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Impressions de campagne : de la place de l’Europe dans le monde et de la France dans l’Europe

Face aux événements internationaux (Brexit, pandémie, guerre en Ukraine, climat…), la campagne présidentielle s’est déroulée sous un prisme nouveau qui aura fait bouger les clivages sur l’Europe au point peut-être de considérer les enjeux européens comme centraux dans les votes des électeurs face aux positions des candidats lors du scrutin présidentiel…

L’Europe dans le monde : le poids des idéologies et le choc des réalités

Somme toute, impossible d’ignorer, même avec des lunettes très idéologiques, l’ampleur des défis à l’échelle globale qui repositionne l’Europe dans le monde comme une entité avec laquelle il faut compter : défense et sécurité, climat et transition énergétique, migrations, État de droit, etc.

Pour Christian Lequesne, dans « L’Europe puissance, enjeu de la campagne présidentielle », « les Français se demandent si la puissance européenne est ou n’est pas la condition d(u) sauvetage » de la France. C’est effectivement, la question qui est posée à tous les électeurs à laquelle les candidats apportent des réponses différentes, mais qui ne peuvent faire fi de la place réelle ou fantasmée de l’Europe face aux problématiques contemporaines.

Avec enthousiasme, résignation ou cynisme, les positions des candidats à l’élection présidentielle sur les questions européennes auront été impactées et auront influencés les votes d’une manière sans doute inédite pour la reine des élections, en raison de l’importance croissante des attentes et des réponses de l’Europe dans le concert des puissances.

La France dans l’Europe : la souveraineté de la France renforcée par l’UE ou malgré l’UE à contester de l’intérieur

Après les visions schématiques et bien trop simplistes entre européistes « pour l’Europe » ou europhobes « contre l’Europe » lors de la précédente élection présidentielle, le fait majeur de la campagne en 2022, c’est que nous n’avons plus de candidats europhobes qui plaident la sortie pure et simple de l’UE, ce n’est simplement plus à l’ordre du jour puisque même les plus critiques feignent de vouloir rester dans la famille européenne.

Pour Sylvain Kahn, dans « Élection présidentielle : deux conceptions de la souveraineté s’affrontent », « entre 2017 et 2022, une bifurcation a donc eu lieu. Alors que plus personne ne conteste l’existence de l’Union européenne et de l’existence de l’Europe comme société et comme société politique, en 2022 la campagne du premier tour oppose deux conceptions de la souveraineté ».

Le choix pour notre avenir repose soit sur la mutualisation de la souveraineté entre États-nations au sein de l’UE pour que l’union fasse la force, soit que la souveraineté se réduise « à proportion du rapetissement de la supranationalité et de la marginalisation des institutions qui l’agissent ». La fin de l’illusion d’une souveraineté renforcée par sa division entre Européens est sans doute un acquis, reportant les controverses autour des contestations de l’intérieur de l’UE sur l’élaboration d’une souveraineté européenne protégeant et renforçant les souverainetés nationales indispensables.

Vers une politique française plus européenne : convergences consensuelles et artificielles

Outre le consensus électoral au moins de façade d’une appartenance de principe de la France à l’UE pour les candidats, d’autres sujets européens autour de ses politiques sont apparus plus rassembleurs, ce qui est là encore assez nouveau :

Pour Yves Bertoncini, dans « Les candidats-présidents et « l’Europe » : une convergence en trompe l’œil ? », quatre champs d’interventions de l’UE sont plus ou moins largement approuvés par les candidats :

  1. Soutien massif à l’interventionnisme de l’Europe économique, financière et environnementale autour notamment de la vaccination et du plan de relance #NextGenerationEU ;
  2. Soutien majeur à un logiciel européen en matière de politiques économiques plus industriel ;
  3. Soutien majoritaire à une ouverture commerciale désormais tempérée, notamment autour du consensus pour une taxe carbone aux frontières ;
  4. Soutien moins ardent pour le « pacte vert européen » au moins dans ses principes, sinon dans ses modalités.

En somme, puisque l’UE est devenue plus française et les Français plus européens, « l’Europe de Bruxelles » divise moins les candidats en ce printemps 2022, même si les chantiers européens ne manquent pas pour le prochain élu.

Élections européennes : comment expliquer la divine surprise de la participation ?

Dans l’ensemble, le taux de participation a augmenté de 8 points dans l’UE, le plus élevé depuis 1994, soit davantage que la plupart des élections législatives nationales et alors qu’un seul pays organisait un scrutin national en même temps. Cette victoire contre l’abstention qu’aucun sondage n’avait vu venir nécessite d’y trouver des éléments d’explication. Quelles les mauvaises et les bonnes raisons de la hausse significative de la participation électorale ?

