une mémoire et d’un futur partagés dans une « union sans cesse plus étroite » au fonctionnement routinisé et institutionnalisé à l’échelle des Vingt-Sept.

Vers une troisième voie : la communication politique européenne cosmopolitaine ?

Faute de disposer d’un espace public européen généraliste adéquat, toute communication politique cosmopolitaine provenant d’acteurs politiques et/ou sociétaux et consistant à s’exprimer sur des choix/réformes/priorités des politiques publiques européennes ne semble pas actuellement praticable.

Pourtant, de tels discours sur l’UE visant à argumenter en faveur/défaveur de valeurs/intérêts/normes européens communs pourraient se constituer autour de délibérations transnationales et/ou de pratiques de démocratie participative telles que les initiatives européennes.

Une hypothèse théorique pour le moment extrêmement limitée faute d’une triple européanisation :

  1. Mass-médiatisation des discours sur la politique européenne dans le respect du multilinguisme et du pluralisme ;
  2. Formation d’une opinion publique européenne au-delà des sondages Eurobaromètres et des élections ;
  3. Mobilisation des oppositions et contestations des mouvements sociaux européens et de la société civile européenne.

Faute d’une européanisation aujourd’hui inachevée, les communications politiques européennes se répartissent entre discours intergouvernementaux à la Cameron et supranationaux à la Hollande devant le Parlement européen.

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