Quelle est la plus grave erreur de la stratégie de communication de l’UE ?

Depuis la nomination de Margot Wallström, Vice-Présidente de la Commission européenne responsable de la stratégie de communication de l’UE en 2004, de nombreuses initiatives de communication ont été engagées. Pourtant, aucune n’est parvenue à changer le regard et les jugements des citoyens européens sur l’UE. Pourquoi ?

Il serait trop simple et inexact de considérer qu’il s’agit simplement d’une question de moyens humains, matériels ou financiers. La complexité des sujets, la diversité des publics, la multiplicité des médias, le multilinguisme sont autant d’excuses qui ne parviennent pas à expliquer totalement l’échec de la communication européenne.

Une communication dans le contrôle et quasi exclusivement menée sur des médias maîtrisés

Le point commun de pratiquement toutes les actions de communication menées par les institutions européennes repose sur la définition de messages et la réalisation d’outils de communication pour diffuser ces messages.

La campagne de communication type s’articule de manière quasi systématique autour d’événements ou d’anniversaires propres à la construction européenne et se déploie au travers du lancement d’un nouveau site Internet (cf. les 50 ans de la PAC), de l’organisation d’un événement à Bruxelles (cf. les 25 ans d’Erasmus) ou de la publication de nouveaux supports print. Ces derniers temps, la promotion via les canaux de communication maîtrisés par l’UE dans les médias sociaux sont également mobilisés.

Exceptionnellement, la campagne de communication type est accompagnée d’une démarche timide d’achat d’espaces publicitaires dans les médias traditionnels, le seul outil actuellement utilisés qui soit en mesure d’entrer en contact avec les citoyens.

Au final, les campagnes de communication de l’UE n’atteignent qu’un public très restreint, qui pour l’essentiel se limite aux « clientèles » de l’UE, qu’ils s’agissent de professionnels (par nécessité) ou d’amateurs (par conviction) de la chose publique européenne.

Une communication de l’UE solipsiste, éloignée de la réalité

Jamais, jusqu’à présent, l’approche pourtant condamnée dans les faits n’a été inversée. Les communicants de l’UE ne sont jamais partis de la réalité, en menant d’abord un audit des conversations et des lieux d’expression des citoyens sur les sujets européens pour ensuite se faire connaître et participer aux échanges, là où ils ont lieu.

À aucun moment, une réflexion de fond est menée sur les conditions de réception des messages européens et encore moins sur les conditions du dialogue.

La réalité, voilà finalement la zone d’ombre de la communication européenne. Autrement dit, la principale erreur de la communication de l’UE, c’est le « solipsisme », c’est-à-dire cette attitude générale, d’après laquelle, il n’y a pour l’UE d’autre réalité qu’elle-même.

Pour inverser le prisme de la communication européenne, l’approche viserait d’une part, à moins contrôler les interventions des « porte-parole » des institutions européennes pour que leurs propos soient plus authentiques, naturels, crédibles, empathiques… et d’autre part, à s’exprimer sur des médias qui ne sont pas uniquement maîtrisés par l’UE.

L’ego européen est finalement la seule chose qui existe réellement pour l’UE et le monde extérieur ainsi qu’autrui n’est qu’une abstraction, qu’une représentation. Tant que la communication européenne se cantonne à être conduite dans cette ignorance de la réalité, l’UE ne peut parvenir à entrer en contact avec les citoyens européens.

3 réflexions sur « Quelle est la plus grave erreur de la stratégie de communication de l’UE ? »

  1. Craig Willy

    Le problème, à mon sens, est qu’on refuse de reconnaître l’UE en tant qu’objet politique, c’est à dire un champs de pouvoir et de controverse où se promènent des *acteurs politiques*.

    On ne se pose pas la question de savoir si « l’Assemblée Nationale » ou « le Congrès américain » ont une bonne opération de comm’. Ce n’est pas leur rôle, au contraire, communiquer c’est le job de l’UMP, de Nicolas Sarkozy, des Démocrates, de ceux qui s’opposent à eux, etc. Alors que les CP du Parlement européen, sans cesse, vantent l’action du « Parlement » et de ses bienfaits (et non « le PPE » ou « les Socialistes »), l’Assemblée nationale est bien plus sobre (http://www.assemblee-nationale.fr/presse/communiques/).

    À la place des acteurs politiques, les institutions promeuvent leur institution, leurs politiques en tant que telles, dont l’action est par définition bonnes (la PAC: « parternariat entre agriculteurs et l’Europe » ou la gestion de la crise de l’euro: « renforcer la gouvernance économique ») . Cette comm’ là, j’ai envi de dire, est inévitablement sans intérêt.

    Ce sont les acteurs politiques (eurodéputés, politiciens nationaux) qui doivent arguer pour ou contre quelquechose (Sarkozy qui défend le bouclier fiscal, par exemple). Et ils le font parfois. Mais les acteurs les plus puissants, en clair les ministres du Conseil, hésitent énormément par peur de provoquer des incidents avec les autres pays.

    Lorsqu’un politicien national des partis principaux (socialistes/conservateurs) s’insurge contre, par exemple, la gestion de la crise de l’euro (Hollande, Magnette, Montebourg…) il se fait généralement rappeler à l’ordre au nom soit de « l’intérêt européen » ou pour prévenir des possibles controverses avec les autres pays.

    Le résultat est une politique européenne dépolitisée. Ceci était peut-être tolérable lorsque l’action de l’Europe paraissait détacher du quotidien. Mais, avec la crise de l’euro, il y a un réel débat qui doit se faire sur le mandat de la BCE, la solidarité entre les États, le rôle de l’austérité et de la discipline budgétaire, etc. Il n’y a peut-être rien d’aussi important aux gens en politique que les impôts, le chômage, l’État-providence (santé, sécurité écononomique), etc.

    Alors que la politique économique européenne actuelle nous a mené à une deuxième récession, la seule région à en souffrir et risquant peut-être de provoquer une récession mondiale, on ne peut pas prétendre que la controverse et le débat doivent être noyés par l’habituel discours bureau-diplomatique sans fin.

    Pour conclure ce commentaire trop long : Au lieu de la comm’ des institutions (beurk) il faudrait poser la question de l’absence de comm’ pan-européenne des véritables décideurs. Au lieu d’avoir le porte-parole d’Oli Rehn à la télé (le pauvre) il faudrait celui d’Angela Merkel ou, si on veut, de la « majorité » du Conseil. À bas la comm’ institutionnelle européenne, vive la comm’ des politiques européens !

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  2. emilio

    Hablas de Margot Wallstrom 2004. Pero si analizamos la política de comunicación desde los años 60-70 hasta 2004, vemos que se han intentado distintas fórmulas para « acercar Europa a los ciudadanos » y que le resultado es claro: hasido un fracaso.
    La prueba está en la participación de los ciudadanos en las elecciones al Parlamento Europeo.
    El tema es complejo y no puede ser resuelto en un comentario…pero muchas gracias por abordarlo. Un saludo: emilio
    ——————

    Tu parles de Margot Wallstrom 2004. Mais si nous analysons la politique de communication des années 60-70 à 2004, nous voyons que des formules distinctes ont été tentées pour « rapprocher l’Europe des citoyens » et que ce lui en ressorti est clair : il a eté un échec. La preuve est dans la participation des citoyens dans les élections au Parlement Européen. Le sujet est complexe et il ne peut pas être résolu dans un commentaire … mais merci beaucoup pour l’aborder…

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