Les mauvaises raisons qu’on aimerait pourtant vraies

La première raison à laquelle on aimerait forcément croire serait de penser que l’intérêt intrinsèque pour l’Europe – que les Eurobaromètres ont plutôt bien mesurés avec une hausse récente mais marquée de la confiance dans l’UE – justifierait en soi la hausse de la participation. Néanmoins, il est à craindre que ni les campagnes des partis nationaux, ni les programmes spécifiquement, ni les Spitzenkandidaten des partis européens ne sont parvenus à vraiment faire la différence auprès des électeurs européens.

La seconde raison à laquelle les institutions européennes aimeraient nous faire croire, considère du point de vue de la Commission européenne que le travail de personnalisation et de politisation renforcées aurait porté la vague tandis que du point de vue du Parlement européen il s’agirait de la campagne reposant sur une communication émotionnelle avec une vidéo forte et une démarche de mobilisation de pas moins de 25 000 volontaires « helpers ». Tous ces efforts ont évidemment contribué aux résultats des élections européennes sans néanmoins permettre d’affirmer qu’eux seuls en sont la cause sûre et certaine.

Les bonnes raisons qu’on trouverait plus justes

Une continentalisation des « agendas » 

Au cours des dernières années, les sujets qui ont été à l’agenda médiatique et dans les esprits ont davantage porté sur des enjeux européens (quel que soient les jugements personnels) qu’il s’agisse de l’effet des crises : euro, Trump, Brexit et migrants – fort bien analysé par Luuk van Middelaar dans « Quand l’Europe improvise » – ou encore de la prééminence d’enjeux paneuropéens de plus en plus sensibles dans le quotidien des Européens : environnement, immigration-terrorisme, sécurité, numérique, commerce international… sans même parler du sujet de la place de l’Europe dans le monde qui redimmensionne d’emblée l’importance quasi géopolitique du scrutin par rapport aux enjeux globaux et planétaires.

Autrement dit, le poids des événements, la pression des crises et la place de l’Europe dans le monde ont contribué à former la première véritable émergence d’une sphère publique européenne grand public autour de thèmes communs où les élections européennes ont généré une forte augmentation de l’intérêt, de l’engagement et donc de la participation des citoyens.

Une polarisation du scrutin

Les électeurs se sont portés sur les listes qui se positionnaient clairement sur des enjeux européens : pour ou contre certaines orientations politiques en Europe et non plus de manière caricaturale pour ou contre l’UE. Au sein des forces qui progressent, comme les Verts ou les Libéraux, la nuance ou la mesure dans leur posture en matière européenne est moindre que dans les familles politiques traditionnelles qui rassemblaient au moins 50 nuances de soutien différent à la construction européenne.

Du coup, les résultats du scrutin se traduisent d’abord par une représentativité renforcée plus pluraliste et moderne dans la composition du Parlement européen au sens où les groupes politiques seront plus réduits et au moins aussi nombreux, et donc ensuite, sans doute, par une imprévisibilité accrue des votes, qui se feront encore plus qu’hier sur la base de majorité d’idées et de coalitions ad hoc. Bref, une promesse d’incarnation des choix beaucoup plus fertiles avec davantage d’acteurs et d’histoires à raconter.

Les résultats du scrutin de 2019 traduisent un renforcement du rôle de Parlement afin de dessiner des majorités (en l’occurrence à plus des deux tiers pro-européennes) face à des oppositions plus visibles et mieux incarnées tandis que le rôle traditionnel dévolu au Parlement européen correspondait à une institution « en dialogue » avec le Conseil et la Commission dans le triangle institutionnel de l’UE.

Une européanisation de la politique

La hausse de la participation traduit un mouvement dans les opinions publiques européennes d’européanisation de la politique que l’UE soit perçue comme la solution à des problèmes difficiles à résoudre à l’échelle nationale : protection des libertés, modèle économique pour un avenir plus vert, équitable et inclusif ; intérêts et valeurs de l’Europe dans le monde… ou l’inverse est tout aussi exact d’ailleurs.

Le regain des électeurs européens ne doit pas pour autant être sur-interprété. Il serait inexact d’en déduire que les citoyens ont délivré un blanc-seing au « business as usual » de la vie politique parlementaire européenne. Au contraire, l’exigence de participation, d’accountability devraient être renforcée au cours de la prochaine mandature. Les Européens semblent ouvert à l’idée de confier plus de compétences à l’UE : protection de l’environnement et lutte contre le changement climatique, politique étrangère et défense… L’Union doit s’en saisir pour relancer le projet européen et faire face à de nouveaux défis tant internes qu’externes sous le regard d’électeurs qui seront également au moins aussi soucieux du bilan législatif acquis.

