20 ans après : quel est l’actualité du diagnostic du rapport De Clercq ?

Afin de poursuivre le travail de refondation de la communication européenne sous la nouvelle Commission Juncker – après la période des origines – place aux « réflexions sur la politique d’information et de communication de l’UE » du rapport de l’eurodéputé Willy De Clercq. Que faut-il retenir du diagnostic, 20 ans après ?

1. Quelle est la situation ?

Encore plus aujourd’hui qu’il y a 20 ans, sur le diagnostic du rapport relatif à l’état de perplexité des citoyens européens, on ne peut hélas que constater une dégradation sur les différents secteurs.

Déjà en 1992, la construction de l’Europe est perçue comme dans un état de crise, une situation critique en termes de confiance, de crédibilité et d’approbation du public, « un sentiment d’anti-climax » – on ne saurait mieux dire.

Plus largement, 20 ans en arrière, déjà, la diversité des opinions publiques à l’égard de l’Europe est analysée entre enthousiasme et aversion, mais surtout ignorance et indifférence. L’attitude contradictoire et ambivalente des Européens à l’égard de l’UE s’observe toujours : l’identité européenne n’a pas encore été ancrée dans l’esprit des gens mais il existe cependant un certain nombre de valeurs communément partagées par les Européens.

Surtout, le constat que la communication européenne a été « inadéquate » demeure vrai :

  • la construction de l’Europe n’est pas communiquée de façon pertinente et convaincante auprès des citoyens de l’Europe ;
  • les politiciens et les fonctionnaires se plaignent qu’ils sont mal compris; mais ils limitent les efforts à une information froide et rationnelle, estimant apparemment que quelqu’un d’autre se chargera d’animer leur communication et de faire passer leurs messages auprès du grand public.
  • les journalistes (intermédiaires essentiels) ne peuvent pas transformer des informations ennuyeuses en excellentes nouvelles.

2. Quelles sont les causes ?

Le mauvais produit

Pour les experts rassemblés autour de De Clercq, notamment Jacques Pilhan, la principale raison de cette situation critique est que la Commission et certains États membres tentent de « vendre » le « mauvais produit ». Il ne s’agit pas de vendre des traités – et pourtant après Maastricht, il y en aura bien d’autre (Amsterdam, Nice, Lisbonne…) – mais de communiquer sur la communauté européenne.

Pas de direction stratégique

En plus, il n’y a pas – toujours pas d’ailleurs – de direction stratégique interinstitutionnelle pour orchestrer les différents émetteurs et veiller à ce que les campagnes de communication institutionnelles et sectorielles soient conformes à la stratégie générale.

Des messages abstraits

Du coup, l’Europe ne parle pas d’une seule voix – il y a une multiplicité de locuteurs et une inconsistance du message, trop jargon incompréhensible, pas assez lié à la vie quotidienne.

Mauvaise organisation

En outre, à Bruxelles, en 1992, il n’y a ni la structure et l’organisation, ni la puissance et les ressources financières, pour faire les changements nécessaires rapidement et efficacement. Et vingt ans plus tard ?

3. Quels sont les objectifs ?

Puisque l’Europe n’est pas seulement pour les élites intellectuelles mais concerne tous les citoyens européens – les politiciens devant assumer leur responsabilité – il convient donc de construire la sensibilisation et l’approbation du public à l’Union européenne. La communication, c’est comme la politique économique, plus les objectifs sont simples, plus il est vraisemblable de les atteindre.

Les messages de l’UE doivent donc être à la fois clairs, consistants, cohérents et convaincants.

Le changement de la communication européenne doit être perçu partout et par tous, une règle qui pourrait d’ailleurs de nouveau s’appliquer à la période actuelle de refondation de la communication de l’UE :

  • changement de ton pour attirer l’attention et être compris ;
  • changement dans la gestion de la communication et de l’information ;
  • changement de la place de la communication (influence et importance) dans le processus de prise de décision au jour le jour ;
  • changement dans la façon dont le professionnalisme est intégré dans toutes les activités ;
  • changement dans la manière dont les institutions européennes travaillent avec les médias (surtout les médias audio-visuels), et en particulier les médias nationaux et régionaux dans les États membres ;
  • changement dans le comportement indiscipliné des « émetteurs » afin d’éviter que Bruxelles soit blâmé pour les échec quand les États membres tirent le crédit pour les succès ;
  • changement dans le montant des ressources consacrées à la communication.

Par ailleurs, il est impératif que l’UE regagne crédibilité et confiance des citoyens :

  • besoin de faire preuve de compréhension et d’affinité avec les préoccupations de la vie quotidienne des gens ;
  • besoin de démontrer autodiscipline et fiabilité mais aussi courage et enthousiasme.

De même, l’UE doit démontrer son sens et son utilité réelle, expliquée franchement et honnêtement, sans se limiter aux couloirs du pouvoir à distance. Mais également, l’UE doit rendre transparents les risques derrières les décisions. Et surtout, l’UE doit faire des propositions pertinentes pour les citoyens, c’est-à-dire en rapport avec son/sa manière de vie, son/sa culture, ses espoirs, aspirations, craintes, préoccupations, besoins et désirs – la clé d’une communication réussie, c’est la pertinence.

20 ans après, le diagnostic des « réflexions sur l’information et la communication de l’UE » du rapport De Clercq demeurent particulièrement actuelles.

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