Au total, les lauriers du succès de la hausse de la participation électorale ne sauraient être tressés à la gloire des formes anciennes de la parlementarisation progressive de l’Union européenne, mais bien davantage comme une pierre blanche vers une européanisation de la politique.

Élections européennes : quel est le diagnostic de la campagne ?

Alors que la hausse de la participation est la divine surprise des résultats aux élections européennes, quel bilan tiré de la campagne des élections européennes de mai 2019 au lendemain des résultats ? Quel est le diagnostic, sachant que le pronostic vital de l’avenir de l’UE ne semble plus la principale inquiétude ?

Anomie renforcée des forces politiques à contrôler la campagne

Première hypothèse du diagnostic, une sorte d’anomie – c’est-à-dire de perte des moyens de contrôle dû à l’absence de règles – est largement perceptible du côté des forces politiques, particulièrement les partis traditionnels.

A l’échelle européenne, les partis politiques européens ne sont pas parvenus à convaincre que la règle des Spitzenkandidaten serait de nouveau appliquée pour sélectionner le futur président de la Commission européenne. Pire, au fil des débats entre les têtes de liste, il est même apparu que le candidat de la force politique la plus vraisemblablement susceptible de rassembler le plus d’eurodéputés élus était également la personnalité n’apparaissant pas comme suffisamment dotée des attributs de présidentialité. Le combat pour rassembler les scrutins des eurodéputés pour élire le président de la Commission européenne ne fait que commencer.

A l’échelle française, la perte de repères entre les partis politiques nationaux est encore plus flagrante puisque bon an, mal an, aucune ligne de partage ne s’est suffisamment dessinée entre les offres partisanes pour créer des dynamiques électorales autour de projets distinctifs hormis les Verts qui se hissent à la 3e place. Les principales formations proposent des programmes sensiblement équivalents avec quelques nuances en termes de priorités – la dialectique Progressistes contre Nationalistes apparaissant comme l’ultime tentative de sortir de cette anomie politique.

Acédie réduite des citoyens à s’intéresser à l’Europe

Deuxième hypothèse du diagnostic concernant les citoyens, une sorte d’acédie – de mal de l’âme qui s’exprime par l’ennui, l’indifférence et le découragement – semble moins que lors des campagnes précédentes frappé le corps électoral qui se traduit par un poids réduit de l’abstention.

L’affection acédique des citoyens en matière européenne se traduit par une forme de résignation qui dessine une majorité d’Européens favorable à l’Union européenne mais faute de mieux, et malgré tout complétée par une vision prospective globalement sombre pour l’avenir des institutions européennes. La participation électorale en hausse est la bonne nouvelle de ces élections européennes de 2019.

L’absence d’envie de prendre soin de l’Europe, de la faire progresser, de poursuivre la construction européenne est aujourd’hui – semble-t-il – en recul parmi les citoyens européens qui se sont mobilisés davantage que les prévisions les plus optimistes. S’agit-il d’un feu de paille ou d’un renouveau durable ?

Atonie relative des médias à traiter les élections européennes

Troisième hypothèse du diagnostic des élections européennes sous l’angle des médias, une sorte d’atonie, de manque de vitalité et de vigueur à couvrir la campagne sur le fond via les programmes pour privilégier un traitement sur la forme avec la course de chevaux entre les candidats.

L’atonie médiatique doit naturellement distinguer entre les médias européens qui ont mis les bouchés doubles pour prendre le sujet à bras le corps tandis que les médias audiovisuels nationaux se sont plutôt contentés d’un service minimum, se dissimulant derrière les règles imposées ou participant de la fabrication médiatique autour du classement d’arrivée des listes nourrie par le récit des éditorialistes et renforcée par le rolling sondagier quotidien.

Au total, la fin de la campagne, qui ne fut pas à la hauteur des enjeux, marque comme un lâche soulagement de la part de tous. Souhaitons que la mobilisation électorale parvienne à sortir du cercle vicieux de l’inertie.

Comment reconnecter la politique européenne avec les citoyens de l’UE ?

Pourtant au cœur de la démocratie européenne, les partis politiques européens ne jouent pas pleinement leur rôle pour transmettre des messages aux citoyens européens et les sensibiliser davantage aux politiques de l’UE, en particulier lors des campagnes électorales. Des enjeux que tentent de résoudre des chercheurs avec une série de recommandations dans « Reconnecting European Political Parties with European Union Citizens »…

Renforcer la démocratie électorale et participative de l’UE pour les institutions européennes

Le Conseil européen – les chefs d’État et de gouvernement – pourrait renforcer sa légitimité démocratique et sa responsabilité au niveau de l’UE en fusionnant les rôles de président de la Commission européenne et de président du Conseil européen, possible sans modification du traité. Cette évolution renforcerait la visibilité de l’exécutif au niveau de l’UE et surtout le lien avec les citoyens de l’UE, puisque les électeurs participant aux élections européennes auraient également leur mot à dire dans la nomination du président du Conseil européen.

La Commission européenne pourrait modifier le cadre juridique régissant les partis et fondations politiques européens dans une logique gagnant-gagnant :

  • En matière de « propagande électorale », des subventions de campagne distincte pour les élections européennes afin de préserver leurs budgets de fonctionnement et de jouer un rôle plus visible en contrepartie d’exigences de dépenses strictes et de transparence accrue en matière de recettes ;
  • Pour la diversité idéologique, une augmentation des fonds publics réservée aux Europarties nouvellement créées et uniquement pour une période limitée afin de les inciter à continuer de rechercher un financement de remplacement – l’utilisation de règles de financement pour entraver le développement des partis transnationaux eurosceptiques risque de se retourner contre le développement démocratique et d’attirer les critiques sur le manque de légitimité démocratique de l’UE.

Toutes les institutions de l’UE devraient réfléchir :

  • à la manière de (ré)organiser de manière créative leurs espaces de travail afin de les rendre plus accessibles aux citoyens pour répondre aux attentes en matière de participation citoyenne malgré des mesures de sécurité toujours plus sévères ;
  • à adopter une position claire en ce qui concerne l’organisation des conventions démocratiques dans la perspective des élections européennes de 2019, sachant que les modalités de participation, les résultats et l’impact incertains constituent autant de risque conduisant au désenchantement et au désengagement.

Créer des passerelles entre les responsables politiques au sein des trois principales institutions de l’UE pour les partis politiques européens

Compte tenu de l’architecture institutionnelle actuelle de l’UE, les Europarties jouent un rôle crucial au sein de cette configuration, car ils sont les rares entités à être représentées dans les principales institutions européennes.

La coordination assurée par les partis politiques européens entre les ministres du Conseil et en amont des Sommets du Conseil européen devraient être renforcée, à l’instar du rôle des groupes politiques au Parlement européen auprès des eurodéputés.

Afin d’approfondir le caractère démocratique des institutions de l’UE, les partis politiques européens et leurs fondations pourraient investir davantage, de manière plus créative, dans la communication avec les citoyens en diffusant des informations sur les questions de politiques de l’UE, et pas seulement en matière d’idéaux politiques concernant l’intégration de l’UE.

En outre, les partis politiques européens pourraient créer des plates-formes horizontales pour les échanges entre citoyens et membres de partis des différents États membres, afin d’être beaucoup plus visibles dans les langues locales pour améliorer leur interaction avec les citoyens et lutter contre la propagation de « fausses informations » sur l’UE, au-delà de la « bulle de Bruxelles ».

De manière plus générale, les Europarties devraient repenser leurs instances et procédures de décision internes afin de mieux nouer des liens avec les citoyens de l’UE, par exemple en augmentant le nombre et les droits de leurs membres, tels que la participation à l’élaboration des politiques et la sélection des dirigeants.

Dans leur responsabilité de choisir leur Spitzenkandidat respectif de manière rapide et démocratique, les partis politiques européens devraient assurer une meilleure visibilité des « primaires » ouvertes ou fermées en vue de sélectionner leur candidat uni à la présidence de la Commission, contraignant davantage les États membres, par l’intermédiaire du Conseil européen, d’accepter le candidat capable de rassembler une majorité à l’issue des élections parlementaires européennes.

Enfin, les partis politiques européens pourraient plaider pour autoriser uniquement les eurodéputés élus à occuper un poste de Commissaire, un modèle appliqué dans de nombreux systèmes parlementaires, ce qui pourrait accroître l’intérêt des citoyens et renforcer leur conviction que leur voix compte.

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Au final, ces recommandations vers une parlementarisation de l’UE ont pour but de permettre et de promouvoir l’engagement des citoyens de l’UE via des partis politiques européens cruciaux pour la démocratie européenne.

Comment mieux parler d’Europe ? – Regards croisés d’une élue et d’un journaliste

Dans le cadre des 12èmes Rendez-vous européens de Strasbourg, dont le thème général est « L’heure des choix », une table ronde a été organisée par l’ENA afin de faire débattre une élue locale Anne-Pernelle Richardot, Adjointe au Maire de Strasbourg avec le rédacteur en chef des Dernières Nouvelles d’Alsace Dominique Jung…

Pour combattre ce paradoxe que ceux qui parlent le plus d’Europe sont ceux qui en veulent le moins

Pour Anne-Pernelle Richardot, la perspective des prochaines élections européennes – qui intéressent déjà une majorité d’Européens (cf. la dernière enquête Parlemètre) – doit permettre de mieux parler d’Europe.

Plusieurs recommandations pragmatiques :

  • Poursuivre la politisation de la Commission européenne autour de la campagne entre les Spitzenkandidaten, ces têtes de liste qui se présentent pour prendre la présidence de la Commission européenne ;
  • Dépasser la communication ultra-institutionnelle du Parlement européen, à l’occasion des prochaines élections, afin de combattre le discours anti-européens des populistes
  • S’acclimater à la culture du débat politique au sein de l’UE fait de davantage de concertation et de conciliation ;
  • Sortir de l’indistinction entre les institutions européennes, en s’appuyant sur les parlementaires européens, qui représentent les citoyens pour s’adresser à eux ;
  • Fuir tout langage technocratique qui complexifie la compréhension de l’UE ;
  • Assumer à l’échelle nationale, les décisions collectives prises dans le cadre de l’UE ;
  • Parler d’Europe en simplifiant et en montrant les bénéfices ;
  • Dessiner un projet qui brise la coupure entre les « sachants » – ceux qui bénéficient de la construction européennes – et les autres qui se sentent menacés.

Quoiqu’il en soit, il faudra davantage qu’un redécoupage des circonscriptions européennes (les nouvelles Régions constituant la base idéale) et qu’un grand débat national ouvert, riche et divers tel que les conventions citoyennes européennes pour réconcilier les Français avec l’Europe.

Pour couvrir l’Europe, la hiérarchie de l’information n’est plus liée ni aux frontières, ni aux institutions

Pour le rédacteur en chef des Dernières Nouvelles d’Alsace (DNA), les raisons de la faible présence de l’Europe dans les médias sont multiples :

  • L’Europe est mal aimée, la technicité de l’UE n’explique pas tout, c’est surtout le désamour pour les affaires européennes que nous n’aimons pas en tant que but en soi ;
  • L’Europe avec la chute du Mur de Berlin, la fin du pacte de Varsovie et les élargissements n’a plus d’ennemi, la perception de l’Europe a changé pour devenir le bouc-émissaire ;
  • L’Europe a fait les frais de la crise des migrants.

Résultats, les journalistes, qui ont beaucoup parlé d’Europe et en bien, notamment lors du référendum sur le projet de Constitution pour l’Europe, parlent aujourd’hui moins d’Europe. D’abord, ils ne sont plus autant prescripteurs. Ensuite, ils veulent éviter l’amalgame avec les « élites » qui soutiennent la mondialisation et le libéralisme. Enfin, ils doivent faire leur travail : remonter à contre-courant.

Du coup, comment les DNA couvrent-elles l’Europe ?

Au cœur de la capitale « citoyenne » de l’Europe, un journaliste suit en permanence depuis Strasbourg le Parlement européen, le Conseil de l’Europe et la Cour européenne des droits de l’homme. Avec l’euro-district, l’Europe, c’est aussi un sujet d’aménagement du territoire et d’équipement en services publics.

Plutôt que de suivre l’actualité des institutions européennes avec un correspondant à Bruxelles, ce qui ne correspond pas aux attentes des lecteurs, le choix de la rédaction est de travailler sur la « transfrontalité » avec le soutien de deux correspondants à Berlin.

Les choix éditoriaux vont privilégier l’Europe de la vie quotidienne, de manière pragmatique, pour parler des affaires nationales allemandes, de l’utilité et de l’impact des politiques publiques européennes en France et en Allemagne auprès des citoyens.

De toute façon, mieux parler d’Europe ne peut passer que par une meilleure maîtrise des langues du voisin. La priorité pour être pragmatique et efficace serait d’imposer le trilinguisme dans l’Education nationale.

Au total, les regards croisés d’une élue et d’un journaliste montrent que pour mieux parler d’Europe, il faut décentrer la focale sur Bruxelles, pour se concentrer sur les citoyens.